Brutal Assault 2017 - Jour 1
Josefov Fortress - Jaroměř
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Nostalmaniac : Après l'édition 2015, Horns Up est de retour au Brutal Assault en Tchéquie ! Dans mon cas, c'est la première fois et j'avais de grandes attentes nourries par de nombreux reports enthousiastes. Un festival plus accessible sans les dérives des grosses machines européennes. Et ça se mérite car en partant du sud-ouest de la Belgique, il aura fallu quasiment treize heures de route pour arriver à Jaroměř (non sans s'arréter dans la splendide capitale tchèque).
Vingt-deuxième édition déjà pour le BA qui aura connu pas mal de lieux différents avant de s'établir à l'imposante forteresse de Josefov, en Bohème. Un endroit parfait pour un festival metal, d'autant plus avec de telles programmations. Cette année n'est pas épargnée avec les débuts très attendus en festival de la gloire nationale Master's Hammer, le show spécial « Anthems to the Welkin at Dusk » d'Emperor, les concerts d'Opeth, Devin Townsend Project, Carcass (qui remplace Morbid Angel) et Demolition Hammer mais aussi les adieux live de Swans et de Dillinger Escape Plan. La France est bien représentée avec la présence d'Igorrr, The Great Old Ones, Birds in Row, Monolithe, Svart Crown (en main stage !) ou encore Treha Sektori soit plusieurs facettes de la scène extrême hexagonale.
On ne va pas se mentir, ce qui est attractif avec un tel festival, c'est surtout le côté financier. Les boissons sont à un prix dérisoire comparé à nos standards (un peu plus d'1€10 le demi litre de bière !) et la nourriture aussi avec, il faut le souligner, une Vegan street très fournie et diversifiée. Et sinon, énormément de stands bouffes divers et variés (de la cusine traditionnelle tchèque avec ses fritures en passant par le stand mongol - bien que je ne sois pas sûr qu'il y ait beaucoup de scampis en Mongolie - à la... frite belge et aux burgers tape-à-l'oeil). Le système cashless étendu cette année à tout le festival (même au metal market ou à l'entrée des catacombes) est très bien fait. Il y a de nombreux points "top-up" pour recharger son crédit (en cash ou par carte) sur le site et je n'ai remarqué aucun bug avec ce système qui m'inquiétait mais qui se révèle aussi maîtrisé que pratique.
J'en reparlerai plus longuement mais le cinéma est vraiment une très bonne idée même s'il est difficile de se dégager un créneau avec une programmation musicale aussi dense, mais on pouvait y voir des films tels que Christine, El Topo, Barb Wire, Toxic Avenger 2, The Keep, L'Exorciste 2, [Rec] ou encore le docu sur la carrière du groupe tchèque Malignant Tumour.
Le premier jour, l'entrée sur le site est un peu compliquée sous la canicule et il fallait être patient. A la fouille, c'est aléatoire. Je pourrai passer aisément avec des boites de thon dans mon sac ou un mystérieux boulon de la forteresse et l'autre quasiment me faire refouler avec ma lampe torche en plastique.
Gros fail, le programme et le running order fournis à l'entrée, contradictoires et bourré d'erreurs (quoi, King Dude est prévu ? Uada joue deux fois ?). Pour leur défense, les organisateurs ont dû faire face à des annulations, comme celle de Walls of Jericho peu avant le festival.
La première journée commence donc fort avec un soleil caniculaire et le programme est déjà chargé sur les quatre scènes (les deux mainstage Jägermeister/Sea Shepherd, la Metalgate et l'Oriental plus intimiste) : The Lurking Fear, Wintersun, Gorguts, Fleshgod Apocalypse, Boris, Cough, Metal Church, Macabre, Batushka, Master's Hammer, Wolves in the Throne Room, etc.
Place à nos récits...
The Lurking Fear
Sea Shepherd
15:05
Nostalmaniac : J'inaugure mon festival avec la prestation de The Lurking Fear, nouveau supergroupe suédois formé autour du vocaliste Tomas Lindberg (At the Gates) avec ses compères de Skitsystem, ATG et Disfear (Andreas "Dread" Axelsson à la basse, le guitariste Jonas Stålhammar et et le batteur Adrian Erlandsson). Plus habitué à être en tête d'affiche, il s'en amuse très vite en affirmant au public qu'il jouera une heure. Pas cette fois, Tomas ! Il faut savoir qu'il s'agit de leur premier concert à l'étranger. Musicalement, c'est clairement un bain de jouvence old school pour ses membres. A mi-chemin entre Death des cavernes et crust bien sale. On ressent sur scène toute leur expérience mais comme souvent chez les supergroupes, il manque ce petit quelque chose qui fait la différence. Hélas, les morceaux s'enchaînent aussi vite qu'ils s'oublient. Il y a bien ci et là un petit solo bien dément mais rien qui rende un morceau vraiment mémorable. Le concert n'est pas pour autant ennuyeux grâce à la conviction palpable de Lindberg qui sait comment faire bouger un public. Un poil tôt sans doute. Je suis quand même curieux de voir comment le projet va évoluer et cohabiter avec At The Gates dont le retour semble confirmé pour 2018.
Fleshgod Apocalypse
Jägermeister
15:45
Florent : C'est presque avec émotion que je me pose devant ce premier concert du Brutal Assault. Pourquoi émotion? Parce qu'après un road-trip depuis Bruxelles avec escale à Prague pour une nuit, une expédition chaotique pour trouver un spot de tente et une première soirée bien arrosée, c'est un vrai sentiment de félicité qui m'emplit d'être dans l'enceinte de cette forteresse de Josefov à Jaromer, prêt à vraiment lancer mon festival. J'ai peut-être l'air d'en faire des tonnes, mais même pas. Puis, en faire des tonnes, c'est aussi un peu dans le thème des Italiens de Fleshgod Apocalypse, dont j'ai entendu tout et son contraire au sujet des prestations live mais qui m'a foutu une solide claque avec son dernier opus King. La scène et les musiciens sont d'ailleurs aux couleurs de l'album, tenues typée XVIIIe et chandeliers à l'appui. Ca a de la gueule et, surtout, ça renforce encore l'emphase de la musique qui, dès In Aeternum, met les points sur les i: c'est carré de chez carré, même dans le chef du chant clair de Paolo Rossi (basse). Le son met un petit temps à se stabiliser mais s'avérera au final tout ce qu'il y a de plus potable, surtout pour un style aussi foutoir que celui de Fleshgod, dont les albums avant King m'ont toujours paru peu digestes. Ca tombe bien: ce dernier opus sera presque le seul sur lequel se basera la setlist à l'exception du classique The Violation qui fait le taf. Pour le reste, je retiendrai surtout deux grands moments: Cold As Perfection et Syphillis, illuminés par le chant lyrique exceptionnel de Veronica Bordacchini, dont j'ignorais qu'elle accompagnait le groupe sur scène. Un concert très propre, sans être totalement mémorable non plus.
Nostalmaniac : Soyons clairs, le Sympho Death mélo développé par Fleshgod Apocalypse m'a toujours laissé froid MAIS leur réputation live m'a rendu assez curieux. Difficile de passer à côté de la scénographie et des classieux costumes arborés par les Italiens et inspirés du XVIIIème siècle ou de l'artwork de leur dernier album "King" en backdrop mais... je m'ennuie très vite. J'ai l'impression d'assister à quelque chose de très artificiel. Carré mais artificiel. Tout est assez prévisible et même si la chanteuse lyrique a du coffre et contribue à la théâtralité, je ne peux pas m'empêcher de trouver ça fade voire à certains moments carrément agaçant. Des orchestrations symphoniques grandiloquentes qui n'arrivent à ne mettre en valeur aucun riff ou solo marquant. Et je ne suis pas réfractaire au Death mélodique, loin de là ! Les compos fourmillent d'idées mais c'est un fourre-tout vite décousu pour ma part malgré un batteur d'exception, Francesco Paoli. Je peux comprendre ce qu'on peut apprécier chez FA mais en live ça tourne en rond si on se focalise sur la musique comme j'ai tenté de le faire. Après, pour un concert d'après-midi le public est déjà très réceptif.
The Amity Affliction
Sea Shepherd
16:25
Florent : Bon, voilà, c'est le moment où je me révèle aux yeux de tous comme le fragile de la bande : oui, j'ai été le seul à aller voir les mélocoreux de The Amity Affliction. C'est aussi ce qui me plaît particulièrement dans l'affiche de ce Brutal Assault : la possibilité, sur une journée, d'enchaîner les concerts extrêmes et pointus avec des moments de plaisir coupable (et j'en aurai d'autres sur le week-end). Quoique, coupable? Même pas tant j'assume trouver génial le talent pour les mélodies accrocheuses qu'ont les Australiens de TAA. Leur dernier album, This Could Be Heartbreak, est un parfait condensé de ce qui me plaît dans le core mélodique - des refrains pop sucrés, des mélodies mémorables, un chant screamé à des années-lumière du deathcore qui me saoule tant. Bref, de la musique de gros fragile et j'adore ça. Dès I Bring the Weather with me, titre d'ouverture du dernier opus, j'ai la banane et tout le public aussi. Sur scène, c'est du cliché à la pelle : le bassiste et chanteur voix claire Ahren Stringer (qui assure très bien ses parties) avec ses tatouages dans le cou et son air de beau gosse émo, le hurleur Joel Birch et son attitude qui condense toutes les idées reçues sur les chanteurs de metalcore (air torturé, casquette, et vas-y que je me tire le t-shirt et que je me mets le doigt sur la tempe), et bien sûr la musique (ce All Fucked Up, ballade plutôt touchante sur le thème du suicide - cliché certes mais dont on n'a pas forcément envie de rire connaissant les soucis de dépression du chanteur). Reste que le tout est bien fait et que c'est une vraie ribambelle de tubes avec en highlight les énormes Open Letter qui se place en deuxième dans le set, Pittsburgh et Don't Lean Me et ses "let the ocean take me" tirés de l'album du même nom. Le concert passe même à une vitesse folle et This Could Be Heartbreak et son chant clair quasi pop-punk sonne la fin de la récré sans même que je m'en rende compte. Je suis un gosse heureux.
Gorguts
Jägermeister
17:10
Sleap : Cette année, cela commence tout en douceur pour moi, avec seulement trois groupes qui m’intéressent le premier jour. Gorguts est de ceux-là (bien que j’aie déjà pu voir le groupe plusieurs fois). Il s’agit de la tête de file d’une des écoles les plus atypiques de la scène Death technique, et c’est toujours un plaisir de contempler les musiciens en live.
Malheureusement, les conditions ne seront pas optimales pour mon premier concert de la journée. Dès l’ouverture sur From Wisdom to Hate, la plupart des parties de guitare sonnent complètement étouffées. Et malgré une légère amélioration sur les deux derniers titres du concert (extraits de Colored Sands), le son reste globalement assez mauvais. De plus, le public est une fois encore composé de Jean-Michel Métale qui commencent à mosher et hurler dès qu’ils entendent un passage de blast. Et pour couronner le tout, Nostalgia – l’un de mes morceaux préférés du groupe – est raccourci lors de l’interprétation d’aujourd’hui.
Je ne sais pas si c'est le t-shirt Ulcerate, la barbe qui a poussé ou les lunettes aviator, mais Luc Lemay a encore plus la classe que d'habitude. Mais cela ne m'aidera pas beaucoup à apprécier le show... Vous l’aurez compris, ce n’est clairement pas mon meilleur concert de Gorguts à ce jour. Et pas la meilleure manière de débuter le festival…
Root
Sea Shepherd
18:00
Nostalmaniac : Plutôt rare dans nos contrées, la bande à Big Boss ne l'est pas du tout au Brutal Assault. Bien sûr, le groupe joue à la maison mais leur relation avec le festival est plutôt fusionnelle avec de nombreuses apparitions (même en guest, Big Boss avait rejoint sur scène Behemoth en 2008). Cette année, en plus du show de Root, il se produit également en solo le jour d'après à l'Oriental Stage.
A l'instar de Mortuary Drape et Mystifier, Root est un groupe à part de la scène Black Metal. Vraiment à part. D'abord suivant sagement les pas de Venom et Bathory, le combo tchèque a développé sa propre identité et son propre son. Ce proto-Black Metal heavylisé avec un frontman totalement possédé aux airs de Anton LaVey (et c'est d'autant plus vrai depuis qu'il est sexagénaire). Big Boss (de son vrai nom Jiří Valter) est le dernier rescapé de la formation originelle qui a sorti des albums mythiques encore aujourd'hui méconnus, comme « Zjevení » (1990) et « Hell Symphony » (1991). Pour bien le faire comprendre, en Belgique on a « Prophecies of Pagan Fire » d'Enthroned et « The Diabolic Serenades » d'Ancient Rites. Les Blackeux Tchèques ont « Ritual » de Master's Hammer (on en reparlera, tiens...) et « Zjevení » de Root. "Píseň pro Satana" n'a pas été repris par hasard en 2001 par Nargaroth dans le fameux « Black Metal ist Krieg ». C'est un hymne qui les a grandement influencés... Je m'attendais donc à un grand moment d'un groupe "culte" et je ne suis pas déçu. Scéniquement, la "jeune" garde (le lineup est plus ou moins stabilisé depuis 2010) n'est pas là pour dépanner. On ressent une véritable cohésion. Au centre de l'attention, Big Boss attire tous les regards. A 65 ans, il en impose par sa présence (et ce vrai faux tatouage de veines noires (?) sur le visage) mais aussi par sa prestance de véritable gourou avec sa canne. Les classiques ("Leviathan", "Píseň pro Satana", "666") sont exécutés avec une ferveur contagieuse (ce refrain vicieux 666 je 666). Jan Konečný est un sacré guitariste qui fixe le public avec un regard froid. Petit bémol pour les non-Tchèques, les interventions/blagues de Big Boss entre les morceaux (je crois avoir juste compris qu'à un moment il s'en prenait aux nazis et aux pédophiles) mais ça n'entache pas leur concert. Toujours très solides, ils mériteraient un peu plus de reconnaissance en dehors de leurs frontières. A quand un fest français ou belge sur le coup ?
Wintersun
Jägermeister
18:50
Florent : Wintersun est d'après ce que j'ai compris un cas épineux au sein du microcosme metal depuis leur très décrié appel aux dons pour... s'offrir un studio d'enregistrement de luxe avec sauna? Bref, je ne me suis pas plus intéressé que ça à ces histoires mais une chose est sûre, elles ont eu leur petit effet marketing puisque The Forest Seasons aura été le premier opus des Finlandais sur lequel j'aurai jeté une oreille attentive. Avec une bonne surprise à la clef: c'est que c'est bien foutu, cette espèce de metal épique gentiment extrême avec plein de claviers dedans. Awaken from the Dark Slumber, qui ouvre l'opus et le concert, est même un sacré bon titre, malheureusement gâché par un Jari Mäenpää au jeu de scène insupportable d'exagération. Côté vocal, il fait toutefois le taf et plus que ça, que ce soit en voix extrême ou en chant clair, plein de maîtrise dans son style très emphatique. Je ne tiens toutefois que peu de temps sur la suite du set de Wintersun qui me confirme que même si j'apprécie leur dernier opus, le reste de leur discographie et leur musique en général me parlent peu.
Nostalmaniac : En février dernier, Wintersun aura déchaîné les internets et nos fils d'actus avec cette campagne de crowdfunding décomplexée à l'américaine. Tout le monde connait l'histoire (les larmes de rageux coulent encore sur la pochette en 4K du fameux Forest Package). Je ne vais pas revenir dessus mais bien avant cette histoire je n'ai jamais réussi à embarquer dans leur univers pourtant riche et tellement empreint de fantasy. Ce côté trop "happy" sûrement. Mais c'est le genre de groupe qui peut prendre toute sa dimension sur scène espérais-je. Le groupe commence avec le premier morceau de son nouvel opus (ce dernier ne semble pas faire l'unanimité même chez les die hard fans, gênant vu le package proposé mais bref, hein) et... c'est très riche musicalement. Cependant ça me laisse totalement de marbre. Et ce n'est pas la faute du son (bien que les guitares soient un peu en retrait) mais trop d'éléments en peu de temps. C'est comme un gateau surchargé en enrobage, assez indigeste. Bon je confesse que je ne connais pas les morceaux et que je remarque que le "shitstorm" qu'a suscité le groupe m'a marqué car le vocaliste Jari Mäenpää me parait automatiquement arrogant et robotique. Dans sa manière de communiquer avec le public tout semble minuté, réglé à l'avance. Bref, rien qui m'aide à me plonger dans la forêt de leur backdrop. Dommage.
Cough
Oriental Stage
19:35
Di Sab : Doomster des plus ponctuels, c’est avec un bon quart d’heure d’avance que je me pointe à l’Oriental Stage pour mon 3ème concert de Cough en moins d’un an, le tout ne servant à rien car des rubans de balisage empêchent la foule nombreuse de s’approcher de la scène. Ces rubans seront enlevés 2 minutes avant le début du show sûrement pour que chaque festivalier puisse profiter d’un petit moment Black Friday. Pendant qu’on patientait à 15m comme des cons, Cough faisait ses balances ce qui nous a permis de constater que David Cisco (le guitariste rythmique qui assure le chant clair) n’est pas sur scène. Ses parties vocales seront effectuées par le second guitariste, Brandon Marcey qui officie également dans Sinister Haze pour un résultat beaucoup plus raw et du coup pas vraiment concluant (car contrastant moins avec la voix de Chandler). La setlist est remaniée en conséquence et fait la part belle aux morceaux où Chandler assure la majorité des lignes de chant. Ce fut Ritual Abuse/Mind Collapse (avec un final un poil cringe où Marcey ânonnait que le temps était venu du sacrifice)/Wounding Hours et Possession (de mémoire). A part ça par contre, rien à redire, tout est comme d’hab. Le son s’abat toujours autant sur toi à la manière d’une plaie d’Egypte, Parker Chandler est toujours un vocaliste exceptionnel et le claviériste J.K est toujours un exemple vivant de « se mettre cher sur scène ». Concert à rapprocher de celui de Terror en 2015 : au vu des conditions, cela n’aurait pas pu être mieux mais l’absence d’un membre clé entache tout de même la performance. Pour info, Cisco n'a pas quitté le groupe mais a dû rentrer en Virginie pour assister à la naissance de son fils qui a mis plus de temps que prévu à naître. Born Too Late!
Metal Church
Jägermeister
20:50
Nostalmaniac : Premier clash du festival, Metal Church ou Macabre ? Deux registres différents mais deux vétérans américains que je n'ai jamais vus en live. Je tranche donc en faveur de l'Eglise du Metal que le retour de Mike Howe a reboosté depuis 2015. Howe c'est LA voix de « Blessing in Disguise » (1989), « The Human Factor » (1991) et « Hanging in the Balance » (1993). Et c'est justement avec le titre d'ouverture de « Blessing in Disguise », "Fake Healer", qu'il entre héroïquement sur scène. Le groupe est toujours aussi sobre avec son fameux logo rouge et blanc estampillé du backdrop immense jusqu'aux grosses caisses de Stet Howland. Alors, je ne peux pas vraiment comparer avec le Metal Church de 89-93 mais Howe n'a rien perdu vocalement. La cinquantaine passée, il est même très énergique. Si quelques aigus passent difficillement, il a toujours la technique vocale pour y pallier. Toujours fidèle au poste, le guitariste Kurdt Vanderhoof montre beaucoup d'enthousiasme. Fier sûrement de proposer ses vieux morceaux qui auront marqué beaucoup de metalheads outre-atlantique. Côté setlist, on aura droit à un morceau de « The Dark » (1986), le tonitruant et thrashy "Start the Fire", exécuté avec classe avec ce refrain implacable "Start the fire. Bring down the hammer. Start start the fire. Burning on forever.". La voix de Howe passe vraiment très bien (plus aiguë que l'originale évidemment). Quelques nouveaux morceaux issus de « XI » (2016) sont également balancés et trouvent leur place au milieu des classiques que sont "Gods of Second Chance" mais surtout "Badlands" et "Beyond the Black" (cette doublette...) repris en choeur par le public. Je suis agréablement surpris, les Américains ont retrouvé un nouveau souffle qui fédère vieux et nouveaux fans. Un petit "Waiting For A Savior" ne m'aurait pas déplu mais la performance reste remarquable. Metal Church n'a peut-être plus rien à prouver, ni à espérer mais ils ont toujours l'envie, et ça fait plaisir.
Macabre
Metalgate
20:50
Sleap : Je ne compte plus les fois où j’ai pu rater Macabre en live, c’est donc avec une joie non-dissimulée que je m’installe sous la tente de la MetalGate pour assister au show du trio de Chicago. Pour ceux qui ne connaîtraient pas le groupe, Macabre pratique un style que je qualifierais de « Free Death Metal » (pensez à un John Zorn qui jouerait du Death Grind). Sur le papier, cela sonne déjà louche, mais la véritable particularité de ce combo est sa passion immodérée pour les serial killers. Ainsi, chaque morceau de leur discographie est inspiré d’un fait, d’une personne ou d’un sujet de l’histoire du meurtre à travers les âges. De Néron à Jeffrey Dahmer, en passant par Vlad Tepes ou Peter Kürten, toutes les époques y passent. Bien que je ne sois pas le plus grand fan du groupe musicalement parlant, j’admire la ferveur avec laquelle le trio s’investit dans son délire morbide. Et cela prend toute sa dimension en live !
Le frontman Corporate Death arrive sur scène avec un micro-tête et sa fameuse salopette de fermier texan et débute chaque morceau par un petit monologue décrivant le serial killer ou le fait divers qui va être évoqué dans le morceau joué. Et sa qualité de conteur est telle qu’absolument toute la foule est pendue à ses lèvres. Lorsqu’à la fin de chaque petit speech il annonce enfin le nom du tueur et/ou le nom du morceau, tout le monde hurle et applaudit. On remarque d’ailleurs une nette victoire d’Albert Fish et Richard Ramirez à l’applaudimètre. Je ne pensais vraiment pas Macabre capable de fédérer autant de public par le simple sujet de ses compos. Mis à part les nombreux titres de Dahmer interprétés ce soir, j’avoue ne pas exulter plus que cela à l’écoute de leur musique en live. Mais l’ambiance du concert et la prestance du frontman font toute la différence. Mention spéciale tout de même pour le son de caisse claire « Tefal » typiquement adapté ! Entre les nombreux titres Death Metal déjantés, le groupe nous interprète évidemment des « chansons-interludes » à la tonalité enfantine mais aux paroles assez dérangées, comme leur fameuse reprise sordide de The Cat Came Back (Le Matou Revient en français). Je note également le petit moment d’émotion lorsque le public apprend qu’il s’agit des trois mêmes musiciens dans le groupe depuis 1985, et qu’ils sont toujours heureux de jouer leur « Murder Metal » plus de trente ans plus tard.
Après le fameux Vampire of Düsseldorf extrait de Sinister Slaughter – l’album le plus apprécié par le public ce soir –, le groupe finit par un rappel sur The Trial, extrait de mon chouchou Dahmer. Aussi bizarre que cela puisse paraitre, il s’agit en définitive de mon concert de la journée. D’excellents showmen, et un public on ne peut plus réceptif !
Boris
Oriental
22:50
Di Sab : Dans la famille « groupe à la discographie impossible à suivre », les Japonais de Boris se situent à environ 7 sur l’échelle des Melvins. Autant dire que ne connaissant qu’Amplifier Worship et Pink, j’arrive à l’Oriental Stage sans avoir la moindre idée d’à quelle sauce je suis sur le point d’être mangé. Ce sera à la sauce Dear, je ne l’ai su que rétrospectivement. Comme S.A.D.E l’explique dans sa chronique, l’album est extrêmement protéiforme, il en sera logiquement de même pour le show où chaque titre est une étape. Début drone à base de cage thoracique secouée et de voix saturée, avant de retomber sur des titres un peu stoner/doom et plus accessibles, le point culminant du show sera néanmoins le titre Beyond, pièce lorgnant vers le post rock où les vocaux sont réellement à tomber (et encore plus intenses qu’en studio). Vu la fatigue, le final, de nouveau drone où pendant une vingtaine de minutes chaque note aurait pu être la dernière me fait un peu décrocher mais à part ça, le concert fut, pour moi, le meilleur de la journée : une immersion facile malgré la versatilité du propos, un jeu de lumière et de scène vraiment magnifique et surtout, j’ai découvert que le gong dans le doom/drone devrait être une institution à l’instar des amplis Orange et des Gibson SG.
Master's Hammer
Jägermeister
22:55
Sleap : Le second show de reformation de Master’s Hammer est à n’en pas douter l’un des événements du week-end. Il s’agit d’une des références de la scène tchèque en matière de Black Metal, et leur retour après plus de 25 ans est très attendu, c’est le moins que l’on puisse dire. J’ai un peu les boules de louper Boris au même moment, mais il fallait que j’assiste à ce show au moins une fois. Je constate d’ailleurs avec étonnement que la plupart des nombreux festivaliers présents sont assez jeunes pour accueillir la légende tchèque à domicile. Mais la surprise est encore plus grande lorsque je remarque le nombre de Tchèques qui connaissent par cœur les paroles de chaque morceau. Je ne pensais vraiment pas que Master’s Hammer était aussi influent, même dans son propre pays.
Sur scène, le groupe a mis le paquet. Bon, on est encore loin des « sacrifices » de vierges sur des autels comme le groupe avait pu le faire par le passé, mais la scénographie a quand même de la gueule. Nombreux backdrops noir et blanc dessinés par l’un des membres du groupe, grandes croix en bois et autres sculptures, le tout avec les flammes à l’avant de la scène qui ponctuent les passages marqués de la musique jouée. Mention spéciale aux deux filles de chaque côté de la scène avec leur immense masque en forme de Baphomet qui tiennent debout sans bouger d’un iota, et ce du début à la fin du concert !
Musicalement, je suis ravi d’entendre que Ritual compose ce soir la majeure partie de la setlist. Il s’agit du seul album que je connais, et celui-ci est quasiment interprété en intégralité. En revanche, il faut tout de même reconnaitre que le groupe a très mal vieilli. Le coté kitsch devient presque nanardesque par moments, notamment lors des interventions du frontman avec son chapeau noir. Je suis content d’assister à cet événement exceptionnel, mais j’avoue que quelques minutes de plus auraient suffi à me faire décrocher. Le cadre festival Metal open air, n’est certainement pas des plus adaptés pour un groupe aussi atypique. En bref, un moment particulier, mais certainement pas inoubliable !
Florent : Parce qu'il faut bien que j'en dise quelque chose, on ne peut pas dire que le metal tchèque m'ait fait forte impression aujourd'hui : entre un Root incompréhensible et ce Master's Hammer que je résumerais bien par le terme "escroquerie", les régionaux de l'étape ne m'ont pas convaincu outre mesure. Ritual est pourtant un album qui me parle, même si c'est dans une langue que je ne comprends pas, et j'avais hâte d'entendre des titres comme Genovié, Vecny Navrat ou Jama Pekel en live. Les vidéos balancées par le Brutal Assault pour mettre l'eau à la bouche m'avaient déjà bien refroidi entre mise en scène cheap avec donzelles aguichantes qui se roulent des pelles et chant n'ayant tout bonnement rien (mais alors là rien) à voir avec l'enregistrement original. J'espérais que la magie de l'instant me donne tort, il n'en aura rien été : le concert de Master's Hammer est peut-être un des trucs les plus mauvais qu'il m'ait été donné de voir. Pas forcément musicalement, car on ne peut pas dire que ce soit mal joué, non, c'est un tout. Cette voix même plus vraiment black metal (qui se rapproche en fait un peu, dans l'esprit, de celle de Big Boss, chanteur de Root), ces deux greluches à masque de démon immobiles en fond de scène... Cradle Of Filth étaient plus evil quand je les ai vus en concert à l'époque. Voilà. Je ne peux pas être plus rude.
Nostalmaniac : Alors qu'on a pu sentir un vent d'histoire du Black Metal tchécoslovaque avec Root, c'est une tempête qui déferle avec l'évocation du nom Master's Hammer. « Ritual » paru en 1991 chez un obscur label praguois puis ressorti par le label français Osmose Productions (ce flair...) en 1994 n'est pas passé inaperçu. Fenriz de Dartkthrone en parle comme le "premier véritable album de Black Metal norvégien alors qu'ils ne viennent pas de Norvège". Un saint Graal du Black Metal européen, tout simplement. Et quand on sait que le groupe ne s'est plus produit en live depuis vingt-cinq ans (!) et qu'il s'apprête à le jouer en entier, il y a de quoi avoir des frissons. Le décorum est travaillé avec plusieurs bannières de dessins occultes aux côtés du superbe logo de la légende tchèque. Sur scène, des statues de Baphomet sont disposés avec quelques croix. Le décor est planté ! Bon, ça reste un Satanisme en carton-pâte mais ça a toujours été assumé chez Master's Hammer. Ce côté occulto-campagnard. Contrairement au premier concert praguois, pas de Nergal (Behemoth) en guest vocal mais toujours les deux modèles féminins qui portent toutes les deux une tête de Baphomet et aborent une tenue très légère. Par contre, festival oblige j'imagine, pas de roulage de pelle goulue comme ce fut le cas. Elles resteront immobiles, les mains à la Baphomet, se contentant d'allers et retours entre les morceaux. Mais venons-en au plus important, la prestation. Et bien, František Štorm avec son look de papy dandy possédé a conservé cette voix particulière, éraillée et démoniaque. Guitaristiquement, c'est plus compliqué. Il écorche le premier riff de certains morceaux très attendus comme "Géniové". Puis, ce qui devient gênant au fil du concert, c'est le gars aux tambours qu'on entend pas du tout (si ce n'est quelques roulements quand la batterie n'est pas lancée) et qui est placé tout devant. Mauvaise idée. Tout n'est pas encore en place et c'est flagrant en open air sur une main stage. Passée la satisfaction d'entendre en live les titres de « Ritual » je n'arrive pas à être captivé. Même remarque que pour Root, les interventions en tchèque pour les Tchèques... Bon d'accord c'est un moment historique avant tout pour eux mais un peu d'anglais n'aurait pas fait de mal. "Mezi kopci cesta je klikatá..." qui figure sur le plus étrange « Jilemnický okultista » (1993) passe bien en live avec les orchestrations. Et on sent déjà qu'ils s'aventuraient déjà vers des rivages plus expérimentaux. Je décroche néanmoins avec les titres plus récents issus de « Vracejte konve na místo » (2012) même si les claviers sont intéressants. Pour l'épilogue, retour à « Ritual » avec l'efficace et sombre "Jáma pekel" dont j'entonne mécaniquement le refrain libérateur. Une très bonne conclusion; cependant je suis mitigé sur la prestation générale. C'est à voir pour le côté historique mais sinon rien de vraiment mémorable. L'album de 1991 n'a pas pris une autre dimension alors que tous les éléments étaient réunis pour et c'est fort regrettable. Master's Hammer est déjà en marche pour devenir TA chez de nombreux festivals underground mais il va falloir qu'ils corrigent de nombreuses choses pour le mériter vraiment et ne pas laisser un goût amer à certains nostalgiques...
Overkill
Sea Shepherd
00:05
Nostalmaniac : Eternel second couteau du Thrash américain, Overkill a pourtant un back catalogue costaud et une longévité admirable (dur dur pour les groupes Thrash après 1994/95). Sans pour autant sortir d'album réellement marquant depuis... 1989 et la sortie de « Horrorscope » (ce qui est encore discutable). Bobby "Blitz" Ellsworth (cette barbe et cette moustache...) s'amuse à prendre la parole avec sa voix suraïgue. Ce qui devient vite plus ridicule que marrant. Le fameux "Fuck You" (reprise des Subhumans, groupe punk rock anglais des 80's) fait son petit effet mais c'est tout ce qu'il y a signaler pendant ce set assez mou. Pour une tête d'affiche, Overkill ne brille pas vraiment...
Batushka
Jägermeister
01:05
Florent : Aaaaall yours, Batushka Batushka Batushka-yaya. Voilà ce que devait chanter cet Asiatique apparemment fanatique de la "nouvelle star" du black metal polonais, qui se promenait en robe de bure et avec une icône à l'effigie de l'album Litourgiya sur le site du festival depuis ce matin. Une anecdote qui permet de souligner à quel point en environ deux ans, Batushka est devenu une sensation avec son black metal mâtiné de chants orthodoxes. Une formule qui ne laisse pas indifférent mais qui a malheureusement la fâcheuse tendance de décevoir en live, comme mon ami Nostalmaniac ne se prive pas pour le faire savoir. Personnellement, j'avais pris leur concert du Eindhoven Metal Meeting en plein dans la tronche, dans un contexte plutôt intimiste et avec des balances interminables pour que le son soit parfait. J'arrive donc en confiance devant leur concert qui clôt les Mainstage de ce premier soir.
Premier constat, le son n'est pas à la hauteur de ce que j'ai vécu à Eindhoven, mais n'est pas l'immonde bouillie qu'on pouvait craindre. Les guitares manquent un peu de puissance et le chant est un peu trop en retrait, mais rien qui m'empêche de rentrer de plain-pied dans la performance et dans cet album dont je ne me lasse décidément pas. Inutile d'encore décrire le tout, contentons-nous de souligner les quelques nouveautés, c'est-à-dire des introductions et interludes légèrement remaniés et un show toujours aussi froid. Pour le reste, les moments forts restent les immenses Yekteniya III et Yekteniya V. Contrairement au concert d'Eindhoven, Batushka n'aura pas survolé les débats.
Nostalmaniac : Depuis la déception au Motocultor (il y a un an, mois pour mois), je n'avais pas revu le mystérieux combo polonais qui a depuis "converti" énormément de fans en peu de temps mais a surtout enchaîné les live et quelques tournées. Des fans particuliers dont un porte une large toge noire et... se promène avec un cadre religieux orthodoxe (ça passe à la fouille, ça ?) qu'il brandira fièrement pendant le concert. Alors oui je n'étais pas emballé mais je me disais que depuis un an le show devait être bien mieux rôdé et les choristes avoir leurs micros branchés. Logique semble t-il. Mais, dès le début c'est assez catastrophique. Les choeurs liturgiques sont plus audibles mais rien n'est en place. Les guitares sont brouillonnes et le chant toujours aussi peu maitrisé. Et oui, mon constat est le même qu'il y a un an. Gênant pour un groupe aussi vite propulsé tête d'affiche et qui n'est en fait qu'une supercherie. Une supercherie vendeuse, certes. Mais qu'on ne raconte pas n'importe quoi, Batushka est vide en live à moins de se contenter de la scénographie (et encore) ou d'être resté trop près de l'encensoir. Le pire étant que j'aime beaucoup leur unique album mais voir ce spectacle lénifiant (sur une main stage !) me le fait détester tant on peut se rendre compte qu'ils ne sont pas capables de le restituer et que le bidouillage studio apparait comme évident. Combien de temps la mascarade va t-elle durer encore ? A vos paris !
Wolves In The Throne Room
Metalgate
02:00
Nostalmaniac : Direction la Metalgate pour le concert des Américains de WITTR. Scène couverte, elle se prête bien à leur Black Metal atmosphérique si envoûtant. Etonnenement, la tente n'est pas remplie mais ce n'est pas plus mal pour s'immerger. Et d'immersion, il est en question avec WITTR. L'ambiance sylvestre s'installe avec "Dea Artio" suivi du passionnant "Vastness And Sorrow" et cette effusion de riffs lancinants. Sur scène, le décor des Américains est sobre avec juste la bannière à tête de loup réalisée par Spazdjel derrière eux mais ils n'ont pas besoin d'artifices pour nous emmener loin. "The Old Ones Are With Us", titre inédit issu de leur prochain album à paraître en septembre, fait grimper un peu plus l'excitation. Car oui, Wolves in the Throne Room et bel et bien de retour. A noter que sur l'album on retrouve sur ce morceau en guest un certain Steve von Till (Neurosis). Toujours particulier de découvrir un nouveau morceau en live bien sûr mais il passe très bien cette épreuve. "Prayer of Transformation" me ramène vers des contrées que je connais mieux. Lent et captivant avec ces effets de disto ! Alors que je trouve le concert déjà très bon (juste quelques couacs au niveau des grattes me perturbent, grrrr), ce sont les premières notes du sublime "I Will Lay Down My Bones Among The Rocks And Roots" qui portent le coup de grâce. Ce déluge de riffs, ces breaks, cette mélancolie qui traverse le morceau, ces tambours... Il suffit de fermer les yeux pour être pris dans la tempête et s'évader. Après la purge du concert précédent, WITTR a donné une leçon. Vivement qu'ils reviennent en Europe pour défendre leur nouvel opus...
Un premier jour qui nous a mis dans le bain (brûlant) du Brutal Assault. On pense au deuxième jour avec notamment Fallujah, Cryptopsy, Arkona, Opeth, Suffocation, Swans, Uada et un certain Emperor !
* * *
*
Crédits :
Textes par l'équipe Horns Up.
Photos : Horns Up et Héloïse M.