Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Alors qu'ils sortent quand même leur quatrième album, les Polonais de Sunnata semblent toujours autant attachés à leur indépendance : comme ses prédécesseurs, Burning in Heaven, Melting on Earth a été produit sans le soutien d'un label. Et clairement, il s'agit ici d'un choix, les sorties précédentes du groupes leur auraient forcément, de par leurs qualités, ouvert bien des portes. Très doom/stoner à ses débuts, Sunnata a incorporé au fil des albums des touches post metal, proposant ainsi une musique toujours plus riche. Ce nouvel album continue sur cette lancée, avec encore une fois de très belles idées.
La pochette, tout d'abord. Dans des styles toujours très différents, les artworks de Sunnata sont tous réussis. Pour Burning in Heaven, Melting on Earth, la sobriété le dispute à l'intensité avec cette photographie aux teintes tranchées. Et côté musique, on s'approche donc encore plus des terres fertiles du post metal. Dès les premières notes de basses de Crows, on sent que le son a de nouveau changé : les derniers grumeaux encore présents sur Outlands, qui rappelait encore clairement les origines doom du groupe, ont laissé place à un son rond et assez clair, confortable. Les lignes de guitares aériennes et enveloppantes sont plus nombreuses, très réussies dans l'ensemble, porteuses d'atmosphères belles et un peu froides, un peu distantes. L'envie de saisir la source de cette beauté nous prend, mais plus l'on s'approche plus elle s'éloigne et soudainement, nous voilà face à un mur. Parce que oui, Sunnata continue d'explorer des sonorités plus brutes et coléreuses, sortant la distortion aux moments opportuns, donnant de l'épaisseur à sa musique. Les guitares saturées se situent quelque part entre celles de Cult of Luna (pour la lourdeur) et celles de When Icarus Fall (pour l'aspect plus hypnotique). Tout au long des six titres de Burning in Heaven, Melting on Earth, Sunnata va donc nous amener entre des ambiances plus légères, avec basse accueillante et guitares tranquilles, et ces moments plus abrupts et sauvages.
En mettant en place un aspect rituel à sa musique, avec une utilisation de la batterie comme percussions tribales et un chant clair parfois incantatoire et mystique, Sunnata développe une atmosphère qui éloigne encore ce nouvel album des précédents. Et cette capacité à se renouveler (et à le faire avec talent) est clairement le point fort du groupe. Burning in Heaven, Melting on Earth, malgré des titres relativement longs et peu linéaires, s'écoute très facilement, tout semble couler sans forcer. Un titre comme God Emperor of Dune, avec ses presque neuf minutes, défile sans même que l'on s'en aperçoive, ouvrant des paysages sereins et calmes. A Million Lives, qui arrive juste après, plus nerveux, avec une rythmique plus dense et marquée, prolonge le voyage tout en marquant une rupture. C'est avec ce genre d'idée, cette finesse dans la construction et la progression (au sein d'un même titre aussi bien que sur l'album en entier) que Sunnata nous embarque dans son périple. Et l'ensemble est porté par un chant lui aussi brillant de maîtrise : doux, parfois triste, lorsqu'il est clair, il devient volontiers menaçant et empli d'un certain dégoût lorsque hurlé.
Prenant le risque d'arpenter des chemins un peu différents à chaque nouvel album, Sunnata semble aimer se mettre en danger. Ce qui est sûr, c'est que chaque nouvel essai dans une direction est réussi. Burning in Heaven, Melting on Earth ne déroge pas à la règle : du travail minutieux sur les sons de guitare (écoutez Black Serpent pour vous en convaincre) à la construction globale de son album, Sunnata démontre une fois encore son talent.
Tracklist de Burning in Heaven, Melting on Earth :
01.Crows
02.God Emperor of Dune
03.A Million Lives
04.Black Serpent
05.Völva (The Seeress)
06.Way Out