Nos essentiels des années 2010 - Heavy, Power et assimilés
vendredi 26 juin 2020Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Après la famille du Speed, Thrash et autres joyeusetés bien régressives, place au seigneur, au vieux sage, plus tronc que branche de notre bien-aimé Metal : le Heavy, auquel nous avons décidé de joindre par sens pratique le Power, dont la désuétude aurait quand même rendu fort compliquée un top décennial dédié (remarquez, je pensais la même chose du Death Mélo, et ils ont fait du bon boulot, les salauds...).
Côté Heavy Metal, par contre, la décennie écoulée a semblé offrir un nouveau souffle... ou plutôt un second souffle. En effet, cette décade fut placée sous le signe du revival, d'abord avec la renaissance de certains artistes oubliés des années 80. On pense alors à Cirith Ungol, Manilla Road, Heavy Load, Ashbury, Sortilège et bien d'autres, qui ont vu leur retour couronné d'un (premier) véritable succès d'estime, conséquence de l'engouement du public pour de nombreux festivals spécialisés ayant remis ces artistes au goût du jour. Le légendaire Keep It True et le Muskelrock suédois nous viennent à l'esprit pour ce qui est de l'Europe, tandis que le Pyrenean Warriors Open Air, le Court of Chaos et le Rising Fest, ont grandement participé à ce renouveau Heavy et Hard dans notre hexagone. Et puisque le Metal est souvent affaire de transmission et d'héritage, la redécouverte de ces "hidden gems" du Heavy a entraîné l'apparition d'une flopée de nouveaux groupes, notamment dans le "Epic Heavy Metal" qui, s'inspirant de leurs ancêtres avec plus ou moins de mimétisme, sont reconnus actuellement comme des piliers de ce second souffle Heavy/Power. Certains des plus illustres représentants de ces "petits jeunes" se trouvent d'ailleurs dans cette sélection.
Vous le constaterez donc dans ce top 20, on ne peut pas forcément considérer que ce soit le renouveau dans la forme qui soit au programme, mais bien un apport de qualité, représenté notamment par cette si pratique appellation NWOTHM (New Wave of Traditional Heavy Metal), dont le côté hype est indéniablement symbolisé par le fait... qu'elle dispose de sa propre chaîne YT dédiée. Spoiler : si vous vous promenez à l'aveugle dans la nasse, vous ne mordrez pas que dans du poisson frais, mais Horns Up a fait une partie du travail pour vous en sélectionnant quelques joyaux de ces dix dernières années, agrémentés de choix bien plus personnels, histoire quand même de créer le débat.
Heureusement, le Heavy fait aussi partie de ces styles où les vieux de la vieille sont toujours bien présents, malgré le temps qui passe et l'âge qui vient ; certains ont été retenus pour leur retour en force, d'autres auraient pu l'être mais sont bien présents dans nos coeurs.
Eternal Champion – The Armor of Ire (2013)
Matthias : Comme l'ami Malice l'évoquait dans son intro, le Heavy/Power Metal vit depuis quelques années un véritable renouveau, qui ne se nourrit pas seulement d'inovations musicales ou d'influences nouvelles, mais aussi du retour d'un certain esprit. Peste soit de tout ces groupes parodiques, volontairement ou non, qui se sont répandus jusqu'en haut des affiches des festivals ! Si j'aime que mon Metal traditionnel soit résolument tourné vers le fantastique, je l'apprécie d'autant mieux quand il est joué avec le sérieux nécessaire. Et si The Armor of Ire se présente avec un visuel fleurant bon la masculinité toxique, nous sommes quand même plus proche de l'hommage à Robert E. Howard que de la campagne de pub pour un club de culturisme à tendance fétichiste, à laquelle se livre un certain groupe plus lourd que l'acier depuis 1980.
Le premier (et pour l'instant, toujours unique) album de Eternal Champion nous plonge la tête la première dans un monde qu'arpentent des armées et des peuples en marche, avec à leur tête de puissants chefs de guerre déterminés à briser d'antiques malédictions. Un univers qui rappelle donc fortement celui dans lequel évolue Conan, référence littéraire que le groupe cite d'ailleurs volontiers en interview, et qui nous est conté par la voix sans pareil de Jason Tarpey. Dès les premières mesures de "I am the Hammer", le Texan conquiert son auditoire avec un sens de la diction proprement fascinant, qui n'est pas sans rappeler une ancienne saga ou un poème épique. Tarpey ne ressent pas le besoin de pousser plus que nécessaire sa voix dans les aigus, ce qui pour moi marque toujours la limite entre le génial et le crispant quand on aborde le Heavy traditionnel. Quant à la partie instrumentale du groupe, elle évite une grandiloquence trop souvent entendue ailleurs pour se concentrer sur son alchimie interne, soutenant de ses soli la charge furieuse de "The Last King of Pictdom", avant le déchaînement de guitares d'un "The Cold Sword" qui semble jaillir d'un portail démoniaque nous reliant aux années 80 pour nous offrir le meilleur de cette décennie de tous les extrêmes.
Avec seulement 34 minutes, The Armor of Ire est un album très court, et c'est sans doute son seul défaut, même si on peut apprécier une certaine concision dans un genre musical qui se pose en antithèse de toute sobriété. Quoiqu'il en soit, on en ressort épuisé, l'esprit encore hanté d'épées brandies vers les étoiles et de citadelles en flammes se détachant du ciel nocturne. Eternal Champion n'est peut-être pas le groupe qui a ressuscité le Heavy épique. Mais il lui a pour le moins rendu ses lettres de noblesse.
High Spirits - Another Night (2011)
Dolorès : Rarement un groupe aura si bien porté son nom. High Spirits est l'un des projets musicaux les plus survitaminés que je connaisse. Tout y est : les road trips, la plage, les néons de la ville, la vitesse et toute la bonne humeur du monde. Entre balades à l'eau de rose et odes à la fête, Another Night est un concentré de tubes qui se suivent, tous plus entêtants les uns que les autres. Le projet a réellement inscrit son propre son dans le paysage musical, entre Heavy et Hard Rock énergique, au tempo soutenu, très aérien et mélodieux.
Chris Black, derrière le projet (ainsi que Dawnbringer, par exemple et parmi d'autres), alors dans sa trentaine en 2011, portait plus que jamais à travers cet album un idéal presque fantasmé, une envie de jeunesse éternelle, à regarder les étoiles et les lumières urbaines plantées dans un décor de feux de voiture et d'alcool à foison. Les deux albums qui ont suivi n'ont malheureusement pas tout à fait cette saveur d'innocence et cette pointe de créativité ultra authentique et sincère qu'Another Night possède et garde à travers les années.
Sumerlands - Sumerlands (2016)
Traleuh : Sorti le même mois que le scintillant, l'inénarrable The Armor of Ire, dont l'éclat herculéen se fait toujours largement ressentir aujourd'hui, il était évident que le premier disque de Sumerlands en constituerait comme un écho fuyant et fragile, un pendant de circonstance à l'automne louvoyant alors. Un disque doux-amer donc, crépusculaire, à l'image du destin fatal de cet Anzû illustrant la pochette, l'aigle des vents méridionaux, l'aile des cieux parcourant ces dernières terres d'ocre. Des paysages évoqués simplement, au détour d'une révéberation soutenue, une voix comme vernis doré de cette histoire funeste. Du Heavy Metal qu'il emprunte, Sumerlands n'en garde même plus le spectre ; comme une carcasse fumante, par laquelle l'envol peut vraiment prendre, un scabellon d'airain faisant trôner ce curieux marbre. Alors que le revival du genre se complaît trop souvent dans un abîme de médiocrité, rappelons-nous de ce magnifique outsider que fut Sumerlands quelque quatre ans plus tôt : un album snobant presque ses origines pour mieux les vivifier, un crêpe bleu outremer garnissant le crâne vieillissant d'un grand souverain.
Iced Earth - Dystopia (2011)
Malice : Iced Earth, ou l'histoire d'un gâchis. Le potentiel du groupe de Jon Schaffer paraissait infini à l'époque des Night Of The Stormrider, Burnt Offerings et Dark Saga, a fortiori avec l'arrivée dès ce second album de l'incroyable Matt Barlow au micro. Mais Iced Earth va commencer à stagner, jusqu'à ce départ de Barlow pour l'ex-Judas Priest Tim « Ripper » Owens en 2004 pour deux albums qui me restent chers, mais sans qu'Owens parvienne à remplir le vide laissé par son prédécesseur... avant, pour la deuxième fois de sa jeune carrière, de se faire jeter pour que ce dit-prédécesseur revienne au micro. Mais si Barlow reste aussi brillant en live, Crucible Of Man est de loin l'album le plus faible des Floridiens... et le vocaliste se barre à nouveau, définitivement cette fois, en 2011. Soyons clairs : on ne donne alors pas cher de la peau de ce qui restera à jamais l'un des « what if » les plus douloureux du heavy metal.
Nous voilà donc à l'aube de la décennie et Iced Earth sort son 10e album-studio avec un certain Stu Block au chant. Pour être clair, Matt Barlow, notamment par sa performance stellaire sur Alive In Athens, est probablement l'un des chanteurs m'ayant le plus fasciné (son projet Ashes Of Ares n'est pas inintéressant, mais reste anecdotique) et je n'étais pas optimiste... mais c'est simple : Block est un prodige. Un prodige encore trop souvent coincé dans une forme de mimétisme agaçant sur ce premier album du "renouveau", mais capable d'atteindre des notes que même Barlow n'allait pas chercher (Boiling Point!!!) et de bien plus de finesse que Tim Owens. Mais surtout, Stu Block n'est probablement pas pour rien dans le retour d'une certaine inspiration chez Iced Earth : finie la mollesse de Crucible Of Man, le groupe, enfin débarrassé de l'encombrante trilogie "Something Wicked" (qui n'a jamais rimé à rien, soyons clairs), enchaîne les hymnes. Sans véritable pièce de bravoure comme à la grande époque des débuts, mais avec des titres s'étant imposés rapidement comme des classiques (V, Anthem, Dystopia) dont je me surprends à scander tous les textes. Certes, les ambiances ne sont pas aussi fines que sous Barlow, l'émotion moins forte (malgré le poignant End of Innocence, écrit par Block en hommage à sa mère mourante), et il manque une certaine profondeur pour faire de ce Dystopia la résurrection qui aurait pu permettre à Iced Earth d'enfin reprendre sa place tout en haut du genre. Malheureusement, Plagues Of Babylon (2014) ne transformera pas l'essai...
The Devil's Blood - The Thousanfold Epicentre (2010)
Di Sab : Entre 2008 et 2013, The Devil’s Blood a brûlé d’une incandescence que peu de groupes ont atteint. C’est cette chaleur qui pue le soufre que l'on perçoit dans chaque solo de Selim et dans chaque feulement incantatoire de Farida, c’est cette conviction dans chaque riff plaqué et c’est cette façon d’écrire pour prendre à la gorge qui a immédiatement rapproché le groupe des aînés de Dissection.
Comme tout ce qui flambe avec ardeur, cela ne pouvait durer. Alors que Come Reap et The Time of No Time Evermore versaient dans une incendescence brute, il y a dans The Thousanfold Epicentre, une névrose qui préfigure la triste fin de The Devil’s Blood.
Dans A Rebours, Huysmans met en scène Des Esseintes, un dandy dont les nerfs malades lui rappellent la mortalité de son corps qui a trop joui. Il y a dans The Thousanfold Epicentre ces légères touches nauséeuses, cette surcharge qui écoeure et qui fascine. Car cet opus est tellement sophistiqué dans ses arrangements, dans sa profusion de chœurs, dans la technique qui a été nécessaire à sa conception que son écoute rend fébrile et marque à jamais.
Des Esseintes, par obsession du beau, décide de sertir une tortue de pierres précieuses, qui décède sous le poids des joailleries. The Thousanfold Epicentre est ce fruit mûr, tellement gorgé de vie, de beau, qu’il en est macabre. Selim Lemouchi n’est plus. Lui survit ce Palais du Facteur cheval audible dont la beauté aussi ultime qu’obscène me marquera à jamais. Indispensable. Inoubliable.
Satan - Life Sentence (2013)
Sleap : 2013 restera à jamais gravée dans ma mémoire comme l’année de tous les « comeback albums ». Entre les Satan, Warlord, Black Sabbath, Gorguts, Carcass, Broken Hope, Mercyless et j’en passe, je ne savais plus où donner de la tête ! Mais dans ce bilan Heavy, je ne m’attarderai que sur les deux premiers susnommés. Dirigeons-nous tout d’abord vers le tribunal où le Juge – mascotte emblématique de Satan – nous attend…
Le vers « Life Sentence, it’s been 28 long years! » qui ouvre le refrain du titre éponyme résume parfaitement ce retour en force des Anglais. Fleuron de la grande époque NWOBHM, le combo de Newcastle revient en 2011 avec exactement le même line-up que celui du culte premier full-length Court in the Act de 1983. Et deux ans plus tard, le verdict est sans appel : la mort ! En effet, depuis l’ouverture Time to Die jusqu’à l’iconique Life Sentence, en passant par les énormes Siege Mentality ou Testimony, ce disque est une tue-rie ! Je suis tout simplement sidéré de voir des musiciens proches de la soixantaine revenir après quasiment 20 ans de pause et pondre un album de cette qualité. Pas de ringardise, pas de lenteur ou de longueurs, c’est même tout le contraire. Le guitariste et fondateur Russ Tiptins nous montre qu’il est toujours l’un des gratteux les plus techniques et véloces de toute la scène anglaise. Quelle vitesse, quelle inspiration ! Chaque morceau possède son enchainement de riffs uniques. Tantôt ultra rapides, tantôt plus posés avec quelques accents orientaux, aucun titre n’est en dessous d’un autre. Et pour couronner le tout, l’argument qui servira de coup de marteau final lors de ce jugement : la voix de Brian Ross ! En compagnie de très rares exceptions (comme Harry Conklin de Jag Panzer), Ross est certainement le « vieux » vocaliste de la grande époque à avoir encore aujourd’hui un coffre identique à celui d’il y a 40 ans, y compris dans les typiques cris aigus. Bref, nul besoin d’en dire plus, la sentence est irrévocable : meilleur comeback Heavy Metal des années 2010. La séance est levée !
Atlantean Kodex - The White Goddess (2013)
Circé : En 2013 sortait un album qui mettra bien vite à peu près tout le monde d'accord. Le deuxième essai des Allemands d'Atlantean Kodex, The White Goddess, s'est imposé comme une pierre angulaire de la décennie pour les scènes heavy et heavy/doom. Avec la force d'un heavy épique de la meilleure facture, la majesté d'un Bathory période Hammerheart, des lignes de chants et choeurs puissants, une aura prégnante pleine de classe et de grandeur se dégage immédiatement de ce petit joyau. Dès les choeurs ouvrant « Sol Invictus », on est pris dans une cavalcade épique à travers les légendes européennes que nous conte le groupe. Conjuguant influences old school, production résolumment moderne et sens de la composition proche de la perfection, Atlantean Kodex s'empare sans conteste du trône du heavy/doom épique en 2013 – une place qui n'a fait que se confirmer avec la sortie de The Course of Empire l'an dernier. Et que dire d'autre, finalement ? Les adeptes sont déjà convaincus, on ne va pas forcer les quelques uns qui n'ont pas adhéré. Et si par hasard il y en a encore qui n'ont pas écouté Atlantean Kodex, je vous envie, car vous allez bientôt faire une merveilleuse découverte.
In Solitude - Sister (2013)
Di Sab : When the day goes to sleep and the full moon looks, when the night is so black that the darkness cooks. En deux vers, Peter Green de Fletwood Mac a posé, en 1970, une ambiance si évocatrice qu’elle marquera la musique à tout jamais. De Judas Priest aux Melvins en passant par Therion, The Green Manalishi a été repris et est devenu un standard.
Et c’est dans ces ténèbres opaques comme un perfecto qu’on imagine In Solitude concocter le giallo sonore qu’est Sister. Une intro abstraite, une cascade de riffs gloomy, une capacité à découper un plan par un riff sorti de nulle part, des soli acérés comme une lame chez Argento, In Solitude a transposé en musique ce qui me plaît tant dans le cinéma horrifique italien : l’atmosphère avant tout et une esthétique légèrement décadente et extrêmement travaillée au service même de cette ambiance. The World The Flesh The Devil allait à l’essentiel et positionnait In Solitude comme des descendants de Mercyful Fate officiant dans le heavy brut composé de bangers glauques. Sister est moins figuratif, mais en se détachant un peu de l’efficacité, In Solitude arrive à parfaire l’atmosphère suffocante qui entoure sa musique. Les guitares acoustiques, le chant qui lorgne vaguement vers le post-punk, chaque élément est bien mesuré et contribue à faire de ce chant du cygne le bijou immersif qu’il est.
Car Sister est le dernier album en date d’In Solitude. Le groupe a tiré sa révérence avec l’opus le plus ambitieux de leur carrière et celui où leur potentiel s’exprime pleinement. C’est à la fois dommage et à la fois beau de se retirer après ce pinacle. Restent des souvenirs et cet opus à l’image de son artwork. Une dernière vision, un dernier cri avant la nuit.
Grand Magus - Triumph & Power (2014)
Malice : La présence de Grand Magus dans cette sélection se justifie par le fait que si les Suédois ont commencé leur carrière en faisant principalement dans le doom, voire en tirant sur le stoner par moments (JB Christofferson était après tout le chanteur de Spiritual Beggars de 2002 à 2010 !), ils ont par la suite bifurqué vers un heavy metal bien plus traditionnel, quasi-Manowaresque (pour le meilleur et le pire), du genre dont on scande les refrains en slip de fourrure le corps oint d'huile et les cheveux au vent. Et si mon album favori de Grand Magus reste Hammer of the North (2010 et donc éligible !), les sonorités qui nous intéressent se retrouvent clairement sur ce Triumph & Power plus épique que jamais. Du duo introductif On Hooves of Gold / Steel vs Steel au majestueux The Hammer Will Bite, l'album ne faiblit pas vraiment sur la durée, tout en restant axé principalement sur du mid-tempo porté par la toujours aussi solide voix de JB, bien plus énergique que sur les dernières sorties du groupe.
Malheureusement, et malgré le potentiel incroyablement tubesque de Triumph & Power (mention spéciale à ce morceau-titre !) Grand Magus restera toujours le cul entre deux chaises : signé sur Nuclear Blast et abonné aux premières parties de luxe (ma seule expérience du groupe en live date d'une tournée avec... Amon Amarth), ils ne parviendront jamais à se faire une place dans tout ce revival de heavy « traditionnel » qui regorge de groupes bien moins inspirés qu'eux. Ils auraient pourtant tout autant leur place dans le coeur du public du Keep It True ou du Pyrenean Warriors que Visigoth ou Eternal Champion si ce monde était bien fait...
Powerwolf - Blood of the Saints (2011)
Michaël : Personne ne prend au sérieux Powerwolf. Vous auriez dû voir ma tête le jour où j’ai découvert le groupe sur scène. Les accoutrements, les paroles, les visuels et le nom du groupe, quoi. Power-wolf, sérieusement ? C’est du même niveau qu’un énième groupe de Death qui se présenterait avec un nom de viscères ; tu ne peux pas faire plus ridicule. Alors forcément, en gagnant en popularité, le groupe est devenu un sujet de discussion, souvent pour se moquer gentiment. Et on ne peut blâmer personne. Mais la vérité est que derrière ce succès grandissant, derrière ce grand cirque qui peut amuser, se cache un groupe à la musique ultra efficace et accrocheuse. Et même si le groupe n’a jamais brillé par ses prises de risques ou par les évolutions de sa musique, ils ont clairement marqué les esprits avec la boîte à hits que constitue Blood of the Saints sorti en 2011.
De la grandiloquente Sanctified with Dynamite à l’entraînante We Drink Your Blood en passant par les taillées pour le live All We Need Is Blood, Dead Boys Don't Cry ou bien encore Night of the Werewolves, Powerwolf nous a offert sur un plateau un album ultra dynamique, agressif, précis, mélodique et enjoué. Rarement j’avais été autant porté par un album de power. Certes, c’est un peu ridicule, les paroles ne ressemblent à rien et leur délire peut laisser pas mal de monde sur le carreau. Mais si l’on se laisse prendre au jeu, ce Blood of the Saints vous emporte. Un torrent de titres fédérateurs où chaque refrain mérite d’être scandé à tue-tête. Un must-have.
Visigoth - The Revenant King (2015)
Dolorès : On peut dire que cette sélection d'équipe est clairement orientée Heavy à tendance doom et épique, quand même. Et s'il y a bien un groupe dans cette veine qui a marqué les esprits par son kitsch entremêlé de sérieux, au caractère entêtant au possible et à la manière des plus grands, c'est bien le premier album de Visigoth.
On y retrouve Jake Rogers au chant, aussi connu pour ses apparitions dans l'album de Caladan Brood et pour son mémorable projet Gallowbraid. Un peu plus orienté Black épique, certes, mais on y retrouve le même feeling d'heroic fantasy entre merveilleux et sombre. L'atout principal de Visigoth reste indéniablement sa voix, entre lyrisme et solennité, toujours ancrée dans des textes extrêmement clichés mais jouissifs.
S'enchaînent ainsi les pistes, chacune ayant son propre refrain à clamer (« Blood Sacrifice », « Iron Brotherhood »), sa progression inattendue et épique (« Dungeon Master », « Mammoth Rider », « Vengeance ») ou encore un feeling extrêmement enjoué et catchy (« Creature of Desire » qui était déjà sur l'EP précédent ou encore la reprise « Necropolis » de Manilla Road). The Revenant King est bien plus rentre-dedans que son successeur, sorti en 2018. Le genre d'album qui s'écoute autant en plaisir solitaire qu'entouré, un album fédérateur qui rassemble autour d'hymnes.
Idle Hands - Mana (2019)
Varulven : Le choix d’inclure Idle Hands dans ce bilan peut paraître quelque peu surprenant de prime abord, de part la jeunesse du projet. S’il n’est pas le premier groupe « récent » à être décortiqué ici (en témoignent Eternal Champion, Atlantean Kodex ou Visigoth), il est en revanche le seul parmi ces « nouvelles formations » à n’avoir aucun background conséquent. Formée en 2017, la bande de Portland va très vite sortir son premier EP Don’t Waste Your Time (2018), avant d’enchaîner un an plus tard sur son premier longue durée. Sobrement intitulé Mana, cet album, sorti de presque nulle part, connaîtra très vite un franc succès, à la fois public et surtout critique, finissant dans les bilans de nombreux médias spécialisés à la fin de l’année. Un succès qui se manifestera par plusieurs grosses premières parties (Gaahls Wyrd et Tribulation en Europe et King Diamond aux USA), ainsi qu’une omniprésence promotionnelle sur les réseaux sociaux, à grands coups de campagnes de merch, de pressages de vinyles limités et de posts Facebook et Instagram à tout va.
Une surcharge de buzz qui me fait malheureusement penser que cette explosion ne sera peut-être qu’un feu de paille… Pourtant, Idle Hands n’est pas un cas isolé. Cette popularité fait écho à une tendance de plus en plus régulière dans la sphère Metal actuelle : le retour au premier plan de la musique gothique des 80’s. Dans le Metal extrême d’abord, avec Tribulation pour le Death, puis Blaze Of Perdition et Secrets of The Moon pour le Black. Et maintenant dans le Heavy grâce à Idle Hands, chose que l’on avait plus vu dans le « Metal Lourd » depuis la fulgurante (mais brève) ascension des Suédois de In Solitude. Mais là où ces derniers étaient davantage portés par un souffle sulfureux et occulte, les Américains poursuivent leur chemin sur un terrain plus nocturne et nostalgique, cet opus étant un véritable road trip au coeur d’un environnement urbain froid, timidement éclairé par quelques réverbères aux lueurs froides et bleutées un soir de pleine lune.
Le périple est sinueux et vaporeux, jalonné par des titres Post-Punk aux arpèges cristallins (mention spéciale à Jackie et son ton langoureux, qui donne envie de contempler la ville, enlacé avec celle que l’on aime). Mais il connaît plusieurs rebondissements typiquement Heavy, grâce aux riffs catchy et aux refrains entêtants des tubes Blade and The Will ou Give Me To The Night, que l’on peut aisément chanter le point levé, d’un air aussi rageur que les rugissements lycanthropiques du chanteur, qui surgissent au milieu de ses lignes vocales de crooner gothique. Un ton mélancolique qui s'accentue sur le morceau titre, final des plus déchirants qui conclue ce premier effort de la plus émouvante des façons. Mélange de Heavy Metal sombre et de Sisters of Mercy, Idle Hands sublime à merveille sur Mana ce dualisme entre énergie et spleen, qui on l'espère, sera poursuivi au-delà de là où s'est brillamment arrêté In Solitude.
Hell - Human Remains (2011)
Malice : Si la résurrection et le revival sont des thèmes réguliers, presque un fil rouge, pour cette sélection, peu de groupes l'incarnent aussi bien que Hell, revenu d'entre les morts de manière presque littérale à l'aube de la décennie. Plus de 20 ans après la dissolution du groupe et le suicide de son chanteur d'origine, Hell revenait, signature sur Nuclear Blast à la clef, à l'initiative du guitariste et surtout producteur Andy Sneap (Sabbat) qui convainquait Kev Bower de relancer le groupe et d'enfin enregistrer un premier album, cette fois avec le comédien et chanteur Dave Bower, frère de Kev, au micro. Un coup de génie car Human Remains frappe très fort et place immédiatement Hell dans la cour des grands, dans un style tout sauf purement old-school.
Dès l'incroyable On Earth as it is in Hell, on plonge dans la folie furieuse : Dave Bower n'est pas un vocaliste, il est un prophète, un flagellant absolument taré dont les hurlements théâtraux sont uniques, donnant presque l'impression de danser sur le fil de la justesse – alors qu'il suffit de voir l'homme en concert, véritable acteur habité par sa performance, pour comprendre le niveau technique sublime qu'il atteint. Les ambiances à couper au couteau rendent Human Remains fascinant de bout en bout, de pièces grandiloquentes (Blasphemy & The Master) aux vrais tubes (The Quest et son refrain surprenant, Let Battle Commence) sans jamais sombrer dans la facilité ou le prévisible. Après un Curse & Chapter (2013) plus moderne et tout aussi réussi, on attend désormais la suite de ce qui est l'un des comebacks les plus fracassants de la NWOBHM...
Hällas - Excerpts From A Future Past (2017)
Circé : En 2015 naquit un vaillant chevalier du nom d'Hällas, dont les péripéties nous sont narrées par de valeureux Suédois à travers une musique personnelle, unique, à mi-chemin entre hard rock, heavy metal, rock progressif – et certainement nourrie d'un fort amour pour les jeux vidéos d'aventure médiévaux-fantastiques. « Adventure Rock », étiquette qu'ils ont donné à leur musique, ne saurait mieux décrire le voyage qu'ils nous proposent sur trois albums concepts (un EP et deux albums, pour être plus précis). Excerpts From A Future Past, premier long format à proprement parler, est celui qui a permis à Hällas, en 2017, de se faire son petit nom. Nous avons été nombreux à nous retrouver ensorcelés par le timbre de voix de Tommy, les compositions à la fois progressives et épiques, fortement suggestives, cette recherche sur les textures des claviers – sans aucune peur de tomber dans un kitsch totalement assumé et bien dosé –, ces superbes artworks...
Pour ma part, j'ai découvert Hällas avec la sortie de cet album et l'ai écouté en boucle pendant un bon bout de temps avant d'arriver à passer à autre chose. Et encore, je l'ai tant réécouté qu'il est aujourd'hui devenu un fidèle compagnon très personnel – de ces albums qui deviennent une part de vous. Hällas propose une musique à la fois candide et mature, baignée dans des thématiques chevaleresques typiques du heavy et fantasques, psychédéliques du prog 70s, et de tant d'autres influences parfaitement assimilées par nos cinq musiciens pour en faire une création complètement originale.
Au delà du « hit » qu'est « Star Rider », Excerpts est un voyage complet, beau, doux, épique, fantasque et magique. Le héros éponyme, Hällas, a certes conclu ses aventures à la fin de Conundrum, sorti en début d'année... Mais le groupe a clairement de beaux jours devant lui, cet album leur ayant permis une signature chez Napalm Records ainsi qu'une tournée européenne en headliner ! (Si le Covid le veut bien...)
Beware the Mighty Hällas !
Sabaton - Carolus Rex (2012)
Matthias : Comment ?!? Même parmi les tenants de la Vraie Foi de chez Horns Up, il s'en trouve d'assez schismatiques pour apprécier Sabaton !? Eh bien oui. Au-delà de l'occasion de titiller les ayatollahs, le groupe a toujours représenté une porte d'entrée vers le Metal à chant clair. Compositeurs certes parfois redondants mais souvent efficaces, les petits soldats de Falun méritent bien leurs lauriers pour leur réel talent d'écriture, qui en fait aussi d'excellents vulgarisateurs, tant en musique qu'en vidéo.
Et Carolus Rex représente la meilleure preuve de cette sincère passion pour l'Histoire qui anime un groupe qu'on caricature un peu trop souvent comme des passionnés de panzers. La bande à Brodén nous fait le récit, forcément plein de flammes et de fureur, des rois-chevaliers suédois déterminés à faire de leur petit pays une véritable Sparte nordique et protestante, avant de se lancer à la conquête d'un empire baltique, aux XVIIe et XVIIIe siècles. Vaste programme, qui ne manque évidemment pas de charges exaltées, "Gott mit Uns" ou "Killing Ground", mais Sabaton évite avec brio le double écueil de la glorification guérrière et de l'interprétation nationaliste, et prend le temps de se focaliser à hauteur d'homme. "A Lifetime of War" rappelle le summum de l'horreur que fut la guerre de Trente Ans, qui s'achève avec "1648" et le sac particulièrement vénal de Prague malgré la résistance désespérée de ses habitants. On n'en a pas conscience ici, mais du Rhin à la Vistule, le Diable a longtemps été suédois.
Avec cet album-concept sur une période de l'Histoire souvent négligée chez nous, Sabaton ne manque pas d'évoquer les conséquences de ce siècle de fer. La consolidation de l'absolutisme avec le titre éponyme "Carolus Rex", et le passage d'une conception chevaleresque du courage à une volonté plus flegmatique, avec les chœurs à la fois martiaux et animés de ferveur de "The Carolean's Prayer", quand les soldats ont dû apprendre à rester impassibles sous la mitraille avec leur foi pour seule cuirasse. Jusqu'à la campagne de trop et "Poltava". Eh oui, fut un temps où Sabaton n'était pas qu'un générateur de memes, mais un groupe capable de nous offrir un album dont l'esprit se rapproche des grandes tragédies baroques.
Wytch Hazel - II: Sojourn (2018)
Hugo : Le propre de l’âge d’or est souvent de paraître derrière nous, quelques décennies en arrière. On devine aisément que Wytch Hazel place celui-ci dans les 70s, assumant des influences Hard Rock évidentes. Evoluant, dira-t-on imparfaitement, entre Thin Lizzy, Ashbury et Pagan Altar, le quatuor propose avec II: Sojourn un second disque assez brillant. La production lumineuse, quasiment cristalline, s’est véritablement bonifiée comparément au premier album. Les riffs ne sont jamais criards mais toujours catchy, et les compositions, teintées parfois d’influences Folk, se mettent véritablement au service du chant de Colin Hendra, qui porte quasiment chacun des morceaux.
Au milieu de tout un revival nostalgique parfois un peu fade, Wytch Hazel est tel un rayon de soleil qui perce l’horizon. L’artwork du disque l’annonce d’emblée : comme ce cavalier, on part en évasion au travers de longues vallées inconnues, magnifiées par les plus beaux paysages de l’automne. Somme toute, il s’agirait de ne pas réduire le groupe à un condensé d’influences assez évidentes, tant il réussit avec brio à proposer des morceaux intelligents, intenses, autant que des bangers illuminés. Nostalgique comme plus guerrier, avec un storytelling spirituel assez évident (certains diront grossier), II: Sojourn fait véritablement partie de ces disques confortables, vers lesquels on revient pour se sentir bien, et en chanter les différents refrains.
Ghost - Opus Eponymous (2010)
Malice : Une chose est sûre : en 10 ans, le phénomène Ghost a largement dépassé les frontières du heavy metal, dont il a totalement quitté le carcan récemment pour devenir, probablement, une future tête d'affiche de grand festival... même si les déboires extra-musicaux ont un peu ralenti la météoritique ascension de Tobias Forge (car c'est de lui qu'il s'agit et de personne d'autre) vers les stades remplis et le statut de nouveau géant du rock.
Mais en 2010, nous n'en étions qu'aux prémices de cette ascension : Opus Eponymous fait le plus gros buzz qu'on ait vu pour un premier album depuis bien longtemps. Qu'y a-t-il, pourtant, de si novateur à cette espèce de Blue Oyster Cult occulte (je n'ai personnellement jamais compris le parallèle fait par certains avec Mercyful Fate) aux compositions efficaces mais simples, à l'imagerie vaguement sataniste ?
Réponse : rien. Ghost, du moins sur Opus Eponymous, se contente d'utiliser une recette à la perfection, que ce soit au niveau musical avec ce clavier à l'ancienne (mis en avant dès l'intro Con Clavi Con Dio) et ce côté doom « gentillet » (« Scooby-Doom », selon l'appellation géniale du Rock Hard de l'époque), ou au niveau de l'imagerie, classique mais bien pensée avec ce « Papa Emeritus » derrière lequel se cachait Tobias Forge. Un gimmick qui a vieilli, mais qui maintenait à l'époque un vrai mystère autour de l'identité des membres du groupe.
Avec du recul, Opus Eponymous est probablement l'album le moins acidulé de la déjà superbe carrière de Ghost : si les légères influences de pop suédoise (ABBA en tête de file) qui prendront énormément d'importance par la suite sont déjà présentes (les irrésistibles Stand By Him, Ritual, le refrain de Satan Prayer), les ambiances restent très gentiment sinistres, comme un épisode musical des Contes de la Crypte sur lequel se poseraient des riffs et des claviers occultes. Un peu plus d'une demi-heure en comptant intro et outro et la bombe est posée : il n'y a rien à jeter, absolument rien, sur ce premier essai d'un Ghost qui sait déjà à l'époque qu'il ira loin. La reprise géniale du Here Comes the Sun des Beatles annonçait quant à elle déjà ce vers quoi se dirigera le groupe dès Infestissummam...
Smoulder - Times of Obscene Evil and Wild Daring (2019)
Matthias : Si l'influence de Michael Moorcock reste latente au dessus d'Eternal Champion, ce sont les Canadiens de Smoulder qui rendent par leur plume un véritable hommage à l'écrivain britannique qui a offert un nouveau coup de vernis à la fantasy au tournant des années 60-70. Avec Times of Obscene Evil and Wild Daring, cette autre formation active depuis quelques années mais révélée très récemment nous offre un premier album qui transcende le temps et l'espace, dans les pas du héros dont "Ilian of Garathorm" n'est qu'un des nombreux noms. Dès ce premier morceau, la voix de Sarah Ann se fait celle de tout un multivers de prophéties, tout en se permettant des accents plus cristallins sur "The Sword Woman" tandis que les guitares, jusqu'ici en retrait, obtiennent la note finale après un sublime solo de Shon Vincent. C'est peut-être là qu'on touche à la moelle de cette scène récente venue du Nouveau-Monde : chaque membe du groupe n'est plus là pour son propre moment de gloire, mais ceux-ci ont appris à travailler de concert pour obtenir un tout musical cohérent qui offre au groupe une identité inimitable et instantanément reconnaissable.
Smoulder représente pour moi la seconde facette de ce renouveau du Heavy/Power. Si le rituel est bien sûr conduit à la perfection, le groupe lui apporte aussi ses influences Doom, qui prennent carrément le dessus sur "Voyage of the Sunchaser" et font de cet album quelque chose de plus poétique, de plus subtil, que de nombreuses œuvres de fantasy. Et donc un très beau reflet du monument littéraire dont il est inspiré. Bien sûr, le Doom est un genre qui s'est déjà souvent marié aux sonorités épiques, mais Smoulder précipite dans son creuset une alchimie résolument moderne, dans un style qui, chez d'autres groupes, a parfois du mal à prendre pleinement conscience que nous sommes entrés dans un nouveau millénaire depuis son premier âge d'or. Quoiqu'il en soit, les nombreux octaves de la chanteuse achèvent de donner son éclat à cette gemme d'un Heavy Metal apte à réconcilier les tenants des vieilles traditions et ceux qui ont soif de nouveauté. Ultime clin d'oeil aux anciens temps : sur tous les visuels du groupe, ce sont pour une fois des femmes qui, en position de force, brandissent leurs armes.
Accept - Stalingrad (2012)
Malice : Dans la série des comebacks, je demande l'un de ceux dont on attendait peut-être le plus que ça se casse la gueule solidement : celui d'Accept sans son légendaire vocaliste Udo Dirkschneider, qui se contentera désormais de sortir le même album tous les 2 ans et de jouer sur la Mainstage du Wacken tous les ans. Après déjà quelques tentatives de relancer la machine, Accept décide en effet de revenir en 2009 sans, cette fois, se remettre avec son ex mais en introduisant la nouvelle régulière – Mark Tornillo. Et sur Blood of the Nations, le nouveau venu a déjà séduit son monde : ce premier album « post-Udo » est un missile à tête chercheuse dirigé droit vers le coeur des fans d'Accept, tout en ayant remarquablement bien modernisé le son du groupe.
Mais si BOTN aurait pu se hisser dans cette sélection, je lui ai toujours préféré son successeur. Stalingrad : Hung, Drawn & Quartered a beau lancer l'album sur les chapeaux de roue, le mot d'ordre ici est plutôt aux morceaux épiques, comme le très beau morceau-titre (et son insert de l'hymne soviétique !), le mélodique Shadow Soldiers ou encore Hellfire, devenu un classique live avec son riff rampant et son thème plutôt osé – à savoir le bombardement de Dresde par l'aviation Alliée en 45. Tornillo prend un peu plus ses marques, l'album file à une vitesse grand V et forme, avec Blood of the Nations avant lui, une paire d'albums franchement indispensables montrant un visage plus fin d'Accept que celui de « AC/DC du heavy metal » que je leur associais...
Warlord - The Holy Empire (2013)
Sleap : Bien qu’il ne soit pas aussi populaire qu’un Manowar ou même qu’un Virgin Steele, Warlord est l’un des parfaits représentants de ce que beaucoup appellent l’Epic Metal US. Créé tout début 80, au même moment que ces autres grands noms, le combo californien concentre tous les éléments caractéristiques du genre : frontman aux allures de barde narrant les nombreux détails de grandes épopées (tantôt grecques, tantôt nordiques, ou même totalement heroic fantasy) ; rythmique souvent martiale et midtempo, loin de la vélocité du Power germanique ; et surtout riffing extrêmement épuré. En effet, à la différence des formations anglaises de l’époque qui multiplient les échanges de leads et de soli, ces groupes US préfèrent articuler leurs compos autour d’une seule guitare (ici celle de William J. Tsamis). Il en résulte un son pur qui colle parfaitement aux nombreuses mélodies épiques des morceaux. Et ce Holy Empire paru en 2013, 11 ans après la séparation du groupe, respecte à la perfection cette formule ancestrale. De la splendide ouverture sur 70000 Sorrows jusqu’au grand final de 11 minutes du titre éponyme, nous sommes submergés par l’émotion. Que de nostalgie, que de mélancolie ! Nul besoin de longs cris aigus ou de sweeps virtuoses pour rendre le tout épique. Un véritable art de l’épure magnifié par une production parfaite. Mis à part le plus faible Kill Zone en milieu d’album, aucun titre n’est à jeter. Contrairement à beaucoup de vieilles formations qui reviennent 20 ans plus tard et sont totalement à côté de la plaque, il semblerait que Warlord ait au contraire maturé et peaufiné ce Holy Empire pendant des années tant celui-ci est aussi épique que ses cultes Deliver Us ou And the Cannons... du début des 80s. Pour ma part, je l’affirme sans sourciller, cet album est mon favori du groupe. Et, aux côtés du Life Sentence de Satan sorti la même année, il s’agit pour moi d’un des meilleurs comebacks Heavy Metal de ces 20 dernières années. Amen (ah oui, le groupe est chrétien) !
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