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jeudi 10 octobre 2024

Festival Les Lunatiques 2024

Espace Le Goffic - Pacé

Dolorès

Non.

Entre musiques hors-normes et éclectisme poussé, les Lunatiques font clairement partie des festivals dont le concept me parle beaucoup. Bien que j'apprécie les festivals de niche, où on vient pour n'entendre qu'un style bien précis et collègues affiliés, le format musiques modernes et étonnantes de tous horizons est clairement là où je me sens le mieux. En ligne de mire, des festivals comme le Rock in Bourlon pour n'en citer qu'un. Ici aussi, black metal côtoie doom et rock progressif, mais aussi des scènes plus accessibles (et pas moins sulfureuses). D'une certaine manière, la facette moderne & hipster se frotte à une frange plus old school. On valse entre différentes atmosphères, ce qui aide clairement à ne pas se lasser de ce qu'on vient de voir et, clairement, cela correspond aussi à ma manière de consommer de la musique à domicile en faisant tourner les styles relativement souvent. A cela s'ajoutent ici des sets « courts » : 40 à 50 minutes pour tout le monde.

Si, sur le papier, je sentais que j'allais m'y plaire, la pratique vient clairement valider la théorie. Présente uniquement le samedi, je dois dire que le lieu, type MJC près de Rennes, est globalement agréable. Les bénévoles semblent s'y plaire, l'espace exposants comporte une variété agréable de stands qui attirent l’œil et les choix de boissons & nourriture sont satisfaisants ! Un petit bémol, bien sûr, pour la différence nette de capacité et de qualité entre la grande salle (Jupiter) et la petite (Pluton), cette dernière étant plus une salle random aménagée en petite scène qu'autre chose, bien qu'elle soit savamment décorée pour en faire un espace hypnotique !
 



Photos : Aurélie P (@aurelie.p_photography)
 

Par avance, je m'excuse de ne pouvoir parler de tous les groupes que je pensais voir ce jour-là car des problèmes de santé m'ont empêchée de profiter pleinement du festival et de ce qu'il avait à proposer. A charge de revanche, une prochaine fois, avec une programmation encore plus déroutante ? En attendant, voici les divers concerts vécus ce samedi d'octobre.

 

Black Bile


Photos : Nolann Jeanneau (@the.grand.chaman)

Déjà vus plusieurs fois, je ne me lasse pourtant pas de voir Black Bile en concert. Même lorsque le son est moins bon, le groupe sait tirer son épingle du jeu, alors que dire lorsque le son et la salle sont adaptés ? Alors que les Lorientais ont depuis peu un nouveau membre à la guitare, on voit que cela n'affecte en rien la qualité des prestations du groupe, si ce n'est l'inverse. On se surprend à se laisser couler sans encombre dans la musique post-metal, doom, qui tourne parfois au black ou à une forme épurée qui invite à la contemplation pure.

Toutefois, c'est bien observer la vocaliste et sa troublante prestance prendre la salle et l'écraser entre ses doigts qui me fascine à chaque fois. Ses différents chants maîtrisés chargent un nouvel orage menaçant à chaque nouveau titre joué et c'est un plaisir de voir la tempête se déchaîner. Avec une mention spéciale à « Antephialtes » et « Ephialtes » qui sont toujours des coups de cœur absolus. Un groupe que je serais heureuse de voir aller loin !
 

Orbel



Photos : Nolann Jeanneau (@the.grand.chaman)

Le quatuor basque est clairement le groupe que j'attendais le plus du festival. Après avoir malheureusement loupé leur dernier passage à Nantes, je suis heureuse de découvrir enfin en live les atmosphères mystérieuses et les polyphonies d'Orbel. Tout y est : les rythmiques qui invitent à la transe, les notes de guitare qui planent, les mains qui accablent le synthé et l'harmonium indien, mais surtout les deux chants des vocalistes qui s'entremêlent et se renvoient la balle. Tout cela surmonté d'un charisme incroyable de le part des quatre membres !

Alors que, semble-t-il, une partie de l'équipe est bien malade ce jour-là, l'intention est là et l'expérience est totale. La sorcellerie d'Orbel embrume la salle et il est difficile d'y échapper. Quel bonheur de voir prendre vie, face à moi, les titres de l'album Lur Hezea, qui vont du martèlement solennel implacable à des chaleurs douces et suffocantes à la fois. Finir sur le chaos sublime d' « Irentsi » était par ailleurs une fermeture idéale à ce moment hors du temps.
 

Aetheria Conscientia



Photos : Aurélie P (@aurelie.p_photography)

 

Toujours difficile d'écrire sur les groupes de ses amis. Certain(e)s savent que j'apparais, le temps de quelques lignes vocales, sur le dernier album d'Aetheria Conscientia. Cependant, je ne chante pas sur scène et il se trouve que le groupe nantais a sorti l'un des meilleurs albums que j'aie pu écouter cette année. C'est d'ailleurs celui-là qui est joué, à l'exception d'un seul titre. La setlist est la même qu'au Frozen Fest où j'avais déjà eu l'occasion de voir le projet il y a quelques mois, reprendre vie sur scène, après quelques années de pause et de changement de line-up.

Malheureusement, la petite salle ne permet pas d'entendre toutes les subtilités du projet et c'est bien dommage car dans du black prog à plusieurs chants, samples et percussions, deux guitares... On aimerait tout entendre parfaitement. En cela, la prestation souffre de la comparaison avec le concert que j'ai pu voir d'eux en juin dernier. Si ce n'est qu'on entend clairement pas assez les deux guitares, l'énergie est telle que le message passe quand même. La salle devient vite un cocon-rouleau-compresseur et le public semble clairement adhérer à l'univers étrange, violent, mais qui ne manque pas de finesse, d'Aetheria Conscientia.

 

Green Milk from the Planet Orange



Photos : Nolann Jeanneau (@the.grand.chaman)

Dans tout bon festival, il faut une découverte d'un groupe qu'on n'avait pas du tout prévu d'aller voir et qui, pourtant, nous propulse ailleurs. Si j'écoute du rock prog, je dois dire que je suis clairement une enfant dans la cour des grands dès que tout devient vraiment complexe. Ici, je ne pensais pas forcément adhérer à la musique complètement hallucinée du trio. Pourtant, tout se construit tranquillement, ou moins tranquillement, ce qui m'étonne moins d'ailleurs, maintenant que j'ai lu que les membres venaient de la scène grindcore japonaise... Clairement, le set est explosif au possible avec des parties de guitare, basse et batterie absolument hors norme.

Une ambiance vraiment spéciale s'installe alors que tout le monde semble être monté dans le wagon de ce circuit infernal qui ne semble jamais s'arrêter. Je ne regrette pas d'avoir été devant, car les musiciens sont assis et ne se lèvent (debout sur leur chaise, évidemment) qu'à de rares occasions. Ils semblent se connaître par cœur et une atmosphère de confiance et d'intimité entre les trois silhouettes fait plaisir à voir. Quelques soucis de son, côté guitare, n'ont pas tant que ça altéré la qualité de la prestation et l'énergie absolument débordante de GMFTPO que je reverrais en live avec un immense plaisir.
 

Gravekvlt



Photos : Aurélie P (@aurelie.p_photography)

Clairement, le même souci de biais se pose avec Gravekvlt qu'avec Aetheria Conscientia. Il faut dire que les copains sont à l'affiche aujourd'hui, pas étonnant quand on voit que l'écurie Frozen Records est sacrément bien représentée (si on compte Black Bile & Kibosh avec eux !).

Toutefois, j'aurais du mal à imaginer dire du mal de Gravekvlt en concert tant le quatuor est superbement rodé depuis quelques temps. Pour les avoir vus dans des grandes salles, dans des petites salles, ou en open air, je dois dire que leur « Evil Speed Metal Punk » prend toujours. La formule semble d'ailleurs trouver son public : je n'ai jamais croisé autant de t-shirts Gravekvlt qu'à cet événement ! Ainsi, il est au rendez-vous malgré l'heure tardive et il enfile ses lunettes de soleil en fosse, en clin-d’œil aux musiciens qui jouent sur cette facette. Malgré un léger souci de guitare, le set se déroule parfaitement, avec un panel de titres du premier et du second album, à paraître d'ici quelques semaines. Pas de temps mort, en tout cas, et pas le temps de souffler entre les morceaux puisque tout s'enchaîne avec une grande fluidité, tant grâce à l'énergie que le groupe dévoile qu'à travers le jeu de scène toujours impeccablement calibré. A guetter en live près de chez vous !

 

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Un grand merci aux Lunatiques pour l'invitation,
aux groupes, aux techniciens et aux bénévoles

ainsi qu'à Aurélie & Nolann pour les photos.