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mardi 15 février 2005

Strapping Young Lad

Devin Townsend

U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

Actuellement en tournée premotionelle pour le nouvel album de Strapping Young Lad, Devin Townsend était à Paris l'espace du journée. C'est dans un hôtel parisien qu'eut lieu l'interview avec ce mythe vivant, visiblement fatigué par les décalages horaires et l'enchaînement des interviews.
Cependant c'est avec le sourire et une bonne humeur constante que Devin a répondu à nos questions.

U-zine : Avant de parler de ton nouvel album, revenons un tout petit peu en arrière sur l’actu’ de SYL avec votre DVD. Sachant qu’il est sorti seulement quelques mois avant la sortie d’Alien, était-ce une manière de dire que Strapping Young Lad était de retour ?
Devin Townsend (chant et guitares) : Je ne sais pas si on peut vraiment parler de retour. Strapping Young Lad est un groupe cool qui me tiens à cœur et que je n’ai pas mis de côté ces dernières années. Je m’investis dans beaucoup de projets, d’expériences… Et l’une des expériences que je n’avais pas encore réalisée avec SYL était de mettre notre son sur un DVD. C’était très sympa comme expérience, même si nous avons eu beaucoup de problèmes avec l’audio, mais ces erreurs seront corrigées pour la prochaine fois.

Tu évoques le son décevant. Sachant que les guitares sont sous mixées, pourquoi n’as-tu pas utilisé des overdubs comme sur le live Australien ?
On n’a du changer nos plans à la dernière minute. En effet, le DVD a du être enregistré en mono… Mais la prochaine version sera disponible en stéreo, ce qui fera définitivement disparaître ce problème !

Parlons maintenant d’Alien. Sa sortie est prévu dans un mois, quel est ton état d’esprit aujourd’hui ?
Bon ! Ce n’est qu’un album de plus… J’ai enregistré tellement d’albums dans ma carrière que je n’ai plus l’excitation des premiers temps. Je me dis juste "Cool, le nouvel album va sortir".
Strapping Young Lad est un groupe qui me permet de me vider de toute la pression qui s’accumule dans ma tête. Pouvoir dire dans un album constamment (faisant des grands gestes) "Fuck ! Fuck ! Fuck ! Fuck !", me permet de me sentir mieux.
On a essayé de faire quelque chose de très compliqué cette fois-ci, avec Strapping Young Lad, car tout était compliqué dans ma tête cette année. Or chaque année, la musique que j’enregistre n’est que le reflet de mon état d’esprit du moment. Il est vrai qu’il m’arrive de préférer des albums à d’autres, mais au moins je reste honnête envers moi-même.

D’où vient le nom Alien ? Etait-ce un concept ?
Non. Un soir, j’étais entrain d’écouter l’album, je me suis dis à la fin de l’écoute "Whaouh ! Cette musique me rend totalement fou et étranger tel un Alien (ndr : Alien = étranger en anglais avant d’être un extraterrestre) ". Le titre s’est alors imposé à mon esprit…
Mais, je tiens à préciser que ça n’a rien à voir avec des quelconques petits hommes verts mais avec le concept d’étranger !

Quelles fut l’implication des autres membres de SYL dans ce nouvel album, sachant que Jed et Byron n’étaient que très peu présent ?
Gene Hoglan et moi avons fait la majorité du boulot. Byron a eu cette expérience avec Fear Factory, ce qui lui a permis d’être encore plus prêt pour enregistrer, quant à Jed, il a fait pas mal de trucs…
Strapping Young Lad est avant tout un groupe d’amis et quelque soit la façon dont est fait cet album, il sera bien fait ! Mais c’est vrai qu’il fallu jongler avec les emplois du temps (rires)

Le fait que Byron joue dans Fear Factory ne te gêne pas ?
Non, je suis même très enthousiaste ! J’adore Fear Factory et je suis un grand fan de Byron et de Fear Factory à la fois ! Or je pense que le metal est une communauté, et si tu vies dans une communauté, tu dois, comme chacun d’entre nous… Partager.
Il y a tellement de musiciens qui ont besoin de jouer constamment de la musique. C’était donc une occasion rêvée pour Byron !

La première chose qui m’a marqué avec Alien vient du fait que l’album dure presque une heure, ce qui est bien long que les précédents opus. Avais-tu besoin de faire passer plus de choses ?
C’est tout simplement le démon de la musique qui m’a possédé (rires). Quand j’ai commencé à écrire l’album, je me suis dit que j’allais prendre ce morceau puis celui-là et encore celui-ci… Habituellement, je mets 10 titres sur un album, on a donc cherché à trouver les 10 morceaux qui correspondaient le plus quelque soit la durée de l’album.

A l’égal de votre dernier album, Alien reste beaucoup plus facile d’approche que City. Y a t’il une raison ?
(s’affalant dans le canapé)Je suis plus vieux. Je n’ai plus 23 ans, j’en ai 32, ce qui fait une sacré différence ! Je suis un vieux croûton maintenant (rires).

Attardons-nous un peu plus longuement sur les titres de ce nouvel opus.
Pourquoi n’avoir pas mis de titre d’intro sur Alien ?

Je pense qu’Imperial, le premier titre, joue le rôle d’intro. Je trouve qu’il introduit parfaitement Alien.

Plus je réécoute le titre Skesis, plus je trouve que l’intro sonne comme un morceau du nouveau Mnemic. Tu penses quoi de ce groupe qui vous as en tant que modèle ?
Tu trouves ? Oh c’est génial ! J’adore Mnemic, j’ai leurs deux albums et je connais bien les gars car j’ai failli produire leur nouvel album.
Et puis, comme je te l’ai dis, je suis un fan de metal et de tout ce que la musique peut t’apporter du point de vue des influences. Je suis influencé par énormément de groupes. Mon seul but est de faire quelque chose de cool et c’est ce que j’ai fais avec Strapping ! Je suis donc satisfait de tout ce que j’ai fait, quelques soient les influences que j’ai pu avoir.

Sur Alien, on distingue très facilement deux parties. La première plus brutale, puis une qui sonne plus The Devin Townsend Band. Cette apparition de titres plus calme vient-il du fait que tu te sens plus vieux ?
Oui, je pense… Je ne fais que composer ce qu’il me vient à l’esprit. Pour moi, qu’importe que la musique de Strapping Young Lad soit ultra-rapide ou très lente ou qu’importe qu’il y ait des chants clairs ou des ambiances très The Devin Townsend Band. Il y a une énergie qui se dégage de cet album qui est pour moi typique de Strapping Young Lad. Et quelque soit les morceaux qu’on a composé, qu’ils soient accoustique ou autres, lorsque j’écoute Alien du début jusqu’à la fin je me sens mal et sale à la fois… Voilà ce qu’est Strapping ! C’est un sentiment qui n’a pas forcément de rapport avec les morceaux mais plutôt avec un état d’esprit. Or l’état d’esprit de cet Alien est du SYL tout craché !

Le morceau Two Weeks est le plus proche de TDTB. Etait-ce ton idée ou celle des autres membres ?
C’était mon idée ! Et l’idée générale qui se dégage du titre "Two Weeks" est que cet album de Strapping est divisée en deux parties qui est dans le style : (se mettant à hurler)Wahhhhhhhhhh (reprenant son souffle) Wahhhhhhhhhhhahhhhhh !
Et bien tu vois, cette pause, c’est Two Weeks (explosant de rires).

Vu qu’on parle du côté plus mélodique de l’album… D’où t’es venu l’idée de conclure par un titre instrumental ?
J’adore le bruit tout simplement. J’adore quand les fréquences vrombissent (imitant)Brrrrrrrrzzzzzzzz. Et sur "Info Dump", le titre de ce dernier morceau, le son est dans le style (devenant fou) Brrzzzzzzrrrrrrrrrrrrrrrrrrrourrrrrrrzzzzzzzz !!! Tout devient de plus en fort dans ta chaîne et tu te dis "Oh, c’est horrible !" (rires).
Personnellement, j’adore jouer avec les modulations de fréquences. Il m’arrive d’adorer composer des choses harmonieuses comme des compos tout droit sorties de l’enfer !! Mais quoiqu’il en soit, il en résulte une énergie. Et c’est la définition de Strapping Young Lad… Créer une certaine énergie quelque soit le style de musique : modulations de fréquences, accoustiques… Il faut qu’il y ait une énergie totalement folle qui sorte de chaque titre comme sur Skesis !
Si tu arrives à extraire une énergie démentielle… Alors fonces !
Pour moi, cette énergie vient du fait que notre musique est intense tout au long de ces 11 minutes et à la fois explosive (rires).

Quant on compare les titres de l’éponyme tels que "Rape Song", "Last Minute" ou "Dirt Pride" qui ont une vision du monde très pessimiste, avec ceux d’Alien comme "Love ? ", "Shine" ou "Zen", bien plus apaisants, on ne peut que se dire que ce nouvel album a été abordé avec un état d’esprit complètement différent.
Oui, totalement ! En fait, c’est la première fois que Gene, notre batteur, et moi devenons frère et lorsque nous avons commencé à composer ensemble, nous avons accouché d’Alien ! On a donc décidé que si c’était toi et moi, c’est-à-dire, Gene Hoglan et Devin Townsend, ce sera Strapping Young Lad.
Lors de la composition d’Alien, je disais à Gene "Qu’est-ce que tu penses de ce riff ?" (imitant le riff) et c’est devenu petit à petit une collaboration des plus intenses d’où est né cette énergie si représentative de ce qu’on a précédemment fait avec Strapping Young Lad.

Et quelle est l’orientation des paroles cette fois-ci ?
Rien ! Je pense que c’était l’une des choses principales qu’il faut garder en tête avec cet album. Quelque soit les mots, ils forment un tout qui est fédérateur de cette énergie.
Et quand je le réécoute, je me fais (l’air heureux). Parfait !
L’objectif principal de cet album n’était pas les paroles, mais d’enregistrer des vibrations de malades. Donc, au niveau des paroles, j’ai juste essayé de dire le plus de trucs fous. En fait, je ne réfléchis pas à ce que je vais écrire. Je compose juste les paroles jusqu’à ce qu’elles accrochent avec le reste.

J’ai vu sur la première partie du making of…. Au fait, comment vous est venu l’idée du making-of ?
Le mec qui a produit notre DVD, nous a proposé de faire quelque chose dans le style et on a tout de suite accroché à l’idée. Ca pouvait être sympa, car c’est une bonne chose de pouvoir ajouter un document explicatif autre qu’un livret !

Donc on retrouvera ce making-of sur votre album ?
Oui, normalement (rires). Car, comme je te l’ai dit, je trouve que les gens doivent savoir comment l’album a été conçu, car de nombreux efforts ont été fournis pour créer cet univers musical. Je ne cherche pas à ce que tout le monde l’aime mais du moins que les gens le regardent et se disent Waouh c’est cool !.
Car il faut savoir que pour parvenir à cette énergie et à ce (se mettant à crier) Waaaaaaaah !, il nous a fallu beaucoup travailler au niveau des instruments que ce soit à la batterie, aux claviers, à la guitare et puis tout le reste.
Je pense que ça va être cool !

On va reprendre ma question initiale... J’ai vu sur la première partie du making-of que vous projetiez d’enregistrer une reprise de Tom Jones What’s New Pussycat. T’en as fait quoi vu qu’elle est pas sur la tracklist ?
Au moment où on a fini d’enregistrer l’album, on s’est dit que cette reprise de Tom Jones ne collait pas avec le reste et que ça ne serait pas aussi cool que ce à quoi on s’attendait.
On l’a mise de côté et on va s’en servir, mais elle ne fera pas parti de cet album. Ce sera pour plus tard !

On peut s’attendre à la voir sur la version digipak ?
J’en sais rien. On a donné tellement de choses à ajouter que je ne sais pas ce qu’ils vont choisir car ce n’est pas nous qui prenons la décision finale, mais la maison de disque.

J’ai lu que tu avais mixé la voix de Burton C. Bell sur un de tes titres. Tu peux nous en dire un peu plus ?
Oui (rires). Tu peux l’entendre au début de Skesis, c’est la voix qui dit God ! God ! …. En fait, on a pris un sampler d’un des morceaux de Fear Factory, ainsi qu’un autre où il hurle Death ! Death ! ….

Est-ce un clin d’œil à Burton vu qu’il vous a volé votre bassiste ?
(s’affalant dans le canapé vu qu’il était crevé – et sûrement ennuyé qu’on reparle de Fear Factory) Non, pas du tout. Nous sommes en relation avec Fear Factory depuis si longtemps…12 ans je crois ! Je suis un fan de Fear Factory et je n’ai aucun sentiment de haine contre eux parce que Byron est allé chez eux. Il peut y jouer pendant 3 ans, je m’en contre fiche, car si je ne peux pas tourner avec Strapping Young Lad, je peux faire des milliers d’autres choses. Je n’attends pas impatiemment de pouvoir faire quelque chose avec Strapping, j’ai tellement d’activités externes…
Mettre un sampler de Fear Factory sur un morceau était plus un hommage au groupe qu’autre chose. Tu vois, un (En français, sans accent) hommage (rires).

Vu que SYL n’est qu’un de tes projets, que penses-tu de ce groupe, surtout qu’il y a quelques années tu en avais marre ?
C’est du heavy metal. Pour moi, Strapping Young Lad est ce groupe qui me permet d’évacuer toute ma pression. Par conséquent, j’adore jouer du Strapping, j’adore en chanter et j’adore être impliqué avec Gene, Jed et Byron.
Mais aujourd’hui, je ne pense plus de la même façon de Strapping Young Lad. Je me répète mais, SYL n’est plus qu’un de mes projets parmi d’autres comme le Devin Townsend Band qui me permet donc de véhiculer tout le stress qui est en moi.

Shitstorm n’ayant pas été suivi de clips, quel sera votre première vidéo ?
Ce sera Love?.

Et tu peux nous en dire plus ?
Euh… On va headbangué (rires… Cherchant ses mots). Je déteste faire des clips !!! Mais bon, on va le tourner la semaine prochaine ou dans les semaines à venir. Je vais juste demander au label qu’on n'ait pas l’air trop stupides (rires).

On n’a pas encore parlé de la scène. Quels sont tes plans de tournée ?
On va tourner aux Etats-Unis aux mois d’Avril et Mai et nous reviendrons en Europe avant la fin de l’été, et par conséquent, nous ferons obligatoirement une halte en France ! Par contre, j’espère, mais je ne sais pas encore, si on pourra faire différents festivals Européens cet été !

Parlons un peu de toi maintenant. Comment arrives-tu à gérer The Devin Townsend Band, Strapping Young Lad et tous tes autres projets ?
Disons que j’ai la chance de pouvoir faire tout ça de mon vivant. Par conséquent, je peux me dévouer à la musique pendant 12 heures par jour. Et puis, avec deux ordinateurs, je peux faire vraiment mais vraiment beaucoup de choses en une seule journée. En un an, je peux mettre au monde 10 albums.
Ce n’est donc pas un problème pour moi de gérer tous ses groupes. Je m’investis dans un groupe jusqu’à m’ennuyer dans celui-ci, dans ce cas, je fais autre chose, jusqu’à m’ennuyer et ainsi de suite, puis je reviendrai sur un ancien projet, etc, etc…

Donc tu reviens à Strapping dès que tu as envie de te changer les idées et te relaxer ?
Pas vraiment. Chacun de mes projets est une partie différente d’un même tout. Parfois, j’ai besoin de Strapping Young Lad (avec des intonations différentes) pour dire Fucccck !, d’autres fois de The Devin Townsend Band pour dire Loooove.
Mais en tant que personne et être humain, j’ai besoin des deux pour me sentir bien. Si je veux me sentir de telle ou telle façon, je choisirai tel ou tel groupe. Je me sens bien du moment que je travail et que je crée !

Je suppose que par conséquent, tu n’as pas un projet qui te tiens plus à cœur que les autres ?
Exact. Chacun de mes projets me mènent au suivant.
Maintenant que j’ai finis Alien, je peux me mettre au nouveau The Devin Townsend Band puis sur un autre album dès que j’ai fini.

En parlant de The Devin Townsend Band. Tu peux nous en dire plus sur le nouvel album ?
(le sourire aux lèvres). Oui.
Il s’appelle Thinkestra (ndr - je ne suis pas sûr de l’orthographe), c’est un mix entre un orchestre et « Think ». Je le trouve particulièrement beau, et non pas horrible (rires). J’en suis très satisfait.

On pourra l’écouter quand ?
J’espère à la fin de l’année, sinon au début de l’année 2006.

Tu vas produire le nouveau Darkest Hour, comment cela s’est-il fait ?
Ils m’ont envoyé un mail en me disant qu’ils seraient intéressés par le fait que je les produise. Au début, j’étais un peu dubitatif. Puis, ils m’ont dis qu’ils voulaient faire quelque chose avec une touche très Pink Floyd. Alors dans ce cas là, j’étais totalement pour (rires) !

La musique représente toute ta vie, pourrais-tu vivre une journée sans écouter de la musique ?
Bien sûr. (S’affalant à nouveau dans le canapé et baillant)
Oh si tu savais, je suis levé depuis si longtemps…
Il m’arrive de faire des indigestions de musique et de ne plus en écouter pendant deux semaines. Mais lorsque je fais quelque chose en rapport avec la musique, j’y pense 24h/24. Il faut trouver le juste équilibre en fait. Parfois, j’écoute énormément de musique afin de trouver une certaine inspiration, d’autres fois pas du tout.

Tu veux rajouter quelque chose ?
Je suis ravi d’être à nouveau en France, et je suis très content que des gens prennent le temps d’écouter ce que nous faisons. La musique me permet de me sentir mieux. Donc, pour tous ceux qui ont aimé l’album Merci de l’avoir écouté !

Merci à toi ! Tu vas tenir le coup jusqu’à ce soir et voir le concert de Dark Tranquillity et Kreator ?
Oui, je pense car j’aime ces groupes. Mais je suis quand même extrêmement fatigué…

Un grand merci à Valérie et Devin Townsend pour sa gentillesse et sa bonne humeur.