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Quatrième album dans la balance des récents justiciers de l’ordre public, … And Justice For All marque un tournant dans la carrière du groupe, lâché en terrain hostile face à ses peurs d’antan et à des tourments que la formation a su admirablement dominer et maîtriser.
L’envie de tout plaquer en réponse à la mort du bassiste Cliff Burton deux ans auparavant, peur de la redite sur les précédents succès Ride The Lightning ou l’idolâtré Master Of Puppets, n’auront eu raison d’un album édifié dans la douleur, mais largement encensé par les indicateurs de l’époque et la presse musicale.
Nouveau loup dans la bergerie - ayant toutefois scindé les fans, car anti-commercial et résolument plus âpre et noir, … And Justice For All repousse malgré tout les frontières du Thrash, diffuse de nouveaux horizons et ne se contente plus de récurer les vieux pots d’un style essoufflé. Formidable injection d’insuline sur le paysage rock et métal, bouffé d’air frais avec l’arrivée du sang neuf Jason Newsted, les Four Horsemen creusent un peu plus le sillon d’avec la nouvelle vague du heavy Metal en maîtrisant leur sujet avec un opus savant, complexe et à la rigueur militaire.
Jamais aucun groupe n’aura rendu aussi bien justice à un membre disparu et effacé d’un revers de manche les quelques années passés en sa compagnie. Accouché dans la douleur, le saisissant « Blackened » frappe sans tarder en imposant près de 7 minutes d’une rugosité et d’une noirceur encore trop peu méconnue. Rythmique heurtée, hymne revendicatif sous les poussoirs de Lars Ulrich, solos efficaces et nets d’Hammett, la nouvelle mouture de Metallica a du bon. Très peu dans l’air du temps, n’ayant en aucun cas la tête à en faire des caisses, les nouveaux arbitres du Thrash suivent leurs instincts sauvages quittent à se mettre à dos leurs principaux fans sur le titre éponyme ou sur « Dyers Eve ». Le quartet s’asseyant majoritairement à cru sur des plans de 5 à 10 minutes, plus rudes et secs, où les peaux de Lars Ulrich subissent sévices et tortures.
Metallica avance en zone ennemie. Mobile sur « The Shortest Straw », ou encore à pas feutrés sur « Eye of The Beholder », le groupe se montre sous des aspects révolutionnaires et sous des facette extrêmement rapides (comme en atteste les solos exécutés ou les riffs fortins de James Hetfield).
Sans compter sur le cantique « One », morceau au cœur de l’album à la diversité plus que prouvée. Les notes pleuvent, les cordes saignent sous des airs de guérilla improvisée, issue de l’œuvre littéraire de Johnny s’en va t-en guerre. Même la basse y va de sa touche personnelle, trop longtemps laissée en arrière-plan et quasi-inaudible sur l’ensemble de l’album. Peur du petit nouveau Newsted, problème de mixage, chacun ira de son commentaire, mais tous noteront cette lourde faille dans un album pourtant jusqu’ici sans faute. « Harvester of Sorrow », bien que déjà bien puissant aurait notamment gagné en visibilité avec un peu plus de diversité et moins de linéarité. Même constat pour « The Frayed of Sanity » campé sur de saines positions, mais finalement pas aussi combative que les débuts incandescents des premiers projectiles lancés en reconnaissance. Quelques morceaux bien linéaires, entachant l’efficacité et la fraîcheur de ce requiem.
Reste que la fin de l’album se termine de fort belle manière. Outre l’excellent « Dyers Eve », la manufacture réussit à recoller les morceaux sur « To Live Is To Die », hommage cinglant au regretté Cliff et titre instrumental réconciliant puristes et nouveaux admirateurs.
Véritable tournant dans la discographie de Metallica, … And Justice for all reste un pilier de thrash antique, accoudé au comptoir d’une entreprise ayant su se régénérer, voir trouver assez d’humilité (profitons en !) et de hargne pour s’échapper de son vase clos. Un renouveau que l’on salue bien bas avec des titres abrupts, plus crus, bien agencés et avec assez de hargne pour clouer au sol les quelques sceptiques. Bien sûr, le réquisitoire n’est pas parfait et laisse encore quelques failles dans la prise de parole, mais Metallica prouve une nouvelle fois qu’ils sont en mesure de défendre avec honneur et franchise leurs affaires.
1 Blackened
2 And Justice For All
3 Eye Of The Beholder
4 One
5 The Shortest Straw
6 Harvester Of Sorrow
7 The Frayed Ends Of Sanity
8 To Live Is To Die
9 Dyers Eve