Motocultor 2023 - Samedi & Dimanche
Open air - Carhaix
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Après avoir couvert les journées de jeudi et vendredi, nous continuons notre voyage à Carhaix pour les journées de samedi et dimanche. Autant le dire tout de suite, la jounée de samedi a certainement été la plus rude pour les organismes : des bons concerts partout et toute la journée. Heureusement que le site était suffisamment ramassé pour ne pas avoir à courir partout, même si notre diététicien aurait surement préféré ça.
Quoi qu'il en soit, retour sur ces deux journées riches et intenses. Bonne lecture à toutes et à tous !
* * *
Samedi 19 août | Dimanche 20 août
Samedi 19 août 2023
Groupes évoqués : Fuoco Fatuo | Pénitence Onirique | Bleed From Within | Sortilège | Brutus | Russian Circles | Sodom | Scarlxrd | Watain | Bullet for my Valentine | Amenra | Little Big
Fuoco Fatuo
Supositor Stage
Di Sab: Etrange de voir les Italiens au Motocultor. Groupe mélangeant death metal et doom - voire funeral doom, le public est plus habitué à croiser ce blase et ce logo symétrique au Klub ou au Kill Town plutôt qu’aux côtés d’Alestorm sur une affiche généraliste. Le fait de tourner avec Bell Witch semble leur avoir ouvert des portes incongrues et c’est donc à 15 heures, devant un public ni forcément connaisseur ni forcément réceptif que les Lombards doivent défendre leur art.
En la faisant courte, il fut difficile de rentrer dans le set. Le parterre clairsemé, le son un peu faiblard et l’inadéquation totale entre le public et le groupe a contribué à ne pas rendre l’expérience hyper immersive. A partir de là, difficile de se plonger dans la musique pourtant pas si mal retranscrite de Fuoco Fatuo. On retiendra tout de même l’enthousiasme du quatuor et leur reconnaissance envers l’audience. Sans doute peu habitués à jouer devant plus de cent personnes, on ne peut être que ravis pour eux, en attendant de les revoir dans de meilleures conditions.
Pénitence Onirique
Massey Ferguscene
Malice : J'étais très curieux de découvrir Pénitence Onirique en concert, quelques années après avoir découvert « V.I.T.R.I.O.L. » au détour d'une compile des débuts des Acteurs de l'Ombre, dont on peut dire que PN incarne à fond le style « maison ». Ca peut plaire ou déplaire, mais les leads de guitare de ce premier album m'avaient rendu fou à l'époque, avant d'être déçu du second, un peu trop produit et bâtardisé à mon goût.
Le rendu sera un peu le même en live : des envolées me feront planer par moments, des passages plus « génériques » me feront retomber. Mais le chant, bien plus perceptible en concert, prend alors une toute autre ampleur et le groupe a un charisme assez clair, qui se perd trop dans ces conditions de festival. À revoir en club, et je redonnerai une chance à Vestige.
Bleed From Within
Dave Mustage
Michaël : Je ne vais pas mentir, Bleed From Within c’est un peu un plaisir coupable. Sur album, c’est un metalcore finalement assez technique mais qui a parfois quelques excès de miel et de facilité. Du coup, on oscille entre le très bien et quelques titres qui nous rappellent que c’est du metalcore et que certains travers sont difficiles à éviter. Mais en live, c’est une autre paire de manche. Je n’en ai pas parlé dans le report du Brutal Assault car il est difficile de tout évoquer en si peu de temps, mais j’avais déjà été séché par l’énergie, le dynamisme, la justesse et aussi ce petit soupçon de plaisir d’être sur scène.
Et rebelote au Motocultor, en dépit d’un Scott Kennedy peut-être un peu diminué : le groupe a fourni un show vraiment solide. Une communication peut-être un peu outrageuse (c’est bon les mecs, on sait qu’on n’est pas le meilleur public de la tournée et ce n’est pas grave), mais tout le reste fut exemplaire. Pas de grande surprise côté setlist, mais c’est toujours mandale sur mandale avec des titres comme « Levitate » et surtout le duo final « I Am Damnation » et « The End of All We Know », devenu titre phare du groupe. A noter également un son excellent, l’histoire de s’enjailler comme il faut et de monter les coudes sur les breakdowns. Un excellent moment du festival pour les coreux modernes.
Setlist :
Stand Down
Sovereign
Levitate
Into Nothing
Pathfinder
Killing Time
Flesh and Stone
I Am Damnation
The End of All We Know
Sortilège
Massey Ferguscene
Malice : Je ne sais pas trop à quoi m'attendre en allant voir Sortilège. Chacun a son avis sur la question mais en ce qui me concerne, le heavy metal m'a toujours conquis par une voix ; Halford est le Priest, Tate est Queensrÿche, Dickinson est Maiden – Zouille est Sortilège. Qu'il ait repris le groupe à son compte, ça en a fait hurler beaucoup, mais une chose est sûre, si ses compères avaient lancé un Sortilège 2.0 sans sa voix, je n'en aurais pas eu grand chose à fiche. Le reste est affaire humaine, en coulisses.
Reste que le groupe m'avait prévenu lors de notre interview à paraître : ils allaient mettre le paquet sur Apocalypso lors de son live, fiers de leur bébé et désireux de le tester face au public. Alors, le résultat ? Mitigé. D'abord parce que le son ne sera pas à la hauteur de la légende : la voix est surmixée, au détriment notamment de l'excellent travail de Bruno Ramos (ex-Manigance) à la guitare solo. « Amazone » (dont je ne comprends pas le statut figé dans le marbre de titre d'ouverture...) et « D'ailleurs » prouvent cependant que Zouille a toujours une Voix, avec un grand V : loin de trop en faire, il gère le souffle et l'âge à merveille. « Messager » est un peu plus délicat car s'adaptant assez mal à ce nouveau grain, mais le moment de vérité, ce sont les... 6 nouveaux titres joués ce soir. Comme sur album, le verdict est mi-figue mi-raisin : certains, comme ce « Poséidon » qui aurait sa place sur Larmes de Héros, ou le presque trop massif « Les Portes de Babylone », sont tout simplement bons. « Le Sacre du Sorcier » a un côté taillé pour le live également avec son refrain un peu « à boire », pas forcément malvenu. D'autres titres, comme ce lourdingue « Attila » (en duo avec Stéphane Buriez de Loudblast, ça n'aide pas...) ou le bancal « La Parade des Centaures », étaient clairement de trop à mes oreilles, d'autant que quand on voit le grand moment qu'a été « Chasse le Dragon » (avec un Zouille en grande forme), c'est incompréhensible de ne pas avoir un peu plus capitalisé sur les tubes de l'époque (pas de « Mourir pour une Princesse »...).
L'essentiel, cependant, est (d')ailleurs : le groupe a la banane, même dans le chef d'un Zouille qu'on a pu connaître un peu distant et qui n'a pas hésité ici à cabotiner, plaisanter avec ses compères ou avec Buriez. Et le public a paru comblé... même si la setlist, on en est sûr, évoluera lors d'une future tournée pour mieux combler les fans. Parce que là, je repars un peu frustré...
Setlist :
Amazone
D'ailleurs
Le Sacre du Sorcier
Messager
Attila (avec Stéphane Buriez)
Chasse le Dragon
Poséidon
Derrière les Portes de Babylone
La Parade des Centaures
Vampire
Sortilège
Brutus
Dave Mustage
Malice : Drôle d'histoire que mon rapport à Brutus. Jusqu'à un magnifique concert au Lokerse Feesten, la musique des Louvanistes me filait des boutons, rien de moins ; mais les titres du dernier album (alors à paraître) Unison Life m'avaient envoûté, et Stéphanie avait fait des progrès indéniables au chant. Depuis, Unison Life est sorti et je l'ai poncé : j'arrivais donc avec des attentes... cette fois déçues.Surtout parce que Stéphanie m'a parue terriblement essoufflée, incapable de reproduire le chant clair qui parsème les hits du dernier album (« What Have We Done » et « Victoria » en deviennent assez atroces). Clairement, Brutus va souffrir de l'enchaînement des dates tant sa batteuse/chanteuse a encore l'air de ne pas maîtriser son souffle par moments, et les compositions n'atteignent pas leur plein potentiel sans son chant à fleur de peau. Un concert que j'ai fini par fuir...
Russian Circles
Massey Ferguscene
Michaël : La beauté des festivals réside parfois dans la surprise. La découverte d'un groupe que l'on ne connaissait pas, le fait de se replonger dans un groupe que l'on avait injustement écarté. Russian Circles se place clairement pour moi dans cette seconde catégorie. Vu mes goûts, du post-metal instrumental n'est en principe pas coché sur le running order du festival. Puis on se laisse porter par la curiosité, et on apprécie l'étendue de son erreur. On se rend compte que l'assimilation du groupe avec ceux qu'il avait pu accompagner en tournée était une erreur, un préjugé crasse. De la douceur, de la lourdeur, de l'intensité. Peu de mouvement mais quelques gestes, quelques sourires suffisent. Porté par une setlist traversant les âges, les Américains ont délivré un set hyper solide et immersif, bien aidé par des lights et un jeu de fumée dans la droite lignée de ce que l'on peut attendre pour un tel concert. Un grand oui, à tous égards.
Setlist :
Station
Harper Lewis
Conduit
Betrayal
Quartered
Gnosis
Mlàdek
Sodom
Dave Mustage
Di Sab : Pas maintenant Tom, pas comme ça, pas après tout ce que tu as fait ! Pour recontextualiser, longtemps, Sodom a été l’exact inverse de Kreator : de bons albums studios récents mais des presta live en dents de scie. La faute à un réel manque de puissance provenant du fait que le groupe évoluait en trio. Depuis le retour de Blackfire et le passage en quatuor, la qualité des concerts s’est améliorée de manière drastique, nous en avons eu la preuve de nouveau lors du Brutal Assault. Malheureusement, à Carhaix, ce fut un jour sans. La faute déjà à une setlist amputée de nombre de classiques (« Remember the Fallen », « The Saw is the Law », « Christ Passion » et « Augustbomb ») et à un son faiblard nous rappelant le Sodom pré-Covid. A cela s’ajoute des guitares pas tellement audibles lors de la première moitié du set (alors que ce fut lors de la première moitié que furent joués les meilleurs titres). Un coup dans l’eau pour la bande à Angelripper qui était plutôt sur une bonne dynamique ces dernières années. A la prochaine, qui ne devrait tarder.
Scarlxrd
Massey Ferguscene
Malice : Mais putain, qu'est-ce que c'était que ça ? Voilà en gros ce que probablement une bonne partie du public réuni sous la Massey Ferguscène a dû se demander. Et même moi qui étais à peu près prévenu, je n'ai pas tout compris. De son backflip sans élan pour lancer son concert à l'heure de dévastation sonore qui a suivi, SCARLXRD, seul en scène, a TOUT démoli. Le Motocultor a poussé loin les limites de l'expérimentation sur ce coup, car SCARLXRD, c'est du rap, clairement. Du rap plus violent que les concerts de Terror et Hatebreed réunis, ça aussi, c'est clair. Son chant est saturé, hardcore de A à Z, pas de respiration, pas de mélodie, la fosse est en fusion.
Watain, dont j'envisageais d'aller voir une moitié ? Rien à foutre. J'observe SCARLXRD, visiblement aussi choqué de l'accueil que nous de sa prestation, et je me demande comment c'est possible de rester aussi énergique pendant 40 minutes. Bien sûr, rap oblige, des bandes viennent parfois lui permettre de reprendre son souffle, mais sans qu'il en abuse. Le futur des afterparty en festival, c'est peut-être cette scène trap-metal si sombre et viscérale qu'elle met une bonne partie de l'affiche à l'amende...
Watain
Supositor Stage
Di Sab : J’ai totalement lâché la meute de Danielson après Lawless Darkness. Album qui a repris le flambeau de Dissection tout en ouvrant une voie à tout ce black mélodique, habité et/ou visuel, il a été succédé par un des plus gros glow down de la musique extrême : The Wild Hunt. Depuis, difficile de retrouver de l’excitation pour les Suédois malgré un The Agony & Ecdtasy of Watain pas trop mal fagoté.
Ne les ayant pas vu depuis 2015, je retrouve le groupe au même point : un décorum impressionnant, une torche qui sert à allumer toute sorte de bougies ….avant de finir lancée dans le public ?????? L’ayant déjà fait au Brutal Assault, je ne comprends pas comment le groupe a encore le droit de se produire et de faire ça. Qu’importe, les plus fanatiques diront que c’est raccord avec l’attitude jusqu’au boutiste du groupe. Servis par un son absolument parfait, le groupe a le bon goût de sortir un rare « Satan’s Hunger » accompagné des plus convenus « Legion of the Black Light » et « Malfeitor ». On peut déplorer une absence de titres antérieurs à Sworn to the Dark, mais ce soir, Watain a donné un concert réellement intéressant. La dimension premier degré est tellement poussée qu’à aucun moment, le public sort du concert et se rend compte du ridicule de la situation alors qu’ils se trouvent devant un petit bonhomme d’1m60 qui joue à l’apprenti sorcier entouré de ses grands copains. Concert excellent d’un groupe qui ne l’est plus autant que par le passé.
Setlist :
Night Vision
Ecstasies in Night Infinite
Legions of the Black Light
The Howling
Satan's Hunger
Dead but Dreaming
Serimosa
Total Funeral
Malfeitor
Waters of Ain
Bullet For My Valentine
Dave Mustage
Malice : ENFIN. Pour une raison incompréhensible, Bullet For My Valentine était le dernier « groupe de mes 16 ans » que je n'avais pas encore vu en concert, alors que je pourrais franchement les considérer comme le plus important du lot pour pas mal de raisons. Et alors que je les avais complètement lâchés après Scream Aim Fire, les trois derniers albums (Venom et l'éponyme surtout) m'ont réconcilié avec la bande à Matt Tuck.
C'est donc avec un coeur d'ado et prêt à chanter comme une midinette que je me pointe devant la main stage.... Mais ceux qui pensent que Bullet For My Valentine en est resté là ont une guerre de retard. Oui, le côté looké est toujours là, mais c'est un véritable mur de son que balance Bullet dès « Knifes », issu du très agressif - il est vrai - dernier album. Ce n'est tout simplement plus le même groupe, et après des années un peu pénibles, Tuck a retrouvé toute sa voix mais s'est surtout accompagné d'un bassiste (Jamie Mathias) dont le growl booste totalement le rendu live. Bon, « Your Betrayal » et « Over It » restent des choix discutables mais après ça, ce sera tube sur tube, timing oblige. Matt joue d'ailleurs un peu sa princesse : « Visiblement, on est la première partie ce soir, j'ai pas vraiment le temps de causer, donc on va enchaîner ». Il répétera le même grief un peu plus tard, visiblement dégoûté de ne pouvoir jouer que 10 titres.
« 4 Words (To Choke Upon) » et « All These Things (I Hate) » entament le supplice du pauvre mec devant moi, qui m'avait en mono et Michaël en stéréo : ce sera karaoké faux à en crever pendant tous les titres de The Poison, qui prennent une ampleur incroyable avec ce nouveau son moderne. Je lâche presque une larme (sans rire) pendant « Tears Don't Fall » tant ce titre a été important pour moi, et je termine le concert sans voix, littéralement, puisque je connaissais encore chaque ligne de « Suffocating Under Words of Sorrow (What Can I Do) » et « Waking the Demon ». Impossible d'être objectif : j'ai eu 16 ans pendant 45 minutes, et j'en veux encore.
Setlist :
Knives
Over It
Your Betrayal
4 Words (to Choke Upon)
All These Things I Hate (Revolve Around Me)
Scream Aim Fire
Shatter
Tears Don't Fall
Suffocating Under Words of Sorrow (What Can I Do)
Waking the Demon
Amenra
Massey Ferguscene
Di Sab : Amenra au Motocultor. En lisant cette phrase nominale, vous imaginez. Vous les entendez, ces espèces d’outres à Bavaria avinée qui beuglent pendant les passages acoustiques ? Et bien nous aussi on les a entendu. Dès le départ, mon voisin a le bon goût de nous prévenir : « je vous le dis direct, je vais être chiant ». Faute avouée à moitié pardonnée, c’est sans trop de difficultés que je rentre dans le concert, sachant d’avance à quoi m’attendre. Alors même si Colin avec des cheveux ressemble à Zelensky et semble pleurer toutes les larmes de son corps pour que le peuple de Carhaix lui fasse don de F16, Amenra reste une incroyable valeur sûre en live. Les finaux de « Solitary Reign » et « Diaken » font partie des moments les plus intenses de ce festival comme toujours. Aux rayons des changements, on remarque que le film projeté en arrière plan a quelques couleurs et que Colin passe une large partie du concert face au public, là où les 3 fois précédentes, je n’avais qu’une vue sur son gibet de potence inversé.
Le premier paragraphe parle du public et effectivement, entre les quelques slameurs et les sifflets pendant le spoken word, il y avait de quoi souffler. Mais on est au Motocultor, on sait à quoi s’attendre. On conseille aux plus puristes d’entre vous d’aller les voir au Roadburn ou en Belgique. Pour notre part, on se contentera de cela bien amplement.
Setlist :
Razoreater
De evenmens
Thurifer et Clamor ad te Veniat
Plus près de toi (Closer to You)
Am Kreuz
A Solitary Reign
Diaken
Little Big
Dave Mustage
Malice : Bon, ce sera court : si je respecte profondément la carrière de Little Big, autant dire que leurs débuts me parlent beaucoup plus que ce qu'ils proposent depuis un ou deux albums, qui me paraît être globalement une blague dénuée d'intérêt musical. En live, j'étais curieux... sauf que depuis leur départ forcé de Russie, j'ai l'impression que le combo autrefois iconoclaste s'est totalement départi de tout cet aspect satyrique : pas de « With Russia From Love », de « Russian Hooligans » ni même de « Everyday I'm Drinking », juste cette espèce de musique d'auto-tamponneuse sans grande profondeur qui donne l'impression d'être au Dour Festival. Alors oui, c'est rigolo, ça devait être la fête dans le public, mais l'intérêt me paraît désormais un poil limité...
Dimanche 20 août 2023
Groupes évoqués : Church of Misery | Shadow of Intent | Bell Witch | Cave In | Archspire | Rise of the Northstar | Soen | Converge | Dying Fetus | Eyehategod | Carpenter Brut
Church of Misery
Bruce Dickinscene
Malice : Pas sûr que le doom/sludge baveux des Japonais de Church Of Misery était la meilleure façon d'ouvrir ma journée (oui, quand on a 30 minutes de route et que les concerts se terminent à 2h, on est rarement sur le site pour le premier groupe). Mais pour le coup, le côté assez débonnaire de l'ensemble aura été assez adapté : pas de cette crasse premier degré à la Eyehategod ou de passages planants à la Elder ici, juste ces riffs rebondissants et cette attitude « à la Ozzy » du chanteur Kazuhiro Asaeda revenu de manière assez incompréhensible après avoir été le tout premier vocaliste du groupe en 1995. Le concert sera court, l'occasion de se rendre compte que « Most Evil (Fritz Harmann) » et « Freeway Madness Boogie (Randy Kraft » issus du dernier album sont de vraies tueries, ce dernier ayant tout pour rester un classique. C'est gras, carré (ce bassiste...), ça ne décolle pas vraiment mais regorge de plans taillés pour le live (« Born to Raise Hell (Richard Speck » en point culminant). Church Of Misery sera resté un second couteau, mais un second couteau très sympathique.
Setlist:
El Padrino (Adolfo de Jesus Constanzo)
Most Evil (Fritz Harmann)
Brother Bishop (Gary Heidnik)
Freeway Madness Boogie (Randy Kraft)
Born to Raise Hell (Richard Speck)
Shadow of Intent
Dave Mustage
Michaël : L'an dernier, j’avais eu la chance de voir le groupe à Paris. Un peu moins de chance car c’était au Glazart. Quoi qu’il en soit, c’était vraiment incroyable de voir le groupe envoyer parpaing sur parpaing dans une salle chauffée à blanc, fort d’un dernier album (Elegy) tout simplement exceptionnel. J’avais donc hâte de voir le groupe remonter sur scène.
Malheureusement, j’ai été assez déçu du concert. Rien à reprocher aux membres du groupe, en réalité : setlist plutôt convaincante et équilibrée qui ne se repose pas trop sur le dernier opus, un Ben Duerr qui confirme qu’il est dans le top 3 des chanteurs de deathcore… Simplement, avec un son très aléatoire (vent ?) et assez faible (orchestrations largement sous-mixées), ce fut assez délicat de prendre pleinement la mesure de la musique du groupe. Idem, une programmation sur une scène aussi grande n’était pas forcément l’idée du siècle… J’aurais adoré les voir sous la grande tente ou sur la Supositor Stage ; le public aurait peut-être été plus compact mais les conditions meilleures. Show en demi-teinte, donc ; en attendant de revoir les monstres américains dans notre contrée.
Setlist :
Gravesinger
Barren and Breathless Macrocosm
The Migrant
The Heretic Prevails
The Catacombs
Farewell
Blood in the Sands of Time
Malediction
Bell Witch
Bruce Dickinscene
Di Sab : Je le confesse au nom de l’équipe, on a été médisants. Nous avons littéralement passé le festival à se moquer du concert à venir de Bell Witch. 40 minutes en plein jour pour un titre de Funeral Doom d’une heure vingt. Comment cela aurait-il pu fonctionner ? Et bien en fait ce fut super. Comme convenu le duo joue « The Clandestine Gate » en amputant toute l’intro au clavier et la fin, et comme pour la troisième fois de l’année, le rendu est vraiment fidèle. La tente n’était pas blindée, loin s’en faut, mais le public n’était pas trop con, ce qui n’était pas gagné d’avance quand on se rappelle d’Amenra. Au-delà de cette considération, le concert fut assez difficile à décrire. La musique peut être percue comme à la fois hyper émotionnelle ou peut laisser parfaitement indifférent. On peut simplement reprocher l’absence des parties de clavier initiales qui donnent au titre une réelle majesté et contribuent à l’immersion du public, mais difficile pour le groupe de faire mieux dans pareilles conditions. Vrai défi relevé avec brio.
Setlist :
The Clandestine Gate (partie)
Cave In
Massey Ferguscene
Di Sab : Raconter ce concert me pose un dilemme. Il questionne en effet la position du sujet racontant. Pour vous dire, je n’étais pas fan de Cave In jusqu’à l’année dernière et la sortie d’Heavy Pendulum qui est mon album de l’année passée. Les ayant vu le jouer en intégralité au Roadburn, j’ai eu le meilleur du groupe. Au Motocultor, le concert fut franchement honnête, mais à des années lumières en deçà de celui d’avril. A partir de là, que dire ? Insister sur le fait que Cave In est un groupe qui tient sa réputation en live ? Que le rendu est franchement professionnel avec une setlist tout de même focalisée sur le dernier en date pour mon plus grand plaisir ? Ou mettre en valeur le goût de trop peu qui vient directement du fait que j’ai eu un concert parfait en avril ? Insister sur le fait que certains de mes titres favoris de Heavy Pendulum n’ont pas été choisis pour faire partie de la setlist (alors que « Floating Skulls » est littéralement taillé pour le live et que « Waiting for Love » est vraiment un titre incroyable) ? Un concert classique et honnête, une exécution sans bavure mais pas transcendante, pour celles et ceux qui apprécient le post metal de Cave In. Pour les autres, on est tout de même loin du groupe dont les compos prennent, sur les planches, une tout autre dimension.
Setlist :
New Reality
Searchers of Hell
Nightmare Eyes
Jupiter
Innuendo and Out the Other
Heavy Pendulum
Careless Offering
Blinded by a Blaze
Archspire
Supositor Stage
Storyteller: Je vais avoir du mal à être objectif tant j’attendais ce groupe qui a bousculé le tech death et qui a su se faire une place dans le genre avec un aspect décalé, que ce soient les clips ou la chaine youtube de Dean Lamb, le guitariste qui fait des tutos guitare death à sa femme tout en causant de tout et n’importe quoi. Dans le pit, le gars à côté de moi se mouille la nuque (littéralement) et mon autre voisin m’annonce qu’il ne veut plus de frais dentaires après le concert en se débarrassant de toutes ses dents. J’ai chaud, très chaud. Et les voilà sur scène, après un discours rigolo, les claques commencent à être distribuées. « Abandon the Linear » envoie tout le monde valser. Le son est bon, les guitares s’entendent toutes, ce qui est un vrai plus tellement la technique déborde de chacun des musiciens. Mais Archspire, c’est surtout le groupe qui a décidé que plus c’est con, plus c’est bon. Alors ils balancent un twister dans le pit entre deux chansons (vous savez le jeu avec des points de couleur sur un tapis et on dit « main gauche sur rond jaune »…) imaginez le bordel. Puis Oli, le chanteur nous montre son cul, il nous parle des pratiques sexuelles des membres du groupe, fait participer le public. Ils sont hors norme à tous les niveaux et ça me rappelle pourquoi je suis fan des Canadiens. Huit titres, que des hits. Terminer par « Drone Corpse Aviator » finit d’achever le public. Dingue mais génial, génial mais dingue.
Setlist:
Abandon the Linear
A Dark Horizontal
Remote Tumor Seeker
Golden Mouth of Ruin
Human Murmuration
Bleed the Future
Involuntary Doppelgänger
Drone Corpse Aviator
Rise of the Northstar
Dave Mustage
Michaël : Le constat habituel avec Rise of the Northstar, c’est de voir à quel point le groupe est polarisant. Les fans de hardcore leur tournent souvent le dos (pas assez impliqués dans la scène ; imagerie pas très raccord avec le genre ; etc.), une partie du grand public trouve cela presque ridicule et… force est de constater que malgré tout le groupe a trouvé son public. Et un public fervent. Ils avaient déjà fait mal à la warzone au Hellfest 2023 et là ils ont remis le couvert. Malgré un son assez faiblard et fluctuant, les franciliens ont déroulé leur set – aux allures de best of – devant un pit en mouvement continu et des slammeurs en nombre.
Aimant le groupe avec parcimonie, j’ai quand même eu de quoi me mettre sous la dent avec quelques vieux titres. La transition avec la prestation XXL de Archspire a toutefois été un peu difficile. Quoi qu'il en shoit, chaque nouveau festival, chaque nouvelle tournée avec des dates à n’en plus finir, met en lumière le succès de ROTN. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, on ne peut que se réjouir de les voir grimper les échelons rapidement, pour la scène française (et les points UEFA). Et on n’est jamais contre chauffer ses épaules sur « Here Comes the Boom » ou « Nekketsu » à l'occasion.
Setlist :
The Anthem
Showdown
Third Strike
One Love
Here Comes The Boom
Welcame (Furyo State of Mind)
Samurai Spirit
Nekketsu
Rise
Again and Again
Soen
Massey Feguscene
Storyteller: Soen est un groupe qui ne joue pas sur des artifices ; ils sont sincères, heureux de partager leur musique avec le public et communicatifs. Alors quand les musiciens débarquent sur la scène et que résonnent les premières notes de « Monarch », un des titres de Imperial, l’attention est captivée. Joel, le chanteur, est d’une simplicité désarmante. Là où d’autres vont en faire des caisses, lui il déroule des notes pas toujours simples mais d’une justesse incroyable. Et son regard croise celui des spectateurs comme une communion directe avec chacun d'entre nous.
Alors pas de furieux pendant le set, pas de pogo, simplement une attention pleine et entière. Le public est au diapason du groupe qui déroule des titres de leurs anciens albums. Rien n'est dit sur Memorial qui arrive le 1er septembre. Le jeu des musiciens est fin, tout autant que leur musique est mélodique. Ils s’amusent à mettre des ballades dans le set pour faire retomber la pression, puis relancent avec « Antagonist ». Cody assure à la guitare mais aussi aux sourires en direction autres membres du groupe et au public, pendant que Martin, derrière ses fûts, est d’une douceur et d’une précision qui font de lui un des grands du genre. Le concert se termine sur « Lotus », un de leurs classiques et on est heureux de savoir qu’ils reviennent dans quelques mois, parce que ce n’était clairement pas assez !
Setlist :
Monarch
Deceiver
Savia
Antagonist
Lascivious
Lotus
Converge
Dave Mustage
Di Sab : Converge n’a pas la plus constante des réputations live. On a tendance à dire qu’ils font partie des groupes dits « un sur deux ». Une bonne presta pour une catastrophe. Suite à une prestation franchement médiocre au Brutal Assault, Bannon a décidé de remettre d’équerre Carhaix. Entrée sur l’ouverture de Jane Doe (l’incroyable « Concubine »), puis balayage en règle de la quasi intégralité de la discographie (avec un focus sur Axe to Fall). En général, deux choses pèchent dans les mauvais concerts de Converge : un son un peu aléatoire qui rend brouillon la dimension chaotique du hardcore des Américains, et un Bannon sous ventoline dont le chant tient plus de l’aboiement que d’autre chose. Ce soir, aucun de ces deux défauts à signaler de mon côté ; même si certains m’ont fait remonter la dimension un peu aléatoire du son. On remarque l’attitude assez unique de Bannon qui, dès les deux tiers du set commence à faire un compte à rebours (il reste 5 titres, il en reste 3, plus que deux) et on se réjouit d’avoir eu une bonne perf' de ce groupe aussi intéresant qu’inconstant.
Setlist :
Concubine
Dark Horse
Eagles Become Vultures
You Fail Me
All We Love We Leave Behind
Reap What You Sow
Axe to Fall
Cutter
Worms Will Feed/Rats Will Feast
Dying Fetus
Supositor Stage
Michaël: C’était quasi-parfait, voilà. Deuxième fois que les vois en une semaine et c’était aussi bien. Indispensable, même. Avec une setlist bien puissante (« Grotesque Impalement » pour une dose de grou grou, des grands classiques comme « One Shot, One Kill », deux nouveaux titres bien bagarre issus de prochain album Make Them Beg for Death : « Unbridled Fury », « Compulsion for Cruelty »…), un son parfait et un groupe en forme, la Supositor a pris vraiment cher. Alors on est toujours sidéré de voir un peu de mouvement sur scène et un Gallagher lâcher ici ou là un sourire, mais quel plaisir de voir ce groupe en pleine nuit, retourner le Motocultor en bonne et due forme. Sans aucun conteste un des meilleurs concerts du festival, de A à Z.
Setlist :
One Shot, One Kill
Subjected to a Beating
We Are Your Enemy
Unbridled Fury
In the Trenches
Grotesque Impalement
Compulsion for Cruelty
From Womb to Waste
Wrong One to Fuck With
Eyehategod
Bruce Dickinscene
Di Sab : D’une constance crasse, Eyehategod poursuit l’objectif qu’il s’est fixé il y a des décennies : parcourir et salir. En tournée perpétuelle, les prestations du groupe se suivent et se ressemblent. Ils montent sur les planches avec leurs trombines de personnes ayant trop vécues et trop consommées, ils jouent leurs titres au nutriscore Z et ils repartent à quelques kilomètres refaire la même chose.
C’est toujours pareil, c’est toujours aussi bien. Jamais la moindre baisse de régime, jamais de performance meilleure que les 10 précédentes et les 30 suivantes. On peut simplement noter que cette fois ci, les Néo-Orléanais semblent se focaliser sur la partie la plus rapide de leur répertoire. Après un début tout en lourdeur avec le début de « Take As Needed From Pain », le tempo s’accélère sur « Blank » et ne redescendra qu’à des occasions plus rares que d’habitudes. Un petit « Kill Your Boss » pour le plaisir, un classique « Sister Fucker » et un « New Orleans is the New Vietnam »pour conclure et c’est en patrons que Williams sort de scène. Flegmatique et efficace.
Carpenter Brut
Massey Ferguscène
Michaël : Au Hellfest, j’avais pris la délicate décision d’assister au show débile mais succulent de Municipal Waste en lieu et place d’un set de Carpenter Brut sur la mainstage, avec plein de guests. La première prestation était tellement bonne et drôle que le regret d’avoir manifestement raté un concert XXL du français était un peu limitée. En attendant la date de l’Olympia et l’anniversaire de Garmonbozia en novembre, j’ai quand même eu envie de faire un peu craquer mes genoux en cette dernière journée de festival. Et grand bien m’en a fait. Un très bon jeu de lights, une setlist solide un peu best-of, des protagonistes jouant parfaitement leur rôle… Solide de bout en bout.
Forcément, quand on revoit la vidéo du Hellfest avec l’impact des guests, on va toujours un peu avoir ce sentiment qu’il manque quelque chose. Mais la réalité est que j’ai perdu le peu de neurones qui me restaient à ce moment du weekend sur « Mobster Roller », et rien que pour ça c’était parfait. L’ouverture des festivals metal à ce genre d’artistes est résolument une bénédiction.
Setlist :
Opening Title
Straight Outta Hell
The Widow Maker
Roller Mobster
Beware the Beast
Day Stalker
Disco Zombi Italia
Imaginary Fire
Leather Terror
Turbo Killer
5 118 574
Le Perv
Maniac
Et c'est sur ces dernières notes électroniques que cette nouvelle édition du Motocultor se termine. Une édition qui nous laisse un goût bizarre en bouche. D'un côté, celui d'une réussite musicale tant la programmation a été belle et, surtout, osée. A côté de valeurs sûres de la scène metal et hardcore, le festival nous a offert la possibilité de voir un certain nombre d'ovnis musicaux - rap ou de musique électronique - qui nous a ravi. A ce titre, le festival a été une très grande réussite, n'ayons pas peur des mots. D'autre part, une organisation encore friable sur des points pourtants basiques, laissant place à une certaine frustration tant tout aurait pu être parfait.
Nous avons de toute évidence espoir que le Motocultor redresse - certains diront enfin - la barre sur ces points afin d'offrir à un public toujours aussi fervent et fidèle l'expérience musicale qu'il est en droit d'attendre. Vivement l'édition 2024 !
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Nos remerciements au Motocultor Festival et à NRV Promotions pour les accréditations et l'accueil.