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La fin d’un règne !
C’est pour la majorité active des fans de heavy en général et d’Iron Maiden en particulier la définition de "No Prayer for the Dying" et son successeur "Fear of the Dark".
Ayant marqué de son joug la face du monde pendant toute une décennie, proposé sept albums monumentaux et cultes en huit ans, fait exploser à la face du monde l’un des plus grands vocalistes de tous les temps, dévoilé le talent d’un des meilleurs bassistes du monde (rien que ça) et mis sous toutes ses formes un symbole horrifique qui allait devenir l’égérie de tout une génération, Iron Maiden ne pouvait que finir par redescendre.
Marqué par une envie d’oxygénation et de nouveauté, Adrian Smith, le fécond bras droit du maître bassiste Steve Harris, quitte le navire malgré l’échec de ASAP, son projet solo.
Janick Gers le remplace, et s’il le remplace parfaitement techniquement, le cœur des fans semble écorché par le départ d’un de ceux que l’on pensait indispensable à la survie de la vierge de fer.
C’est dans ce contexte que le sauvage et raw "No Prayer for the Dying" voit le jour, renvoyant indéniablement l’auditoire à "Killers" et sa fougue pleine de rage.
Malgré un échec critique, il fera décrocher au groupe son premier single numéro un grâce au glauque "Bring Your Daughter to the Slaughter" (composé par Bruce et Jannick).
"Fear of the Dark" est sa parfaite continuité, l’effet de surprise en moins mais un brin de musicalité en plus, une richesse plus ample et une envie plus expressive de nouveauté. Face au grunge et à la folie qu’engendrait alors Metallica, Megadeth ou Slayer, Maiden tenta de brutaliser sa musique, de la noircir, fait évident dans le premier single de ce neuvième album.
"Be Quick or Be Dead" mixe allègrement des vocaux quasi hurlés et volcaniques de Dickinson à des riffs directs et bruts, où la rapidité et la fureur sont clairement les maîtres-mots.
Le texte est incisif, le refrain également, Nicko McBrain complexifie son jeu. Les riffs de Murray et Gers s’entremêlent dans une démence proche d’un thrash, comme pour entrer de plain-pied dans une époque qui ne leur correspond pas mais qu’ils se doivent de dominer comme la précédente. Le single se classera numéro deux des charts anglais dès la première semaine.
Mais "Fear of the Dark" ne pouvait tenir cette cadence sur une totalité d’album. Ensuite, Maiden se perd dans des expérimentations presque jamais assouvies, à l’instar de "Fear Is the Key" et son ambiance bluesy bancale et inexpressive, existant pour exister et non par utilité.
En revanche, "From Here to Eternity" laisse filtrer une crasse blues typique et naturelle qui emmène le groupe dans de nouveaux horizons, où Bruce est parfaitement à l’aise, comme le dévoile ce refrain rugueux et scandé par un vocaliste plus convaincant que sur l’opus précédent.
Une noirceur de tous les instants émane de ce disque composé dans l’envie d’en découdre, loin de la sérénité qui pouvait exister lors d’un Seventh Son of the Seventh Son. Les paroles de "Childhood’s End" sont si pessimistes, si désespérées (“No hope, no life, just pain and fear - No food, no love, just greed is here”), si réelles et lointaines des mythologies d’antan que c’est le fondement même de la musique qui en pâtit.
Car plus brutes et orphelines de cette aura mystique qui entourait les opus post 90, les productions des années noires du heavy perdent de leur éclat si indispensable à l’émotion.
Pourtant, la sensibilité du superbe "Afraid to Shoot Strangers" contrebalance avec le reste de l’album. S’ouvrant sur une mélodie poignante, Bruce pose des vocalises presque torturées, à fleur de peau et emplies de souffrance. Les élans de caisse claire sont autant de claquements secs qui nous rapprochent inexorablement de l’affrontement physique, avant l’ultime son du couperet. La mélodie prend alors le dessus, la pression monte, doucement mais sûrement, Bruce se montre plus en voix et…le déchainement ! Le rythme s’accélère et s’emballe. A l'égal des salves purificatrices et annihilatrices d’armes de mort, les solos sulfureux mais néanmoins magnifiques des guitaristes broient les pistes, se mêlent et se déchirent entre un Bruce éructant et une basse imposant un tempo de char d’assaut.
L’on retiendra également le très mélodique et entêtant Judas Be My Guide, plus typique des britanniques, renforçant une seconde partie de disque ternie par un "The Fugitive" répétitif et un "Chains of Misery" se perdant dans sa propre recherche d’aération d’un style en plein questionnement. Il est l’exemple typique du morceau qui veut tenter des nouveaux éléments mais n’ose pas aller au bout, comme le prouve ce refrain niais et anachronique en comparaison de couplets cyniques et très hard.
Le constat est identique pour un "Weekend Warriors" inutile et soporifique, notamment en cette fin d’album qui commence sincèrement à se faire attendre.
Mais qu’entend-on là ?
"Fear of the Dark" ! L’un des rares morceaux de cette époque pouvant se targuer d’être devenu culte autant pour le groupe (pas un concert sans lui) que pour la communauté metal au sens très large du terme.
Comme un rappel inévitable à l’indispensable Hallowed By the Name dans sa structure et sa durée, Fear of the Dark profite pleinement de l’ambiance angoissante qui plane sur cette pochette prônant un Eddy menaçant au clair d’une lune vampirique.
La rapidité du titre, l’immense ligne de basse de ‘sieur Harris (incroyable !), les couplets devenus cultes, ce refrain unique et simple, créé dans le but d’être repris par des milliers de poitrines en délire, ces solos cisaillant l’atmosphère de leur mélodie, leur fluidité et leur virtuosité, sont autant d’éléments qui ont permis au morceau titre de devenir culte.
"Fear of the Dark" ! Inégal mais cachant de véritables trésors, autant que de pacotilles certes mais si précieux en ce qui concerne les joyaux. Il marque la fin d’un règne également car Bruce Dickinson, face au succès de plus en plus encombrant du groupe, vivra de plus en plus mal les tournées intensives et sans fin. Préférant vivre quelques années en solo, il acceptera néanmoins de signer deux témoignages Live de cette période trouble également de la vie de Steve.
Trouble qui donnera naissance à la controverse ultime en la présence de "The X Factor", introduisant le ténébreux Blaze Bayley. Mais ceci est une autre page de l’histoire du Heavy Metal…
1. Be Quick or Be Dead
2. From Here to Eternity
3. Afraid to Shoot Strangers
4. Fear Is the Key
5. Childhood's End
6. Wasting Love
7. The Fugitive
8. Chains of Misery
9. The Apparition
10. Judas Be My Guide
11. Weekend Warrior
12. Fear of the Dark