Le Max de l'ombre. 29 ans. Rédacteur en chef de Horns Up (2015-2020) / Fondateur de Heavy / Thrash Nostalmania (2013)
Survivant à sa décapitation qui aurait pu (encore...) définitivement sceller son sort en 2015, ce Immortal “post-Abbath” était l’un des grands mystères de 2018 avec son lot d’interrogations qu’il ne pouvait manquer de soulever. Une des grosses questions étant quelle direction prendrait le duo de rescapés Demonaz et Horgh ? Je dois bien dire que je n’en attendais pas grand chose pour être tout à fait honnête, neuf ans après un « All Shall Fall » pas mauvais du tout, mais que je ne réécoute plus jamais depuis sa sortie tant il n'est pas vraiment marquant. Le dernier Immortal m’ayant vraiment marqué est « Sons of Northern Darkness » en 2002 qui malgré sa production plastique me faisait encore sentir la glace et les ténèbres nordiques. Quoi qu'il en soit, l'annonce d'un nouveau Immortal ne pouvait pas me laisser insensible...
En 2011, Demonaz nous avait en quelque sorte déjà préparé à un Immortal sans Abbath avec le premier et unique album à ce jour de son side project « March of the Norse », à mi-chemin entre Immortal et l’ère viking de Bathory (Nordland I et II). Un bon album sur lequel je retourne peu souvent, mais qui pouvait être une piste pour imaginer ce « Northern Chaos Gods »…
Et, patatras ! Le premier extrait dévoilé, “Northern Chaos Gods”, balayait toutes les attentes et les questions avec son riffing agressif nous renvoyant plus de 20 ans en arrière dans le blizzard et un certain… « Blizzard Beasts » ! En plus de la surprise de ce retour aux sources inattendu, on remarque que Demonaz est vraiment à la hauteur vocalement (ce n’était pas vraiment le point fort sur son album solo) dans ce morceau où se mêle parfaitement agressivité et puissance. Immortal renoue t-il avec ses fondamentaux ?
Non, et à l'écoute de l'album, je me sens comme un enfant qui a ouvert trop vite son cadeau ne se rendant pas compte que la boite est désespérément... vide. Je suis un enfant nostalgique, c'est vrai, mais il en faut plus pour m'émerveiller et j’avoue ne pas trop comprendre les chroniques dithyrambiques que j’ai pu lire ci et là. J’aurai sans doute pu les comprendre si l’album était sorti 20 ans plus tôt, et encore. Le reste de l’album est une succession de titres best-of sans âme et sans intérêt. Si on a beaucoup écouté comme moi les monumentaux « Pure Holocaust », « Blizzard Beasts » et « At the Heart of Winter » dont il s'inspire largement, on ne peut pas trouver les riffs aussi bons et applaudir au génie ou alors c'est qu'on se laisse berner par la production plus plastique et moderne que jamais. Certes, je ne raffole pas du son de batterie sur « Pure Holocaust », par exemple, mais je préfère ce genre de prod aussi imparfaite qu’elle soit que ce genre de produit jetable dont on ne retient rien. A part le morceau-titre, aucun titre ne m'a donné envie de creuser. Que leur champ lexical soit toujours aussi limité, je m'en fiche, mais tout me parait limité dans cet album qui est paradoxalement plus consistant que « All Shall Fall » mais répétitif et vite lassant.
Ce n’est donc pas l’absence du facteur Abbath qui m’attriste (son projet solo n’est guère plus réjouissant musicalement), et ce même si on ressent que ce n'est plus la même "patte", mais l’impression qu’on me prend pour un pigeon car on met bout à bout des demi-riffs de vieux albums. Quand j'ai écouté la première fois "Mighty Ravendark", qui a le rôle de morceau-fleuve, j'ai coupé après une poignée de secondes pour rire tellement c'est prévisible. Alors oui, sans doute, cet album peut convaincre certains qui n'ont jamais écouté un seul album d'Immortal auparavant mais qu'ils écoutent alors directement les albums que j'ai déjà mentionnés. Oui la prod n'est pas aussi propre, mais il faudrait arréter de se laisser formater. Formatage dont Nuclear Blast se fait une spécialité. C'est un peu l'une de mes marottes mais je l'assume car les meilleurs albums de l'histoire du Black Metal ne sont pas forcément les mieux produits. Il faut aiguiser son oreille, apprendre à apprivoiser des productions plus hostiles.
Je sais que ce n'est pas l'intention de ce nouveau Immortal d'être un must-have de l'histoire du Black, mais alors c'est quoi ? Le pire, c'est que je ne dirais pas pour autant que c'est un mauvais album, d'un point de vue technique et parce qu'il utilise des recettes déjà utilisées. C'est un album qui peut faire illusion, mais il faut vraiment avoir écouté que 3 albums Black Metal dans sa vie pour ne pas s'ennuyer pendant ces 40 minutes qui m'ont paru une éternité. Donc non cet album n'est pas là pour faire plaisir aux nostalgiques malgré les apparences et je l'accepte mais du coup je trouve la démarche très fausse.
« Northern Chaos Gods » m’apparaît comme un disque inutile, dénué de passion et de conviction fait pour occuper l’espace libre laissé par Abbath et profiter de le réputation d'un nom devenu une marque qu'il est bien difficile de lâcher. Je ne veux pas blâmer Horgh et Demonaz de continuer et de vouloir prouver qu'ils sont toujours là mais c'est un coup d'épée dans l'eau (autrefois glacée). Un album creux qui marque sans doute une étape nécessaire pour que ce nouveau lineup puisse un jour revenir en live (on peut imaginer des problèmes légaux pour le back catalogue) et quoi qu'on en pense ce n'est pas le meilleur signe qui soit.
Tracklist:
01. Northern Chaos Gods
02. Into Battle Ride
03. Gates To Blashyrkh
04. Grim And Dark
05. Called To Ice
06. Where Mountains Rise
07. Blacker Of Worlds
08. Mighty Ravendark