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samedi 17 décembre 2011

Ataraxie

Fred, Jo', Pierre et Sylvain

U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

Ataraxie, groupe culte dans le microcosme du Doom Death et pourtant si peu reconnu dans la scène Metal française. Après deux albums aussi géniaux l'un que l'autre, le groupe nous revient en cette fin avec le Projet X, une compilation avec réédition de leur première démo, titres inédits et morceaux live pour fêter ses dix ans de carrière. C'est à cette occasion que je me retrouve face au groupe au complet pour un entretien bien complet.

U-zine : Comment est né l'idée du Projet X et quels étaient les objectifs derrière ?

Jo' : D'une part, nous avions pas mal de demandes vis à vis de la démo The Other Path qui était sold out depuis un petit bout de temps et comme, ça nous faisait mal au cœur de la rééditer vu les moyens qu'on avait utilisé à l'époque, notamment du son, on s'est dit qu'il valait mieux la réenregistrer.

Fred : Déjà au niveau de la qualité du son, on voulait améliorer la chose. A l'époque, on n'était pas satisfait à 100% de l'enregistrement parce qu'on était encore débutant.

Sylvain : On voulait mettre aussi les morceaux à la sauce 2010, se rapprocher plus de ce qu'on fait maintenant bien que les morceaux n'aient pas été vraiment modifiés. On a modifié que les rythmes.

U-zine : C'est beaucoup plus lent...

Jo' : Oui, donc voilà, on s'est dit, si on réenregistre la démo, autant y inclure des morceaux qu'on avait sous le coude depuis un petit bout de temps si jamais on faisait un split ou je ne sais quoi. On y a ajouté un live de très bonne qualité qu'on avait enregistré à Longueau. On s'est dit : « On fait un package, on réédite ça et puis ça fera un bel objet pour les dix ans du groupe ». En plus, avec les titres live, ça fait un bel aperçu pour découvrir le groupe comme il y a des morceaux de toutes les époques.

U-zine : Ca fait un peu best of.

Jo' : Exactement.

U-zine : Le considérez-vous comme un album à part entière ou une simple réédition pour vous faire des pépètes ?

Sylvain : Ce n'est pas un album. C'est avant tout pour les gens qui avaient envie d'avoir cette démo.

Pierre : Et puis en même temps, ça fait plaisir de réentendre ces morceaux là enregistrés correctement et de les rejouer en répète.

Sylvain : Ca faisait huit ans qu'on n'avait pas joué la plupart des morceaux.

Jo' : Voire plus pour certains.

Fred : Du coup, on les a réinclus dans certains sets et c'est amusant de les rejouer en live.

U-zine : Les morceaux avaient-ils vraiment besoin d'être retravaillés ? Après tout, la démo originelle n'est pas si mal que ça.

Sylvain : Ils n'avaient pas besoin d'être retravaillés, ce n'est pas ça. En fait, on a enregistré la démo le lendemain d'un concert et on avait enregistré les morceaux en une prise. On était un peu au taquet. Du coup, on s'est retrouvé avec des morceaux rapides alors qu'ils devaient être plus lents à la base.

Jo' : Il y avait des morceaux qui étaient beaucoup trop rapides comme par exemple, « Unholy Prayer ». Disons qu'on n'avait pas cette approche du tempo à l'époque. On se prenait beaucoup moins la tête.

Sylvain : Nous étions plus instinctifs.

Jo' : Oui, alors que maintenant on se prend beaucoup plus la tête sur ces questions. C'est au BPM près.

Sylvain : Pour te dire, à l'époque, on a enregistré sans clic. Tu vois à quel point on étant débutant (rires). Ce réenregistrement permet donc d'avoir les tempos qu'on avait envie d'avoir à la base.

Fred : Quand on compare les moyens de maintenant avec les moyens d'il y a dix ans. C'était bien d'avoir une démo qui sonnait comme ça à l'époque. Là on a envie de sonner beaucoup plus gros et j'espère que c'est atteint.

Jo' : Il y a des groupes qui ont réenregistré des choses que j'ai trouvé maladroit comme Gorgoroth avec Under The Sign Of Hell et même Bethlehem avec S.U.I.Z.I.D. qui est une horreur. Nous, je pense qu'à l'époque vu qu'on avait le cul entre deux chaises avec l'arrivée du numérique, on n'avait pas réussi à tirer le meilleur parti de la technologie rodée à l'époque. Quand tu prends la première démo de Paradise Lost, par exemple, t'as le charme du son alors que, nous, le son n'était pas là. Il fallait donc faire mieux.

U-zine : « From Agony To Eternity » et « A Jamais » sont donc de vieux titres a priori ?

Sylvain : Oui. « From Agony To Eternity » date de 2003. Il était notamment présent sur le Live Doomination sorti en 2003. C'est un morceau qui est tombé aux oubliettes. Il a été composé à une époque un peu charnière et qu'on aimait bien donc on voulait le faire apparaître. « A Jamais », c'est un morceau qu'on avait composé entre Slow Transcending Agony et Anhédonie qui aurait pu terminer sur le second mais qu'on avait trouvé un peu moins bon que le reste.

Jo' : C'est un peu comme si qu'à chaque album, on composait un morceau pour se dire au final, on va composer quelque chose d'un peu différent. Pour le prochain on en a un ou pas ?

Fred : On ne sait pas (Rires).

U-zine : On saura dans dix ans pour la prochaine réédition. (Rires)

Sylvain : On mettra peut être moins d'un an et demi à la faire celle là.

U-zine : Quitte à être exhaustif, pourquoi ne pas avoir remis votre reprise de Worship ?

Fred : Oulah. Ça avait été enregistré à l'arrache ça.

Sylvain : En fait, Fred et Jo' l'avaient enregistré chez Fred en une après midi avec son matos.

Jo' : C'était pour le fun.

Fred : Si je me souviens bien, quand on avait sorti la première réédition de The Other Path, c'était juste pour avoir un petit truc en plus par rapport à la première édition.

U-zine : Sur cette sortie, on sent que les mélodies reprennent un peu le dessus que ce soit par leur beauté (Mournful Congregation et My Dying Bride) mais aussi par leur intensité (« Unholy Prayer » et « A Jamais ») presque Dark Metal. Est-ce une piste suivie pour le prochain album ?

Réponse collégiale : Non! (Rires)

Sylvain : Ca va pas être très mélodique. Un peu mais pas beaucoup.

Jo' : Ca va être plus sombre avec des passages encore plus brutaux d'autres encore plus lents.

Fred : Il y aura même des moments très dissonants.

Jo' : En fait, c'est un peu inconscient. Ce qu'on écoute ressurgit sur certains passages et pas sur d'autres.

Pierre : Par exemple, quand on a enregistré le split avec Imindain, le dernier morceau n'a rien à voir du tout avec ce qu'on peut composer pour les albums.

U-zine : En fait, quand on écoute le Projet X, les deux passages qui sautent aux oreilles sont ceux avec les mélodies intenses.

Jo' : Il ne sera pas Dark Metalisé en tout cas.

Sylvain : Il sera différent, c'est clair. T'auras la surprise quand il sortira. On jouera au moins un nouveau morceau lors de notre prochain concert à Rouen.

U-zine : Alors justement, à quand le prochain album ?

Sylvain : On espère dans l'année.

Fred : Oui, on est bien parti pour. Après, ça dépendra de la disponibilité des studios.

Jo' : Cela dépend aussi du rythme de répèts car plus le temps passe, plus on a d'autres occupations. Avant, on était des étudiants, on avait le temps.

Sylvain : Ah non moi j'ai toujours travaillé quand j'étais dans le groupe.

Fred : Moi aussi. En fait, on a deux générations dans le groupe. Les jeunes et les vieux. (Rires.)

Jo' : Il y avait l'époque où j'étais en permanence sur Rouen. Maintenant, j'ai déménagé. Et puis, on devient vieux avec femmes, enfants, chiens et chats.

Fred : Personne n'a une bonne nouvelle à nous annoncer ? (Rires.)

U-zine : Sur le second cd, on retrouve votre concert aux Festins Sonores, je crois que c'était un concert un peu cocasse. Vous pouvez nous rappeler le contexte ?

Sylvain : Alors, c'était un grand festival avec en tête d'affiche No One Is Innocent qui avait refusé de jouer après nous. Même eux, n'avaient pas réussi à ramener beaucoup de monde. Après leur concert, tout le monde est parti et il ne restait que les gens qui étaient venus pour nous, soit une quinzaine de personnes.

Pierre : Il y avait une organisation de malade, du matos de malade et on a joué devant dix personnes. (Rires)

Sylvain : Le festival a été un flop et l'organisateur a perdu pas mal d'argent dans l'histoire.

Jo' : Et le plus drôle dans l'histoire, c'est qu'on est arrivé tôt sur place. Style à dix heures du matin et on a joué qu'à minuit. Donc que fait-on quand on s'embête dans un festival et qu'il y a des backstages remplis d'alcool et une scène avec une guitare moumoute ?

Fred : On a fait du Reverrend Bourré avec Jo'.

Jo' : Ca a été du boeuf très alcoolisé pendant toute la journée.

Fred : Et au final, on a plutôt fait un bon set. En tout cas, les quinze qui étaient là étaient très contents.

U-zine : Quels sont vos meilleurs et vos pires souvenirs de concerts ?

Sylvain : L'Antre du Chaos! C'était pas forcément le meilleur mais c'était unique. En fait, c'était un mec qui s'appelait Slayer qui avait une maison troglodyte près de Tours. A coté de sa maison, il avait creusé une salle de concerts. Un groupe avait joué avant nous et avec le monde dedans, il y avait une condensation monstrueuse. Quand on est arrivait, les instruments ruisselaient. Tout le matos de Fred ne fonctionnait plus à cause de la protection anti court-circuit.

Pierre : Ma batterie était posée sur ce qu'il nous avait dit être sa future tombe.

Sylvain : Il y avait une corde de pendu au dessus de la scène.

Pierre : En plus, il crachait du feu et quand il crachait, on avait les flammes qui nous cramaient la gueule.

Sylvain : Et puis, il s'aspergeait de sang.

Pierre : Sa baraque était à coté de la scène et pareil, une maison troglodyte pas du tout aérée, éclairée à la torche.

Fred : On avait dormi directement dans des sièges à coté de Mein Kampf. La salle de bain était peinte en noir même les chiottes. On est quelques groupes à avoir joué la-bas comme Furia.

Sylvain : Dans les bons souvenirs, on en a pas mal. Il y a le Dutch Doom Day III. Il y a le Madrid Is The Dark... Putain qu'est-ce qu'on était bourrés. (Rires)

Pierre : Tunis aussi, c'était une bonne expérience.

Fred : C'était une énorme expérience. On a été joué en Tunisie à la fin de l'époque Ben Ali.

Sylvain : Neuf mois après, il y avait la révolution.

Pierre : En même temps quand on a été joué à Athènes, peu de temps après c'était la crise (Rires).

Fred : Promoteurs étrangers si vous voulez nous faire jouer, faites gaffe car quand on passe, après c'est souvent la révolution (Rires).

Pierre : En général, il y a toujours un bon souvenir quand on loge chez les gens.

Sylvain : Il y a quand même un mauvais souvenir. C'est quand on était parti faire deux dates avec Wormfood aux Pays-Bas. Le premier soir, on joue à Tilburg et après, on devait loger dans un squat qui s'est avéré être un ancien commissariat de police. On était huit et on devait dormir à même le seul dans un pièce de 10m². On nous avait dit de prendre des duvets mais pas les matelas. Le sol était dégueulasse et abimé. Le plafond tombait.

Jo' : Il y avait un animal empaillé, en plus.

Fred : Un furet!

Sylvain : J'ai décidé d'aller dormir dans le van alors qu'il devait faire -2. On a préféré aller dormir dans le van plutôt que de dormir dans cet endroit pourri, c'est dire.

Fred : Des vrais mauvais souvenirs en concert, on en n'a pas eu. Il y a pleins d'histoires dans le milieu de groupes qui sont tombés sur des connards mais nous, non.

Pierre : Nos expériences sont tellement folkloriques que quand on y repense avec du recul, elles ne peuvent être que positives.

Fred : C'est le coté Spinal Tap qu'il y a dans toutes vies de groupes. Nous, on n'a pas pas encore faire Stonehenge mais ça pourrait être marrant.

U-zine : Justement, vous semblez être plus reconnus à l'étranger qu'en France. Vous l'expliquez comment ?

Sylvain : Je ne sais pas si on est plus reconnu mais c'est vrai qu'on arrive toujours plus facilement à jouer à l'étranger.

Jo' : Ça vient de la culture parce qu'en Belgique, aux Pays-Bas, il y a plus d'argents investis dans la culture. C'est plus facile pour une asso' de louer une grosse salle.

Sylvain : Ce sont des pays qui sont plus Metal que la France.

Jo' : Oui, en France, on est quand même ultra contaminé par toute la culture Hip-Hop, R'n'B...

Fred : Et puis en France, le Rock c'est Johnny quoi... Ca fait un peu peur.

Jo' : Ou M... Et encore, ça va M.

Fred : Et quand on parle Metal, on pense à Kyo.

Sylvain : Ça vient de là et puis c'est plus difficile d'organiser des concerts.

Fred : Et puis, on n'a pas choisi le style le plus porteur.

Jo' : Le style n'est pas porteur, d'une part et puis d'autre part, le Metal n'est pas très populaire en France.

Sylvain : Mais d'avoir « choisi » ce style, ça nous a permis aussi de jouer plus facilement à l'étranger car c'est un petit milieu et tout le monde se connait.

Fred : Aussi, il faut dire qu'on a eu la chance de partager la scène avec énormément de groupes qui sont connus dans le style.

Pierre : J'ai remarqué, également, quand je faisais des concerts qu'il y avait un regard du public français hyper critique si un groupe ne jouait pas du Black ou du Death, qu'il y avait une espèce d'élite Black Metal. Comme on jouait du Doom, on a été mieux accueilli par les Belges et les Hollandais qui étaient plus ouverts.

U-zine : Quelles sont les dates confirmées hormis celle de Rouen ?

Jo' : Nous jouerons le 1er mars à Paris aux Combustibles avec The Wounded Kings et Cult Of Occult, un groupe de Sludge Doom français vraiment sympa. Ils n'ont encore rien sorti en physique, je crois, mais c'est vraiment bien ce qu'ils font.

U-zine : Et il va y avoir une crise en Irlande bientôt si j'ai bien compris ?

Fred : Oui, on est annoncé au Dublin Doom Day au mois de septembre avec Procession, un groupe chilien. Et après, on n'a rien d'autre de confirmer donc je lance un appel à concerts si vous voulez qu'on aille jouer chez vous.

Sylvain : Même en France... Surtout en France... Dans le sud!

Fred : Ca fait longtemps qu'on n'a pas fait l'est ?

Sylvain : On y est jamais allé (Rires).

U-zine : A coté de ça, beaucoup de fans se demandent quels sont les projets à venir pour Funeralium ?

Jo' : On commence à enregistrer dans deux semaines les parties batteries. Suivent les guitares, les basses et le chant. Fin février, tout sera en boite. Il y aura mixage rapidement avec mastering dans la foulée. En mars, tout sera fini.

Fred : Une chance d'avoir l'album pour le Doom Over Paris.

Jo' : La sortie vynile se fera chez Ostra Records. Pour la sortie cd, on est encore en discussion. On attend de voir les propositions. On en a déjà une ferme mais on attend.

Fred : Je pense que cet album là risque de surprendre aussi.

U-zine : Un mot sur la fermeture d'Hellion Records ? Je crois que c'est un lieu particulier pour vous.

Jo' : Bin, on s'est rencontré la-bas.

Pierre : C'est même lui qui a fait les échanges de numéros de téléphone.

Jo' : C'était l'entremetteuse. « Lui, il achète les mêmes groupes que toi et en plus, il joue de la guitare et lui de la batterie. »(Rires).

Pierre : Il y a quelques groupes locaux qui lui doivent beaucoup.

Fred : Bin Franck, bravo d'avoir tenu aussi longtemps.

Jo' : Il est arrivé à un moment pas évident avec l'arrivée de l'anti-format mp3... (Rires)

Sylvain : Et d'internet tout court où tout revient moins cher.

Fred : C'est le genre de lieux qui risquent de manquer dans le coin.

Jo' : Oui cet espèce de liens entre tous les groupes et puis entre le public et les groupes. Il faisait quand même une promotion de toute la scène. Grâce à lui, on a vu la différence. Et maintenant, on est revenu un peu comme à nos débuts, il n'y a personne pour faire la promotion des concerts du coin. Si bien qu'on assiste à une baisse de la fréquentation des concerts.

Sylvain : Il y a aussi beaucoup de concerts. Des fois plusieurs, le même jour.

U-zine : Un dernier mot pour conclure ?

Jo' : Venez nous voir et achetez nos cds, si vous êtes un minimum sensible au Doom, vous risquez d'être agréablement surpris.

Merci à Fred pour avoir organisé tout ça et à tout le groupe pour sa gentillesse et sadisponibilité.