Courts of Chaos Festival 2023
Avel Dro - Plozévet
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Sleap : Depuis sa seconde édition, le Courts of Chaos est devenu l’un de mes pèlerinages annuels. Et à voir le nombre de copains au mètre carré, je suis loin d’être le seul. C’est bien simple, on ne peut pas faire un seul pas sans croiser une tête connue. Qui aurait pu croire que l’épicentre de la scène française actuelle se situerait dans le fin fond du Finistère ? Eh bien, il faut se rendre à l’évidence, lorsque la qualité est au rendez-vous, le public aussi. Une affiche de premier choix, un cadre parfait, un son encore meilleur que les précédentes éditions (on y reviendra), une jauge adéquate niveau public et, pour couronner le tout, une météo au rendez-vous ! Le festival semble d’ailleurs avoir enregistré son plus haut record d’affluence en cette quatrième édition.
La recette d’un tel succès ? Découvrons-la sans plus attendre…
Groupes évoqués : Moundrag | Seven Sisters | Riot City | Vortex of End | Smoulder | Herzel | Bütcher | Atlantean Kodex | Agressor | Domine | Desaster | Fall of Seraphs | Meurtrières | Hexecutor | Vulture's Vengeance | Artillery | Dark Quarterer | Dead Congregation | Slough Feg | Wishbone Ash
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Warm Up
Sleap : Comme chaque année, l’équipe du Courts of Chaos nous propose une soirée pré-festival qui se situe en extérieur, cette fois-ci sur le terrain collé à la salle. Un petit événement gratuit et ouvert également aux habitants du village. Pour ma part, le temps d’arriver, de poser les affaires à l’AirBnB et de se rendre sur le site, je loupe malheureusement le premier groupe. En revanche, je vais prendre une énorme claque lors du concert suivant…
Moundrag
Sleap : Moundrag est un nom que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam mais qui semble être une petite gloire locale selon les dires de nombreux collègues. Et dès leur arrivée sur scène, je suis déjà conquis. Le duo est constitué de deux frères d’à peine 26 et 23 ans ! L’un coté gauche à l’orgue Hammond, l’autre coté droit à la batterie, tous deux également chanteurs. Positionnés en face à face pour plus de complicité, les deux musiciens et leurs massifs instruments occupent à eux seuls toute la largeur de la scène. De plus, le fait qu’ils soient de profil nous offre un meilleur point de vue sur leur jeu. Et pour une immersion encore plus totale, l’organiste est un parfait sosie de Thijs van Leer (Focus) tandis que le batteur est un véritable clone de Carl Palmer (ELP). Pantalons pattes d’éléphant, chaussures à talonnettes, vestes à frange, bref un véritable saut dans le temps !
Malgré l’absence totale de guitare, de basse ou de tout autre instrument, le duo breton parvient à émuler toute l’essence du rock fin 60’s / début 70’s. Le coté prog est encore assez embryonnaire mais ce cocktail à la Uriah Heep / early Deep Purple me sied amplement. Mention spéciale à « Demon Race » dont les chœurs sont repris par une partie de l’audience. Le triple clavier de Camille couvre un panel sonore extrêmement varié, agrémenté çà et là d’effets de distorsion et de reverb’ pour un rendu ensorcelant. Et son frère Colin n’est pas en reste avec un éventail de jeu tout aussi diversifié. Son kit est même complété par deux énormes gongs à l’arrière qui, contrairement à d’autres groupes, ne sont pas là pour décorer ! Certains pourraient trouver cette démarche revival assez stérile, mais pour ma part je suis toujours heureux que de jeunes musiciens embrassent cette vague proto-hard rock / heavy psych si chère à mon cœur. Sans conteste ma découverte du week-end !
Seven Sisters
Dolorès : Il n'est pas rare que je fasse tout à l'envers. En fait, j'ai découvert (et adoré) Phantom Spell, le projet du chanteur-guitariste, avant Seven Sisters. C'est donc sans avoir écouté le groupe, volontairement, que je me rends à leur concert lors du Warm Up, histoire de voir si je me prends une claque de découverte ou non. La réponse est oui : on trouve dans leur heavy une énergie incroyable, une bonne humeur absolue, un chant super agréable (pour peu qu'on aime ce genre de vocaliste), des parties de guitare parfaites et des contrastes vraiment dosés entre les instants plus calmes et les passages fédérateurs (qui sont fort nombreux). J'y retrouve l'élégance que j'adore chez Wytch Hazel par exemple (est-ce la classe britannique ?), un peu plus rentre-dedans.
Je regrette peut-être juste le manque de complicité des trois musiciens avec leur batteur. Imaginez le tableau, qui n'a pas fait sourire que moi : au milieu des hardos blonds à moustache (qui semblent avoir quelques racines nordiques bien que le groupe soit britannique) on trouve le seul brun. Clairement, il est tout seul derrière les fûts, avec une dégaine à ne pas du tout faire partie de cette scène (et peut-être n'en a-t-il que la dégaine, cela dit Metal Archives m'apprend qu'il était leur merchguy et driver avant de devenir batteur) et n'ayant que très peu d'interactions avec ses petits camarades. Heureusement, la complicité avec le public est énorme, qu'il s'agisse de lui (les échanges de sourires et clins-d’œil me l'ont prouvé) ou des autres musiciens et c'est clairement ce dont on avait besoin à ce moment-là !
Riot City
Sleap : Depuis la bombe Burn the Night lâchée il y a maintenant trois ans, Riot City s’est taillé une solide réputation dans le milieu heavy metal. Forts d’un second full-length presque autant acclamé, les Canadiens foulent les planches de Plozévet devant un parterre déjà acquis à leur cause. Pour ma part, je découvre en live les morceaux de ce Electric Elite et, ma foi, ils me font presque autant d’effet que ceux du premier album. Malgré une énorme reprise de « See you in Hell » (Grim Reaper) pour clore le set, mon point d’orgue du concert reste bien sûr « Warrior of Time », d’ores et déjà un classique contemporain du heavy speed.
La tâche était pourtant ardue mais le nouveau chanteur est encore meilleur que celui du premier album ; il ne rate pas une seule occasion de placer un « YAAAAAAAH » suraigu où il le peut. D’aucuns des plus aigris pourraient dire qu’il en fait des tonnes (ce qui est le cas), mais tant que c’est bien fait, il ne faut pas bouder son plaisir. La quasi-totalité de la fosse chante d’ailleurs presque tous les refrains le poing levé et un pit se forme même pendant « Burn the Night ». Enfin, je me dois de mentionner le grand moment de ce premier soir : lorsque le frontman annonce au public qu’il est Canadien non-francophone et qu’il aimerait bien apprendre des mots en français, la foule se met instantanément à scander « Macron démission ». Une telle spontanéité mérite d’être soulignée ! Bref, malgré un son de guitare pas terrible – en particulier celle de droite –, le concert passe comme une lettre à la poste. Je n’ai déjà plus de voix alors que le festival n’a même pas commencé…
Vendredi
Vortex of End
Dolorès : Avec le retard sur l'ouverture du festival, difficile de savoir à quelle heure débutera quel groupe. Vortex of End est une bonne excuse pour esquiver le soleil de plomb qui fait du mal à ma gueule de bois, alors direction la salle en tout début d'après-midi pour un peu de black parisien. Bien que le groupe ait pas mal fait parler de lui ces dernières années, je crois que je ne l'avais pas vu sur scène depuis l'édition 2018 des Feux de Beltane. Depuis : un changement de line-up avec un nouveau guitariste et deux nouveaux albums !
Je découvre les titres d'Abhorrent Fervor, le dernier album sorti en 2021, qui passent super bien en live, il faut l'avouer. Le point fort reste pour moi le chant, dont le timbre sort un peu du lot mais qui a aussi l'avantage ici d'être bien mixé, si bien qu'il véhicule parfaitement les émotions souhaitées. La scénographie aide bien sûr, avec ces flammes en miroir de part et d'autre de la scène. Le jeu des musiciens également, qu'il s'agisse de leur maîtrise du set ou de leur attitude galvanisée, presque possédée. Autant je trouve que chez beaucoup de groupes de black, ça ne fonctionne pas, autant c'est crédible chez Vortex of End, ce qui est clairement un bonus dans une scène remplie de figures assez ridicules.
Smoulder
Dolorès : Ne tournons pas autour du pot : il s'agit de ma grosse déception du festival. Smoulder était l'une des raisons de ma venue et autant dire que j'en suis ressortie très triste. J'avais beaucoup d'admiration pour Sarah Ann et une grande hâte de voir sa performance, une sensation vite étouffée par l'énorme mauvaise surprise d'entendre 80% de ses parties chantées complètement faux. Lorsqu'elle passe dans les graves, comme pour le début de « Warrior Witch of Hel » ou encore « Ilian of Garathorm », c'est bien mieux mais presque tous les aigus et les notes de passage des 45 minutes sont très difficiles à écouter. La dissonance est constamment créée avec les musiciens qui ne sont eux-mêmes pas très carrés... Avec notamment une tendance à accélérer sans écouter la batterie qui les guide. Ils ne sont pas aidés par le mix, avec une guitare lead surmixée, alors que quelques parties sont très approximatives.
Il y a quand même quelques passages, notamment les instrumentaux bien martiaux des morceaux plus orientés doom que heavy qui fonctionnent à fond en live, mais aussi le single « The Talisman and the Blade » où le chant me choque moins et dont la puissance est bien rendue sur scène. S'agit-il d'un manque de concentration de la vocaliste ? De tonalités plus ou moins faciles à gérer ? Ses parties sont souvent très difficiles à chanter, je le reconnais volontiers. D'ailleurs, on voit qu'elle prend un sacré plaisir à chanter et elle adopte une attitude plutôt sûre d'elle. Je pense que nous avons tous et toutes été ensorcelé(e)s par sa gestuelle disons, incarnée, mais peut-être faut-il choisir entre un jeu de scène électrique et une performance vocale plus précise ? Je dirais simplement qu'on attend un peu plus d'un groupe qui en est à son deuxième album.
Herzel
Dolorès : Herzel, dont une partie des membres font partie de La Vonologie (qui organise le Courts of Chaos), a été ajouté à l'affiche en dernière minute, après l'annulation de Grave et une actualisation du running order avec un temps de set rallongé pour les têtes d'affiche restantes. Que vous dire que vous ne sachiez pas déjà sur le groupe de heavy breton ? Toutes les personnes qui ont entendu parler d'Herzel ou qui les ont déjà vus en live savent que les concerts sont super carrés ou que le public chante à tue-tête. Ce qui serait pertinent, ce serait alors de s'adresser à celles et ceux qui n'ont jamais entendu parler du groupe. Imaginez une saga fantaisiste immergée dans l'histoire de la Bretagne, des compositions extrêmement bien ciselées et des mélodies infaillibles, un chant limpide et sincère dans une cohésion toujours inégalable avec le public. Le groupe véhicule une bonne humeur énorme, clairement symbolisée par l'exaltation de Thomas au chant et le groove absolu de Mordiern à la basse. Je me demande simplement si la magie est la même lorsqu'on s'éloigne des terres armoricaines... Après un passage au Keep It True quelques semaines plus tôt, on peut penser que oui.
La légende raconte qu'ils ont écourté leur set pour rattraper un peu du retard de la journée et permettre au groupe suivant de commencer à l'heure, mais je n'ai pas eu l'impression d'assister à un set plus court. Trop court, selon mon ressenti personnel, c'est probable puisque le groupe fonctionne toujours à merveille sur moi, après les avoir vus sur scène un bon nombre de fois.
Bütcher
Dolorès : Bien que le groupe ait déjà joué en France, il était très attendu pour beaucoup. Le dernier album, déjà daté de 2020 et intitulé 666 Goats Carry My Chariot, laissait présager un excellent moment de violence et de fun. Tout est « trop » chez Bütcher : à commencer par le volume sonore qui est monté d'un niveau à ce moment-là (notamment du côté de la batterie). Avec de bons bouchons, rien d'embêtant, mais on a clairement l'impression qu'une étape a été franchie dans la soirée. Trop fort, trop vite, trop kitsch, trop cool ? Clairement, le groupe vit à fond sa prestation, à commencer par le chanteur qui se balade de droite à gauche, n'hésite pas à poser comme une rockstar pour les photos, toujours armé de son pied de micro portatif en forme de croix inversée.
Clairement, ça commence à bien chauffer dans la salle, sans doute en parallèle du degré d'alcoolémie des festivaliers et festivalières. Même lorsque le tempo redescend, comme sur le début du titre « 666 Goats Carry My Charriot », l'atmosphère est brûlante. C'est quand même le « speed » dans black speed metal qui nous intéresse quand on vient voir Bütcher et, pour ça, les titres comme « Iron Bitch », « Metallström/Face the Bütcher » ou « Viking Funeral » font le taff à 100%.
Atlantean Kodex
Dolorès : Très fan depuis un moment du groupe de doom épique allemand, j'avais pourtant loupé toutes les occasions de les voir. Il faut dire qu'en France, ils ne se sont pas montrés très souvent, si ce n'est au Pyrenean Warriors qui est vraiment à l'autre bout de la France pour moi. Quel bonheur d'entendre le chant propre et solennel de Markus Becker ! Bien sûr, la setlist met à l'honneur le dernier album, The Course of Empire (2019, déjà), en piochant bien sûr parmi les tubes. Etrangement, j'ai beau être absorbée par « Lions of Chaldea » et « People of the Moon », je suis étonnée de les voir terminer le set avec « The Course of Empire » qui n'est pas pour moi leur meilleur titre. Malgré des passages mémorables, il me semble un tout petit peu décousu et il prend pour moi toute son ampleur seulement sur sa deuxième moitié, ce qui en fait un excellent final mais pas forcément le tube absolu sur lequel terminer.
Bien sûr, le micro est souvent tendu vers le public : les superbes textes, immense atout d'Atlantean Kodex, sont massivement repris en chœur par les premiers rangs. « Sol Invictus », « Heresiarch » et « Twelve Stars and an Azure Gown », du deuxième album, font leur petit effet lorsqu'on se retrouve pour la première fois face à eux, dans une atmosphère aussi héroïque qu'émouvante. C'est « The Atlantean Kodex » qui est choisie pour représenter le premier album, pour amener une dynamique qui cavale un peu plus, bien que j'aurais personnellement préféré « A Prophet in the Forest » ou « Pilgrim », même si je comprends bien qu'il n'est pas simple de caler des titres de cette longueur dans une setlist.
En sortant du concert, on retient le contraste entre la lourdeur de l'instrumentation, très massive avec un rendu presque orchestral par moments, et le chant qui survole le tout tel un messager, dont les graves font frémir et les aigus pénètrent ton âme. On retient aussi la joie du public et un groupe très sérieux, qui confirme l'idée que je m'en faisais : un groupe sérieux et humble, avec juste ce qu'il faut de fierté, qui maîtrise son sujet. Une heure de plus, la prochaine fois, s'il vous plaît.
Agressor
Sleap : Le nombre astronomique de copains présents me fait malheureusement louper une bonne partie du set d’Agressor. Mais un sourire ne tarde pas à illuminer mon visage lorsque j’arrive dans la salle puisque ce sont les premières notes de « Paralytic Disease » qui résonnent. Et le titre éponyme du premier album ne tarde pas à suivre. Je suis visiblement bien tombé puisque ce seront les deux seuls « vieux » morceaux joués ce soir. Le public est assez réceptif et ça se bagarre déjà bien dans la fosse. La fin de set plutôt orientée milieu/fin années 90 me parle moins, mais je passe globalement un bref mais sympathique moment en compagnie des vétérans du death français.
Domine
Sleap : Lorsqu’on pense « power épique italien » c’est évidemment Rhapsody qui vient d’abord en tête. Mais malgré une discographie qui commence à peu près en même temps, leurs compatriotes de Domine se forment, eux, en 1983 ! Et, bien qu’ils utilisent aussi pas mal de claviers, leur musique sonne beaucoup moins symphonique que celle du groupe suscité. Autre différence : le groupe n’invente pas son propre univers fantasy mais tire presque toutes ses thématiques de la mythologie d’Elric et de l’œuvre de Michael Moorcock en général. Ce sont deux frères, respectivement bassiste et guitariste, qui mènent la barque depuis 40 ans et ils reviennent ce soir en France pour la première fois en plus de vingt ans ! Nous les attendions lors de l’édition 2022 mais le sort en a voulu autrement. Et même si pas mal de festivaliers s’en foutent royalement, les fans sont présents en nombre dans les premiers rangs, à commencer par les gars d’Herzel et donc une bonne partie des organisateurs du fest !
Malheureusement, de nombreux problèmes sonores viennent entacher le début de la prestation. Plusieurs grésillements au niveau des sorties clavier et même de grosses coupures de son çà et là. Fort dommage vu que le set commence sur le fédérateur « Thunderstorm » suivi d’un de mes titres préférés « The Mass of Chaos » ouvrant le premier album. Musicalement, on reste dans du power épique et mélodique mais qui va beaucoup plus piocher dans la scène heavy américaine qu’européenne. Mais s’il y a bien une chose qu’il faut aborder c’est le chant. Le vocaliste Morby, présent depuis le premier album, est d’office élu chanteur du week-end, de très trèèès loin. Bien qu’il soit le sosie parfait de Jeff Walker (Carcass), son timbre est totalement opposé au sien. C’est bien simple, il s’agit là du meilleur vocaliste « âgé » qu’il m’ait été donné d’entendre en live ! À bientôt 60 ans, il est encore plus juste et puissant qu’un Harry Conklin (Jag Panzer) ou qu’un Brian Ross (Satan) qui pourtant sont toujours d’immenses chanteurs pour leur âge. Le set fait la part belle à Dragonlord avec notamment le titre éponyme ou encore « Defenders » en final, mais l’apothéose est atteinte en milieu de set sur la magnifique pièce de douze minutes « The Eternal Champion » qui clôt le premier album. En dépit du manque de public et des quelques problèmes de son, nous sommes visiblement tous conquis. Ave Domine !
Desaster
Sleap : Cela faisait littéralement dix ans que je n’avais pas vu Desaster en live. Et je dois dire que chez eux, au milieu du public allemand, j’en avais un assez bon souvenir. Mais je vais bien vite déchanter. Un set d’une heure et demi en clôture de journée n’est vraiment pas l’idéal pour apprécier le show du quatuor teuton.
Premier constat : plus de Tormentor à la batterie. Je ne savais pas que le colosse avait quitté le groupe en rejoignant les rangs d’Asphyx. Et après le concert de ces derniers lors de l’édition précédente (et sa démonstration de force brute derrière le kit), je me réjouissais de le revoir avec son groupe principal. Que nenni…
Second constat : malgré une bonne humeur visible – surtout de la part du guitariste –, la communication avec le public est assez gênante. Beaucoup de silences, de pauses car le nouveau batteur est fatigué, de passages en allemand que personne ne comprend, bref un certain malaise dans la salle.
Troisième constat : le groupe n’interprète quasiment aucun « vieux » morceau avant une bonne quarantaine de minutes. Et le set semble donc interminable tant les titres joués ne thrashent pas vraiment. Le fond de la salle se vide petit à petit, découragé. Il y a heureusement des fans dans les premiers rangs, mais le pit est composé à 80% de metalleux avinés qui passent plus de temps à tomber ou à renverser leur bière qu’à véritablement pogoter.
Je parviens tout de même à tenir jusqu’à la fin de set où le groupe se réveille enfin avec quelques classiques issus de Hellfire’s Dominion ou de Divine Blasphemies, mais je finis par quitter moi aussi la salle avant la reprise improbable de Speak English or Die (S.O.D.). Sans avoir détesté le concert, je préfère rester sur mon souvenir de 2013…
Samedi
Dolorès : L'an dernier, le festival avait été une excellente surprise : en plus d'affiches très qualitatives, le festival sait gérer les imprévus et la forte affluence. Même si tout n'est pas parfait à 100%, rien n'est assez embêtant pour mériter d'être cité ici. Comme l'an dernier, je ne peux néanmoins être présente que sur une partie du weekend, taff oblige. Après un jeudi soir qu'on pourrait juste qualifier de premier jour de festival tant la qualification de warm up ne fait pas honneur aux groupes programmés, suivi d'un vendredi très bien dosé dans les styles et les attentes personnelles... Je laisse le collègue Sleap poursuivre l'aventure (dont les retours globaux, résumés en fin d'article, rejoignent entièrement mon avis donné ici).
De mon côté, je retiens la taille humaine super agréable du Courts of Chaos, la bonne humeur des festivalier(e)s dont l'agréable aspect rendez-vous de copains venus des quatre coins de la France (jamais compris pourquoi on disait quatre alors qu'on parle de notre pays comme d'un Hexagone d'ailleurs). Egalement, les efforts toujours maintenus pour que restauration et boisson ne demandent pas de vendre un organe et soient de bons moments (merci pour le couscous vegan & les bières craft). Surtout que les jetons ont remplacé les cartes à poinçonner qui étaient une vraie galère en 2022 ! Je repars également avec un bon souvenir du son global des concerts, et une approbation totale de la cohérence de l'affiche (bien que La Vonologie sache varier et alterner les genres).
La partie dédiée aux exposants a cette année été agrandie et déplacée en extérieur, sous une tente. Ici, le disquaire et label nantais Frozen Records avec, en fond, les sérigraphies réalisées spécialement pour le festival par Emgalaï.
Fall of Seraphs
Sleap : Je n’avais pas vu Fall of Seraphs depuis l’année de sortie de leur démo et, ayant fort apprécié leur premier album, je me faisais une joie de les revoir ici. Malheureusement pour moi, la fiesta de la veille me fait rater une bonne partie du set des Aquitains. Et en arrivant dans la salle, je constate que les afters n’ont décidément épargné personne tant le public est clairsemé.
Cela ne m’empêche heureusement pas d’apprécier comme il se doit cette seconde moitié de set ; mention spéciale à « Divine’s Lament » et son riffing taillé pour le live. Je le redis mais le son est vraiment irréprochable lors de cette édition 2023, on capte absolument tous les éléments. À ce titre, je ne manque pas de relever le touché de Vincent à la batterie. Sa frappe n’est pas aussi puissante que d’autres mais son jeu est hyper carré et précis. J’apprécie également beaucoup l’attitude du frontman, très sobre mais charismatique là où beaucoup auraient tendance à en faire trop. Enfin, pour mon plus grand plaisir, le show se termine sur une reprise de « Children of the Underworld » (Deicide) durant laquelle je ne manque pas de gueuler les paroles comme un dératé. Il n’y a pas meilleur remède contre la gueule de bois !
Meurtrières
Sleap : Je confesse ne jamais avoir trop compris la hype autour de Meurtrières. Leur unique EP me faisait l’effet d’un groupe de punk qui voudrait faire du heavy à tendance épique et… il faut dire ce qui est, cela sonne vraiment cheap. Mais vu que de nombreux amis sont fans absolus, je fais l’effort d’aller assister à leur set.
Scéniquement, les musiciens sont exactement comme je les imaginais : les cheveux courts, des t-shirts Disrupt ou de groupes d’anarcho-punk, et la plupart ont l’air d’être bien plus âgés que la chanteuse. Et musicalement eh bien je n’accroche malheureusement pas non plus en live. L’interprétation reste plus carrée que celle de Smoulder la veille, mais les pains sont tout de même fréquents. En revanche, le son est une nouvelle fois excellent lors de ce set. De plus, la salle est vraiment remplie malgré l’horaire. Et à voir la réception du public, les fans sont effectivement au rendez-vous. Nombreux sont les poings qui se lèvent et les voix qui s’élèvent lors des refrains (« Aliénor » entre autres). Je ne comprends toujours pas l’engouement mais je dois dire que l’ambiance live me fait finalement passer un assez bon concert. Peut-être aurai-je le déclic plus tard…
Hexecutor
Sleap : Je ne vais pas épiloguer tant j’ai déjà abordé le cas Hexecutor en long en large et en travers dans les pages de ce zine. Il s’agit peut-être du meilleur groupe de thrash français, notamment en live. Ce doit être au moins mon douzième concert du groupe et ce fut une nouvelle fois la branlée. Contrairement à leur set écourté l’année précédente (du fait de nombreux problèmes techniques), celui-ci bénéficie d’un son parfait – une constante lors de cette édition 2023 ! Le public est présent en masse et un pit ne tarde pas à se former pendant « Hangmen of Roazhon ». Je chipote tout de même sur l’absence de « Hardrockers City » dans la setlist, pourtant l’un de leurs morceaux les mieux taillés pour le live. Mais au-delà de ça, c’est une nouvelle fois un carton.
Vulture's Vengeance
Sleap : Je n’assiste qu’à une petite partie du set des Italiens, juste le temps de noter leur magnifique dégaine rétro. Chemises à jabot, bottes et gilets en cuir noir, on se croirait presque à un show de Running Wild. Leur heavy old school est fort bien exécuté mais je m’attendais à quelque chose de beaucoup plus speed. Il faudra que je me replonge dans leur discographie. Mais mis à part un chant bien trop en retrait dans le mix, le concert reste tout de même sympathique.
Artillery
Sleap : J’avais un doute en voyant arriver le chanteur en bonnet, cheveux mi-longs, pantacourt et t-shirt à logo H&M douteux, mais c’est bien le même qu’il y a dix ans. Heureusement, sa dégaine de deathcore kid n’entache en rien ses qualités vocales. Même s’il ne monte pas aussi haut, il restitue assez bien les lignes de chant des premiers albums. Oui, je parle surtout de la fin de set vu que l’essentiel de vieux titres sont joués à ce moment-là. Malgré le timide mosh pit, il ne semble pas y avoir beaucoup de fans. Mis à part les chœurs du final sur « Terror Squad », peu de refrains sont chantés. Le frontman en vient à descendre aux barrières lors de « Khomaniac » pour tendre le micro au public à grand coups de « woooooh ooooooh » un peu longuets. Un bon moment, encore mieux que mes souvenirs de 2014, mais qui sera bien vite éclipsé par les autres prestations du jour…
Dark Quarterer
Sleap : Comme je l’écrivais dans notre article pré-festival, Dark Quarterer est l’une des véritables raretés de l’affiche aux cotés de Slough Feg et Domine. Les Italiens se forment il y a presque cinquante ans (!!!) et pratiquent dès les années 80 un heavy épique teinté de prog assez unique en son genre. De plus, cette singulière formule est complétée par des thématiques quasi-exclusivement centrées sur la mythologie gréco-romaine. Même si j’apprécie beaucoup les deux premiers albums, je dois avouer que j’étais assez sceptique sur le rendu live d’un tel groupe. Eh bien mes craintes vont être rapidement dissipées…
Le frontman original accapare toute l’attention, tant visuellement que vocalement. Avec son long manteau en cuir noir, son chapeau et son pupitre pour lire ses textes très denses, il dégage quelque chose d’assez solennel, presque professoral. Mais c’est vraiment son timbre de voix qui impressionne le plus. Le spectre est hyper large et ses montées dans les aigus sont toujours justes ; et le tout en jouant de la basse. Respect ! Je note tout de même une belle osmose entre les musiciens, notamment le claviériste et le guitariste, situés de part et d’autre de la scène. Bien que plus en retrait, le batteur fascine également par son utilisation de la totalité du kit, jusqu’à la moindre splash. Le bougre se sert également d’un shaker latin entre les deux micros stéréo des cymbales pour simuler certains bruitages d’intro. Même si la setlist fait la part belle aux albums récents que je ne connais pas, les passages progressifs font mouche. Mais c’est bien évidemment le final sur « Dark Quarterer » qui constitue le point d’orgue du show. Final durant lequel Tom Rentor de Chevalier vient épauler le groupe à la seconde guitare. Un très beau moment que même les plus aigris semblent avoir apprécié !
Dead Congregation
Sleap : Même si musicalement, Dead Congregation est de très loin mon groupe favori de l’affiche, je ne viens pas à ce festival pour eux en particulier. Les ayant déjà vus un paquet de fois, je m’attends « juste » à un très bon concert. Mais ma dernière date du groupe remontant à quelques années, j’en oublie presque qu’un « bon concert » de Dead Congregation survole aisément la moyenne.
Le son est une nouvelle fois au top, les lights bleutées parfaitement calibrées, la salle est bien remplie et le pit est pour une fois assez énervé. Certains festivaliers ont bien compris que c’était là leur dernière occasion de pogoter tant la suite du programme ne s’y prête pas. Toutefois, de nombreux slams ont lieu pendant le set et ça, c’est déjà moins adapté… Mais ne boudons pas notre plaisir, d’autant que les Grecs nous gratifient de l’enchaînement « Promulgation of the Fall » / « Serpentskin », ce qu’ils avaient pris la fâcheuse habitude de ne plus faire ces dernières années. En revanche, le départ du groupe après seulement 45 petites minutes est fort décevant. Le retard n’était pourtant pas si conséquent. Et l’absence du classique final sur « Teeth into Red » laisse une bonne partie de l’assemblée sur sa faim, moi le premier… C’est comme un bon repas sans dessert, impardonnable !
The Lord Weird Slough Feg
Sleap : Il y a ceux qui regardent le nom du groupe en se marrant, et il y a ceux qui savent. Avec des textes abordant la mythologie celtique, tirés pour la plupart du comics britannique Sláine, Slough Feg est en réalité une sorte d'excroissance de Thin Lizzy qui jouerait du heavy épique US. Et sous ces oripeaux de nerdisme assumé se cache un vrai bijou à la discographie quasi-parfaite. Active depuis plus de trente ans, la bande à Mike Scalzi se fait pourtant rare en Europe tant le groupe est snobé par nombre d’amateurs du genre. J’avais eu la chance de les voir à Londres en 2018 mais il s’agit ce soir de leur première date française !
Dès l’arrivée des Californiens sur scène, leur attitude désinvolte fait son effet. Backpatch GBH pour les uns, t-shirt Poison Idea pour les autres, quant à Mike, il arbore toujours son petit gilet en cuir sur son torse nu. En revanche, pour coller à l’ambiance, il est totalement saoul. Cela n’altère pas la qualité du show mais c’est tout de même marrant de noter ses nombreux ratages. Il loupe presque tous ses débuts de couplets (car trop loin du micro à l’instant T), crache de nombreux molards, peine à communiquer efficacement avec le public et on a même droit à un faux départ lors d’un morceau en début de set. Mais malgré tout cela, il parvient à tenir en haleine son auditoire. Le bougre n’est pas prof de philo pour rien ! L’apogée est atteinte avec une improbable reprise hard rock d’une chanson de Star Trek durant laquelle Mike descend aux barrières coiffé d’un chapeau qui lui donne, plus que jamais, des airs de Tom Waits.
Mis à part le final sur « High Passage/Low Passage », c’est surtout « Tiger ! Tiger ! » qui semble récolter le plus de réactions du public. De mon coté, c’est plutôt le troisième album qui me fait user mes cordes vocales. Nous avons droit à « Sky Chariots », « Traders & Gunboats » et surtout « Warrior’s Dawn » à l’intérieur duquel le groupe intègre un autre morceau en snippet avant de clore le titre. Mis à part les backing vocals du bassiste qui sont purement et simplement inaudibles, le son reste tout à fait correct. Je garde une préférence pour la date londonienne d’il y a cinq ans – un peu plus carrée –, mais Slough Feg ont indéniablement convaincu l’assemblée, c’est une certitude !
Wishbone Ash
Sleap : C’était le rêve des organisateurs que de faire venir des groupes de rock 70’s à Plozévet. Après avoir envisagé la chose sous la forme d’un second festival, le choix d’inscrire Wishbone Ash directement sur l’affiche du Courts of Chaos s’est rapidement imposé comme une évidence. Et à la vue des nombreux festivaliers – metalleux ou non – s’impatientant dans la salle alors que les balances n’ont même pas commencé, on peut dire que ce choix s’est avéré judicieux. Pour ma part, j’avais déjà raté les Anglais à trois ou quatre reprises par le passé, c’est donc en grande partie pour eux que je suis présent au festival cette année.
Le début de set est malheureusement terni par quelques problèmes de jack et de pédale au niveau de la Flying V d’Andy Powell. Ces soucis seront heureusement réglés juste avant que ne démarre le véritable show. En effet, nous ne sommes pas seulement ici pour voir Wishbone Ash. Nous sommes ici pour voir Wishbone Ash interpréter Argus dans son intégralité. Il s’agit là, non seulement de leur meilleur album, mais également d’un des plus grands disques de rock 70’s de tous les temps. Mariant hard rock, prog et classic rock, ce monument de la scène britannique est parfaitement restitué ce soir, et dans l’ordre !
Dès les premières secondes de « Time Was », la clameur du public se fait entendre et les refrains ne tardent pas à être repris en chœur par l’audience. Le son était déjà exemplaire durant ces deux jours de festival, mais il atteint là une qualité tout bonnement extraordinaire. Quelle clarté ! Le son des guitares est presque aussi cristallin que sur album. Et pour un groupe comme Wishbone Ash c’est d’autant plus incroyable à vivre en live. Le groupe est en effet réputé pour avoir popularisé ce que l’on appelle les « twin guitars », à savoir non pas un guitariste rythmique et un soliste, mais bien deux guitaristes solistes. Et bon dieu, le groupe n’a pas usurpé sa réputation ! Les échanges de soli entre Powell et son nouveau comparse Mike Abrahams sont hypnotisants. Une telle maîtrise de cet instrument met à genoux tout le reste du line up du week-end. Les membres de Slough Feg sont justement parmi nous dans la fosse et en totale pamoison.
Coté chant, la voix de Powell n’est évidemment plus aussi puissante qu’en 1973, mais le frontman sonne malgré tout parfaitement juste. Et lorsqu’il est obligé de descendre d’une octave, c’est le bassiste Bob Skeat qui se charge des passages plus aigus. Agrémentées d’une très légère reverb’, les harmonies vocales sont presque aussi belles que le travail des guitares. Le tout avec une attitude très sobre de la part de tous les musiciens. Quelle classe, mais quelle putain de classe ! « Sometime World », « Blowin’ Free », « The King will Come », le groupe enchaîne les titres – pour la plupart entre cinq et dix minutes ! – sans presque aucune pause. On n’a même pas le temps de se remettre de nos émotions qu’un autre immense classique démarre. L’apogée étant atteinte sur « Warrior » en fin d’album durant lequel toute la salle reprend le triomphant chorus final à l’unisson.
Et alors que je pensais que le show ne pouvait pas être plus phénoménal, le quatuor effectue un rappel sur un « Phoenix » absolument anthologique. Je venais clairement à cette date pour entendre Argus en live, mais ce rappel est finalement pour moi l’apothéose du set. Plus d’un quart d’heure de maestria durant lequel nous sommes plusieurs dans les premiers rangs à s’époumoner sur chaque foutu riff ! Et c’est après un tout aussi énorme « Jail Bait » que les Anglais quittent la salle sous un tonnerre d’applaudissements. Cette heure et demie de Wishbone Ash se hisse haut la main tout en haut du podium de l’année. Je viens de vivre l’un des meilleurs concerts rock de toute ma vie, ni plus ni moins !
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Sleap : Comme le disait le président de l’asso il y a quelques jours, le festival commence à trouver son rythme de croisière après quatre éditions rondement menées. Ce cru 2023 est effectivement une nouvelle réussite à tous les niveaux, surpassant même les années précédentes sur certains points. Et à ce titre, on peut remercier l’armée de bénévoles qui se sont encore une fois donnés à fond !
Même s’il y a encore beaucoup d’attente au bar ou à la restauration lors des heures de pointe, le trafic reste assez fluide durant tout le week-end. La qualité est toujours au rendez-vous et les prix abordables. Mention spéciale aux brasseries locales Tri Martolod et Storlok pour leurs différentes pressions toujours excellentes, en plus de celles, incontournables, de La Débauche. Et il en est de même pour la nourriture, que ce soit les crêpes, les frites et même le couscous (oui j’ai tout goûté).
Mis à part quelques retards dans le running order – que l’on comprend et excuse amplement, nul besoin de raccourcir les sets –, les enchaînements sont rigoureusement effectués. Mais s’il y a un point qui était cette année bien supérieur aux éditions précédentes, c’est bien le son. Un grand bravo à toute l’équipe technique pour ce travail impeccable ! Enfin, je salue bien bas tous les membres de La Vonologie à commencer par Ion, Kevin, Paul, Mo et bien évidemment Thomas dont c’est la dernière année au sein de l’asso. Ce n’est pas chose aisée que de mettre sur pied le meilleur festival de metal en France, et pourtant vous l’avez fait !
Photos : Dolorès pour le premier jour et merci à Ana (pour les photos de Meurtrières, Slough Feg et Vulture's Vengeance) !