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Album

19 janvier 2015 - Dolorès

Pallbearer

Sorrow And Extinction

LabelProfound Lore Records
styleDoom Metal
formatAlbum
paysEtats-Unis
sortiefévrier 2012
La note de
Dolorès
9/10


Dolorès

Non.

Peu de groupes sont aussi contrastés que Pallbearer. « Sorrow And Extinction », première grande offensive après une Démo, est l'incarnation parfaite des extrêmes qui se confrontent, tirent chacun de leur côté pour obtenir le dernier mot. A la fois massif et lumineux, doux et torturé, vigoureux et déchiré. Ce qui en ressort n'est autre qu'un regard troublé.

Ce premier album s'insère assez évidemment dans la vague assez récente de groupes de Doom rêveurs, mélancoliques, n'appartenant qu'à leur propre bulle. A leur manière, et ne se ressemblant pourtant pas du tout entre eux, des projets comme ceux de Subrosa, Warning, ou Jex Thoth cherchent à exploiter cette même part, très éthérée, à la limite entre le Metal et d'autres styles, en gardant cette touche écorchée mais légère.

On pourrait croire qu'à travers cette ambition, Pallbearer se fait plus accessible, notamment envers les non-amateurs de Doom et de Metal plus généralement. Pas tout à fait. Il faut tout de même avoir quelques prédispositions pour apprécier cela lorsqu'on est étranger à cette scène, comme n'avoir aucun souci pour apprécier des groupes dégoulinant de spleen. Néanmoins, si l'ambiance se fait pesante, les riffs de guitare sont loin d'être agressifs. Les mélodies de premier-plan perceptibles (incluant notamment celles de basse) sont assez claires et restent en tête. La production quant à elle, est un peu étonnante. Sans être sale ou gênante, elle n'est pas tout à fait nette non plus, et cela donne ce grain si particulier au son de ces cinq titres.

Passée la particularité du son, ce qui fait réellement l'intérêt de ce « Sorrow And Extinction » est de voir à quel point une telle simplicité peut faire de l'album un bijou. Si les compositions jouent sur les effets de contraste, le ressenti suit tout à fait la même logique. « Foreigner » met un grand nombre d'accord en ce qui concerne le meilleur titre de l'album. Il a également un statut bien particulier, plongeant l'auditeur dans une position paradoxale. Le morceau est à la fois rassurant, formant comme un cocon serein, et extrêmement éprouvant. Il est difficile à appréhender tant les deux parts sont équivalentes, rendant ces douze minutes inconfortables, apaisantes et préoccupantes. Placé en ouverture d'album, il est inattendu de découvrir l'ensemble par cette facette.

« Shifting path, that makes it hard to tread my way »

A cela s'ajoutent des textes, parlants, intenses, sans tomber dans le ridicule. Il n'y a pas tant que ça de chant dans Pallbearer, Brett Campbell se contentant du nécessaire, même si cela inclue de savoir se taire. Un titre un peu plus bavard, comme « An Offering Of Grief » sur toute sa première partie, permet pourtant à la construction, et notamment celle du chant, d'être pertinente. Il y a ce jeu d'échos, de question-réponse entre la voix et les guitares, qui s'éclipse sur un arrêt net acoustique, et reprend sur un des meilleurs riffs de l'album.

« Given To The Grave » clôture d'une manière évidente et logique l'album, par sa position, et en proposant également un certain aboutissement des morceaux précédents, qui sonnaient déjà comme une parfaite bande-son de funérailles. Quasiment instrumental, il met en scène des élancements mélodiques répétitifs, comme une manière de laisser s'écouler enfin les dernières notes sans se soucier de calibrer quoi que ce soit. Puis vient un solo inattendu, figeant les dernières paroles qui expliquent un peu mieux le titre de l'album.

« Sorrow And Extinction » n'est qu'une histoire de ressenti. Si les structures sont carrées, si les compositions ne s'éternisent pas inutilement, si le chant se fait simple et direct, ils ne sont en aucun cas exceptionnels, de manière technique. On le découvre à force d'écoutes, l'opus peut être vu comme technique d'une seule manière : sa construction est tout à fait réfléchie et pensée au millimètre près, tout en gardant cet effet très naturel. Apprendre les règles et la rigueur pour pouvoir les dépasser. Les éléments, de manière individuelle, ne sont pas spécialement incroyables. C'est l'harmonie générale de ceux-ci qui peut finalement faire de l'album une merveille.
Noir mais brillant.

1. Foreigner
2. Devoid Of Redemption
3. The Legend
4. An Offering Of Grief
5. Given To The Grave

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