Kalandra + A.A. Williams + Lys Mørke @ Paris
Backstage By The Mill - Paris
hell god baby damn no!
Ensevelie sous son ciel bas et gris, Paris s'enfonce vers des journées courtes et dénuées de lumière, quelques feuilles d'automne jonchant les rues parcourues de la froideur de novembre. La ville dans la nuit ou dans la grisaille est particulière, à la fois austère et plus chaleureuse grâce à toutes les petites lumières qui la parsèment. Enfin, le temps de l'année est venu où il fait bon se blottir sous sa couette, un chocolat chaud entre les mains. Et quoi de mieux, comme bande son, qu'une musique douce et mélancolique ? Garmonbozia nous propose un plateau parfait pour cela, avec une tournée co-headlinée par A.A. Williams et Kalandra. Direction le Backstage pour une soirée sold out.
LysMørke
Les Parisien.ne.s le savent, un Backstage complet est une mauvaise nouvelle : lieu tout en longueur avec des escaliers étroits et des piliers, le Backstage est plein de goulots d'étranglement rendant la circulation particulièrement difficile. Heureusement, on arrive encore plus ou moins à circuler en début de soirée, et je peux donc m'approcher quelque peu de la scène pour Lys Mørke, projet espagnol qui m'est totalement inconnu.
Projet d'une musicienne espagnole, Lys Mørke n'a apparemment sorti qu'une demo et une cover de Deftones, mais d'autres morceaux ont, semble-t-il, été composés au vu de la durée du set. L'étiquette « dark electro pop » ne donnant qu'une indication vague sur le contenu, je suis surprise de me retrouver face à quelque chose d'assez oppressant. Toute la musique du duo se base sur l'opposition entre une instrumentation electro-indus froide et lourde au possible, et des lignes de chant plus lumineuses et positives de la chanteuse - Lys voulant dire lumière et Mørke obscurité en norvégien, tout est au final dans le nom. Parfois doux et noyé dans les beats, parfois plus véhément, le chant semble jouer avec la musique, cherchant différentes manières de la contraster. Quelques projections viennent compléter l'univers musical, mais impossible de les voir lorsqu'on ne mesure qu'1,60 m. Quelques problèmes de son perturbent malheureusement le set, m'empêchant de vraiment rentrer dedans, mais la prestation du groupe aura tout du moins assez attisé ma curiosité pour me donner envie d'aller jeter une oreille à leur Bandcamp.
A. A. Williams
A.A. Williams est une jeune Anglaise posant une voix chaude et triste sur sa guitare ou son piano, dans une musique minimaliste, souvent lente, toujours mélancolique. Rien d'exceptionnel, rien de révolutionnaire, mais une grande sensibilité, une voix toujours sur le fil, chargée d'émotions sans vouloir trop le montrer, et de magnifiques mélodies, voici qui suffit à donner au projet sa plus-value. J'avais découvert la Londonienne et ses acolytes sur scène il y a un peu plus d'un an, lors d'un magnifique concert dans une église en première partie de Mono, groupe avec lequel elle collabore sur le sublime « Exit in Darkness ». Le cadre avait certainement joué, mais je gardais un souvenir fort de cette soirée et étais curieuse de revoir A.A. Williams en ayant un peu plus écouté ses albums studio entre-temps.
Dès les premières notes, « For Nothing » donne le ton : un tempo lent, un chant vacillant, et le groupe impose le silence à un public peu démonstratif mais attentif, pendu à la moindre note. Accompagnée de trois musiciens live, A. se concentre sur sa guitare et son chant. Le concert n'atteindra pas mes souvenirs de l'été dernier, mais le groupe délivre quoi qu'il en soit une prestation sans faute au-delà des problèmes de son dont il a également souffert. La magnifique voix de la chanteuse nous parle de dépression, de doute, d'amour, mais aussi d'espoir et de lumière. Entre instants silencieux où seul son chant nous porte comme sur le début de « Melt », ou explosion de mélodies sur un tempo doomesque, sa musique joue toujours habilement entre différentes facettes, un mélange subtil d'influences classiques, goth, rock et metal. La setlist privilégie des morceaux de Forever Blue et du dernier album, As the Moon Rests, dont « Evaporate » reste sûrement le sommet. On se laisse porter au fil des mélodies et des émotions, sur un nuage isolé, mais protégé au milieu d'une tempête – le groupe nous offre un moment hors du temps, propre à l'introspection.
Setlist :
For Nothing
Evaporate
Without You I'm Nothing (reprise de Placebo)
Love and Pain
Control
Wait
Belong
Pristine
Melt
As the Moon Rests
Kalandra
Cela fait maintenant plusieurs années que je suis Kalandra, et en 2019, alors que la formation était absolument inconnue en France, jamais je n'aurais imaginé en si peu de temps voir une salle complète à Paris crier et applaudir à son arrivée sur scène. Mais les tournées avec Wardruna et Leprous et un passage au Hellfest lui ont donné une exposition dans nos contrées qui a semble-t-il bien payé, puisqu'une grande partie du public semble en fait attendre autant Kalandra que A.A. Wiliams, voire plus. Et la salle déjà pleine à craquer devient impossible à naviguer, que ce soir pour aller au merch', au bar, ou n'importe où : je me retrouve reléguée à l'arrière de la salle sans rien y voir.
Les Norvégiens sont doués pour nouer des liens avec leur public, que ce soit par la communication chaleureuse de la chanteuse qui s'adresse à nous dans son meilleur français ou par un sympathique livre d'or de tournée au merch' où chacun.e peut laisser son petit mot. Ça doit être la quatrième fois que je vois le groupe, et c'est sans doute la meilleure : au-delà de la longueur du set, le groupe est plus propre et carré que jamais, que ce soit pour les morceaux épiques de l'OST du jeu Kingdom Two Crowns : Norse Lands ou les pistes plus calmes ou pop de The Line. Kalandra sait vraiment balayer tout un spectre musical et émotionnel large, créer des instants à fleur de peau comme sur « Borders » ou « It gets easier » (qui n'y verse pas de larmes n'a pas de cœur), tout comme des refrains entraînants de « Ensom » ou « Brave New World ». Et même si l'aspect symphonique des morceaux de Norse Lands m'attirent moins, leur impact en live reste puissant et permet de créer de vrais instants épiques et lumineux. Même le nouveau morceau, « Bardaginn » dont l'aspect plus rock m'attirait moins, se révèle être un vrai tube en live où Katrine peut démontrer toute la puissance de son chant.
Malheureusement, leitmotiv de cette soirée, les problèmes de son reviendront perturber la fin du set : malgré nous avoir fait attendre plus que prévu avant de monter sur scène pour tenter de les régler, le micro se remet à refaire des « pops » en plein milieu de « Helvegen ».
Des incidents qui ne perturbent pour autant en rien le groupe qui finit son set devant un public plus que conquis, au vu du tonnerre d'applaudissement qui les suit alors qu'ils sortent de scène. Bravo et merci – au vu de la hype et du nouvel album à venir, ce n'est que le début d'une belle aventure.
Setlist :
Helheim
Slow Motion
Naive
The Waiting Game
Borders
Virklighetens Etterklang
RAM
Ensom
It Gets Easier
Helvegen (reprise de Wardruna)
Bardaginn
Brave New World
Merci à Garmonbozia pour l'organisation et l'invitation !