Revue d'actu #16 : Marilyn Manson, Eternal Champion, Gojira, Anna von Hausswolff, Solstafir, Alien Weaponry, Vatican Shadow, etc
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
L'été suit son cours, dans une désespérante absence des habituels festivals et autres événements culturels tandis que le virus a entamé la seconde partie de sa grande tournée européenne. Le temps, qui parraissait déjà long, a viré complètement plombé avec l'installation d'une vague de chaleur qui ne nous laisse pour seul loisir que des apéros en comité restreint. Pourtant, côté news il y a de quoi s'occuper: pour cette quinzaine, pas mal de groupes en ont révélé un peu plus sur leur prochaine sortie respective, avec quelques premiers morceaux à découvrir. Dans un autre domaine qu'on aborde assez peu ici, et c'est peut-être une habitude à changer, d'autres arts font preuve d'un intérêt croissant pour nos styles musicaux de prédilection. Cette fois, c'est l'industrie vidéoludique qui a, coup sur coup, annoncé deux collaborations avec des groupes de metal. Une bonne occasion de redécouvrir des morceaux qu'on pensait bien connaître.
Anna von Hausswolff
Traleuh : On était en début d'année 2018, et Anna von Hausswolff, avec son Dead Magic, éclatait dans toute sa souveraineté ; une souveraineté ardente, sanglante. La Suède trouvait alors sa vengeresse tragique, sa Médée aux organes impies, sa fleur du mal. Et comme en un parfait contretemps, All Thoughts Fly, lui, s'annonce dans le silence sacré de l'orgue, dans toute l'antique amplitude de son spectre acoustique profond.
"Sacro Bosco" constitue en fait un curieux avant-goût, tant sa montée en sève a quelque chose de paroxystique ; une première apnée pour un disque présenté comme plus volubile, plus aérien et, certainement, plus apaisé. De notre côté, on ne doute pas un seul instant que cette année sera à nouveau celle de la suédoise, tant le ralliement à ses côtés de Stephen O'Malley et Nick Cave a quelque chose d'excitant, et tant sa fraîche accession parmi les artistes expérimentaux les plus en vue a quelque chose d'évident. Alors on retient son souffle et on prie pour que l'automne arrive vite.
John Petrucci
Storyteller : Voilà un sacré événement pour tous les fans de guitares et surtout ceux de Dream Theater. Le 4 septembre prochain, John Petrucci sort Terminal Velocity, son premier album solo en 15 ans. Bien sûr cela reste de l’instrumental, et du shredding pour les fans. Mais il faut noter que Petrucci sait aussi s’entourer comme il le faut puisqu’il a rappelé à la basse Dave LaRue qui avait déjà officié sur son premier album solo, Suspended Animation qui date de 2005. Mais la surprise que tout le monde attendait et pressentait c’est la présence derrière les fûts d’un certain Mike Portnoy, que l’on ne présente plus. La séparation entre Portnoy et Dream Theater est oubliée depuis longtemps et on savait les deux hommes en très bons termes.
L’album a été composé en grande partie pendant le confinement et le plus dur de l’épidémie de coronavirus. Petrucci a aussi repris des éléments antérieurs que les fans reconnaitront puisqu’ils sont parfois joués en live. Pour attiser l’impatience de ces derniers, il propose la chanson titre de l’album,"Terminal Velocity" avec un mise en scène des musiciens, jouant chacun de leur côté. On y voit quelques clins d’œil à la culture pop, comme le bébé Yoda de la série The Mandalorian, ou le t-shirt de Portnoy plus quelques images de synthèse, histoire de faire des transitions. Un bon moyen de patienter en somme !
Eternal Champion
Malice : ILS SONT DE RETOUR ! POUR SAUVER 2020 ! AVEC LEUR GROS MARTEAU !!! En voilà une annonce qu'on en était presque venu à ne plus attendre. Eternal Champion, auteur avec The Armor Of Ire d'un des albums les plus marquants du heavy metal ces dernières années (logiquement présent dans notre sélection de la décennie), s'était fait tristement discret depuis. Mais revoilà le Champion Éternel, épée brandie, armure rutilante et sueur au vent, avec même une date pour sa nouvelle offrande: novembre 2020.
Au nom très classieux de Ravening Iron, ce second LP de nos admirateurs de Moorcock se révèlera en détails les 22 et 23 août prochains (très vite, donc), avec un extrait éponyme diffusé par Keep It True Festival TV d'abord, pochette et tracklist ensuite. Le tout via No Remorse Records. En l'absence de tout teaser ou visuel à vous proposer, on vous ordonne de réécouter le tube d'Eternal Champion," Je Suis le Marteau".
Alien Weaponry/Rotting Christ
Matth: Comme pour un bon film, le choix de la bande sonore est capital pour réussir un jeu vidéo. Étrangement, dans les deux cas, peu de réalisateurs ou de studios se sont vraiment penchés sur ce que pouvait apporter le metal, à part, côté vidéoludique, quelques jeux directement consacrés à l'univers musical tels que Brütal Legends. Mais par une étrange coïncidence, deux trailers viennent d'être dévoilés sous fond de musique extrême.
Le premier nous présente Werewolf: The Apocalypse – Earthblood, l'histoire d'un lycanthrope écoterroriste (sic!) au look de biker et engagé dans une vendetta forcément ultra-violente. Pour l'ambiance sonore de cette œuvre basée sur l'univers d'un jeu de rôle éponyme, le studio Cyanide a opté pour le morceau "Kai Tangata" du groupe Alien Weaponry. Difficilement classable d'un point de vue musical, ces Néo-Zélandais avaient bénéficié d'un véritable engouement médiatique il y a une paire d'années, tant leur intérêt pour l'Histoire et la culture des Maoris dénotait des thématiques habituellement représentées dans le metal. Les trois membres du groupe, tous apparentés au peuple maori, consacrent une large part de leurs compositions à la confrontation entre leurs ancêtres et les pressions coloniales européennes, et chantent au moins partiellement en langue maorie. "Kai Tangata" décrit donc les rites, incluant le cannibalisme rituel, permettant d'absorber le mana d'un ennemi vaincu. De toute évidence, on ne part pas sur une expérience de jeu contemplative.
Ensuite, ce ne sont pas moins que les vétérans grecs de Rotting Christ qui se trouvent crédités dans Mortal Shell, un action-RPG développé par Cold Simmetry et qui ne manque pas d'un certain air de famille avec Dark Souls. Pour ce qu'on en sait, le jeu nous plonge dans un univers mythique en passe d'être détruit, et qu'il faudra sauver dans une suite de combats dont l'aspect tactique serait fort poussé. Le trailer nous offre en tout cas une ambiance gothico-ésotérique à laquelle correspond très bien le titre très méditatif "Χ Ξ Σ", issu de l'album Κατά τον δαίμονα εαυτού, sorti en 2013, et que j'avais d'ailleurs sélectionné parmi les incontournables de la carrière des frères Tolis.
Gojira
Circé : Peu de chance que vous soyez passés à côté du retour des géants français de Gojira, mais cette revue d'actu aurait tout de même été incomplète sans mentionner le nouveau single "Another World". Fidèles à eux mêmes, les Bordelais abordent encore des thèmes liés à l'environnement, à notre planète et l'usage que nous en faisons. Une critique sociale toujours aussi juste avec de très belles paroles, jusque là tout va bien. Musicalement, on retrouve tout de suite le côté progressif, mélodique et atmosphérique de Magma dans les riffs, la construction du morceau ou les vocaux de Joe, seulement... Seulement, Magma ne sonnait pas terne et uniforme, ce que m'inspire au contraire malheureusement ce nouveau morceau. A voir ce que Gojira a prévu pour la suite, les singles de Magma s'étaient avérés être les plus accessibles de l'album et il m'avait aussi fallu un peu de temps, comme pour beaucoup je pense, pour apprivoiser ce nouveau visage de leur musique. Quoi qu'il en soit, le magnifique clip en animation justifie complètement l'écoute.
Emyn Muil
Matth:Comme on vous le signalait le mois passé, le projet solo italienEmyn Muil commence à nous dévoiler des pans de son troisième album, intitulé très sobrement Afar Angathfark, et qui sortira le 25 septembre prochain sur Northern Silence Productions. On en connaissait déjà le visuel et la setlist, c'est maintenant un premier morceau que l'on peut découvrir. Intitulé "Halls of the Fallen", il faut bien avouer que celui-ci ne s'éloigne guère bien loin de la zone de confort de Saverio Giove, dont les compositions inspirées des écrits de Tolkien rappellent immanquablement Summoning. Cela dit, l'artiste italien l'assume, et il nous a offert par le passé des morceaux aussi prenants que les plus glorieux faits d'armes de ses mentors autrichiens. Des perles comme "Ar-Pharazôn" ou "Far Umbar" sur l'album précédent Elenion Ancalima s'éloignaient même des usage des Maîtres qui trônent dans les Alpages. "Halls of the Fallen" tient plutôt de la longue ballade mélancolique mid tempo, alternant voix claire féminine, air déchirant au violon et chœurs de guerriers tombés. L'ensemble est joli, mais n'apporte pas grande originalité, et s'écoute au final assez distraitement. Cela dit, je ne jugerais pas d'un album qui nous est annoncé long de plus d'une heure sur un seul de ses morceaux.
Vatican Shadow
Traleuh : Après la récente signature de Prurient chez Profound Lore et ses nombreuses collaborations avec Justin Broadrick, Dominick Fernow renforce la netteté de sa filiation à la scène metal en signant son projet Vatican Shadow chez20 Buck Spin, label américain très en vogue chez les amateurs de Death (Tomb Mold, Solothus, Vastum mais aussi Magic Circle, Obsequiae). Une filiation qui, si elle peut surprendre les fidèles du label, a une véritable cohérence lorsque l'on s'intéresse de près ou de loin à la façon dont Dominick Fernow aura investi le genre de la techno, en recalibrant les codes, visuels comme sonores, d'une sensibilité nouvelle, noire et envoutante, pour Rainforest Spiritual Enslavement comme pour le projet qui nous intéresse donc ici, Vatican Shadow.
Vatican Shadow le polymorphe, Vatican Shadow le nécromancien, celui qui conjure l'esprit de feu Muslimgauze en y implémentant son propre lexique, une pesanteur particulière, comme un spectre gothique venant vernir ce Moyen-Orient obsessionnel, celui de tous les complots, de toutes les paranoias. Et "Rehearsing for the Attack", précisément, porte l'emphase sur ce versant strictement deep techno de Vatican Shadow, comme un charme lénifiant suffisamment occulte pour plaire aux nombreux curieux qui, sans doute, prêteront l'oreille à cette petite extravagance que le label se permet.
Sólstafir
Circé : Je fais partie des adeptes de Berdreyminn, dernier album en date des islandais de Solstafir (comme de leurs méfaits précédents bien sûr) et j'attendais donc avec impatience son successeur. Endless twilight of codependant love sortira le 6 novembre, et le titre d'ouverture, "Akkeri", vient d'être dévoilé. Et ce morceau a tout pour me plaire, ses 10 minutes nous faisant passer de passages simples et émotionels à des explosions un peu plus directes rappelant les premiers albums du groupe, avant de repartir voguer sur des flots plus post-rock, atmosphériques et mystiques. Pourtant, il y a quelque chose qui me chiffone : les vocaux d'Addi, quelquefois peu harmonieux avec le reste, voire poussifs. Alors que la musique est là pour me plaire, je me surprends à chaque écoute à hausser les sourcils sur ces quelques lignes de chant. Sensibilité personnelle peut être, il n'empêche que je ne sais plus si j'attends toujours autant cet album.
Over the voids...
Circé : Petit passage par la Pologne avec un extrait du prochain album d'Over the voids... à sortir à la fin du mois via Nordvis Produktion. "Corridors inside a glacier" ne propose en soi rien d'original, mais applique cependant parfaitement la recette Mgla avec beaucoup de talent et d'efficacité, que ce soit dans les mélodies glaciales, la section rythmique voire le timbre des vocaux. Et vraiment, le morceau porte très bien son nom alors qu'on court dans un dédale de riffs et de blasts froids. Une découverte sympathique pour se rafraîchir au milieu de l'été, qui fera probablement passer un bon moment aux amateurs du genre.
Marilyn Manson
S.A.D.E : Le metal et l'indus, pierres angulaires de la musique de Manson jusqu'à The Golden Age Of Grotesque, se font de plus en plus discrets dans les albums du Révérend au fil des années. Et ce n'est pas ce nouveau single, "We Are Chaos", extrait de l'album du même nom qui sortira le 11 septembre prochain, qui inversera la tendance. Porté par une guitare sèche que Bowie n'aurait pas dénigrée, ce premier extrait lorgne délibérément vers une pop aux entournures un peu sombres mais jamais noires, assez proche du son de Mechanical Animals. La voix de Manson fait toujours son effet, ce chant trainant de dandy goth reste son atout majeur, on est immédiatement tenté de reprendre le refrain avec lui. Sans être une révélation ou un coup de coeur absolu, ce single me semble être tout à fait réussi : efficace, entrainant et un peu addictif, je n'en demande pas plus. Quant au clip, on navigue dans un imaginaire à la Terry Gilliam format Flying Circus qui aurait pris une bonne dose de Tim Burton.