
Negative plane + Coldborn @Bruxelles
Magasin 4 - Bruxelles

Punkach' renégat hellénophile.
Ça n'est quand même guère croyable que personne, au sein de la pourtant influente minorité belge chez Horns Up, n'ait encore abordé la nouvelle incarnation du Magasin 4. Cette institution mythique de la scène alternative bruxelloise a bénéficié l'année dernière d'une mue inespérée, après avoir été expropriée de son entrepôt de la rue du Port. Celui-ci a été détruit, ainsi que le skatepark et la plaine de jeux attenants, afin d'y bâtir, entre autre, un parc et une plaine de jeux – mais pas autogérés par des anars. Si l'ASBL qui gérait l'endroit devait bénéficier d'une nouvelle salle flambant neuve sur fonds publics, celle-ci se fait attendre, la faute à la crise ma bonne dame. Jusqu'à ce que se profile cette solution supposée provisoire : un autre entrepôt abandonné à réaménager, cette fois en périphérie d'Anderlecht.
Un entrepôt qui, grâce aux efforts de l'équipe de bénévoles, reproduit à s'y méprendre l'incarnation précédente du Magasin 4 (je le confesse, personne parmi nous n'a connu le premier nid à punks, situé au 4, rue du Magasin). Et si en début d'année il y régnait encore une odeur de neuf, celle-ci s'est bien vite estompée sous les couches de stickers et les bières renversées. Mais trêve de considérations sur le Bruxelles post-industriel ; si on est ici, c'est pour invoquer des chèvres, dans ce qui s'avère, si je n'ai rien manqué, être la première « grosse » date de ce nouveau Magasin 4 au rayon metal extrême.
Coldborn
Comme elle tombe un lundi et qu'il fait splendide dehors, la foule reste clairsemée. Mais ça ne semble pas entamer la motivation de Coldborn, groupe local que je découvre pour l'occasion. Il s'agit en fait du projet très personnel de Norgaath, bassiste d'Enthroned jusqu'à l'année dernière ; un détail qui a son importance, car si, sur scène, il occupe le micro, il compose le tout et on sent très vite que Coldborn est un projet très centré sur la basse. Ce qui s'entend, avec des passages composés pour que celle-ci bénéficie vraiment du devant de la scène (« Silenced is the Choir of Euphoria »). Quelques breaks parviennent également me surprendre dans ce black metal certes traditionnel, mais de bonne facture. Norgaath ne manque pas de présence, qu'elle soit vocale ou scénique sous sa capuche, et ses musiciens de scène le secondent bien, malgré quelques soucis techniques et une batterie par moments hésitante. Devant un public encore clairsemé, Coldborn, convainc, et c'est mérité.
Negative Plane
Belle soirée printanière ou pas, la salle se remplit un peu plus pour Negative Plane, dont les tournées européennes restent quand même de petits événements. On remarquera d'ailleurs que les New-Yorkais s'étaient déjà produits la veille en Belgique, à Namur, offrant ainsi coup sur coup leur deuxième et troisième concerts dans le pays - et certains, présents la veille, avaient fait à nouveau le déplacement ce soir. Pourtant, je le confesse, Negative Plane n'est pas un groupe avec lequel je me dirais familier. On me l'a comparé, avec une certaine justesse, avec un Malokarpatan dont je dois être l'un des plus fervents défenseurs de ce côté de la Vltava. Mais si les Américains officient aussi dans un black metal primitiviste, ils l'enrichissent d'un côté progressif fort impressionnant, mais que je ne trouve pas pour autant d'une écoute aussi facile. Ceci étant, le dernier opus en date, The Pact, a su se faire une place dans mes dernières écoutes, avec son côté punk à la Dartkhrone davantage mis en avant.
Punk, en tout cas, sur scène, ça l'est : Edward « Nameless Void » Miller débarque avec son gang tout de cuir vêtu et les cheveux dans les ventilateurs pour entamer directement sur le riff lancinant qui annonce « A Work to Stand a Thousand Years ». Et à partir de là, la tension ne redescendra plus d'un cran, ni d'ailleurs le compteur de décibels. Negative Plane, c'est un groupe dont on ne peut expérimenter l'intensité qu'en live, face à un mur de son dantesque (au sens des écrits de Dante Alighieri) ponctué par les éructations du vocaliste et les prouesses digitales à la limite de l'inhumain de ses musiciens.
L'ensemble est proprement hypnotisant, à tel point qu'entre fixer la scène dans l'espoir de comprendre quelle sorcellerie est à l’œuvre, et plus prosaïquement se dévisser la nuque à faire la fortune de toute une génération de kinésithérapeute, on ne sait que choisir. Pas besoin de scénographie ou autres artifices, les musiciens enchainent et mettent le feu au Magasin 4 comme si de rien n'était. Les morceaux issus du dernier album restent, à mon sens, les plus efficaces, avec un « Even The Devil Goes Into The Church » digne d'une production gothico-horrifique des années 60 – c'est dingue d'ailleurs à quel point je retrouve des références cinématographiques dans le black metal. Mais Negative Plane peut légitimement se vanter d'être le seul groupe du genre à me faire apprécier en live de longues plages instrumentales – et à les rendre hyper énergiques au passage.
Tournée thématique oblige, c'est The Pact qui est le mieux représenté, malgré quelques incursions vers les deux premiers albums. Ce sera particulièrement le cas durant le rappel que le groupe, généreux, ne se fait pas fort prier avant d'offrir. Allez, en comparant les setlists, on en voudra un peu aux Parisiens d'avoir eu droit à une reprise de Black Sabbath pour l'occasion. Mais Bruxelles aura quand même droit à son grand final, sur un « The Chaos Before The Light » dont les samples d'orgues et de cloches ne feront qu'accentuer la charge furieuse à grands renforts de « Ough ! » et de « Argh ! » C'est du punk, je vous dis ; mais du punk progressif.
Setlist :
A Work to Stand a Thousand Years
Lamentations and Ashes
(The Wailing of the Immured)
Even the Devil Goes into the Church
Fallen Angel (Bulldozer cover
Rappel :
Unhallowed Ground
The Chaos Before The Light