Death metal et science-fiction : une oreille dans les étoiles, une autre dans les enfers.
Un nom très rigolo, un début de discographie témoin d’un talent et d’une énergie folles, pour un groupe de death metal américain signé sur un super label en l’an de grâce 2024 ? Il y a de quoi pondre l’album death metal de l’année ou presque. Au milieu des cadres qui continuent de tenir la baraque et de la multitude de jeunes formations qui sortent chaque trimestre des trucs vraiment trop cools, Witch Vomit a émergé comme l’un des nouveaux gros noms du death metal moderne, avec Blood Incantation et Tomb Mold. La preuve en est avec ce Funeral Sanctum, sorti début avril, qui pour ma part risque de finir très haut dans le top de de fin d’année.
Tout d'abord, pour qui écoute le troisième album de Witch Vomit et connaît le reste de la discographie du groupe (trois EPs et deux albums en dix ans), la qualité du son est frappante. Terminé le death metal crasseux et brouillon qui jusqu’alors faisait le succès du groupe de Portland. C’est le jour et la nuit quand on compare avec Buried Deep in a Bottomless Grave (2019) et Abhorrent Rapture (2021). Sur Funeral Sanctum chaque mesure est limpide, du riff d’ouverture au dernier interlude.
Et là où le son cradingue auquel nous avait habitué Witch Vomit ne cachait pas une réelle pauvreté de composition, le choix d’une production claire et pleinement audible permet de débloquer un potentiel jusqu’alors à peine effleuré. Citons l’incroyable « Serpentine Shadows », premier moment dans l’album ou le quatuor lève un poil le rythme. Une ambiance lugubre et grinçante s’installe, et pendant qu’une guitare entretient discrètement un riff death-thrash, un thème dissonant et scandé s’impose. On se retrouve au moment du break dans un monde à part, à mi-chemin entre At the Gates (avant Slaughter of the Soul surtout), et Bolt Thrower. Même jeu sur l'excellente « Dominion of a Darkened Realm ». L’alternance entre d’immenses blastbeats et des passages mid-tempos où la basse bourdonne donne des moments franchement épiques (« Endless Fall »).
Épique est un adjectif qu’il faut désormais employer pour parler de la musique de Witch Vomit. Car le groupe se vautre effrontément dans le death mélodique des années 90 (Intestine Baalism, Dissection). L’abondance de solis et de riffs entraînants témoigne d’un choix artistique évident (« Black Wings of Desolation »). Et malgré tout le groupe ne perd rien de l'agressivité qui a fait son succès : ce n’est pas parce qu’on fait un peu de death mélo qu’on fait plus de metal extrême, après tout. Ajouter un peu de mélodie rend en fin de compte complètement service au groupe, car n’est pas Black Curse qui veut. Qu’à cela ne tienne, puisque Witch Vomit a un talent fou. Rien à jeter dans ce Funeral Sanctum, et surtout pas sa dernière piste éponyme, désormais coincée dans mon cerveau jusqu’à la fin de l’été.
Biberonné au death mélodique dans mon adolescence, il y avait peu de chances que ce troisième album de Witch Vomit ne me plaise pas. Les antécédents déjà brillants du groupe et la pochette bleu nuit auraient du nous mettre la puce à l’oreille. Mais nous avons bel et bien affaire au meilleur album du groupe à ce jour. L'occasion de se replonger ou dans le reste de leur discographie si on la connaît mal, ou dans le meilleur du death mélo des années 90 pour une petite giboulée de nostalgie.
Tracklist :
1. Dying Embers (Intro)
2. Endless Fall
3. Blood of Abomination
4. Serpentine Shadows
5. Decaying Angelic Flesh
6. Black Wings of Desolation
7. Dominion of a Darkened Realm
8. Endarkened Spirits
9. Abject Silence (Interlude)
10. Funeral Sanctum