The Halo Effect (Niclas) : "Vous devriez voir Jesper Strömblad en action, c’est un réel magicien"
Niclas Engelin
Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.
Fort d'un premier album couronné par la critique, nous avons eu l'occasion de rencontrer Niclas Engelin, guitariste de The Halo Effect à la veille de la sortie de leur prochain opus, prévu pour le 10 janvier 2025 chez Nuclear Blast Records. L'occasion pour Niclas de nous en dire plus sur ce nouvel album, sa génèse mais aussi le futur du groupe.
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Merci beaucoup Niclas de m’accorder cet interview. Comment vas-tu ?
Merci de me donner l'opportunité de parler aux fans français de The Halo Effect ! Je vais très bien. Tout le groupe est vraiment heureux de sortir un nouvel album et de constater que les gens aiment toujours ce que nous faisons. Nous ne prenons jamais cela pour acquis.
De l'extérieur, The Halo Effect ressemble à un groupe d'amis qui décide un beau jour de faire de la musique ensemble. Y a-t-il un plaisir différent à jouer dans The Halo Effect par rapport à tes autres projets ?
D'une certaine manière, oui. C’est un privilège de pouvoir jouer avec des vieux copains que l’on connait depuis des décennies. Je connais Jesper (ndlr : Jesper Strömblad) depuis la cinquième, Mikael (ndlr : Mikael Stanne) et moi nous connaissons depuis 1989 ou 1990, et Peter et Daniel (ndlr : Peter Iwers et Daniel Svensson) jouent avec moi depuis au moins 16 ans. Nous nous connaissons donc depuis très longtemps, et nous évoluons dans cette scène de Göteborg depuis des lustres. C'est donc très excitant de faire ça, et très inspirant, encore aujourd'hui. Je me sens comme un adolescent ! J'ai envie de continuer à faire ça et encore plus avec eux. A vrai dire, à ce stade de ma carrière, je ne serais pas là à te parler si je n’étais pas enthousiasmé par ce projet.
La décision de créer The Halo Effect a-t-elle un lien avec la période du Covid, le besoin de se regrouper et de passer du temps avec de très bons amis, ou ce projet était-il en préparation depuis longtemps ?
A vrai dire, ce projet a un peu pris la forme de ces fameuses conversations que vous avez au bar avec des amis. Vous vous retrouvez autour d’un verre, vous discutez : « Les mecs, ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vus, je suis content de vous voir », et puis d’un coup une des personnes présentes lance un « formons un groupe ! ». « Ouais, ouais, je t'appelle la semaine prochaine », « ok, bye-bye ». Et puis vous revoyez ces mêmes amis six mois plus tard, la même discussion revient et il ne se passe toujours rien (rires).
Cette fois-ci, la première discussion autour d’un verre a bien eu lieu mais les choses ne se sont pas passées comme ça pour la suite. Nous avons décidé d'organiser une réunion, de nous asseoir et de parler d'un nouveau projet commun. Pouvons-nous le faire ? Voulons-nous le faire ? Si oui, quel genre de musique ? Nous aimons toutes sortes de choses ; cela pouvait être un groupe allant dans plein de directions possibles. Nous aimons Rush, Tom Petty, Morbid Angel, Depeche Mode, et plein d’autres groupes. Nous nous sommes donc dit : pourquoi ne pas essayer de lancer un nouveau projet qui nous motive tous ? Pourquoi ne pas simplement écrire une chanson et voir comment cela se passe. Nous nous sommes alors réunis et avons écrit la chanson « Gateways », et après ça, assez rapidement, je suis venu avec « Shadowminds », et ensuite nous avons fait « Feel What I Believe ». Cela a en quelque sorte ouvert la voie à ce que nous voulions faire, et je pense que tout s'est fait vraiment sans effort, et nous n'avons pas réfléchi trop longtemps. C'était vraiment très naturel comme process et ça l'est toujours.
Cela semble en tous cas naturel lorsque nous écoutons vos albums, en tous cas !
Merci, j'aime entendre ça. Je pense également que c'est le cas (rires).
Parlons un peu de votre prochain album, intitulé « March of the Unheard », qui sortira le 10 janvier prochain. On pouvait craindre que The Halo Effect ne soit un projet ponctuel, on est donc heureux de vous voir revenir (rires). Quel bilan tires-tu de ce nouvel album ?
Je suis très enthousiaste, même si je vis avec cet album depuis un sacré moment déjà. Quand j'y pense, avec le recul, j'ai commencé à écrire l'album un mois, un mois et demi avant notre premier concert au Sweden Rock (ndlr : juin 2022). À l'époque, on nous avait proposé un créneau d'une heure au festival, mais nous n'avions qu'un seul album à jouer. Je n'avais jamais fait cela auparavant et je pense d’ailleurs qu'aucun autre membre du groupe ne l'avait fait auparavant. C'était vraiment stimulant et inspirant, mais cela signifiait que nous avions besoin d'une intro et d'une outro pour construire une setlist correcte. J'ai donc écrit une intro qui est restée pendant tout le cycle de l'album, soit 96 concerts. A la fin de la tournée, les gens revenaient nous voir, ils nous acclamaient et commençaient à chanter la mélodie de cette intro, et je me suis dit, pourquoi ne pas en faire une chanson ? C'est devenu « March of the Unheard ». Tout le processus est parti de là.
J'ai entendu dire que l’album était prêt depuis un certain temps, mais que sa sortie avait été reportée par Nuclear Blast ?
En réalité, c’est toute l’organisation derrière The Halo Effect qui a pris la décision de sortir l’album début janvier : le label, le management, le booking et le groupe. Nous avons longuement réfléchi à comment nous envisagions la sortie de l’album, les singles, le teasing, pour être certains que nos fans et d’éventuels nouveaux fans pourraient s’emparer de cette nouvelle musique. C’est fondamental pour moi de ne pas précipiter les choses et d’avoir un peu de temps pour bien les faire.
Comment s'est déroulé l'enregistrement cette fois-ci ? Avez-vous changé vos habitudes en ce qui concerne le processus d'écriture ou d'enregistrement ?
En y réfléchissant, c'était plutôt du copier-coller, d'une certaine manière (rires). J’ai l'habitude de proposer au reste du groupe des squelettes de chansons, pour que nous ayons quelque chose à partir de quoi travailler. Tout le monde les écoute, les ressent puis propose des éléments pour compléter ce squelette ou le modifier. Je discute toujours avec Mikael en parallèle pour qu’il puisse s’approprier la chanson pour y poser ses paroles. Nous avions fait comme cela pour le premier album et nous avons conservé ce fonctionnement pour March of the Unheard. Nous avons discuté en amont de l'ambiance que nous voulions avoir, de l'atmosphère et du thème de cet album. A la suite de quoi nous avons complété les premiers squelettes de titres, chacun apportant sa pierre à l’édifice. Nous avons ensuite tout enregistré avec Oskar Nilsson, à l'époque son studio s'appelait Create Studios (ndlr : il s’agit désormais de Bohus Studio), étant précisé que j’ai produit l’album avec lui. Nous avons enfin envoyé l’album à Jens Bogren à Örebro pour le mixage, puis à Tony Lindgren pour le mastering, toujours chez Fascination Street. Au final, pour répondre à ta question, je pense que c’est plutôt du copier-coller du process du premier album parce que nous avons trouvé notre rythme de croisière et une équipe de professionnels avec lesquels nous sommes heureux de travailler, qui pensent comme nous. Nous avons une bonne alchimie et nous voulons la conserver à tous prix ! Peut-être que nous changerons cela à l'avenir, mais pour l'instant, il nous semble naturel d'enregistrer et de travailler de cette manière.
Ce second album, comme le premier, est très « guitar-driven ». Je suppose que c'est Jesper et toi qui êtes les principaux pourvoyeurs d’idées ?
Oui, en quelque sorte. J’ai l'habitude de proposer des squelettes de chansons, des idées de base, puis Jesper arrive et met sa magie en œuvre. Vraiment, vous devriez le voir en action, c’est un réel magicien. Ensuite, tout le monde a son mot à dire sur le fruit de notre travail. Ce qui est génial avec ce groupe, c'est que chacun a sa propre identité et son propre son, et nous n'interférons pas avec le jeu de qui que ce soit, parce que nous nous faisons totalement confiance, et nous pensons que chaque membre est le meilleur choix possible pour nous. Lorsque Daniel pose sa batterie, il sait ce qu'il va jouer et le son sera génial, et c'est la même chose pour Pete. Moi et Jesper, nous nous en tenons à ce que nous faisons, et Mikael est le maître du chant et des paroles.
Je l'ai vu il y a deux jours à Paris avec Dark Tranquillity. Le temps passe, mais il est comme un bon vin…
C'est vraiment un maître dans son domaine, un régal de le voir évoluer avec nous.
Y a-t-il des thèmes communs à l'ensemble de l'album ou des choses que vous vouliez exprimer dans les paroles ?
C'est le monde de Mikael, pour ainsi dire. C'est un vrai poète ; il passe beaucoup de temps à travailler sa voix, les enregistrements et surtout à écrire les paroles les plus justes possibles pour chaque composition. C’est plutôt lui qui pourrait t’en parler en détail mais, en substance, le thème global de l’album était de donner une voix à ceux qui n'en ont pas, pour ainsi dire. Les personnes qui n'ont pas de voix dans notre société, qui vivent dans l'ombre, qui sont méprisées.
Après une première écoute de l'album, j'ai l'impression que l'album était peut-être un peu moins mélancolique que le précédent. Cet album semble un peu plus plein d'espoir, et en tout cas très libérateur. « Cruel Perception » ou « Forever Astray » en sont de bons exemples. As-tu la même lecture ?
C’est possible, oui. C'est très amusant de faire toutes ces interviews, de parler à des gens différents qui voient l'album un peu différemment les uns des autres. J’ai commencé à travailler sur cet album il y a si longtemps que je n’ai plus vraiment de recul sur celui-ci. Cela viendra sûrement plus tard, lorsque nous commencerons à jouer en live. J'ai eu une interview juste avant toi, et l’intervieweuse me disait que la dernière chanson de l'album, « Coda », qui est une piste instrumentale avec du violon et du violoncelle et des chœurs chantés par Julia et Mikael, en duo, était très mélancolique et puissante. Je ne l'avais pas vu de cette façon, parce que je suis tellement plongé dans le processus d'écriture et d'enregistrement et qu’on perd parfois un peu les choses de vue (rires). Mais à la réflexion, cet album est peut-être un peu moins mélancolique que le précédent, oui. Il reste un peu sombre, mais il est aussi plein d'espoir ; c’est le message que nous voulions faire passer.
C'est super que tu évoques le titre « Coda » car j'ai une question à ce sujet. D'habitude, on voit ce genre de titres comme des transitions ou des ouvertures, pas à la fin de l'album. Peux-tu nous en dire plus sur ce choix ?
J'avais une vision précise pour ce titre. Lorsque vous jouez avec une guitare acoustique et que vous jouez des mélodies mélancoliques, cela me touche toujours. Cela active quelque chose dans mon cerveau, à coup sûr. Tout cela est amplifié dans ce titre avec les harmonies et les instruments additionnels ; du violon, du violoncelle, une voix féminine et un duo, tout prend encore plus d’ampleur. D'une certaine manière, cela devient puissant, bien que fragile. Très tôt, pendant l'enregistrement de l'album, j'ai pensé que nous devrions avoir une chanson acoustique qui inclurait beaucoup de mélodies, beaucoup de passages qui ont été utilisés pour tout l'album et qui se terminerait avec ça. C'est un peu comme un pot-pourri.
En 2023, vous avez joué deux nouvelles chansons lors de concerts en Suède : « The Defiant One » et « Become Surrender ». Elles ne figurent toutefois pas dans cet album. Y a-t-il une raison spécifique à cela ?
C'est un peu un malentendu, en réalité. Nous avons fait ces deux singles pour donner aux gens quelque chose de plus que le premier album en attendant la sortie éventuelle d’un second album. Les gens ont donc commencé à penser que nous avions lancé la promotion d’un nouvel album mais pas du tout, c’était simplement deux singles autonomes !
C’est beaucoup plus clair maintenant ! Parlons un peu de votre prochaine tournée européenne. Comment allez-vous créer la setlist ? Devons-nous nous attendre à des surprises puisque vous aurez l'occasion d'avoir plus de temps en tant que tête d'affiche ?
Nous y pensons déjà, en effet. Nous voulons présenter The Halo Effect de la meilleure façon possible. Proposer un show dynamique, fun et intense. Même si nous n'avons sorti que deux albums et deux singles autonomes, nous allons essayer de faire en sorte que cela fonctionne, qu’il y ait une alchimie globale. Pour l’heure (ndlr : l’interview a été réalisée à la mi-novembre), nous en sommes seulement à planifier la production scénique. Il est donc un peu tôt pour parler de la setlist, mais il y aura des tonnes d'énergie et de fun, je peux te le dire !
Est-ce que le fait de jouer avec de vieux potes rend la tournée plus facile ?
Oui, sans aucun doute. La vie en tour bus est parfois délicate. C'est plus facile avec The Halo Effect car, au-delà du fait que nous sommes rompus à ce genre de tournées, nous nous connaissons tous parfaitement. Si toi et moi devions parcourir le monde pendant deux ans, nous aurions un point de départ, puis nous apprendrions à nous connaître, avec tous les aléas que cela peut comporter. Ici, c'est complètement différent. Il suffit de sauter dans le bus, « voici une bière », « voici un café », « d'accord », « je vais dormir », « à demain », « bye-bye » ! Tout est fluide et c'est un plaisir (rires).
On sait que Jesper ne participe pour l’heure pas aux tournées du groupe. Est-ce que cela va changer pour la tournée à venir ou vous continuerez avec un guitariste live en attendant que Jesper se sente apte à refouler les planches ?
Jesper a sa place sur scène avec nous quand il en a envie. Il sera toujours le bienvenu. Mais je pense qu'il a encore besoin d'être chez lui, de prendre soin de lui. Il est toujours à un coup de fil de la scène. Nous voulons qu'il soit sur scène quand il en aura envie, donc nous allons pour l’heure continuer comme nous l’avons fait depuis le début.
En ce qui concerne tes projets, tu fais toujours partie d'un autre groupe, Engel. The Halo Effect est-il désormais ton projet principal ? Comment vois-tu les mois à venir ?
J'adorerais faire un autre album d'Engel parce que j'adore les gars du groupe, on s'amuse beaucoup ensemble. Mais j'ai été accaparé par The Halo Effect pendant si longtemps que cela m'a pris beaucoup d’énergie et de temps. Je n’ai pas vraiment eu l’opportunité de réfléchir et d’écrire un nouvel album pour Engel. A voir à l’avenir !
À ce propos, tu as certainement pu constater à quel point la scène mélodeath a été très active ces dernières années. Y compris, d’ailleurs, un certain revival old school comme avec l’album de Majesties. As-tu écouté d'autres groupes qui t’ont marqués ces derniers temps ?
Oh oui ! J'écoute toujours de la musique en dehors de la mienne, en fait. Je sais que ce n’est pas le cas de tous les artistes mais moi je ne m’arrête jamais. J'ai d’ailleurs un album préféré cette année, c'est le Gatecreeper. Cet album est génial ! Nous avons eu le privilège de les voir au Milwaukee Metal Fest, et j'ai traîné un peu avec eux. Ils sont vraiment bons !
Dark Superstition est vraiment un très bon album, en effet.
Oui !
Es-tu fier de faire partie de l'héritage mélodique de la scène Göteborg, qui demeure encore aujourd’hui la référence ?
Tu n’as pas idée ! Je suis vraiment fier de faire partie de cette scène, d'être capable de continuer à nourrir ce genre, de me sentir inspiré et de me sentir comme un adolescent, en réalité (rires). Je veux juste jouer de la musique et jouer ce genre de musique et pouvoir inspirer les plus jeunes à monter leurs propres groupes. C'est tellement beau !
Notre temps est malheureusement écoulé. Peut-être aurais-tu un dernier mot pour tes fans français ?
J'espère que vous aimerez notre nouvel album March of the Unheard, parce que nous l'adorons et que nous avons hâte de vous le faire découvrir sur scène dans quelques semaines !
Un grand merci au groupe et à Nuclear Blast Records pour cet interview.