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Une sorte d'état second se substitue à ma conscience quotidienne, comme propulsé dans un univers identique à la grande bleue, mais terriblement spectral, peuplé d'âmes errantes, holographiques, dans une atmosphère glaciale, baignant dans un contexte grisâtre et inquiétant. Désorienté, plus vraiment de repères mais une inexplicable sérénité m'envahit, j'avance.
Depuis l'horizon, des sons me parviennent, écorchés, grinçants, bancals. Dans une dissonance lointaine et répétitive, des plaintes de guitares animées par des mains invisibles se perdent dans un immense écho, alors que, noyée dans la masse, une voix éraillée se manifeste, fantomatique, semblable à un murmure.
Aussi cauchemardesque que soit ce contexte, j'avance vers le lointain. Et à mesure que je progresse dans mon périple, ces complaintes presque tribales trouvent grâce à mes oreilles et, paradoxalement, m'effraient autant qu'elles me réconfortent, perdu que je suis dans cette immensité inconnue et gelée.
Ces oscillations de notes, en sons et en harmonies, contradictoires, anti-musicales parfois, m'enveloppent dans une sphère dense, vers une lumière dont j'ignore si elle existe vraiment, si elle n'est pas le fruit de quelques artifices instrumentaux ingénieux, comme pour me conforter dans l'idée de me croire la tête dans les nuages, alors que je pose sans le savoir un premier pied dans la tombe.
La soudaine brutalité, véloce, qui parfois jaillit, semble-t-il, des entrailles de la terre, au cœur même du sinistre paysage dans lequel je me trouve égaré, contraste violemment avec les mélodies aux langueurs hypnotiques et désespérément belles qui caractérisent la bande son de mon expérience. Plus troublant encore, sur plus de dix minutes, les sons, les rythmes éthérés et lancinants se répètent inlassablement, d'une beauté enivrante.
La fin est proche, je le sens, à mesure que cette ritournelle se meurt dans le néant, que le paysage se trouble et que je regagne enfin la lumière, mon esprit reprend contact avec le monde réel.
Le monde vivant.
Puis, le silence.
Le réveil est douloureux, la ballade fût autant déstabilisante qu'extraordinaire. Cette expérience, extra-sensorielle, que l'on ne peut tout simplement pas commenter, qu'il faut vivre, et pleinement, c'est Blut Aus Nord.
C'est The Work wich transforms God, qui définitivement pénètre le cerveau, exalte les sensations, crée un univers palpable, et prouve ainsi que l'esprit peut transformer la matière. Ce genre d'ambiance dont l'écoute vous plonge malgré vous dans un état d'hypnose, quelque part entre mélancolie profonde et contemplation béate. Un monde entier se meut dans cette œuvre qui dépasse la notion de musique, ou du moins qui en a tellement saisi la quintessence, qu'elle en devient plus imagée et plus réelle que jamais.
Chapeau bas messieurs.
NB : Une réédition du disque est disponible depuis 2005 chez Candlelight Records accompagnée d'un second disque répondant au nom de Thematic Emanation of Archetypal Multiplicity
1. End
2. The Choir of the Dead
3. Axis
4. The Fall
5. Metamorphosis
6. The Supreme Abstract
7. Our Blessed Frozen Cells
8. Devilish Essence
9. The Howling of God
10. Inner Mental Cage
11. Density
12. Procession of the Dead Clowns