Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Avec ses deux (voire trois) derniers albums, Marilyn Manson semble avoir définitivement perdu le goût de la provocation pour se pencher sur une introspection de plus en plus profonde de lui-même. Même s'il garde une aura de mystère autour de lui, le Révérend n'est plus l'ennemi public qu'il a été dans les années 90 et au début des années 2000. Depuis Eat Me, Drink Me, Manson construit sa musique autour de son vécu et les albums qui en ressortent divisent à chaque fois les fans : Manson n'agite plus la Terre entière comme il l'a fait, il remue juste ceux qui s'intéressent à lui. Et c'est bien suffisant.
Killing Strangers débute tout en rythmique, basse bien ronde, rythme ternaire assez lent, on retrouve un peu l'ambiance bluesy qui habitait le morceau Four Rusted Horses. Manson sait toujours y faire avec sa voix, dans les complaintes déchirantes, à mi-chemin entre la colère à fleur de peau et le désespoir latent qui semble l'habiter depuis toujours. Ce premier morceau, moins direct que les ouvertures de Born Villain ou The High End Of Low, offre une entrée progressive dans l'album. Vient ensuite un Deep Six en format pur single, entrainant avec son refrain typiquement mansonien, pas de doute il y a encore du jus dans la machine à hit qu'est Manson depuis ses débuts. Mais ce qui frappe avec ces deux premiers morceaux ce sont les arrangements. La collaboration avec Tyler Bates (compositieur de musique de film, il a travaillé entre autres sur 300 et Watchmen) se sent dans les détails, un travail sur des habillages et des sonorités dicrètes qui arrivent à se faire oublier tout en construisant une ambiance profonde à chaque morceau. Le côté très onirique et inquiétant de Birds Of Hell Awaiting, qui n'est pas sans rappeler I Want To Kill You Like They Do In The Movies dans un format plus court ou Warship My Wreck avec ses nappes qui gonflent lentement montre à quel point le travail des sur les arrangements est précis.
On retrouve également des gimmicks 100% Manson, ses halètements au début de Third Day Of A Seven Day Binge, des phrasés toujours aussi retords avec sa voix trainante inimitable (Slave Only Dreams To Be King). Il n'oublie pas non plus quelques petites saillies envers les réactionnaires qu'il méprise depuis toujours dans les paroles de Killing Strangers ou de l'énergique Cupid Carries A Gun.
The Pale Emperor est en fait un résumé pour ceux qui aurait raté les précédents épisodes discographiques de Manson. Il va chercher dans ses prédécesseurs ce qu'il y avait de plus intéressant, tout en apportant la fraicheur nécéssaire par le biais du travail de Bates. Mais il en ressort quand même une vague impression de déjà vu sur certains passages comme The Devil Beneath My Feet avec sa ligne de basse assez convenue ou le morceau de clôture, Odds Of Even, sorte de ballade sombre comme Manson en fait depuis toujours, intéressante mais trop diluée.
Manson n'est plus l'Antéchrist et ne le sera jamais plus, c'est sûr et certain. Mais son parcours musical reste passionant et The Pale Emperor le démontre encore une fois. Nuancé, précis et profond, ce neuvième album continue dans la lignée des précédents, en améliorant chacun des points forts qu'on pouvait y trouver.
Tracklist de The Pale Emperor :
01. Killing Strangers
02. Deep Six
03. Third Day Of A Seven Day Binge
04. The Mephistopheles Of Los Angeles
05. Warship My Wreck
06. Slave Only Dreams To Be King
07. The Devil Beneath My Feet
08. Birds Of Hell Awaiting
09. Cupid Carries A Gun
10. Odds Of Even