Di Sab

Existe-t-il un groupe qui semble plus sympathique sur Terre que Slomosa ? En 2024, il est légitime de se poser la question. Alors que le stoner connaît depuis une grosse dizaine d’année une forte baisse de régime, que les anciens suiveurs de Monolord et de Kadavar commencent à regarder ailleurs, Slomosa peut très vite être perçu comme la dernière étincelle d’un genre qu’il peut être aisé (mais facile) de qualifier de moribond.

Quoiqu’il en soit, je n’étais pas rentré au Backstage depuis mai et la date d’Acid King. A ce titre, il est assez singulier de constater qu’au printemps, la salle était à moitié vide alors qu’un groupe totalement mythique avec 30 ans de carrière au compteur s’y produisait, là où ce soir on frôle le sold out pour les Norvégiens qui n’ont pas le tiers de leur longévité. Cependant, l’excellent accueil de Tundra Rock qui a bénéficié d’une exposition hors des circuits habituels ainsi qu’une réputation live qui les précède expliquent cet engouement.

J’assiste de loin et assez distraitement à la performance de Homecoming. Groupe de post metal parisien que je découvre sur scène et qui manifestement a un bon début de carrière. La formation a malheureusement tendance à proposer ce que je n’aime pas du tout dans le post metal c’est-à-dire des titres aux couleurs assez diverses qui nuisent à la cohérence générale du set. Certains riffs sont directement inspirés de Mastodon, il y a une vraie patte grunge et un titre groovy un peu up tempo assez caractéristique du Sabbath enjoué. Du chant clair, du chant saturé, le tout ne manque clairement pas de maîtrise ni d’idées mais j’ai vraiment du mal à voir où le groupe veut en venir.  Ce n’est pas tellement grave car le public, lui, est plutôt réceptif malgré l’écart stylistique entre Homecoming et la tête d’affiche. Dommage pour moi, tant mieux pour tous les autres.

Depuis la sortie du premier album éponyme, tout semble réussir à Slomosa. Des programmations dans des festivals insolemment grands, des premières parties de prestiges (Elder) et des critiques unanimes quant à la qualité des productions et des prestations. Loin de posséder la chance des débutants, le succès des Norvégiens ne vient que de deux choses : leur talent et leur efficacité.

Le stoner est un genre plutôt académique. Beaucoup d’éléments ont été posés dès la création du style et peu ont su repousser les carcans établis dans les années 90. Slomosa ne s’embête pas de ces questionnements. En véritables artisans, ils décident juste de polir et de parfaire un son, un sens de l’écriture. Les compositions sont incroyables, « Rice » est probablement le meilleur titre de stoner sorti ces dernières années, et l’exécution met en valeur cette capacité à faire jaillir des riffs accrocheurs et des lignes vocales pertinentes.

Avec 12 titres, Slomosa joue entre la moitié et les deux tiers de sa discographie. Aucun tube ne manque à l’appel, que ce soit les directs « Horses », « Kevin », « Monoman » ou les pistes où les ambiances sont plus travaillées comme « Cabin Fever », « In my Mind’s Desert » ou « Scavangers ». Seul « Red Tundra » fait office de point faible dans un set varié mais sans réel temps mort.

L’attitude est impeccable, on notera le Free Palestine de rigueur avant « Battling Gun » ainsi que la petite dédicace à la famille du frontman présent dans la salle. Le tout est humble et dynamique et est assez raccord avec la musique du quatuor.

Au sein d’une industrie pas toujours honnête, la dimension brute de Slomosa, la capacité du groupe a proposer des choses simples et bien faites, a fait mouche et a ravi un public peut être las des sophistications et des tendances. L’impression d’assister à un concert d’un groupe au pic de sa forme, avec un peu de bouteille mais pas encore corrompu ni en manque d’inspiration. On ne leur souhaite évidemment pas cela car nous voulons toutes et tous ici, revivre un moment comme celui-ci.  

Setlist :

Afghansk Rev
Estonia
Cabin Fever
Rice
In My Mind's Desert
Psykonaut
Battling Guns
Red Thundra
Monomann
There Is Nothing New Under the Sun
Horses

Scavengers
Kevin