Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Parmi les possibles expériences d'une vie, un séjour en prison est certainement l'une des plus dures et des plus marquantes, le genre de passage de l'existence où une foule de questions doivent tourner sans cesse durant les longues heures d'ennui qui composent le quotidien des détenus. Et cette expérience désagréable, Randy Blythe l'a connue, l'a vécue et s'en est, tant mieux pour nous et pour lui, sorti. En 2010, accusé d'homicide, le chanteur s'est retrouvé dans la prison Pankrác de Prague et c'est là qu'a commencé la création de ce septième album, VII : Sturm Und Drang.
Premier contact avec la bête : violence directe et sans compromis. Still Echoes ouvre les hostilités de manière parfaitement assumée et classique : pur concentré de Lamb Of God, tempo qui cogne dès le début, la caisse claque toujours autant, et côté guitares on retrouve ce riffing complexe tout en restant efficace à chaque instant. Et si Erase This prend le même chemin, avec son orientation brisage de nuque sans préavis, éveillant la crainte d'un groupe en pilotage automatique, la suite de ce Sturm Und Drang viendra prouver que Lamb Of God arrive encore à faire bouger les lignes de son style.
La première grande nouveauté est la présence de chant clair sur le morceau Overlord, une sorte de fausse ballade comme en avait fait Pantera en son temps. Au final, Blythe ne s'en sort pas trop mal, mais son hurlement surpuissant reprend rapidement le dessus, sans doute mieux maitrisé. Le morceau en lui-même est acceptable, bien qu'un peu prévisible, dès le début, on sait que ça pétera avant la fin. En revanche, l'autre grosse intervention du chant clair est une pure réussite, mais c'est un élément extérieur qui vient sublimer la chose. Embers débute de manière classique, riffs qui butent, rythmique carrée et puissante, quand soudain, à mi-parcours, sortie de nulle part, une ligne de chant cristalline, pure, vient se poser sur un riff qui reste pesant. La voix de Chino Moreno (Deftones) accolée à cette atmosphère un peu épaisse qui caractérise la musique de Lamb Of God offre une dualité superbe, et si, un jour, par chance, ce morceau venait à être interpréter en live, frissons garantis lors de cette explosion vocale.
Au rang des choses un peu nouvelles qui se sont glissées ça et là, une forme de froideur se décèle par moments, à l'opposé de l'aspect assez sudiste qui se dégageait de Resolution. L'intro de 512, soit le numéro de la cellule de Blythe durant son incarcération, laisse une sensation de malaise qui planera sur tout le morceau. Mais ce qui fait quand même le cœur de cet album, c'est bien ce metal moderne, groovy et ultra-efficace qui fait la renommée de Lamb Of God depuis quinze ans. Parce que si quelques petites touches de nouveauté viennent offrir de la surprise, le gros de l'album reste du pur metal US à base de bonnes grosses séquences de brutalité. Et là c'est festival, j'ai déjà mentionné les premiers titres, mais derrière ça, Footprints, Anthropoid et Delusion Pandemic tapent avec la même rage. Que ce soient sur les parties où le tempo s'emballe et la caisse claire devient surpuissante, ou durant la multitude de riffs bien lourds qui font le squelette de l'album, Lamb Of God reste maître dans le meulage de gueule. Quelques titres restent un peu de côté, exemple avec Engage The Fear Machine qui, tout énervé soit-il, demeure un peu répétitif et monotone. L'album se termine sur Torches qui fait parti de ces morceaux un peu trop convenus, malgré la présence en guest au chant de Greg Puciato (The Dillinger Escape Plan) dont la performance reste bien anecdotique comparée à celle de Chino quelques titres plus tôt.
VII : Sturm Und Drang ravira les fans du groupe, pas de doute là-dessus, le cahier des charges est rempli, les quotas de grosses mandales sont atteints. C'est avec de petites touches essaimées que Lamb Of God fait évoluer sa musique, et si certaines sont bien maitrisées (l'aspect froid dont je parlais plus haut) d'autres sont plus questionnables (je reste moyennement convaincu par le chant clair de Randy). Lamb Of God reste sur son terrain de prédilection mais essaie d'en élargir les frontières, et c'est tout à leur honneur.
Tracklist de VII : Sturm Und Drang :
1. Still Echoes
2. Erase This
3. 512
4. Embers
5. Footprints
6. Overlord
7. Anthropoid
8. Engage The Fear Machine
9. Delusion Pandemic
10. Torches