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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Death

Symbolic

LabelRoadrunner Records
styleDeath Metal Technique
formatAlbum
paysUSA
sortiemars 1995
La note de
U-Zine
10/10


U-Zine

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Je vais me la jouer un peu égoïste tiens. Vous vous en foutez et vous auriez raison, mais merde, c’est ma centième chronique sur U-Zine, alors en plus de m’être réservé cet album tout particulier, j’ai décidé de parler un peu de moi. Une autre raison pour laquelle cette chronique sera davantage personnelle, c’est que je ne suis pas sans ignorer que dans la grouillante masse des fans de Death, tout le monde ne tombe pas d’accord sur L’Album du groupe avec un grand A. A chaque fan de Death son album culte en somme…

Death, j’ai découvert ça sur le tard, il y a environ 10 ans, 1 an après la mort de Chuck Schuldiner. Et c’était avec The Sound of Perseverance, peut-être l’album le plus controversé de Death. Ce riffing incroyable et cette technicité m’avaient à l’époque soufflé, et les années passant, j’ai tranquillement remonté la discographie du groupe, me prenant d’une passion inébranlable pour son charismatique leader et sa musique qui me parlait comme très peu d’autres alors. Dans cette remontée dans le temps, je me suis vite rendu compte que quelle que soit l’époque dans laquelle a officié Chuck Schuldiner, rappelons que le bougre a eu tout de même une carrière de plus de 10 ans, Death n’a jamais entaché sa discographie d’un album faiblard.

La primitivité de Scream Bloody Gore, la claque Leprosy, l’évolution d’un Spiritual Healing qui évoluera vers la maîtrise plus adulte d'un Human et davantage encore sur Individual Thoughts Patterns, tout ce que touchait à Schuldiner se transformait en or à mes yeux. Et dans ces successions d’écoutes, un album revenait en boucle, plus que les autres encore, et cet album c’était Symbolic, paru en 1995. La claque, la révélation.

Entouré encore une fois de musiciens loin d’être des branques, Gene Hoglan aux baguettes, Bobby Koelble, professeur de gratte émérite et de Kelly Conlon à la basse, connu aujourd’hui pour son travail chez Monstrosity, Chuck Schuldiner a signé avec Symbolic un album dans la continuité logique du travail fourni sur Individual Thought Patterns, tout en conservant une forte marge d’évolution propre au perfectionniste qu’il était.
Symbolic en effet est un album plus sinueux, plus technique et moins brut de décoffrage que par le passé, conserve les bases techniques et le souci de construction dont on pouvait déjà se délecter sur Human/Individual, mais en exacerbe la profondeur et la finesse, développant un Death Metal encore plus technique, plus fouillé encore. En fait, cet album s’éloigne même encore un peu plus du death metal.

Sur Symbolic, la nuance est de mise, et au-delà de la griffe immédiatement indentifiable du jeu de Schuldiner, ces mélodies aigües qui se construisent autour du pivot constitué des cordes plus graves par exemple, c’est dans la subtilité du jeu de ses musiciens, et surtout du travail imparable effectué par l’impressionnant Gene Hoglan qui étoffe et densifie l’atmosphère, assez sombre, de ce disque. Son jeu de cymbale et de caisse claire est tout simplement bluffant, s’insère avec aisance dans la dynamique de composition de Death,
Symbolic est résolument un album de techniciens, dont on sent qu’il a bénéficié d’un travail méticuleux, Schuldiner emmenant son art sur des terres pas encore défrichées. Ciselée avec soin dans une base de metal brut, l’architecture de Symbolic puise sa force dans ses subtilités, là où Schuldiner ponctue ses riffs de nombreux solis du meilleur effet, marquant d’un empreinte très mélancolique la teneur générale de l’album, dont les courbes transportent l’auditeur pour mieux le saisir à la jugulaire par les explosions inattendues, intervenant là où l’on s’y attend le moins.
La cavalcade à mi-parcours de Without Judgement est à ce titre simplement époustouflante, les hachures de l’explosif et imparable Misanthrope, qui résume parfaitement l’album jonglant avec les rythmes, la mélancolie et la puissance, tranchent dans la masse, les arrangements d’Empty Words, Zero Tolerance ou la mélodie centrale d’un 1,000 Eyes, impressionnent dans leur construction, sans verser pour autant dans la surenchère technique que l’on pourra retrouver dans The Sound of Persevrance, qui rebutera certains.
Non, l’équilibre est savant sur Symbolic, Death fait preuve d’un grand savoir faire lorsqu’il érige des structures alambiquées, qui jamais ne sonnent bancales, et même s’il préfigure par sa technicité et l'accentuation de compositions progressives de ce que le groupe accouchera dans le futur, jamais il ne frôle l’indigestion.

Par ailleurs la courbe de progression est exponentielle sur cet album qui, s’il ne propose à mon sens aucun morceau en dessous des autres, s’intensifie à mesure qu’il progresse, introduit plus de diversité à mesure qu’il s’écoule. Crystal Mountain et ses sonorités hispaniques finales, ses couplets éthérés au possible introduisent encore plus de noirceur et d’originalité à l’album et nous emmène par la main vers la splendide Perrenial Quest, plus lente, qui, en plus d’être terriblement bien écrite, conclut ce Symbolic de la manière la plus poignante qui soit, avec un arpège déchirant, délicat et sensible, beau à en chialer.
Symbolic c’est aussi le dernier album où Schuldiner se servait de sa voix gutturale, ses vocaux étant ici sans doute les plus aboutis qu’il ait proposé. Le travail des textes est aussi bien entendu à saluer, doté de plusieurs niveaux de lectures, symboliques à souhait et non ce n’est pas un calembour.

Death n’est un groupe comme les autres. Quand je l’ai écouté la première fois, j’ai senti que cette formation était différente. C’est aussi un groupe qui a su se bonifier avec le temps, évoluant au même rythme que son géniteur, Death faisait partie de la vie de Schuldiner, et a progressé comme lui. De son logo, aux textes en passant par le professionnalisme musical, Death n’a jamais servi deux fois la même chose à son auditoire, et si l’on sent que la démarche était personnelle, la volonté de perfection qu’il affiche témoigne d’un véritable respect pour ceux qui l’écoutent.
La sensibilité qui transpire dans chaque note interprétée avec force et sincérité, la diversité des riffs, l’identité forte de Symbolic le place un cran au dessus des autres. On y trouve autant de finesse que de brutalité, Schuldiner est parvenu à peaufiner encore son intellectualisation de l’agressivité musicale, en y injectant une noblesse et une élégance que j’ai rarement entendue ailleurs.
Je pourrais continuer à pérorer des heures durant comme ça. Pour certains ce sera Scream Bloody Gore, pour d'autres, Human ou encore Leprosy, pour moi, c'est celui là.
Alors oui, je vous avais prévenu, cette chronique est écrite par un fan (et pour les fans) totalement dévoué à la cause de l’album, j’assume pleinement, mais Symbolic est mon album favori de Death, celui qui a changé ma vision de la musique et restera mon album du siècle jusqu’à ce que la Faucheuse se penche sur mon cas.
Peut-être aurai-je la chance que celle-ci évite de me choper pour cette raison triste à en pleurer, qui a coûté la vie au regretté Chuck Schuldiner , mort d’un tumeur au cerveau n’ayant pas été opérée faute de billets verts.

Won't you join me on the perennial quest
Reaching into the dark, retrieving light
Search for answers on the perennial quest
Where dreams are followed, and time is a test


01. Symbolic
02. Zero Tolerance
03. Empty Words
04. Sacred Serenity
05. 1,000 Eyes
06. Without Judgement
07. Crystal Mountain
08. Misanthrope
09. Perennial Quest

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