In Flames + At The Gates + Imminence + Orbit Culture @Paris
Bataclan - Paris
Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.
Ce mercredi 23 novembre 2022, le Bataclan avait rendez-vous avec une tournée placée sous le signe du death metal mélodique. Au programme des festivités, la pépite montante Orbit Culture (death mélodique - Suède), Imminence (metalcore - Suède), At the Gates (death mélodique - Suède) et les patrons du soir : In Flames. On avait naturellement hâte de revoir le groupe sur scène avec son nouveau lineup et de nouveaux titres à défendre.
Orbit Culture
En règle générale, sauf à être étudiant ou que sais-je, il est délicat d'assister aux premières parties des concerts parisiens. Surtout lorsqu'il y a quatre concerts comme ce soir. Avec un début à 18h pétante, c'est nécessairement devant un public très maigre que les Suédois de Orbit Culture débarquent sur une scène à la configuration au demeurant très réduite compte tenu de la présence du matos de tous les groupes du soir.
Une scène réduite ? Tout juste trente minutes de jeu ? Une batterie un peu trop surmixée ? Qu'importe ! Les Suédois nous ont démontré pourquoi ils sont un des groupes en vogue dans la scène death metal mélodique. Des compositions bien léchées (« North Star of Nija » est un petit bonbon), une alternance growls / voix claire Hetfieldienne du plus bel effet, des riffs bien tranchants et des mélodies omniprésentes. L'effet sur scène est le même que sur album : on retrouve cette lourdeur Gojirienne du son et ce soin apporté à la mélodie.
On avait évoqué leur dernier album dans la première Rubrique nécro' (voir ici) et je ne peux que vous inviter à aller découvrir le groupe et à aller les voir sur scène dès qu'ils reviendront. Un grand oui, tout simplement.
Setlist :
1. Vultures of North
2. North Star of Nija
3. Strangler
4. The Shadowing
5. Saw
Imminence
Avant ce soir, je n'avais jeté qu'une oreille très distraite au groupe. Il faut dire qu'il est difficile de s'enlever cette image d'un énième groupe de metalcore propret, dont on sait d'avance qu'il ne laissera pas une trace indélébile. Et après un peu plus de 30 minutes de show, c'est avec un sentiment mitigé qu'on quitte le set des Suédois. D'un côté, on se prend au jeu d'un metalcore pas trop mal fichu, hyper mélodique, énergique et qui ne surfe pas trop sur les clichés du genre. On ne retrouvera pas les sempiternelles pirouettes sur scène à chaque bass drop ou autres gimmicks qui donnent envie de s'enfoncer ses protections d'oreilles dans les yeux. D'un autre côté, la prestation du groupe n'est pas nécessairement des plus originales, même si les musiciens n'ont pas ménagé leurs efforts. « Ghost », « Chasing Shadows » et « Temptation », notamment, ont fait leur petit effet. Mais ce sentiment d'absence d'originalité n'est-il pas le constat que l'on peut faire de 95 % de la scène metalcore ? Au final, c'est donc un bon moment passé, mais qui ne laissera pas réellement un souvenir imperissable.
Setlist :
1. Ghost
2. The Sickness
3. Chasing Shadows
4. Paralyzed
5. Heavin in Hiding
6. Temptation
At the Gates
Lorsque l'on tire le bilan des groupes qui ont été les grands moteurs du death metal mélodique à la sauce Göteborg, il y a ceux qui ont fait évoluer leur musique vers des terrains plus mélodiques (comme la tête d'affiche du soir) et ceux qui sont restés à baigner dans leur son, avec parfois un succès tout relatif. At The Gates fait résolument partie de la seconde catégorie.
On est jamais surpris par les albums qu'ils sortent et encore moins par leurs prestations en live. C'est toujours massif, carré, souriant, enjoué et dynamique. Tomas Lindberg est égal à lui même : le plus heureux du monde sur les planches, à haranguer sans cesse la foule et à gueuler avec toute sa fougue malgré les années qui passent. Le professeur (son métier « principal » à côté de la musique) est dans la communication physique permanente et c'est un délice. D'autant plus quand le groupe nous concocte une setlist qui contient 8 titres sur 10 des deux albums que j'aime le plus du groupe : At War with Reality sorti en 2014 (« At War With Reality », « Heroes and Tombs » « Death and the Labyrinth » « The Night Eternal ») et le grand classique Slaughter of the Soul (« Blinded by Fear », « Cold » « Slaughter of the Soul » « Under a Serpent Sun »). Je me surprends même à aimer « To Drink From the Night Itself », tiré de l'album du même nom qui m'avait pourtant laissé de marbre à l'époque et que j'avais cruellement délaissé depuis lors.
Encore une belle prestation d'At the Gates. Zéro effet de surprise ; mais un groupe que je prends toujours plaisir à voir en salle. Le public parisien, bien plus dense pour cette prestation, commence déjà à donner de la voix et à occuper une sécurité très désorganisée. La bagarre bat son plein.
Setlist :
1. Spectre of Extinction
2. Slaughter Of The Soul
3. At War With Reality
4. To Drink From the Night Itself
5. Cold
6. Under A Serpent Sun
7. Heroes and Tombs
8. Death and the Labyrinth
9. Blinded By Fear
10. The Night Eternal
In Flames
Dès qu'on évoque le nom d'In Flames, les passions se déchaînent. Le débat sans fin du Old In Flames vs. New In Flames fait toujours rage ; mélange de gatekeeping, de constat évident d'un son qui dérive vers du trop mélodique, et d'attachement émotionnel à une musique passée que l'on refuse certainement égoïstement de voir évoluer. Quoi qu'il en soit, même si je n'ai globalement aimé aucun album depuis le délicieux Sounds of A Playground Fading sorti en 2011, je ne rate jamais une occasion de voir le groupe sur scène. Car c'est un groupe de live ; j'en suis convaincu. Au delà du plaisir que l'on peut avoir d'entendre telle ou telle pépite de sa discographie, In Flames ne m'a jamais déçu sur scène. Et ce soir ne va pas faire exception.
Cette qualité tient souvent à la prestation du groupe, mais également à la façon dont le show se déroule, comme lors de cette tournée. Un décorum assez simple avec une batterie et des claviers surélevés en fond de scène ; pas de backdrop ; des spots encagés de part et d'autre de la scène et un grand « repose-pied » en grillage tout le long, lequel recouvre strobos et autres lumières. Simple, efficace, permettant une réelle proximité avec le public.
Sans attendre la perfection absolue qu'avait été la tournée d'A Sense of Purpose (cette date au Zénith restera dans les annales), les lights ont également été excellentes ce soir, notamment en fin de set.
Mais la question qui se pose toujours avec In Flames ne porte pas tant sur les lights ou la qualité du son ; c'est plutôt : « alors, ils ont joué quoi ? ». Et, pour le coup, la setlist du soir fut bien raffinée. Alors certes, avec autant d'albums au compteur, tout le monde ne sera pas content. Soundtrack to Your Escape a encore été boudé à mon plus grand désarroi, pas de « Trigger », « Colony », « Jotun », « Resin » ou autres vieilleries qui remportent toujours les suffrages à l'applaudimètre. On pourra également regretter que le groupe joue encore et toujours « Only for the Weak » que l'on a bien trop entendu. Mais, globalement, le groupe a su nous offrir un beau panorama de sa discographie en réussisant le pari délicat de ne pas rendre floue les transitions entre les premiers albums et les plus récents.
Et cette clarté a surement été facilitée par le constat que les nouveaux titres sonnent vraiment bien en live. « The Great Deceiver », venue ouvrir le concert, est phénomènale en live. Il en va de même de « Foregone Pt. 1 » ; seule « State of Slow Decay » me semble un ton en dessous. Et si vous avez peur des refrains très mélodiques un peu mielleux, pas d'inquiétude ! Anders les chante plutôt en growls qu'en voix claire. Peu importe les raisons (artistiques ou pratiques), ça me plait davantage de cette façon.
Et que dire de l'enchainement du démon : « Pinball Map », « Cloud Connected », « Behind Space », « Graveland » (!!!), « The Hive » et « Scorn » ? Quelques titres moins fréquents, quelques habitués des setlists, mais un unique point commun : que des bangers. On est dans les cordes tout le long, surtout que le groupe opte pour laisser assez peu de temps entre chaque titre, sauf lorsqu'Anders décide de prendre la parole pour digresser, comme à son habitude. Enfin, quand il est en mesure de le faire, le public l'empêchant à plusieurs reprises de parler en scandant le nom du groupe à tue-tête, sous le regard médusé des six compères (le groupe continue de tourner avec un claviériste) devant tant de passion. Les titres défilent à toute vitesse et on est saisi par l'atmosphère du show et une fluidité retrouvée.
Et même si cela me fait un peu mal de l'admettre, moi qui ait longtemps défendu Daniel Svensson (notamment pour son travail sur Soundtrack to Your Escape), cette énergie et cette fluidité tient en partie aux nouvelles recrues du groupe. Des Américains venus en masse qui ne remettent pas en cause l'alchimie originelle. Tanner est vraiment massif derrière les futs et Chris Broderick est excellent. Je suis même ravi de voir que ce dernier n'a pas qu'un rôle de faire-valoir sur scène (il l'est surement en studio, malheureusement, Bjorn et Anders composant tout) puisqu'il joue quelques soli, volés pour l'occasion à Bjorn. Seul le nouveau bassiste est un peu en retrait, bien que ses backing vocaux soient parfois les bienvenus.
En somme, la mayonnaise prend. On regrettera toujours la bonhomie de Peter ou l'immense talent de Jesper, mais c'est comme ça. Surtout, alors que je trouve que l'américanisation du groupe a pu avoir un impact sur le son des albums, c'est indolore sur scène. Cela sent encore bon le death mélo à l'ancienne, et c'est tout ce que l'on demande.
La fin de la setlist n'est pas en reste avec, en surprise du soir, « Wallflower » tirée de l'album Battles. Une franche réussite en live, qui l'eut cru ! Mais la plus grosse surprise est peut-être l'ambiance dans ce Bataclan. Pas officiellement complet mais très rempli, je n'avais rarement vu un pit aussi actif sur du In Flames. Le groupe n'a jamais été réputé pour être un manieur de foules hormis le craquage de genoux règlementaire sur « Only for the Weak ». La dynamique a été toute autre ce soir, avec un public hyper participatif et très réactif, sur les vieux titres comme les nouveaux. Comme toujours, l'introduction de « The Mirror's Truth » fait partie des moments forts de la soirée avec quelques manchades qui partent ici ou là.
Et c'est avec un sourire bien grand que l'on quitte le Bataclan après la toujours aussi pleine d'émotions « Take This Life ». Car le constat est implacable : même si musicalement In Flames s'éloigne de plus en plus des standards qui ont fait de ce groupe l'un de mes préférés, j'ai toujours un plaisir incommensurable à le voir en live. Et il me le rend bien : une setlist vraiment bien pensée, lights excellentes, son correct, groupe en forme et très propre. Quel putain de plaisir.
Setlist :
1. The Great Deceiver
2. Pinball Map
3. Cloud Connected
4. Behind Space
5. Graveland
6. The Hive
7. Scorn
8. Only for the Weak
9. Leeches
10. Foregone Pt. 1
11. Wallflower
12. State of Slow Decay
13. Alias
14. The Mirror's Truth
15. I Am Above
16. Take This Life
Merci à In Flames, à Century Media, à Live Nation, au Bataclan et à Valérie pour l'invitation, le pass photo et l'opportunité d'interviewer Anders Fridèn.