Interviews Retour
vendredi 23 décembre 2016

INCIPIENT CHAOS

INCIPIENT CHAOS

Pamalach

"Les vrais savent, les vrais font".

"Anima Mercurii" est le nouvel et deuxième EP d'Incipient Chaos. L'occasion pour Horns Up d'aller leur poser quelques questions et de se rendre compte que derrière la musique complexe du groupe se cache un concept et un discours particulièrement riche et habité.

1/ Peux-tu, pour ceux qui ne vous connaissent pas, nous présenter Incipient Chaos ?

Incipient Chaos est un groupe de Black Metal basé à Nantes. Après "Sulphur", notre première réalisation, sortie en 2014 chez Mortis Humanae Productions, nous venons de sortir notre second EP, "Anima Mercurii", sur le label Antiq. Nous avons un concept basé sur l’alchimie mystique.

2/ Vous faites le choix de ne pas communiquer sur vos identités, est-ce une volonté de ne pas laisser les individualités empiéter sur la musique, un moyen pour auréoler de mystère vos productions ou tout autre chose ?

Dans Incipient Chaos, la musique passe avant les individus qui l’ont créé. Mais ce n’est pas quelque chose que nous tenons secret coûte que coûte. Nous n’avons rien calculé. Nous ne voulions pas faire comme la plupart des groupes, à savoir des photos promos où l’on aurait fait semblant d’être méchant ou faussement torturés. C’est un parti pris qui s’est manifesté naturellement. Il est donc exact que nous préférons être perçus comme une entité musicale, un tout, plutôt qu’une somme d’individus. La musique et le concept doivent prédominer.

3/ Vous semblez animés d’un sentiment d’indépendance fort puisque je crois que mis à part la distribution du label, c’est vous qui gérez tout, de la production à l’artwork. Est-ce que c’est votre façon de procéder qui est ainsi où avez-vous eu des expériences plus ou moins négatives qui vous ont amené à tout faire par vous-même ?

Il est vrai que nous aimons maîtriser le maximum de choses qui touchent de près ou de loin au groupe. Nous n’avons pas eu d’expérience négative sur ce sujet, pour la simple raison que nous avons la chance d’avoir deux graphistes au sein du groupe. Ce qui permet d’avoir des débats animés autour de l’imagerie et du concept. Et de travailler à fond l’esthétique (disques, tee-shirts, affiches…). Idem pour la production de "Sulphur" et d’"Anima Mercurii". Nous avons fait ça au Darkened Studio, avec STVN, un bon pote en qui nous avons confiance, et que nous connaissons depuis pas mal de temps.

4/ Après "Sulphur", "Anima Mercurii" se présente lui aussi sous la forme d’un E.P. Qu’est-ce qui vous plaît dans ce format ?

Le cheminement vers la quintessence, la réalisation du grand œuvre, à savoir l’album. "Sulphur" nous a permis de poser les bases de notre concept, et de consolider le groupe autour de celui-ci. Il nous a aussi permis d’apprendre beaucoup de choses lors de l’enregistrement en studio. "Sulphur" a les défauts d’une première réalisation. Avec "Anima Mercurii", nous avons essayé d’éviter les erreurs faites avec "Sulphur", tout en approfondissant le concept, et en élargissant notre spectre musical.

5/ L’artwork est une nouvelle fois magnifique. Qui est à l’initiative de ce superbe visuel et quel est son lien entre le titre de l’EP ?

Merci pour le compliment. L’artwork a été une nouvelle fois réalisé à quatre mains. G.T s’est occupé du dessin, et C.R de la partie graphique. On y voit la lune avec le glyphe du mercure alchimique au-dessus d’une femme, qui est une allégorie du mercure, flottant dans le cosmos.

6/ Vos lyrics s’axent autour de l’alchimie et de l’occulte. Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?

Comme dit plus haut, sur "Anima Mercurii" nous avons approfondi notre concept autour de l’alchimie mystique (l’art sacré). L’EP est construit autour du Mercure, deuxième élément de la Tria Prima. Dans les textes, toutes les références à ce composant sont faites sous la forme d’une allégorie féminine. De Kosmòs à Khaos, chaque morceau est une ode pour Elle. Le narrateur est un observateur, un témoin passif. Du déluge cosmique et de l’exaltation sur le premier titre, on passe à la figure maternelle et royale sur Celestial Wind. Un vent quasi divin, une élévation du Corps et de l’Esprit, pour mieux enchaîner et enflammer une bonne fois pour toutes l’Humanité.

"Anima Mercurii", « l’Âme du Mercure », fait écho à "Sulphur". Le narrateur subit l’influence de Mercure, charmeuse puis dominatrice, pour finir par se perdre dans son océan et être son bras armé. Le dernier morceau, Khaos, est l’aboutissement de ce voyage. Lui, qui a pu observer et subir l’élévation, n’est au final qu’un cultiste de plus dans la myriade qui compose le Mercure. Absorbé, transformé, il est un témoin du changement. Son voyage n’est pas encore terminé…

7/ Entre le titre "Sulphur" et "Anima Mercurii" le lien semble bien présent. Est-ce que votre œuvre va se présenter sous la forme d’une fresque inquiétante ? Est-ce que Incipient Chaos est intimement lié aux concepts que vous développez dans vos lyrics ?

Le grand œuvre alchimique (ou œuvre principale) comporte 3 grandes phases. La première, l’œuvre au noir, est représentée par le Soufre (représentation : le soleil, masculin, fixe, le feu, la terre, l’esprit). C’est une phase de putréfaction, de dissolution et de décomposition. Le Soufre est une énergie brute qui est présente mais qui n’est pas différenciée, ni orientée.

La seconde, l’œuvre au blanc est représentée par le Mercure (représentation : la lune, féminin, volatil, l’eau, l’air, l’âme). C’est une phase de recomposition, de mise en « alignement ». Elle consiste à accueillir la lumière dans la matière. Le Mercure va orienter l’information, ordonner et structurer l’énergie du Soufre.

Ce sont deux principes opposés, mais complémentaires, que nous avons essayé de développer sur nos deux EP.

La troisième et dernière phase, c’est l’œuvre au rouge. C’est le stade de la réalisation de l’union du Soufre et du Mercure vers la pierre philosophale (pierre rouge). C’est-à-dire vers la transmutation spirituelle. La quintessence…

8/ Comment un néophyte peut-il appréhender l’alchimie s’il souhaite en savoir plus ?

En apparence, définir l’alchimie peut paraître simple : la transmutation des métaux vils en or. L’art de faire de l’or. Mais la réalité historique est beaucoup plus riche et extrêmement complexe. Les vrais alchimistes n’étaient pas intéressés par l’enrichissement matériel, mais par la contemplation des vraies lois qui régissent la matière pour l’esprit. C’est une science occulte, une doctrine secrète, expliquant la nature, l’origine et la raison d’être de tout ce qui existe, relatant l’origine et la destinée de l’univers entier. À chacun de faire ses recherches…

9/ Votre musique passe par des stades d’intensité très différents. Est-ce difficile à gérer d’un point de vue technique ?

Nous composons naturellement comme ça, c’est donc logiquement plus facile à gérer. Mais nous répétons et travaillons quand même beaucoup « à la maison », pour pouvoir tenir la route techniquement en répétition et concerts.

10/ Si tu devais nous parler d’un artiste qui a influencé votre œuvre dans Incipient Chaos tu nous citerais qui en premier lieu ?

Il n’y a pas vraiment d’artistes particuliers qui nous viennent à l’esprit. Les traités d’alchimie écrits par certains philosophes et théologiens (Paracelse, Hermès Trismégiste…) ; la musique en général, et plus précisément le Black Metal, sont les principales sources d’inspiration pour Incipient Chaos.

11 / Quels sont vos derniers coups de cœur musicaux ?

Le dernier Glaciation, "Sur les falaises de marbre". Un véritable petit bijou. Et le "Leytmotif Luzifer" d’Abigor. Intouchable.

12/ Avez-vous un dernier mot à faire passer à nos lecteurs ?

« Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, pour faire les miracles d’une seule chose ».