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jeudi 24 octobre 2024

Sum 41 @ Palais 12 (Bruxelles) : et si ce n'était qu'un au revoir ?

ING Arena (Palais 12) - Bruxelles

Malice

L'autre belge de la rédac'. Passé par Spirit of Metal et Shoot Me Again.

Sum 41, c'est donc... fini. En mai 2023, l'un des groupes les plus iconiques de son époque annonçait un ultime album et une ultime tournée – et le public parisien aura l'honneur de vivre le tout dernier concert de la carrière de Sum 41, le 24 novembre prochain à La Défense. Avant cela, Deryck Whibley et ses compères passaient par le Palais 12 de Bruxelles, et je ne pouvais pas rater ça. Parce que comme beaucoup, Sum 41 a bercé mon adolescence : avant le metal, c'est le pop-punk de Chuck et All Killer No Filler qui m'a fait goûter à mes premiers riffs et même, en un sens, fait découvrir certains aspects de la culture heavy metal (« Pain for Pleasure », ce pastiche de heavy qui ponctuait All Killer No Filler, m'avait marqué à l'époque).

Sans être l'un des groupes les plus influents de son époque – plutôt un groupe riche de ses influences et très fort pour en tirer le meilleur – on peut dire que Sum 41 aura offert quelques-uns des plus gros tubes des années 2000, à mes yeux bien plus qu'un blink-182 ou qu'un Offspring, beaucoup moins consistants. La même traversée du désert, globalement dans les années 2010, aura frappé tous ces groupes ; le même « revival » semble de mise, maintenant que les millenials dans la trentaine repensent à leurs 15 ans avec nostalgie et y associent naturellement une bande-son entre pop-punk et nu-metal. Mais Sum 41, qui aura au final commencé assez tard (1998), refuse apparemment de se traîner jusqu'à la cinquantaine en chantant des hymnes d'ado, et sonne donc la fin de la récré' cette année.

Sum 41 

C'est non seulement ma première au Palais 12, plus grande salle de Bruxelles (15.000 places avec les sièges) derrière le Stade Roi Baudouin voisin, mais aussi... mon premier, et donc dernier (?) concert de Sum 41 ce mercredi. On attend parfois un peu trop le dernier moment pour voir les groupes qui nous tiennent à coeur, même si sincèrement, je ne crois pas une seconde que ce « Tour of the Setting Sum » soit vraiment le dernier tour de piste des Canadiens. Mais bon, on ne sait jamais, et vu le soldout général, c'est ce que tout le monde se dit.

Après un assez bon concert de The Bronx, dont je ne connaissais pas grand chose à part le nom mais qui se taille un beau petit succès et dont on sent l'expérience sur les planches, le Palais 12 retentit d'hymnes pop-punk qui font déjà bien chanter un public... comment dire ? De trentenaires très peu lookés, qui donnent presque l'impression d'être là en afterwork entre collègues. Très peu d'adolescents, très peu de quinquas : on est clairement sur de la génération Y, qui a grandi avec Sum 41 et vient faire ses adieux.

Des adieux qui sont lancés par le justement très teenager « Motivation », mais qui décollent dès le deuxième titre : Deryck s'empare de sa guitare, lance l'un des riffs les plus célèbre de Sum 41 et son fameux glaviot - « The Hell Song » lance le premier karaoké géant de la soirée. Whibley est, depuis plusieurs années déjà, devenu frontman à part entière et ne prend la guitare qu'à l'occasion : s'il donne encore par moments l'impression de ne pas trop savoir quoi faire de ses mains, peu importe, le public lui mange dedans et côté voix, il chante probablement mieux aujourd'hui qu'en 2003, comme le prouve le plus récent et très bien accueilli « Screaming Bloody Murder ».

La setlist est massive – près de 30 titres - et va bien sûr couvrir une bonne partie de la carrière du Sum, mais on ne peut pas faire sans remarquer que l'un peu niais « War » fait retomber la tension... au contraire, et c'est étonnant, de quelques titres de Heaven X Hell, le très bon dernier album sorti cette année et qui a trouvé son public (« Landmines » et ses « oh-oh-ooooh » repris en choeur, « Waiting on a Twist of Fate » calé tranquillement au rappel entre « Summer » et « In Too Deep », rien que ça!). LA bonne surprise, pour moi, c'est la place énorme laissée à Underclass Hero (2007), peut-être le dernier très bon album du groupe avant les rudes années 2010 – quand Deryck Whibley remercie le public d'avoir été là « à travers les bons et les mauvais moments », il pense sûrement à 13 Voices (2016)et surtout Order In Decline (2019)même pas représenté ce soir – et dont 5 titres seront joués. Le titre éponyme et son lâcher de ballons reçoit l'un des meilleurs accueils du soir, et « Walking Disaster », joué sur la toute première guitare de Whibley rachetée quelques semaines plus tôt après qu'elle ait été volée à l'époque, reste l'un des meilleurs titres de Sum 41.

Alors bien sûr, il y a des moments un peu plus plats ; j'ai mentionné « War », mais les morceaux issus de la partie Hell de Heaven X Hell, censés être plus metal, font assez ironiquement retomber la tension. Mais la gestion du rythme du concert et de la setlist est admirable, entrecoupant les tubes (« We're All to Blame », l'excellent « No Reason ») de ballades superbement chantées par un Deryck Whibley qui n'a pas été cité pour rien comme successeur potentiel de Chester Bennington. Des ballades que toute la salle a dû écouter un nombre incalculable de fois pendant ses peines de cœur d'adolescence (« With Me », la classique « Pieces » mais aussi la plus rare « Best of Me » pour la première fois de la tournée). C'est évidemment l'incontournable enchaînement « Fat Lip » - « Still Waiting » sur lequel Sum 41 prend congé une première fois.

Alors que le rappel se termine dans un joyeux bordel sur un « In Too Deep » qui fait craquer nos vieux genoux, on se demande franchement pourquoi Sum 41 décide d'arrêter maintenant, alors que la nostalgie se remet à vendre, qu'ils viennent de sortir un album plus que correct et que, clairement, ils en remontrent encore à pas mal de groupes en live. Mais on ne peut que respecter la volonté, qu'on sent sincère, de s'en aller au sommet et sur une dernière tournée généreuse, en donnant l'impression de s'éclater sur scène et d'avoir gardé une belle complicité. « So Long Goodbye », comme le chante le groupe dans un ultime rappel ? J'y crois peu, et je m'attends à un inévitable comeback. Mais si ce sont bel et bien des adieux, ils auront été réussis. Sum 41 is dead, long live Sum 41 !

Setlist : 

Motivation (+ outro 88) 
The Hell Song
Over My Head (Better Off Dead)
Screaming Bloody Murder 
Underclass Hero
War
Landmines
Dopamine
We're All to Blame
Some Say
No Reason
Walking Disaster
With Me
Makes No Difference
Medley All Killer No Filler (My Direction/No Brains/All Messed Up)
Best of Me
Preparasi a Salire
Rise Up
Fake my Own Death
You Wanted War
Pieces
Fat Lip
Still Waiting
***
Summer
Waiting on a Twist of Fate
In Too Deep
*** 
So Long Goodbye