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lundi 29 juillet 2024

Ben Hutcherson (Khemmis) :"Je ne veux pas que nous soyons prévisibles !"

Ben Hutcherson

Michael

Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.

En marge du concert de KhemmisSuffocation et Black Dahlia Murder au Black Lab de Wasquehal, dont vous trouverez notre live report par ici, nous avons pu interviewer Ben Hutcherson, guitariste et leader du groupe américain de heavy metal Khemmis. Notre échange, fructueux et passionnant, est à découvrir ci-dessous.

*

Merci beaucoup pour cette interview.  Premier concert en France et première fois en France ?

Ben : C'est la première fois pour moi dans beaucoup de pays où nous sommes en tournée en réalité ! Je n'étais jamais sorti des Etats-Unis jusqu'à ce que nous commencions à faire des concerts en dehors des Etats-Unis il y a quelques années. Donc, oui, c'est ma première fois en France cette année, mais aussi ma première fois en Belgique, ma première fois au Danemark... Beaucoup de premières ! Pour un premier concert en France, c'était dingue ce soir, surtout pour un mardi (rires). Aux Etats-Unis, quand tu joues un mardi, à moins que ce soit dans ta ville natale, ça risque d'être difficile ! Le public était très sympathique ce soir et très enthousiaste. Je ne sais pas si tu as vu, il y avait un jeune enfant sur le côté de la scène. Il devait avoir, je ne sais pas, 10 ans ou quelque chose comme ça. Il portait un petit casque antibruit et, lorsque nous sommes montés sur scène, il nous a tendu le poing à tous les quatre. Et dès qu'il m'a donné ce « fistbump », je me suis dit que ce concert ne pouvait qu'être génial. De bonnes vibrations, de bonnes ondes. D'habitude, on n'a pas ce genre d'ambiance quand on est la première partie du concert ; ici, la salle était déjà presque comble pour nous. Ça aide forcément qu'il y ait assez de gens qui sachent qui nous sommes, mais ce n'est pas impératif. C'est aussi amusant de jouer devant un public qui est là pour écouter du death metal, une musique différente de la nôtre, et notre rôle est alors d’ouvrir l'esprit du public à d'autres choses.

C'était justement l'une de mes questions : certaines personnes vous connaissent peut-être en France, mais vous n'êtes pas très connus à ce stade. Comment décrirais-tu la musique de Khemmis, si tu devais leur faire découvrir ?

J'ai dit pendant un certain temps que nous sonnions comme Iron Maiden piégé dans une fosse de goudron. Cela nécessite que vous sachiez qui est Iron Maiden, mais cela ne devrait pas trop poser de problèmes (rires). Peut-être qu'une description plus générale pour les néophytes serait… du heavy metal tout simplement ! Nos anciens morceaux sont plus proches du doom et nous avons pris une orientation légèrement différente depuis lors, je suppose. Ce n'est pas que nous ayons changé de direction, à la reflexion, nous avons juste pris confiance en notre son. Les gens entendent maintenant beaucoup plus l'influence d'Iron Maiden et d'AtThe Gates, mais elle a toujours été présente. C'est juste que nous savons un peu mieux ce que nous faisons. Mais en fin de compte, c'est du « doomed heavy metal ». Je veux dire, bon sang, nous avons appelé notre album comme ça, pour une bonne raison !

Dans une interview précédente, j'ai lu que quelqu'un vous avait décrit comme Candlemass qui rencontre le death metal, ce qui est assez juste, je pense, au moins pour votre premier album.

Oui, c'est vrai. Il y a beaucoup de façons de nous décrire et de s'y retrouver. C'est marrant quand les gens font référence à des groupes spécifiques. Je sais que je viens de le faire avec Iron Maiden, mais Candlemass, par exemple, je vais être honnête, je connais quatre ou cinq chansons d’eux. Ce n'est pas que je ne les aime pas, mais ils ne font pas partie des groupes avec lesquels j'ai grandi. Les gens font également souvent référence aux Peaceville Three avec nous (ndlr : My Dying Bride, Anathema et Paradise Lost). Je n'avais pourtant jamais rien entendu de ces groupes avant l'âge de 30 ans. Je n'ai pas grandi avec ça, alors que mon style, ce par quoi j'ai été ouvertement influencé, c'est beaucoup de death metal suédois et du black metal. Et puis il y a beaucoup de doom super lent et d'une manière ou d'une autre, ça se transforme en ce que nous sommes.

Tu as dit que ta musique avait évolué au fil des années. Au début, vous étiez davantage un groupe de doom metal et vos derniers titres se rapprochent davantage du heavy metal. Est-ce que c'est une évolution naturelle, quelque chose que vous recherchez, en vous disant que vous préférez un peu plus de solos, de riffs de guitare très heavy ? Tu mentionnes Iron Maiden comme influence, à juste titre ; quand tu écoutes certains riffs, comme dans « Isolation » par exemple, c'est complètement différent de ce que vous faisiez auparavant.

Nous n'avons pas nécessairement pris la décision de changer de style ou quoi que ce soit en toute connaissance de cause. Nous avons toujours essayé de faire confiance à notre instinct lorsque nous faisons ces albums. Dans notre esprit, chaque nouvel album semble être la suite logique du précédent, mais c'est aussi parce que nous vivons dedans. Pour les personnes qui ne sont pas dans la salle de répétition avec nous tout le temps, qui ne sont pas dans le van avec nous, qui ne nous entendent pas essayer de nouveaux riffs en soundcheck, ils n'obtiennent que ces instantanés au fil du temps et donc une vision tronquée de ce que nous sommes. Et donc je pense qu'il est juste de classer cela comme une sorte d'évolution de l’extérieur, mais de l’intérieur du groupe c’est quelque chose que nous avons toujours fait, en réalité. Il s'agit plus d'une question de s'approprier et de se sentir de plus en plus confiants dans le fait que nous savons ce que nous voulons faire avec notre musique, le type d'émotion que nous voulons transmettre, le type d'histoire que nous voulons raconter et de nous faire confiance pour choisir les tempos et le type de vibration des chansons. Et, en fin de compte, apporter ces différents éléments, qu'il s'agisse de guitares harmonisées ou de solos.

Je joue certainement beaucoup plus de solos qu'avant (rires). Je me suis amélioré à la guitare, aussi, comme cela arrive quand on joue beaucoup… J'ai commencé à l'âge de 12 ans et me voici 27 ans ou 28 ans… (il réfléchit)… Je ne suis pas bon en maths donc disons cent ans plus tard, et je me suis nettement amélioré. En tous cas j’espère ! Et encore une fois, je me sens confiant pour explorer ces choses et me sentir moins contraint par ces étiquettes de genre.

Quand nous avons commencé, je pense que nous avions même en tête que nous allions être un groupe de doom. Nous ne savions pas nécessairement ce que cela signifiait. Pour ce qui est de fixer des limites à ce que nous allons faire, je pense qu'à partir du moment où tu dis que nous allons être un groupe X, tu te mets déjà en opposition avec les types Y et Z, quels qu'ils soient. Au fil des années, nous nous sommes plus concentrés sur le fait que nous sommes un groupe qui veut raconter ce genre d'histoires, et peut-être que ces chansons seront plus rapides, ou plus lentes. Peut-être que ces chansons auront des parties claires et qu'il faut les laisser être ce qu'elles ont besoin d'être. Il n’y a aucune limite.

Oui, c'est toujours difficile quand on est en dehors du groupe de comprendre ce qui se passe en interne, évidemment. Et quand on voit le changement de son et le fait que vous avez changé de label, passant de 20 Buck Spin, qui a un portefeuille de groupes plus extrêmes que d'autres, à Nuclear Blast…

(Il m'interrompt) C'est tout à fait compréhensible. C'est marrant parce qu'il y a certainement eu des gens au fil des années qui se sont dit que Nuclear Blast a manifestement eu une influence sur nous. En réalité, ce n'est pas ainsi que fonctionnent les maisons de disques. Peut-être pour les stars de la pop, mais pour les groupes de metal, les maisons de disques ne disent pas aux groupes ce qu'ils doivent faire. Ils leur disent simplement de faire un album, de ne pas le foirer, de ne pas perdre tout l'argent et de ne pas faire n'importe quoi. On n'est plus dans les années 80. Ils sont heureux quand vous rendez l'album et qu'il sonne bien. Et heureusement, nous sommes le genre de groupe qui fait les choses dans les temps, donc Nuclear Blast est content et nous sommes contents !

Et ce changement de label vous donne certainement une meilleure visibilité, surtout en Europe où Nuclear Blast est profondément implanté.

Tout à fait. Une partie du passage à un plus gros label consiste à essayer d'élargir cette base de fans. C'est marrant parce que quand nous avons commencé le groupe, nous disions que nous n'allions jamais tourner. Zach et moi avons joué dans des groupes underground de death et de black metal depuis notre adolescence. Ca n'a mené nulle part ; en témoigne le fait que personne ne connaît les groupes dans lesquels nous étions ! Alors on s'est dit qu'on ne le ferait plus : c’est ingrat, c’est trop de travail. Et nous voilà aujourd’hui à faire des tournées dans le monde entier. Il faut donc faire attention à ce que l'on dit. Mais c'est aussi parce que nous avons eu la chance de travailler avec des gens compétents, notamment chez Nuclear Blast, et que nous avons un super management à la fois en Amérique du Nord et en Europe, qui travaillent pour nous faire sortir et jouer devant plus de gens. Car heureusement, nous jouons un genre de heavy metal qui semble plaire à certaines personnes. Même ce soir, où les gens sont surtout venus pour Suffocation et The Black Dahlia Murder. Beaucoup de gens sont venus nous voir et nous ont dit qu'ils n'avaient jamais entendu notre groupe auparavant. C'était génial.

Je pense d’ailleurs que vous faites parti de ces groupes fédérateurs, qui peuvent plaire à des fans de musique extrême ou plus douce. Vous êtes au milieu de nombreuses influences qui, surtout dans une soirée comme celle-ci où vous êtes complètement différents des têtes d'affiche, peuvent encore intéresser les gens.

C'est tout à fait vrai. Faire des tournées avec des groupes plus extrêmes, c'est très amusant. C'est un défi. Et cela me rappelle deux choses. Ça me rappelle les histoires d'Alice in Chains quand ils tournaient avec Slayer, quand ils ont sorti leur premier disque. Cela me rappelle aussi que Neil Fallon de Clutch m'a raconté une histoire très similaire à propos des tournées avec Slayer au début et au milieu des années quatre-vingt-dix. Il m'a dit que leurs fans n'étaient pas enthousiastes à l'idée de voir Clutch. Mais tous les soirs, il s'est assuré qu'à la fin de la soirée, le public savait que Clutch méritait d'être là. Et maintenant, ils ont des fans issus de cette tournée qui amènent leurs enfants au concert et leur racontent ces moments-là. C'est vraiment amusant de sortir et de conquérir une foule comme ça et de prendre les gens au dépourvu. Alors que si vous jouez avec trois autres groupes qui sonnent exactement comme vous, ce n’est pas pour autant une mauvaise soirée mais ce n'est pas aussi stimulant. J'aime les défis ! J'aime devoir conquérir les gens et leur faire admettre qu'ils passent un bon moment. Vous savez, ils se tiennent debout, les bras croisés, mais progressivement ils tapent du pied, puis ils headbanguent…

Vous avez beaucoup tourné avec des groupes de rock ou de metal progressif (Opeth, Mastodon…) et maintenant avec des groupes plus extrêmes. Cela a-t-il un impact sur la façon dont vous abordez le live ? Par exemple, changez-vous votre setlist ?

Maintenant que tu me poses la question et que j’y réfléchis, peut-être bien. La setlist que nous jouons sur cette série de concerts, avec The Black Dahlia Murder, est principalement due au fait que nous avons 40 minutes et que beaucoup de nos chansons sont assez longues. Donc, afin de jouer le plus de chansons possible, nous avons choisi des chansons qui sont plus courtes et plus heavy comme « Isolation » par exemple qui dure quatre minutes et demie. Comparée à certaines de nos chansons plus sombres, elle est plutôt enjouée et dynamique. Mais aussi, nous clôturons nos concerts avec « A Conversation With Death », plus longue et doomy. Et tout de suite après, ils entendent Suffocation jouer « Liege of Inveracity » (rires). Quoi qu'il en soit, nous n'essayons pas de vendre quelque chose qui n'est pas notre musique. Je préfère que les gens nous entendent et se disent « hey, ce n'est pas pour moi » ou qu'à la fin de la soirée ils se disent : « bon sang, ouais, c’était cool finalement !». A défaut, à trop vouloir changer pour plaire, on ne serait pas sincères. Et puis, nous avons confiance en notre musique. Peut-être qu'ils l'aiment ; peut-être pas. Mais dans tous les cas, nous allons jouer à fond.

Vous avez sorti Deceiver en 2021 et un EP l'année dernière qui ne contient que deux titres. Est-ce la fin de Khemmis qui nous livre des albums entiers ou vous vouliez simplement sortir dès que possible de nouvelles chansons ?

Contrairement à certains groupes, nous ne voulons pas abandonner complètement le concept de l'album. Mais peut-être que lorsque nous avons quelques titres prêts, nous allons les sortir pour nos fans sans attendre. Même si nous n'avons que deux titres et pas un album complet, pourquoi ne pas le faire ? Dans le cas présent, nous avions écrit et enregistré toutes ces chansons en même temps que Deceiver. Une fois que nous avons su quelles chansons allaient figurer sur Deceiver, nous savions que nous voulions faire quelque chose avec les deux titres non retenus. Nous avons réalisé la cover de « In the Pines », puis nous avons eu notre nouveau titre « Sigil » qui est sorti en Amérique du Nord sous la forme d'un Flexitrack avec le magazine Decibel. C'était une sorte de teaser, d'échantillon, ou quelque chose comme ça. Mais ils n'ont pas pu l'obtenir en format physique jusqu'à l'année dernière, lorsque nous avons sorti le vinyle.

Cette sortie est aussi un pur produit de la pandémie. Nous venions de sortir Doomed Heavy Metal à ce moment-là, et soudain, nous n'avons plus tourné, nous ne nous sommes plus réunis, nous n'avons plus écrit, nous n'avons plus enregistré, et nous ne voulions pas nous retrouver à nouveau dans une situation où nous n'aurions plus de musique à partager avec les gens pendant de longs mois. Donc nous avons décidé de sortir ce petit EP.

Espérons qu'il n’y aura pas d'autre épidémie de COVID ou quelque chose comme ça pour que nous puissions continuer à avoir plus de musique de votre part !

Croisons les doigts (rires). Nous ne sommes certainement pas le premier groupe à le constater, mais c'était la première fois que nous pensions réellement à l'avenir, que nous pensions à autre chose qu'à notre quotidien dans le groupe et aux chansons de notre prochain album. On s'est dit qu'on devrait avoir plus de chansons prêtes. Nous devions avoir des choses supplémentaires, mais aussi des surprises pour notre public. S'assurer que personne ne sait exactement ce que nous allons faire ensuite. Parce que je ne veux pas que nous soyons prévisibles. Le jour où l'on sait exactement ce que l'on va faire, à quoi va ressembler notre prochain album, j'ai l'impression qu'il faudra qu'on raccroche. Parce que nous essayons toujours de faire la musique que nous voudrions écouter. Et si mon groupe préféré, à l'exception peut-être d'AC/DC ou d'Amon Amarth, fait un album qui sonne exactement comme le précédent... A quoi bon ? Il y a un millier d'autres groupes que je pourrais écouter et qui proposeront quelque chose de mieux ou de nouveau. Donc, tu sais, j'ai l'impression que je me le dois à moi-même. Nous nous le devons à nous-mêmes en tant que groupe, à nos fans.

Khemmis est originaire du Colorado. Je crois avoir lu que vous n'êtes pas tous du Colorado, en revanche. C'est exact ?

Oui, c'est vrai. Aucun de nous n'est originaire du Colorado en fait. Ma femme et moi avons déménagé dans le Colorado il y a environ 13 ans. Nous venons du Mississippi. Zach quant à lui avait déménagé quelques mois plus tôt, en provenance du Texas. Dave vient de la Bay Area, en Californie. Quant à Phil, il vient du Nord de l'État de Washington. Ou plutôt du Nord-Est de Seattle ou du Nord de Seattle. Quoi qu'il en soit, c'est comme si tout le monde à Denver venait d'ailleurs. C'est une grande ville pleine de personnes qui viennent de partout aux Etats-Unis. Soit dit en passant, c'est fou de penser que ce groupe a commencé il y a 12 ans. Le temps passe vite quand on s'amuse !

Et qu'y a-t-il dans l'air du Colorado ? Je veux dire, quand tu regardes ce que cet Etat contient en groupes qui ont le vent en poupe : Wayfarer, Primitive Man, Havok, Blood Incantation... Je pourrais continuer longtemps. Qu'est-ce qui se passe ? Sais-tu pourquoi il semble y avoir une telle profusion de groupes dans cette ville ?

J'ai une théorie : pendant longtemps, personne ne s'est soucié de ce qui se passait à Denver. Tout le monde a joué pendant des années sans que qui que ce soit en ait quelque chose à faire ; tout le monde se débrouillait comme il pouvait. Les groupes pouvaient trouver leur voie tranquillement et donner des concerts avec des groupes évoluant dans des styles différents. Tu pouvais voir, comme lorsque nous avons fait notre tournée pour l’album Hunted, Spectral Voice et un groupe instrumental de post-metal appelé Cult of the Lost Cause. Avoir des concerts variés tout le temps a forcément apporté beaucoup aux groupes locaux. Tout le monde a commencé à avoir des influences musicales diverses et à grandir à l'abri des regards. Et pas dans le sens « oh je veux sonner comme Blood Incantation » ou « je veux sonner comme Primitive Man », mais plutôt un bel esprit d’émulation quand tu vois tes amis qui percent et qui jouent la musique qui les anime. Il n’y avait pas de compétition les uns avec les autres, mais plutôt une compétition avec soi-même, dans un environnement devenu très varié et dynamique, pour être la meilleure version possible de nous-mêmes. Il y a beaucoup d'entraide et de camaraderie dans cette scène où, encore une fois, jusqu'en 2016 environ, personne n'y prêtait vraiment attention. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus nous permettre de faire un mauvais album parce que tout le monde regarde (rires).

Je crois que vous avez un projet parallèle appelé Glacial Tomb, qui est plus un projet de blackened-death metal ?

Oui, c'est exact. Dave, notre bassiste, joue dans Glacial Tomb avec moi. Nous sommes un groupe de metal composé de trois musiciens. En ce qui concerne le genre, j'ai déjà du mal à classer Khemmis, alors j'aurai peut-être encore plus de mal à classer Glacial Tomb (rires). Disons que, s’il faut le fait, ce serait du death metal avec un peu de black metal, peut-être. Nous avons un nouvel album qui sort cet automne. Le premier single sortira en juillet, et nous annoncerons qui est notre label et quand l'album sortira (ndlr : le 23 juillet dernier, le groupe a annoncé que Lightless Expanse sortira le 20 septembre prochain chez Prosthetic). Nous allons faire une tournée en Amérique du Nord dont quelques concerts avec Deicide, quelques concerts avec Rivers of Nihil. Nous allons également jouer au New England Metal and Hardcore Festival, et si tout va bien, l'année prochaine, nous viendrons en Europe !

Quand vous étiez plus jeune, vous vous disiez que vous ne partiriez jamais en tournée avec vos groupes. Et maintenant, vous créez plusieurs groupes et vous tournez avec chacun d'entre eux !

Oui (rires). Maintenant, je le fais pour gagner ma vie. J'ai la chance de pouvoir payer les factures en jouant du rock and roll et en faisant ce que j’aime ! Je ne rajeunis pas et je ne sais pas si je ferais cela si je rentrais à la maison avec deux dollars en poche. Je ne deviens pas riche, ce ne sont pas les années 80, mais je rentre à la maison avec suffisamment d'argent pour que ma femme ne m'ait pas encore quitté, alors je dois faire quelque chose de bien (rires). Il faut en tirer le meilleur parti.

L'année dernière, je suis allé au Damnation Festival à Manchester, essentiellement pour vous voir. Ce n'était pas votre première fois en Europe mais vous n'êtes pas beaucoup venus pour l'heure.

Oh merci, mec, c'est génial ! Oui, nous avons fait le Roadburn, le Doom Over Leipzig et un concert dans un club en 2017 si je me souviens bien. Ensuite, nous sommes venus en 2019 pour une courte période, nous avons fait cinq concerts en Allemagne, deux aux Pays-Bas et peut-être un ailleurs. Le Damnation était notre premier concert au Royaume-Uni. Nous ne savions pas à quoi nous attendre, mais nous nous sommes éclatés ! Dave et moi sommes restés un jour de plus, nous sommes allés au siège de Nuclear Blast, nous avons déjeuné avec tous ces gens, ils nous ont fait visiter une partie de Londres. C’était vraiment un beau moment.

Le Damnation est vraiment un festival différent, avec tous ces sets exclusifs et son ambiance particulière.

J'ai adoré ce festival. Je pense que c'est appréciable de voir ce type d’organisation autonome qui n'est pas soutenue par des entreprises ou des promoteurs. L’éthique dans le metal est à géométrie variable et que tout ce que nous faisons ou achetons est mauvais d'une manière ou d'une autre, mais ces festivals qui ne sont pas portés par ces méga promoteurs sont à soutenir. C'est spécial parce qu'ils n'ont pas à jouer le jeu de la même manière. Ils peuvent avoir des sets exclusifs pour les artistes et les accueillir dans des conditions différentes. Quand tu regardes le Roadburn programmer des groupes comme Clipping cette année, un groupe que je ne me serais jamais attendu à voir dans un tel festival, c'est vraiment cool. J'adore Clipping, mais le hip hop expérimental n'est pas une chose que l'on peut considérer comme logique si l'on regarde la programmation du Roadburn au cours des deux dernières années. Mais le fait qu'ils soient capables de faire ça maintenant est génial et le fait d'avoir pu jouer dans ces deux festivals nous permet de reconnaître à quel point c'est spécial.

Et dans quelques jours, vous jouerez au Hellfest ! Ce sera un peu un changement de décor, en passant d'une tout petite date ici dans le nord de la France au deuxième plus grand festival de métal d'Europe occidentale.

Oh, oui ! Je crois que Megadeth est la tête d'affiche de notre journée, ce qui m'épate. Metallica est là deux jours après… Et même sur notre scène, Green Lung joue juste après nous et j'adore ce groupe. Je viens de les découvrir avec leur dernier album et je ne peux pas m’arrêter d’en parler ! Quand nous étions au bureau de Nuclear Blast, je n’arrêtais pas de leur dire : « Comment se fait-il qu'aucun d'entre vous ne m'ait parlé de ce groupe ? » (rires). Mais oui, nous sommes tous très excités à l’idée de jouer au Hellfest.

Vous allez rester un peu pour profiter du festival ?

Malheureusement, nous devrons partir quasiment illico. Nous jouons au Resurrection Fest en Espagne deux jours plus tard, donc nous devons prendre la route. Je ne me souviens plus de la durée du trajet, mais c'est 14 heures ou quelque chose comme ça.

On arrive à la fin de notre interview. Merci beaucoup pour ton temps, Ben.

Non, merci d'avoir discuté avec moi, mec ! Ce fut un plaisir.

Peut-être un dernier mot pour vos fans français ? Connais-tu un mot en français d’ailleurs ?

Je sais dire « merci » (en français) et c'est tout. Quant aux fans français, je voudrais leur dire que tous vos fromages sont délicieux, nous avons mangé tellement de fromage pour le déjeuner et le dîner aujourd'hui, c'était incroyable. Je n'ai pas eu l'occasion de manger de la pâtisserie pendant que nous étions ici aujourd'hui, mais à un moment donné au Hellfest, je vais m'assurer d'en prendre parce qu’à chaque fois que je peux manger de la pâtisserie aux Etats-Unis, je me dis toujours : « Un jour, un jour, j'aurai l'occasion de manger de la vraie pâtisserie française », « Un jour, un jour, j'irai en Europe pour manger toutes les pâtisseries que je peux trouver » (rires). Merci donc à la France pour sa cuisine extraordinaire, et merci pour tout, vous êtes tous extraordinaires. Et merci beaucoup pour votre soutien !

Un immense merci au groupe et à Nuclear Blast records pour cette interview.