Michael

Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.

Après une performance très convaincante au Hellfest 2024, nous avons eu l'occasion de rencontrer Johan Reinholdz, guitariste du groupe depuis quelques années désormais. L'occasion d'évoquer l'actualité du groupe, et notamment leur nouvel album, Endtime Signals, qui sortira le 16 août prochain chez Century Media.

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Bonjour Johan, merci beaucoup pour cet interview ! Cela fait maintenant un peu plus de quatre ans que tu es un membre à part entière de Dark Tranquillity. Comment s'est passée ton intégration et quelle a été ta progression dans le groupe ?

Ma première répétition avec le groupe a eu lieu en décembre 2016, ce qui semble bien loin maintenant. En 2017 et 2018, nous avons fait beaucoup de concerts et de tournées ensemble. Je me suis donc senti à l'aise lorsque j'ai finalement rejoint le groupe en tant que membre officiel.

Mais pour revenir sur le processus, il s'est déroulé assez rapidement, en réalité. Nous étions occupés par la tournée d'Atoma et vers 2019, il a été question de commencer à composer un nouvel album. Je me suis lancé et j'ai fait quelques démos pour les gars ; j'ai envoyé quelques idées sans qu'ils me le demandent vraiment parce que je voulais aller de l'avant et montrer que je prenais des initiatives. Mikael (ndlr : Mikael Stanne, chanteur) et Martin (ndlr : Martin Brändström, claviériste) commençaient à écrire des chansons de leur côté depuis un moment, puis j'ai été invité à travailler sur quelques démos sur lesquelles ils travaillaient. J'ai donc réécrit et réarrangé certaines des choses qu'ils faisaient ; je suppose que c'était à l'automne 2019. Ils ont trouvé mon travail très intéressant et j'ai donc été invité à venir au studio et à continuer à écrire avec eux. J'ai travaillé sur certaines de leurs chansons, mais j'ai aussi présenté certaines des miennes. Deux d'entre elles ont fini sur l'album Moment, donc ça s'est fait en douceur (rires). Je m'investissais de plus en plus, et sur ce nouvel album, j'ai eu encore plus de responsabilités en matière d'écriture. Donc oui, c'est une belle progression.

C'était ma question suivante en fait ! Maintenant que tu es le seul guitariste officiel du groupe, quel a été ton rôle dans ce nouvel album ?

J’ai naturellement eu plus de place dans le process. Cette fois, Martin et moi avons directement travaillé ensemble. Nous avons commencé à réarranger des compos, en utilisant une approche analytique. Nous ne sommes pas le genre de groupe à répéter ou à jammer dans la même pièce ou quoi que ce soit de ce genre. Nous nous sommes assis devant Cubase et nous écrivons, modifions et faisons beaucoup de choses par nous-mêmes. Ensuite, Mikael est arrivé en s’impliquant dans les sessions et en apportant ses idées. Nous essayions aussi d'intégrer les arrangements vocaux au mixage et au processus d'écriture assez tôt, parce que c'est très important bien sûr. Nous avons travaillé du 22 août au 23 septembre, soit une année entière à composer ces chansons, sans compter les démos.

En gros, vous travailliez surtout chacun de votre côté, puis vous vous réunissiez pour discuter des idées développées. Vous n’êtes pas du genre à jammer ensemble !

Tout à fait. Ce groupe n'a pas fait ça depuis un certain temps ! Cette fois-ci, nous avons remarqué que certaines chansons n'avaient pas le tempo optimal, que le BPM était un peu bas sur certaines chansons, ce qui aurait pu être évité si nous avions joué les chansons avec le batteur avant d'aller les enregistrer ! Cela a demandé un peu de travail en aval. Nous avons ainsi eu une petite séance avec Joakim (ndlr : Joakim Strandberg Nilsson) juste avant qu'il n'aille enregistrer la batterie aux studios Fascination Street. Nous l'avons écouté jouer les chansons et nous avons discuté pour savoir si certains ou tous les tempos étaient corrects et s'il y avait des parties à changer à la batterie. Au final, cela a été un peu retravaillé avec les tempos de la batterie et ce genre de choses.

Le remaniement du groupe depuis le dernier album a-t-il eu un impact sur le processus ?

Pas trop, en réalité. La seule différence est que Jivarp (ndlr : Anders Jivarp, l'un des membres fondateurs du groupe qui est parti en 2021) était très impliqué dans les compositions auparavant, et il n'est plus avec nous.

J'ai eu l'occasion d'écouter Endtime Signals, votre nouvel album. Je l'ai trouvé encore plus mélodique que le précédent, tout en sentant que le côté extrême de Dark Tranquillity est toujours présent. Est-ce que c'est ce que vous aviez à l'esprit en mettant l'accent sur le côté mélodique, sans pour autant renier les origines death metal de Dark Tranquillity ?

J'ai vu ce commentaire dans une autre critique et je l'ai trouvé un peu surprenant, bien que je ne sache pas vraiment ce que signifie « mélodique ». Plus mélodique parce qu'il contient plus de mélodies mémorables et qu'il s'appuie encore plus sur des voix claires et des crochets accrocheurs ?

Oui, exactement.

Je pense que Dark Tranquillity a toujours été très mélodique et a toujours essayé de s'appuyer sur des mélodies mémorables. Mais oui, j'espère qu'il y a des refrains et mélodies plus fortes cette fois-ci ! Mais ma vision globale de l'album est qu'il est un peu plus sombre, plus dur et plus rapide que le précédent. Il y a aussi plus de choses atmosphériques, donc je pense qu'il est plus intense et mélodique en ce sens. Je pense qu'il a un spectre plus large que le précédent album.

C'est aussi ce que je ressens lorsque je l’ai entendu pour la première fois. Il y a une sorte d'emphase sur les claviers par exemple. D'un côté, il y a des riffs plus lourds et plus rapides, et de l'autre, il y a plus de claviers que sur l'album précédent, avec d'énormes lignes mélodiques tout au long de l'album.

C'est vrai. Je pense que l'on peut avoir une combinaison des deux extrêmes de chaque côté. Nous voulions ramener le côté plus rapide de Dark Tranquillity, qui s'était un peu perdu depuis quelques albums, et faire ressortir les chansons plus atmosphériques, pour qu'elles s'enrichissent l'une l'autre, avec plus de dynamique dans l'ensemble.

Et peut-être que cette ambiance est liée au message de l'album qui semble être un peu plus sombre et pessimiste que les précédents.

Bien sûr, même si je n'ai pas écrit les paroles, qui sont l'affaire de Mikael. Je pense que de mon point de vue, j'aurais écrit la musique indépendamment des thèmes des paroles, mais je suppose que nous sommes tous sur la même longueur d'onde lorsque nous faisons l'album, donc oui, il est logique que les paroles soient en accord avec l'ambiance générale de l'album qui est plus sombre et heavy.

La promo de l'album indique que Niklas Sundin et feu Fredrik Johansson ont contribué à deux titres de l'album. Peux-tu me dire quels ont été leurs rôles respectifs sur ces deux chansons ?

Comme vous l'avez mentionné, Fredrik Johansson est décédé d'un cancer il y a quelques années et il écrivait encore de la musique à l'époque. Il nous a envoyé un tas d'idées, des fichiers sonores et des idées qu'il avait mis sur papier. Il nous a dit que si nous voulions les utiliser, nous pouvions le faire. Nous avons écouté son travail et avons trouvé de bonnes idées, en particulier une sur laquelle Martin a commencé à travailler et à la développer, qui est devenue la chanson « One of Us is Gone ». Martin a écrit la majeure partie de la musique et Mikael a fait le chant, mais tout est parti d'une idée de Fredrik, et les paroles parlent de lui comme le laisse supposer le titre. Elles traitent de la mortalité, ce qui était tout à fait approprié vu le contexte.

En ce qui concerne Niklas, comme d'habitude, il nous a envoyé un tas d'idées et nous avons vraiment aimé l'une d'entre elles, qui a été le point de départ de « False Reflection », qui vient clore l'album. Donc, c'était plutôt cool de lier ces gars avec nous. Bien sûr, Niklas fait toujours partie de la vie du groupe puisqu'il fait les animations vidéo et les illustrations de nos albums. Même s'il n'est plus techniquement dans le groupe puisqu'il ne joue plus, il n'est jamais loin de nous et nous lui en sommes reconnaissants.

Vous avez sorti trois singles de ce nouvel album, qui sont essentiellement les chansons que vous avez jouées en concert cet été. Appréciez-vous cette nouvelle tendance - qui semble obligatoire pour les groupes - de sortir des singles en guise de teasers, peut-être au détriment du public qui peut découvrir l'ensemble de l'album en tant que tel ?

Cela ne me dérange pas trop. Vous dites que c'est nouveau, mais c'est en fait un vieux truc qui revient, en quelque sorte. Je veux dire, si vous revenez aux années 50 et 60, il n'y avait que des singles ! Mais il est clair que vous diluez le plaisir du nouvel album parce que vous avez déjà entendu certaines chansons au moment de sa sortie. Mais d'un autre côté, vous attirez davantage l'attention de vos fans s'ils ont déjà été aguichés par quelques singles. En fin de compte, je pense que c'est plutôt cool. Et, évidemment, c'est aussi important d'un point de vue commercial et marketing. Il est logique de publier régulièrement du matériel, compte tenu de la sursaturation du marché. En tant que groupe, vous devez vraiment faire tout ce que vous pouvez pour vous démarquer et essayer d'attirer l'attention des gens. Vous obtenez encore plus de visibilité et d'attention lorsque vous publiez la pochette, des informations sur l'album ou des vidéos pour les singles. Je pense que c'est bien, in fine, d'autant plus qu'il y aura toujours un tas de chansons que les gens n'auront pas entendues lorsqu'ils recevront l'album entier à sa sortie !

Avez-vous déjà réfléchi à votre setlist pour les prochains concerts ? Je sais que vous faites une tournée européenne en novembre ; je serai d’ailleurs à Paris pour vous voir. En général, comment faites-vous ce choix de setlist quand il s'agit, par exemple, d'inclure d'autres morceaux ou chansons qui ne sont peut-être pas dans la même vibe que les albums les plus récents ? C'est quelque chose qui peut s'avérer de plus en plus délicat compte tenu du nombre d'albums que vous avez maintenant.

Tu as raison. Indubitablement et mathématiquement, il y a de plus en plus de chansons dans notre discographie et donc plus de chansons sont laissées de côté à chaque concert. Mais oui, nous faisons un effort en ce moment pour avoir un répertoire plus large et une setlist plus variée. Nous allons essayer de changer davantage notre setlist parce qu'elle s'est un peu essoufflée ces derniers temps. Nous jouions les mêmes chansons encore et encore, donc nous essayons bien sûr de jouer beaucoup de nouvelles chansons du nouvel album, mais aussi de ramener d'anciennes chansons et des chansons qui n'ont jamais été jouées en live. En fait, nous apprenons en ce moment même à jouer certaines d'entre elles, donc nous allons essayer d'avoir plus de variations dans les prochaines setlists. Nous discutons et votons pour les chansons au sein du groupe, en essayant de savoir quelles chansons nous voulons tous jouer, et nous avons aussi posé la question sur les médias sociaux où nos fans peuvent suggérer des titres. Et puis, bien sûr, il faudra tester le résultat en live ! Même si vous pensez que certaines chansons seront super à jouer en live, ce n'est pas toujours le cas !

Une bonne nouvelle pour les fans old school !

Sûrement ! Et c'est aussi plus amusant pour nous, même si cela représente plus de travail parce que nous devons répéter davantage (rires). Je pense en effet que ce sera plus excitant pour nous et pas seulement pour le public, d'avoir des chansons différentes à jouer.

Parlons un peu plus de toi et de tes goûts musicaux. Je me demandais avec quel album tu as découvert Dark Tranquillity à l'époque, et lequel est ton préféré, en dehors de ceux où tu as joué bien sûr.

Mes amis et moi étions très portés sur le metal et le death metal au début des années 90. Les grands groupes évidemment, mais aussi la scène underground, surtout en 93/94. Toute cette tendance death metal mélodique mais aussi le black metal de l'époque étaient notre truc. Nous commandions des démos et recevions des CD de petits labels, etc. Je me souviens avoir reçu le premier album Skydancer quand il est sorti en 93 et j'ai été un peu surpris parce que c'était une musique assez nouvelle à l'époque et c'était fascinant. Je pense que Dark Tranquillity a vraiment décollé avec l'EP Of Chaos and Eternal Night et l'album The Gallery. Je pense toutefois que le meilleur album est, à l'exception du nouveau évidemment, Damage Done. Il doit être mon préféré ; il est très bon, il a un excellent équilibre entre beaucoup de choses différentes, il est très accrocheur. Je pense que Fiction est également un très bon album. Depuis que je suis dans le groupe, nous avons joué presque toutes les chansons de cet album en concert, donc cela signifie quelque chose pour moi. Mais en fin de compte, pour moi, c'est Damage Done !

Et c'est un excellent choix ! En fait, c'est assez drôle parce que quand on parle de death metal mélodique, la plupart des gens disent que les années 90 ont été l'âge d'or. Mais quand on y regarde de plus près et qu'on voit quels sont les albums que les gens préfèrent et écoutent le plus souvent, ils datent généralement des années 2000 ! Cela fonctionne pour Dark Tranquillity mais aussi pour In Flames, par exemple.

C’est peut-être vrai pour beaucoup de gens, oui. J'aimerais contredire cela, car je pense par exemple que In Flames a atteint son apogée avec Clayman.

Clayman date de 2000.

Alors tu as raison ! (rires). Mais, dans l'ensemble, je préfère les années 90 avec les premiers In Flames et At the Gates. Mais pour Soilwork, par exemple, mes albums préférés datent des années 2000, donc ton commentaire est au moins partiellement vrai (rires).

Peut-être un dernier mot pour vos fans français, peut-être même en français ?!

Ma copine est française donc je comprends un peu mais je ne peux pas dire grand-chose malheureusement ! Je dirais à nos fans français dans que j'ai hâte qu’ils écoutent l'album qui sortira le 16 août prochain. Nous avons toujours eu beaucoup de plaisir à jouer en France, donc nous sommes impatients de sortir cet album et de revenir en France pour jouer pour vous en novembre !

Un grand merci au groupe et à Century Media Records pour cet interview.