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Il se trouve dans notre existence des bribes de vie qui nous marque, nous bouleverse profondément. Bien plus qu’une chronique, c’est une tranche de vie que je vous écris. Je crois que le vocabulaire français n’aura jamais assez de force pour évoquer ma première rencontre avec Opeth.
Au détour d’une nuit de Juin, alors que l’aube commençait à embrasser la lune, je frissonnais à nouveau. Cela faisait plusieurs années que j’errais dans l’indifférence la plus complète. Mais cette nuit là… une musique vint à moi et réveilla comme une sorte de confession oubliée. Ces ambiances lunatiques, ces mélodies à la fois si claires mais aussi si noires, ces riffs consumants l’audace. Une leçon d’humilité et de connaissance de soi.
Une nouvelle fleur s’ouvrait et portait au cœur de sa corolle l’ouverture d’une nouvelle destinée…L’éternité.
La musique peut devenir incroyable et vous faire reconsidérer le temps, le monde, les gens. Elle redessine les contours d’une dimension nouvelle. Trois mots y demeurent : Beauté, Imagination, Transcendance. Opeth détruit la stabilité…
Les morceaux de ce premier album sortit en 1995 sont chacun des édifices en mouvement. Aucun ne se ressemble, tout est solide mais s’effondre en même temps. « In the Mist She Was Standing » fait perdre constamment pied entre ses guitares aiguisées, ses lignes mélodiques ou encore ses passages acoustiques envoûtants. A peine se sent-on réconforter que tout s’écroule…Quoi de plus humain ? Nous sommes une menace perpétuelle… Même sous les vibrations lunatiques de « Under a Weeping Moon », la caresse vire rapidement à la cadence maladive. Rêver est une souffrance…
Opeth a aussi su me rappeler qu’il n’y pas de transcendance sans violence. Le dépassement outrage avant de poser la renaissance. La douleur a toujours un cri quelque part, même au fin fond de « Forest of October » et de ses élans harmonieux. Le chant est rageur et indocile: on se heurte à des contrées difficiles. Pourtant, la « Silhouette » était gracieuse…
« Orchid » s’ouvre et le soleil perce à l’horizon. Je suis toujours assise dans l’herbe, immobile. La rosée métallique désaltère !
Comme notre monde est laid dans son ordinaire ! Mais comme il peut devenir somptueux vécu sous un autre œil ! « The Twilight is My Robe » hypnotise mes visions : laves amères, jardins dévastés, cités mortes, pantins abandonnés…Tout peut avoir une âme si on se donne la peine de la sentir. Les guitares mélancoliques nous le disent et la basse chante avec ferveur cet hymne nouveau. Une voix douce colore ces paysages…
Quelque chose vient de s’éteindre. Le « Requiem » s’impose ! Opeth annonce la mort du quotidien…pour mieux fêter le renouveau du commun. On dirait que l’éternité a enfin trouvé ses troubadours. Un temps exceptionnel est donné : « The Apostle in Triumph » bat les rythmes subtils d’une naissance, puis la frappe s’accélère aux balbutiements du cœur.
La transcendance ébranle les perspectives…
Le silence revient. Je me sens étrangement mal mais le vide prend un sens. Cette nuit, la douleur et la beauté ont parlé : l’humidité a rongé ma peau, les larmes ont creusé mon visage, mon esprit s’est égaré mais j’ai eu la sensation d’exister.
Rien n’est sondable mais tout peut être exploré. Dois – je croire au possible ? A ces rêves qui me semblent si intouchables ? A un monde où tout se touche mais où rien ne peut se violer ? Dois – je vivre cette poésie ? Espérer en des êtres si différents mais si proches ? Dépasser le simple donné ? Opeth peut m'y faire croire...et je veux y croire, même au prix de la douleur.
Depuis cette rencontre insolite, Mikael Akerfeldt devient le narrateur nostalgique et écorché de mon âme…et Opeth, le poète de mon monde.
1. In Mist She Was Standing
2. Under The Weeping Moon
3. Silhouette
4. Forest Of October
5. The Twilight Is My Robe
6. Requiem
7. The Apostle In Triumph