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La bête bouge toujours…et c’est les crocs en avant et toutes griffes dehors qu’elle s’apprête à sauter au visage de son assaillant.
Sauvage, indomptable, terrifiante et certaine de sa force, elle s’avance face à ses hôtes, dont elle ne connait les aspirations profondes. Rugissant d’un cri étourdissant et assourdissant, elle grogne, méfiante et carnassière, mais dans le même temps emplie d’une superbe et d’une stature frisant l’idolâtrie et la vénération.
Oh non la bête n’est pas morte…cette vierge de fer est belle et bien vivante, et les 50 000 individus qui lui tiennent tête son sur le point de le découvrir.
Pour ceux qui pensaient que "The Final Frontier" marquait un sérieux coup d’arrêt depuis la reformation d’Iron Maiden, "En Vivo' est une nouvelle preuve de la forme olympique, et semble-t-il, immortelle de la bête du heavy metal. Les temps ont passé, la cinquantaine (quand ce n’est pas la soixantaine) est venue pointée le bout de son nez et, malgré cela, les six musiciens britanniques témoignent toujours une forme, une sportivité et un potentiel musical ahurissant. Arpentant de long en large une scène toujours aussi monstrueusement grande et large (un véritable no-man’s-land pour certains groupes), la bande à Steve Harris ne ménage jamais ses efforts, développant une énergie hors du commun que peu de combos de heavy metal peuvent se targuer d’atteindre, malgré leur plus jeune âge. Et si nous avions peur, fut un temps, pour un Nicko McBrain devenu un peu léger pour tenir un set entier derrière ses futs, l’arrangement et le montage de sa batterie lui permet aujourd’hui d’être sans soucis au top pendant deux heures de temps. Bruce Dickinson marque néanmoins un peu le pas, ne délaissant pas sa furie habituelle et ses sauts en tous genres, mais perdant inévitablement aujourd’hui de la puissance dans sa voix, en se montrant moins juste ou en prenant quelques raccourcis vocaux parfois clairement identifiables. Mais que voulez-vous ? La voix est, à l’égal du corps, un organe vieillissant avec son propriétaire.
Matériellement, "En Vivo" se présente sous la forme d’un très beau boitier metal et brillant (pour une somme tout de même très rondelette), dont on regrettera simplement l’artwork d’un simplisme assez exubérant, en plus d’être une copie quasi conforme de celle de "Rock in Rio" (qui est de plus loin d’être une réussite). Ce n’est pas que le visuel de "Dance on the Road" était sublime mais il était clairement plus attractif.
Bref, passons ce détail bassement matérialiste pour nous pencher sur le contenu. Divisé en deux dvd, "En Vivo" se compose du concert complet enregistré à Santiago, dans un immense stade de 50 000 personnes chauffées à blanc, et d’un documentaire de 90 minutes étant en fait la suite logique du très intéressant "Flight 666" sorti voilà quatre ans.
Le concert est, d’un point de vue technique, une énorme réussite. Enregistré par 22 caméras haute-définition et une octocam permettant des plans vus du ciel stupéfiants, l’image est en soi d’une qualité irréprochable et d’une très grande pureté. Le visionnage sur un grand écran est un pur bonheur. Quant au montage, élément souvent décrié des dvd Live par sa trop grande rapidité frôlant parfois l’épilepsie tant les plans s’enchainent, Maiden a sorti le grand jeu en multipliant les écrans splittés permettant, en optant pour un défilement plus lent, de voir plusieurs séquences du concert sur la même image. Résultat, certains solo sont filmés de plusieurs endroit (par en dessous, au-dessus, devant) et tous les plans sont visibles en même temps, ou encore Bruce et Steve, chacun à un bout de la scène, se partagent l’écran pour que l’on puisse apercevoir en même temps ce qui se passe pendant le concert.
Du côté de la setlist, "The Final Frontier" est bien évidemment à l’honneur, et avec lui les classiques du groupe connus de tous sans énorme prise de risque. On appréciera la présente du puissant "The Wicker Man" et de l’émotionnel "Blood Brothers" (tous deux tirés de "Brave New World"), "Dance of Death" où justement Bruce se retrouve face à ses limites concernant le choix de faire le pitre et courir plutôt que chanter, et ensuite une bonne rasade de tubes des années 80.
"The Final Frontier" sonne très bien en concert, que ce soit le puissant morceau introducteur ou encore le sublime "When the Wild Wind Blows" qui, du haut de ses 11 minutes, est sans aucun doute l’un des grands moments du concert avec son interprétation impeccable (et ce putain de riff qui revient et écrase tout). Même si son choix était logique, on ne pourra qu’être plus sceptique concernant "El Dorado", bien plus faiblard que "The Talisman" ou le très beau "Coming Home" résonant dans le stade par son refrain enlevé et taillé pour les foules.
A côté de cela, on retrouvera les "2 Minutes to Midnight", "The Trooper", "The Evil That Men Do", "The Number of the Beast", "Fear of the Dark" ou autre "Hallowed by the Name" sans qui un concert de Maiden n’en serait plus vraiment un. Le show se termine sur un "Running Free" que l’on n’avait pas entendu aussi bon depuis un sacré paquet de temps (l’étirement en longueur de ce morceau ayant tendance à me taper personnellement sur le système).
Scéniquement, en plus d’être fidèle à eux-même, on ajoutera un Eddie robotique de trois mètres de haut venant jouer d’une véritable guitare sur le superbe "The Evil That Men Do" (un autre exemple des nouvelles limites de Bruce, tant ce morceau est exigeant vocalement, à l’instar de "The Trooper") ou encore l’énorme Eddie sortant traditionnellement sur le morceau phare "Iron Maiden", ici à l’image du dernier album, agrippant le fond de la salle avec ses mains et toisant de son regard la foule. On peut d’ailleurs y voir un certain retour aux visuels de "Somewhere in Time", pendant que les toiles présentes derrière la scène présentent de nouveau quelques exceptions où la bête n’est pas présente, fait de moins en moins rare (c’était la première fois avec "Paschendale", et c’est encore le cas sur la toile désolée et apocalyptique de "When the Wild Wind Blows").
Concernant le documentaire "Behind the Beast", il est surprenant dans le sens où il n’évoque presque jamais la musique du groupe ou le dernier album. Il aurait peut-être pu être intéressant de se pencher sur la composition de "The Final Frontier" mais le groupe, à l’instar de "Flight 666", préfère nous montrer l’organisation gargantuesque et monumentale d’une tournée d’un groupe comme Iron Maiden.
Que ce soit les moyens humains faramineux, les complications logistiques du fait de voyager en avion, le nombre ahurissant de personnes impliqués dans le projet ou encore les difficultés concernant les visas (entre l’Asie, l’Inde, l’Amérique du Sud, le Japon…), Maiden est aujourd’hui une véritable multinationale qui se gère sur le long terme et qui développe un projet pendant des mois avant de le mettre en œuvre (rien que 1500 repas par jour sont préparés pour toute l’équipe…).
Donnant la parole autant aux roadies qu’aux personnes de l’ombre (comptable à l’allure bien plus bureaucratique que metalleuse, créateur des toiles, graphistes, manager…), le documentaire met en exergue la logistique infernale d’un groupe qui ne fait pas les shows comme les autres et qui versent dans la démesure pour son public.
Pourtant, lorsque le groupe parle, c’est toujours avec beaucoup de proximité, de respect pour le personnel et pour les fans, bien loin des allures megalo de certains confrères de la même génération. De cette manière, "En Vivo" est un hommage à ceux sans qui chaque concert, en plus du groupe, ne serait pas possible. Steve Harris évoque aussi la complexité des décalages horaires, le fait de vivre plusieurs fois certains évènements comme son anniversaire, de remonter l’horloge deux fois en 24 heures en passant d’un hémisphère à l’ombre…de ces choses à priori banales mais qui se dévoilent très perturbantes à vivre. L’envers du décor est montré et il est bien moins reluisant et pailleté que la vie que l’on imagine de rock star comme eux. Sans jamais se plaindre ni donner l’envie de les plaindre, il met en avant l’étendue du travail pour atteindre le résultat escompté.
Au final, que dire ? Certains pourront toujours dire que le groupe cherche à sortir le maximum de trucs pour remplir le tiroir-caisse mais force est d’admettre que la qualité du contenu est toujours là, et que nous sommes loin de nous retrouver avec un dvd Live aux bonus faméliques et inutiles. La vierge de fer fait encore les choses en grand et le fait bien. Certes non indispensable au fan lambda, "En Vivo" est un nouveau témoignage de la machine de guerre qu’est Iron Maiden, et du chemin qu’il reste à parcourir pour ne serais-ce qu’égaliser un monstre aussi bien huilé. Pas indispensable, mais forcément instructif, et forçant l’admiration.
DISC 1 "LIVE AT ESTADIO NACIONAL, SANTIAGO"
1. Satellite 15
2. The Final Frontier
3. El Dorado
4. 2 Minutes to Midnight
5. The Talisman
6. Coming Home
7. Dance of Death
8. The Trooper
9. The Wicker Man
10. Blood Brothers
11. When the Wild Wind Blows
12. The Evil That Men Do
13. Fear of the Dark
14. Iron Maiden
15. The Number of the Beast
16. Hallowed Be Thy Name
17. Running Free
DISC 2 "BEHIND THE BEAST"
1. Behind the Beast documentary
2. Satellite 15... The Final Frontier (Video)
3. The Making of Satellite 15... The Final Frontier
4. The Final Frontier World Tour Show Intro