Hell's Balls Belgium J1 @ Courtrai
Kortrjik Xpo - Courtrai
hell god baby damn no!
Matthias : L'été dernier, le Horns Up on tour s'était arrêté à l'Alcatraz Festival, un événement de trois jours dans le Plat Pays, à proximité directe de la frontière française et qui nous avait fait forte impression. En une dizaine d'années d'activité, ce festival a véritablement fait son nid sur le campus de la Lange Munte de Courtrai, jusqu'à devenir un rival sérieux pour le Graspop dans le panel des réjouissances d'été des gens du Nord. Depuis l'année dernière, l'Alcatraz a même vu naître un petit frère, en salle et paré des couleurs d'automne (qui a dit « tout en nuances de gris, donc » ?) : le Hell's Balls, festival de deux jours en salle, dans le complexe ultramoderne de la Kortrijk Xpo. L'affiche de l'année étant des plus prometteuses, on retourne de bon cœur en terre flamande pour découvrir si on doit désormais compter avec deux rendez-vous annuels...
Samedi 9 Novembre - Jour 1
Groupes évoqués : Wolfheart | Hellripper | Vltimas | Moonspell | Carpathian Forest | Primordial | Dark Tranquillity | Triptykon
Wolfheart
Circé : Qui dit week-end prolongé, dit embouteillages sur les routes le samedi matin ; le trafic à la sortie de Bruxelles ne nous permettra que d'arriver vers la moitié du set de Wolfheart. J'ai lâché la carrière des Finnois vers 2018 et suis donc très peu familière de leurs dernières sorties. Mais coup de chance : j'entre dans l'immense salle-hangar sur l'intro de « Aeons of Cold », l'un des morceaux phares de leur second album, immédiatement reconnaissable grâce à sa petite mélodie d'intro au piano. La tornade de riffs death mélo ultra moderne déferle bientôt sur la salle, portée par un son plutôt qualitatif qui permettra de bien discerner les guitares, le chant, les choeurs du refrain et les arrangements. Wolfheart – et ce type de melodeath en général – peut vite tourner à la bouillie auditive en live, et la qualité du son fut donc le point positif de ce set.
Car au delà de ça, peu de coups de cœur musicaux pour moi sur les morceaux que je ne connais pas. Le groupe enchaînera avec des plus récents, comme un “The King” dont le chant clair, rare chez le groupe, sonne malheureusement assez faux. Wolfheart reste cependant en soi un solide groupe de live grâce à des morceaux rentre-dedans et un frontman aussi charismatique que communicatif avec son public (en particulier pour un Finnois !) J'ai du mal à évaluer combien nous étions de bonne heure devant le groupe dans une salle dont la taille rivalise avec celle d'une mainstage d'open air, mais j'avais quoi qu'il en soit autour de moi un solide groupe de fans enthousiastes, semblant déjà bien connaître les morceaux de Draconian Darkness, nouvel album au cœur de cette tournée. Pas la pire mise en jambe pour un début de festival, somme toute.
Hellripper
Circé : Je suis sûre de ne pas encore avoir assez forcé avec ce groupe sur ce webzine. Donc allons-y : Hellripper est à mes yeux l'une des jeunes formations les plus prometteuses de ces dernières années, et écrase toute concurrence en terme de black/speed. Et quand je dis jeune, je me base plus sur l'âge des musiciens que sur celui du projet lui même, dont le premier EP fêtera bientôt ses 10 ans. Plus mélodique qu'un Bütcher, plus rapide qu'un Midnight, Hellripper oscille entre purs riffs à headbang, refrains fédérateurs, soli et envolées épiques pour un résultat qui redonne ses lettres de noblesses à un style qu'on a souvent qualifié de simple musique bas du front. Bref, si vous voulez lire des tartines d'éloges sur les Ecossais, voici ma chronique du dernier album. Si vous voulez en savoir plus sur ce que donne le groupe dans une grande salle, restez ici.
Ayant l'habitude de voir Hellripper dans de plus petites salles et de plus petits événements [NDLR : la dernière fois c'était au Night Fest d'Arlon], j'appréhendais quelque peu de voir les Écossais sur une si grande scène, et surtout si tôt, avec un public pas forcément venu pour eux. Et en effet, dès les premières notes, problème : on n'entend strictement que la batterie. Si James n'avait pas crié « All Hail the Goat! » avant d'entamer le morceau, on n'aurait aucune idée de ce que le groupe était en train de jouer, et c'est pourtant leur plus gros « tube ».
La frustration est palpable, autant sur scène que dans le public, jusqu'à ce que les guitares et le chant surgissent enfin au bout de quelques morceaux, sur « The Affair of the Poisons ». C'est d'ailleurs à ce moment-ci que le frontman arrive enfin à convaincre assez de monde de lancer un modeste circle pit. C'est là l'autre problème de ce concert : allez demander à des Flamands sobres de faire un peu de sport à 15h... Nous sommes clairement quelques fans dans les premiers rangs et dans le pit, mais l'audience reste gobalement assez molle. La présence du pit photographe et de la barrière n'aident pas non plus, coupant toute proximité avec le groupe et empêchant par exemple James de venir se mêler au public sur la fin du set comme il aime parfois le faire.
Je dois tout de même saluer une setlist très variée, sûrement la plus complète des 3 ou 4 fois où j'ai du voir le groupe. On balaye les trois albums jusqu'au nouveau single sorti en août (qui ravira d'ailleurs les fans du Hellripper le plus speed), en passant par les purs défouloirs que sont les premiers morceaux du projet. « Hell's Rock'n'Roll » ou « Nunfucking Armaggeddon 666 » sont de vrais immanquables. C'est d'autant plus dommage de ne pas avoir eu un public plus réactif sur une setlist aussi axée sur des titres faits pour bouger. Ce n'est que partie remise !
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Les 20mn entre chaque groupe permettent agréablement de prendre des petites pauses entre les concerts, et on n'a pas trop non plus à se presser pour avoir une bonne place, au vu de la taille de la salle.
Le festival est véritablement construit comme un « open air en intérieur » avec des espaces très distincts, ce que permet cette très grande salle. L'espace bar et foodtrucks, dans le hall d'entrée, a sa propre playlist, tellement forte qu'il est en fait impossible d'entendre la scène lorsqu'on ne se trouve pas dans la salle principale, et on a l'impression que, tout comme dans un camping de fest, une partie du public préfère y zoner pour écouter la sono plutôt que d'aller voir la scène. Cela a le mérite de mettre de l'ambiance sur l'ensemble du site, mais l'inconvénient aussi de ne pas vraiment offrir d'espace pour se reposer les oreilles, du moins pas sans sortir dans les brumes de novembre. C'est à l'heure de notre pause frites que nous découvrons un peu tout cela. L'offre nourriture est d'ailleurs concise, mais variée : un camion friture, un camion burger/pizza, un camion café et snacks et un stand vegan. Quant aux prix, ce sont là aussi ceux d'un open air belge. Mais la qualité reste plutôt au rendez-vous.
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VLTIMAS
Circé : C'est donc avec un grand cornet de frites brûlantes que nous nous dirigeons, curieux, vers le set de VLTIMAS. Je n'en n'attendais rien, me souvenant vaguement d'avoir écouté le premier album à sa sortie il y a quelques années, et je n'en n'avais strictement rien retenu.
Sans a priori, le groupe de David Vincent (qui a d'ailleurs fait son soundcheck en criant son propre nom) aura tout de même réussi à me décevoir. Parce que justement, sur scène, on a juste l'impression de voir le show de David Vincent, ex-Morbid Angel : son grand chapeau vissé sur la tête, il prend toute la place, sort tranquillement de scène en plein milieu de set après avoir fini de chanter un morceau... Bref, une attitude assez peu engageante.
Techniquement parlant, rien à redire : tous les musiciens sont des vétérans d'excellents groupes comme Cryptopsy, Aura Noir, etc. Tout le monde sait jouer et joue parfaitement. C'est carré. Milimétré. Mécanique. Puissant. C'est aussi extrêmement froid. J'ai un peu l'impression d'entendre une explication objective et scientifique de ce qu'est le metal extrême. Le résultat, c'est un death metal ultra moderne et accessible, un peu technique, parfois un peu thrashy, parfois un peu mélodique, quelques mélodies et lignes de chant un peu gothique ou ésotérique pour l'ambiance. On ne sait pas trop sur quel pied danser, d'ailleurs. Mais surtout, on dirait un peu une voiture toute neuve lavée au Karcher. C'est tout beau, tout lisse.
Je retourne donc manger. Mes frites ne sont pas parfaites, elles, elles sont un peu cramées au bout. Mais au moins, ca leur donne du croustillant.
Moonspell
Circé : En tournée avec Wolfheart et Dark Tranquillity, les Portugais de Moonspell sont aussi présents aujourd'hui. La salle est loin d'être pleine, mais commence à avoir l'air moins vide : un bon équilibre où l'on circule facilement mais sans avoir l'impression d'être quasiment seul.e devant la scène.
Je suis étonnée de voir autant de t-shirts Moonspell autour de moi. Le groupe a une solide fanbase, pas énorme et qui ne grossit pas vraiment, mais néanmoins fidèle comme elle le prouve ce soir. La horde monte à peine sur scène que la foule se resserre et qu'une petite ambiance se crée dès que Fernando fait son entrée sous nos cris et applaudissements. Il y a toujours un sentiment de partage assez fort dans les concerts du groupe, qui comme ce soir, joue toujours face à une foule qui connait les paroles et les chante avec joie. Une ambiance simple et conviviale, qui correspond bien à l'image d'un groupe qui a tracé sa route depuis trente ans sans jamais vraiment grossir, mais tout en restant toujours présent et populaire.
La setlist sera au final très classique mais de très bonne qualité, pleine de morceaux iconiques du groupe et quelques autres plus rares comme « Finisterra » (rare passage mémorable de l'album Memorial, soyons honnêtes). On alterne entre des titres que l'on chante en choeur comme le goth rock de « Extinct » ou le plus metal « Night Eternal », des titres plus sombres et directs comme « Finisterra » ou « From Lowering Skies» ; et puis de purs titres d'ambiances gothiques comme « Everything Invaded » ou les classiques « Opium » et « Mephisto ».
Moonspell est vraiment un des ces groupes constants en terme de live : jamais trop de surprises, mais toujours de la qualité. Même si l'envie d'entendre plus de raretés est là, c'est aussi toujours un plaisir d'entendre ces mélodies, de chanter le refrain de « Breathe (until we are no more) », de reprendre « Alma Mater» en choeur jusqu'à ce que le groupe soit sorti de la salle. Et surtout, je suis de mon côté fort heureuse de voir un de mes albums préférés, The Antidote, mis à l'honneur sur les deux ou trois dernières fois que j'ai pu voir le groupe.
Setlist :
Opium
Awake!
Extinct
Night Eternal
Finisterra
In and Above Men
From Lowering Skies
Everything Invaded
Breathe (Until we are no more)
Mephisto
Alma Mater
Carpathian Forest
Circé : Carpathian Forest a construit sa réputation en faisant des démos lo-fi dans les 90s à mi-chemin entre le trve black norvégien et un black punkisant destructeur et destructif. Puis quatre albums entre 1998 et 2006 à l'odeur d'alcool, de pisse et d'héroïne. Comment Nattfrost, illustre et camé leader du groupe, tient toujours debout, on a du mal à le savoir. N'en reste pas moins que Carpathian Forest existe toujours et fait même des concerts très régulièrement. Le groupe semble même être encore plus revenu au goût du jour après avoir remis à sa sauce “All My Friends Are Dead” de ses compatriotes de Turbonegro.
Carpathian Forest, c'est aussi tout ou rien. Soit Nattfrost est super en forme et gueule de sa voix la plus criarde, soit vous le fixez pendant tout le concert en vous demandant à quel moment il va s'écrouler. Il y a une sorte de fascination sale avec ce groupe, et les Norvégiens jouent complètement avec, d'ailleurs.
Bref : bon point ce soir, Nattfrost tient debout et est même en bonne forme. Les bons points s'arrêtent là en revanche, car la majeure partie du set se concentre sur les morceaux « trve » du groupe qui trainent en longueur, au lieu de leurs bombes punk courtes et efficaces. C'est dommage, car un set de Carpathian Forest composé de morceaux de moins de trois minutes, tous plus rentre-dedans et régressifs que les autres, donne généralement à vivre un moment très fun. Seulement voilà, dès que le groupe se met à jouer des titres plus longs, il se perde vite dans des riffs plats qui ont l'air de tourner en rond sur eux-même en s'y emmêlant les pieds, et le chant de Nattfrost perd tout son côté débridé suraigu. On décroche vite, et c'est dommage, car j'ai vu des lives du groupe beaucoup plus funs. Mais les longueurs sont aussi quelque chose de difficile à éviter lorsqu'on leur donne un set de 55 minutes.
Primordial
Circé :Un peu comme Moonspell mais dans un tout autre registre musical, Primordial fait partie de ces groupes qui continuent leur chemin de manière solide depuis des décennies, ne semblant jamais trop grossir ni vraiment perdre en popularité, assis sur une base solide de fans et de morceaux iconiques. Primordial n'a d'ailleurs même pas vraiment fait de tournée pour son dernier album, How it Ends, sorti il y a un peu plus d'un an. Ils n'auront en outre même pas de stand de merch au festival ce jour-ci. Manque de temps, de moyens ou d'envie, il en ressort un peu l'image d'un groupe qui vit sans sentir le besoin de promouvoir ses nouveaux faits d'armes, voir qui ne continue de sortir des albums que par habitude. Bien qu'How it Ends était un album en dents de scie, il n'en comportait pas moins un ou deux des meilleurs titres que Primordial aie sorti ces dix dernières années. Les Irlandais ont donc encore bien un peu la flamme.
Cette flamme brûlera d'ailleurs bien fort ce soir sur scène. Voir la bande d'Alan Averill en live, ce n'est pas toujours évident : tantôt un mauvais son, tantôt un Alan pas en forme, tantôt un public peu réceptif... Mais ce soir, le vent d'Irlande tournera en notre faveur, et le groupe nous offrira un live sans faute. Démarrer les hostilités avec “As Rome Burns” place la barre extrêmement haut, et donne le ton du concert : une setlist trop courte mais parfaite, composée de quelques uns des morceaux les plus marquants du groupe. Nouveau venu dans cette catégorie, “Victory Has a Thousand Fathers, Defeat is an Orphan”, single du dernier album dont le riff épique contraste parfaitement avec la mélancolie de “The Coffin Ships” qui le précède. On sent qu'il est déjà un morceau iconique connu par beaucoup, et ce serait un plaisir que de le voir devenir un régulier de leurs setlists.
Alan, bien sûr, règne en maître absolu sur scène comme face au public, lançant des “shut up and listen!” lorsqu'un fan hurle son amour pour le groupe pendant qu'il présente l'histoire derrière “To Hell or the Hangman”. Le frontman nous rend en tout cas bien l'enthousiasme d'une bonne partie de la foule qui entame toutes les paroles en choeur avec lui.
Un chanteur possédé par sa musique la voix toujours tremblante d'émotions, un excellent son, un public connaisseur et réceptif... Les étoiles étaient alignées pour que Primordial nous offre une prestation magistrale digne d'une des formations les plus emblématiques des scènes doom, black et pagan. Le groupe nous quitte bien sûr sur "Empire Falls", nous laissant un arrière goût de cendres, un air de mélancolie et de mélodies irlandaises oubliées.
Setlist :
As Rome Burns
No Grave Deep Enough
Bloodied Yet Unbowed
To Hell or the Hangman
The Coffin Ships
Victory Has a Thousand Fathers, Defeat is an Orphan
Empire Falls
Dark Tranquillity
Circé : Changement de registre, tout en restant dans une thématique mélodique et mélancolique. Dark Tranquillity, en tournée avec Moonspell, Wolfheart et Hiraes, sont là pour promouvoir Endtime Signals, leur nouvel album. Un de mes premiers groupes de metal extrême, j'ai toujours eu beaucoup d'affection pour les Suédois bien que je n'ai plus rien écouté de leurs nouvelles sorties depuis (l'excellent) Atoma de 2016. C'est donc un live mi-nostalgie mi-curiosité pour moi ce soir.
Le public dans la salle semble avoir presque doublé de volume. Il faut dire que Dark Tranquillity est un groupe à la fois accessible et de très bonne qualité, fédérateur au delà des générations et des scènes. Les Suédois jouent en territoire déjà conquis, et nous en mettrons plein les yeux. Ils occupent la grande scène à la perfection, projections en fond et un Mikael Stane toujours aussi énergique et sympathique. Même face à une immense salle, le rouquin vous donnera l'impression de passer un moment intime et amical en sa compagnie - alors qu'en parallèle, tout est propre et carré sur scène, du son à la prestation, le professionalisme est à son comble. C'est le vrai atout d'un live de Dark Tranquillity : on en ressort toujours avec l'impression d'avoir passé un bon moment et vu un bon concert.
La setlist variée m'aide aussi énormément à retrouver mon chemin dans l'univers du groupe. Les mélodies et refrains de “ThereIn”, “Lost to Apathy” ou “Nothing to No One” me reviennent bien vite en tête – impossible de ne pas reprendre les paroles en choeur avec le reste du public. Je suis aussi ravie de découvrir les morceaux d'Endtime Signals en live, toujours aussi bien composés, qui me semblent plus axés sur le riffing sans délaisser de belles lignes de chant. Il faut dire qu'une mélodie de Dark Tranquillity est immédiatement reconnaissable, elle fait mouche, et couplée à un riffing assez direct et efficace, forme la recette parfaite d'un bon morceau. La voix si unique de Stane ajoute bien sûr toujours au cachet et permet immédiatement de se plonger dans les nouveaux morceaux du groupe. Une prestation puissante, pleine d'un mélange d'énergie positive et de nostalgie.
Dark Tranquillity, du haut de ses plus de 30 ans de carrière, continue de sonner comme un groupe inspiré, authentique et fédérateur. Bravo, messieurs.
Triptykon
Circé : Triptykon n'a plus sorti d'album studio depuis 2014, mais avouons-le, ce n'est pas quelque chose donc on se soucie (ils seraient en tout cas actuellement en train de travailler sur leur prochain méfait). Au delà de deux albums monumentaux, le groupe est assis sur une histoire littéralement aussi vieille que le metal extrême. Dernière mutation d'une entité qui a sculpté cette musique, a traversé les époques et ses évolutions, Tom G. Warrior et la communauté artistique qui gravite autour de lui n'ont plus rien à prouver. Triptykon est à mes yeux presque une sorte d'entité sonore d'un autre monde composée d'un son abyssal si difficile à décrire, d'un univers visuel dantesque grâce à H.R. Giger et d'une portée émotionnelle dévastatrice. Toujours discret, communiquant avec sobriété et donnant des apparitions scéniques avec parcimonie, Triptykon a su se construire son aura propre, au delà de celles de Celtic Frost et Hellhammer, tout en revendiquant avec fierté cet héritage, et en jouant souvent quelques-uns de ses titres. Le live de ce soir était annoncé comme une exclusivité belge, et un “set spécial” avait été évoqué sur les réseaux sociaux du groupe, mais le mystère restait complet.
Rien que le déploiement du backdrop semble installer un climat solemnel, alors que la créature diabolique de la pochette de To Mega Therion nous toise. Puis vient la musique. Riffs assommants, d'une rudesse et d'une précision impardonables. Le groupe entame “Synagoga Satanae”, pénultième morceau de l'ultime album de Celtic Frost, Monotheist. Album monumental dans tous les sens du terme, et transition directe à ce que sera la musique de Triptykon. Peu d'albums me touchent et me bouleversent autant, je l'avoue. Le live donne une allure encore plus monumentale à ces guitares hurlantes de douleur et à cette voix grave et froide sortie des abymes.
Triptykon jouera trois autres morceaux de Celtic Frost ce soir, dans un registre plus old school. Le groupe a en effet donné en septembre au Prophecy Fest un concert sur l'album Into the Pandemonium, et le Hells Balls leur ayant demandé un set spécial, nous aurons droit à “Mesmerized”, “Sorrows of the Moon” et “Babylon Fell”. Joués au milieu des compos de Triptykon, ils sonnent plus lourds et pesants que sur album, mais proposent aussi une coupure un peu plus rythmée, bienvenue au milieu de la chape de plomb sonore qu'est le reste de la setlist. Celle ci comportera bien sûr peu de titres au vu de la longueur de ces derniers, et se concentrera sur le premier album du groupe, avec seulement “Altar of Deceit” pour représenter le second.
Le groupe, et Tom en particulier, arrivent à dégager beaucoup en en faisant peu. Pas d'artifice, looks sobres voire insignifiants : tout est dans la musique et la présence scénique. Il n'y a besoin de rien d'autre. Le frontman parle peu, mais on sent une vraie sincérité et plaisir d'être là, en remerciant le festival, en rappelant les débuts de Celtic Frost sur scène en Belgique... Son charisme est imposant, mais il n'en joue pas, ne dégage pas pour autant une attitude pédante comme d'autres musiciens de sa stature pourraient le faire. Ce qui impose au final encore plus le respect. Tout ce qui importe est dans la musique : on ressort vide après les presque 20mn de "The Prolonging", dernier morceau d'Eparistera Daimones et de cette soirée
Une expérience éprouvante mais belle, profonde et sincère. Triptykon est magistral. Only Death is Real !
Setlist :
Synagoga Satanae
Goetia
Altar of Deceit
Mesmerized
Sorrows of the Moon
Abyss Within My Soul
Babylon Fell
The Prolonging
Un grand merci au festival pour l'accréditation, et à très vite pour nos aventures du jour 2 !