"Les vrais savent, les vrais font".
Si on a trop souvent l’occasion de constater que le Black Metal enferme certains de ses activistes dans des schémas sclérosés, pour d’autres, il est un puissant vecteur d'inspiration et de créativité. La palette d’émotions qui peut être exprimée dans le BM est quasiment aussi large que ses outils d'expression, le talent des artistes s’abreuvant à la source impie d’un univers sombre et putride, magma infernal d’un style musical séditieux et rebelle.
Si je me permets cette entrée en matière poetico/imagée, c’est que dès les premières écoutes de « Anima Mercurii », s’est dessiné en moi un univers très sensitif balancé entre la retenue et la violence. J’avais du mal à me défaire de cette idée que la musique de INCIPIENT CHAOS était aussi dure que ce qu’elle était fragile et que si elle avait le tranchant acéré d'un couteau de boucher, elle était par moments aussi fragile que du cristal. Leur premier E.P s’appelant « Sulphur » il n’est guère étonnant que me soit venu à l'esprit de telles images, INCIPIENT CHAOS basant ses lyrics sur le concept de l’alchimie et de l’occulte.
Originaire de Nantes, le groupe est très discret sur l'identité de ses membres, les musiciens étant nommés sur l’album de I à V. Indépendant et désireux de garder le contrôle sur le maximum d'éléments inhérents à ses œuvres, INCIPIENT CHAOS s'occupe seul de sa production et de ses artworks (vous noterez une fois de plus, la bellissime pochette de ce nouvel E.P). Instinctif et opiniâtre, INCIPIENT CHAOS sait poser des ambiances, travailler ses harmonies et donner du relief à ses compositions. Ils peuvent jouer de manière rapide en laissant les guitares dégueuler leur lave maléfique puis l’instant d’après offrir des arpèges et des solos particulièrement clairs et mélodiques. Rassurez-vous, reste de manière insidieuse un sentiment de malaise et de désespoir qui tient lieu de fil rouge tout le long de ces quatre titres.
Même dans la lenteur et une certaine clarté, INCIPIENT CHAOS reste âpre, combatif et en perpétuel mouvement. Comme un métal qui fond et se rend insaisissable, l’intensité explose puis se tait d’un coup, laisse l’anarchie musicale succéder aux rigueurs du tempo et s’aventure, trébuche, sombre et resurgit au travers d'incantations inquiétantes qui n’en finissent pas d'étonner.
Plus les titres avancent et plus la pression semble devenir forte. Les blast beats semblent aller plus vite, les riffs deviennent de plus en plus déments et la raison semble complètement s'évaporer pour finir en une fumée méphitique aux relents rances et empoisonnés. Un deuxième E.P en forme de coup de lame qui mérite bien de s'y attarder un peu... vous m'en direz des nouvelles.