Punkach' renégat hellénophile.
En black metal orthodoxe, il faut bien constater qu'il y a peu d'artistes récents que je me surprends à suivre de près, sortie après sortie ; et puis il y a Hulder. Le one-woman band de la dame éponyme, belge néerlandophone par ses origines et installée aux États-Unis, enchaîne les sorties marquantes depuis 2019, dans un black metal certes traditionnel, mais qui fait fusionner les influences de l'Ancien et du Nouveau Monde. Des sonorités à la fois cascadiennes et médiévalisantes plutôt équilibrées sur son premier album, Godslastering: Hymns of a Forlorn Peasantry, mais qui ont toutefois commencé à pencher davantage du côté des secondes avec l'EP The Eternal Fanfare – dont je vous parlais déjà dans une ancienne Série noire.
Une évolution qui se confirme donc sur ce second album. Dès que cesse le chant des corbeaux sur nos plaines flamandes, Verses in Oath nous plonge dans des paysages d'hiver qui n'auraient pas dépareillé sur les toiles de Brueghel l'Ancien. Les compositions sont moins abruptes que dans les sorties précédentes cependant, et Hulder se lance dans une instrumentalisation médiévalisante mid-tempo très réussie sur « Hearken the End », sans utiliser d'instruments traditionnels d'ailleurs. On notera aussi la voix claire féminine, presque éthérée, qui participe à la splendeur du moment, comme une dentelle de pierre gothique qui se découpe sur un ciel qui ne serait familier que de la grisaille. La brutalité revient sur le devant de la scène pour le morceau-titre, avant que l'album n'enchaîne deux pistes instrumentales et atmosphériques assez étrangement placées – bien que « An Offering » s'avère très réussie. La seconde partie de l'album renoue avec un black metal classique, mais de très bonne facture, entrecoupé de quelques chœurs (une nouveauté, je pense, chez Hulder) ou de passages au clavier plus marqués, sur « Enchanted Steel » notamment, qui donnent à l'ensemble une petite touche de dark fantasy qui n'est pas pour me déplaire.
Cet hiver, dame Hulder a – enfin – pu entreprendre la tournée européenne tant de fois repoussée, et jouer entourée des vieilles pierres de la vallée de l'Escaut. Il y a eu des couacs techniques, mais elle a prouvé que ses compositions passaient aisément l'épreuve de la scène, tout en faisant preuve d'une énergie qui manque trop souvent au genre. Verses in Oath dispose certes de quelques lacunes, l'album pêchant par un rythme un peu difficile à trouver. Mais ses compositions fonctionnent finalement toutes assez bien, tandis que la compositrice s'essaie à de nouvelles sonorités avec un certain succès. De quoi, on peut l'espérer, lui offrir une meilleure reconnaissance et une place pour son nom sur les affiches européennes.
Tracklist :
An Elegy
Boughs Ablaze
Hearken the End
Verses in Oath
Lamentation
An Offering
Cast Into the Well of Remembrance
Vessel of Suffering
Enchanted Steel
Veil of Penitence