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«Enivrant et gigantesque, Triumph or Agony tire définitivement la fin d’une époque, et dévoile un futur encore plus grandiose et inattendu.»
Eternalis
Voilà ce que l’on pouvait penser des transalpins après un sixième véritable album littéralement différent de tous ses prédécesseurs, aux multiples compréhensions et angles d’écoutes, ayant autant subjugué que déçu.
La rage électrique et métallique s’amenuisait au profit d’une messe érudite et cinématographique, plongeant le modeste auditeur que nous sommes dans les forêts ensorcelées du Dar-Kunor, à la rencontre des esprits elfiques et des diverses créatures légendaires appartenant au mythe Rhapsody Of Fire. Le voyage était complet, total, musical, artistique… mais étrangement peu métallique, se permettant modestement quelques offensives, notamment sur le dantesque "The Mystic of the Demonknight", montrant le visage le plus éclectique des italiens.
«L'essoufflement est selon moi bien palpable, et le groupe a intérêt à réinventer son concept s'il ne veut pas finir aux oubliettes...»
Spirit of Metal
L’essoufflement créatif. Il est certain qu’un groupe précurseur est bien plus souvent en proie à son propre essoufflement, devant garder une ligne de conduite de ce qu’il a lui-même fondé. Et il est clairement visible qu’après un Symphony of the Enchanted Land part II médiocre et insipide, Triumph or Agony, qui marquait par son empreinte musicale si caractéristique, déclarait très distinctement que le Rhapsody des débuts n’était plus…
«L’album montre la face la plus extrême et agressive du groupe.»
Alex Staropoli
Les déboires judiciaires furent nombreux, condamnant momentanément le groupe à l’empêcher de sortir quoique ce soit sous l’appellation Rhapsody Of Fire, l’enfermant probablement dans une sphère de tension et de frustration.
Alors que le groupe annonce son retour, une signature chez Nuclear Blast (qui, un jour où l’autre, posséderont tous les groupes metal de la planète…) et dévoile la direction de son septième album longue durée, The Frozen Tears of Angels, les doutes s’installent. Peut-on réellement rêver du changement ?
Changement il y a, très clairement. The Frozen Tears of Angels est simplement l’album le plus violent, le plus épique, le plus rapide, le plus dantesque et jouissif de la carrière du groupe, l’effet de surprise des débuts néanmoins légèrement en retrait. Et pourtant, qui pouvait s’attendre à une telle déferlante de riffs, de vélocité, de fluidité, de chœurs et de notes pour un nouveau Rhapsody ? Personne mis à part eux…
"Dark Frozen World" sonne le glas d’une période où le metal s’amenuisait au profit des uniques symphonies afin d’enfin unir les deux dans leurs formes la plus parfaite. Les chœurs litaniques s’envolent, la narration solennelle de Christopher Lee est toujours aussi impressionnante tandis que la production s’annonce énorme. Mais une réelle impression de grandeur et de tension émane déjà de cette introduction, loin du mystère des introductions précédentes. Les chœurs installent rapidement une certaine pression, comme si la guerre et la bataille étaient imminentes, l’atmosphère épique est partout… puis ce riff de "Sea of Fate", sa ligne de basse monstrueuse et sa double pédale qui vous accueillent avec fracas. Fabio Lione chante toujours aussi admirablement bien, le refrain est une merveille de mélodie (comme à l’époque) et surtout, on sent que les interventions de Luca Turilli ont été finement travaillées. Pleines de dextérité, de fluidité, d’une célérité à dégouter mais toujours emplies de beauté, il renoue avec une technique qu’il avait eu tendance à un peu trop oublier par le passé. Le constat est le même pour un Alex Staropoli ayant complètement élargi sa gamme de sonorités, ne se contentant plus uniquement de sonorités symphoniques mais aussi de nombreuses nappes, soli et textures synthétiques (ce solo magique sur "Sea of Fate") conférant un peu plus à l’agressivité de l’ensemble.
Il n’y a qu’à écouter les jouissifs "Reign of Terror" ou "On the Way to Ainor" pour s’en convaincre. "Reign of Terror" continue de nous plonger en pleine jouissance auditive, en exprimant une rage jamais atteinte encore par le groupe. S’ouvrant sur un orgue malsain et lointain, des murmures démoniaques et incantatoires, il laisse exploser un des riffs les plus heavy jamais composés. Quelques soli à se couper les doigts retentissent avant un blast beat incroyablement rapide, des hurlements animaux de Fabio Lione ainsi qu’une symphonie complètement débridée et folle. Fabio distille toute sa palette vocale avec une maestria forçant l’admiration tandis que les chœurs sont tous plus monumentaux les uns que les autres. Alex y montre également sa nouvelle approche des claviers pour accentuer la pression musicale alors que l’approche extrêmement technique et déchaînée évoque le "Prophet of the Last Eclipse" solo du guitariste.
"On the Way to Ainor" dresse un Rhapsody, tout au long de sept minutes, hargneux à souhait et grandiloquent où tout s’enchaîne dans une fluidité qui s’était complètement perdue depuis "Power of the Dragonflame", entre envolées lyriques à couper le souffle et parties d’une cantatrice féminine sublime. "Crystal Moonlight" et "Raging Starfire" complètent un tableau d’une rapidité sans pareil, aux arrangements si nombreux qu’il en devient impossible de tout décrire, à la richesse si immense que la découverte en devient une mine d’or où l’on ne sait plus où donner de l’oreille.
La surprenante "Danza di Fuoco e Ghiaccio" installe un interlude moyenâgeux bienvenue dans ce climat de terreur et de guerre, pause nécessaire à la respiration d’un album touché par la grâce et l’envie d’en découdre. Une ambiance de troubadour, des flûtes, mandolines et autres instruments à vent étranges dressent une nouvelle symphonie plus intimiste et magnifique, chantante et presque dansante.
The Frozen Tears of Angels tire sa révérence sur le morceau offrant son nom à l’album, pour douze minutes épiques et teintées d’une plus grande mélodie, comme un flashback de ce que fut le groupe avec une production et une interprétation actuelle.
Une fois ce morceau fini, dont le souffle des forêts tisse le lien avec l’opus précédent, le constat est sans appel ! Rhapsody l’a fait… il tient dans ses mains l’aboutissement de tout un style, de toute une époque, de tout ce qu’il a lui-même instauré. Rhapsody Of Fire vient de donner vie à un monstre, un album déjà crucial dans sa carrière. Un opus qui, clairement, se pose concrètement comme la finalité d’un genre que l’on croyait en bout de course. Plus personne n’y croyait, Rhapsody l’a réalisé… son ultime chef d’œuvre !
1. Dark Frozen World
2. Sea of Fate
3. Crystal Moonlight
4. Reign of Terror
5. Danza di Fuoco E Ghiaccio
6. Raging Starfire
7. Lost in Cold Dreams
8. On The Way to Ainor
9. The Frozen Tears of Angels
Bonustracks
10. Labyrinth of Madness
11. Sea of Fate (Orchestral Version)