Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
La première chose qui frappe avec Toutes ces horreurs, troisième album des Grenoblois de Satan, c'est la pochette. Là où les albums précédents été illustrés de manière assez simpliste et primitive, à l'image de la musique directe et viscérale proposée par le groupe, l'artwork de ce nouvel album est bien plus travaillé et professionnel. Marque d'un changement dans l'approche musical du quatuor ? Oui et non.
Confiture pour cochons, qui introduit l'album, est une sorte de poème surréaliste déclamé sur fond d'une étrange mélopée maladive servie par des instruments à vent. On est très loin de la fureur immédiate et sans filtre que nous proposait le groupe jusqu'à présent. Néanmoins, dès La Guerre Lente, on retrouve l'hybridation entre black metal et punk rugueux, marque de fabrique du groupe. Le son est toujours aussi bordélique et crasseux, la guitare crache littéralement ses accords et la batterie garde ses sonorités brutes de décoffrage. Satan reprend donc de larges pans de son identité avec ce mix très caractéristique, et pourtant, on sent une nette évolution dans la manière de composer. Les morceaux ne sont plus des brûlots frappant vite et fort en une minute et des poussières ; la batterie n'est plus aussi monoblastique qu'elle a pu l'être ; le tempo est globalement moins rapide et constant que sur les efforts précédents. On se retrouve quand même par moment face à des agressions directes et frontales qui ne vous font pas de politesses (Faux-Amis, Peinture au plomb) mais Toutes ces horreurs dévoile en général une volonté de s'éloigner un peu de l'efficacité immédiate qui était jusqu'à présent le maître-mot de la discographie de Satan.
Si on pèse à la louche, Satan c'était 50% de black metal darkthronien et 50% de punk furibard. Avec Toutes ces horreurs, on découvre une belle proportion de black metal plus dissonant et dérangeant (Triste Sœur sur son intro et pas mal d'autres plans disseminés ça et là), quelque chose qui donne une profondeur supplémentaire aux compositions du groupe, les rendants un peu moins immédiates au passage. La seule composante qui reste véritablement stable par rapport aux sorties précédentes est le chant (si l'on excepte l'introduction). La hargne et la détestation suintent toujours de la gorge de Léo et les paroles, toujours en français, se développent à nouveau sur des thèmes de poésie noire et déviante. Satan sait toujours faire des morceaux fascinants avec très peu d'artifices, en témoigne Le Sang des bêtes qui hypnotise dès les premières secondes pour ne plus vous lâcher et synthétise à merveille les nouvelles approches qu'apporte le groupe sur l'album.
Tout en gardant ce qui a fait le sel de ses premiers efforts, Satan parvient avec son troisième album à se renouveler et à se diversifier. Toutes ces horreurs donne toujours envie d'égorger les monstres et les imbéciles, faisant bouillonner une drôle de rage dans les estomacs de ses auditeurs. Mais cette nouvelle fournée donne aussi à voir un groupe plus mature et plus audacieux, n'hésitant pas, par exemple, à s'enfermer presque deux minutes sur un seul riff (la fin du titre éponyme) pour en extraire toute la puissance et la saveur (âcre et nauséeuse). Avec ce nouvel album, les Grenoblois trouvent un équilibre très juste entre leur passé et une envie d'aller voir un peu plus loin si le ciel est aussi gris.
Tracklist de Toutes ces horreurs :
01.Confiture pour Cochons
02.La Guerre Lente
03.Le Sang du poète
04.Caveau Familial
05.Faux-Ami
06.Triste Soeur
07.Zone d'Inconfort
08.L'Ennemie Déclaré
08.Peinture au plomb
10.Le Sang des Bêtes
11.Toutes ces horreurs
12.Lève-toi et rampe