"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Vous avez dit « super-groupe suédois avec Mikael Stanne de Dark Tranquillity » ? Non, on ne va pas parler de Grand Cadaver, le groupe qu’il a fondé avec quelques routiers du Metal suédois (passés par Katatonia, Tiamat…) pour faire du bon vieux Swedeath, avec un album (Into The Maw Of Death, 2021) passé assez inaperçu - car il est vrai un peu anecdotique. On va plutôt parler de plus « lourd », enfin plus en termes de pedigree que de musique. Si vous suivez un peu les sorties de Nuclear Blast, vous n’avez pas pu passer à côté de The Halo Effect. Outre la présence de Stanne derrière le micro, ce nouveau groupe réunit surtout pas moins de 4 anciens membres d’In Flames : Jesper Strömblad, Peter Iwers, Niclas Engelin et Daniel Svensson. Autant dire que l’on lorgnait sur cette nouvelle formation pour espérer, au minimum, un revival du In Flames période fin 90’s début 2000’s, celui de Colony et Clayman. Mais d’autres paramètres rentrent tout de même dans l’équation : par exemple le cas du guitariste Niclas Engelin, qui après avoir débuté dans Gardenian a été membre éphémère d’In Flames entre 1997 et 1998 mais était surtout revenu pour enregistrer… les 3 derniers albums en date des enflammés. Il a aussi participé à Engel, dont un bon pan de la discographie est assez discutable. Jesper et Peter eux s’étaient distingués dans Cyhra, groupe de mélodeath plus moderne mené notamment par Jake E passé par le très honni Amaranthe. Alors attention, rien ne dit que The Halo Effect viendra faire du In Flames « old-school », même si on peut le présager. De toute façon la réponse arrivera bien vite, le groupe ayant été généreux en singles depuis quelques mois. Qu’on pense logiquement à In Flames, à Dark Tranquillity aussi, à Engel ou à Cyhra, The Halo Effect va au-delà de toutes ses inspirations possibles et des groupes auxquels il est rattaché, évoquer une seule chose précise : le mélodeath dit « Gothenburg ».
Car c’est là qu’est le cœur du mélodeath suédois, la ville de Gotebörg, et nul doute que tout bon metalleux qui connaît la Culture saura reconnaître ce vivier, qu’il aime ou pas. Plutôt que de faire du In Flames old ou mid school mâtiné de Dark Tranquillity avec des touches plus modernes, The Halo Effect fait tout simplement du « mélodeath Gothenburg ». Attention, cela ne veut pas dire que la première affirmation est fausse. Bien évidemment, le chant de Stanne rattache beaucoup à Dark Tranquillity de même que certaines compos, et que le touché global emprunte énormément à In Flames - plutôt autour d’un Reroute To Remain que des albums plus anciens globalement - mais The Halo Effect semble plutôt être un condensé de ce que la scène Gothenburg peut produire (bon, excepté la vibe At The Gates quand même). Tout ceci se constate dès l’ouverture sur "Shadowminds", où tout y est, même des soubresauts plus modernes pour montrer que The Halo Effect remet malgré tout son mélodeath Gothenburg au goût du jour. Le morceau-titre de Days Of The Lost balance directement des mélodies typiques d’In Flames en un peu plus vintage avec des couplets remuants à la Dark Tranquillity, et on se dit déjà qu’il n’y aura aucune surprise et peu d’aspérités, mais finalement n’est-ce pas ce qu’on était venu chercher ? En tout cas, il ne faudrait pas en attendre plus, et The Halo Effect d’assumer ne rien révolutionner et faire un mélodeath début 2000’s pour faire plaisir et se faire plaisir. Et ça continue à fonctionner avec le très mélodique "The Needless End" et surtout "Conditional", assurément le tube de cet opus avec son riffing franchement mortel. Plus tard dans l’album un "Feel What I Believe", bien dynamique et fort teinté de (pas trop) vieux In Flames, nous fait établir presque définitivement le constat : c’est donc bien dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes ?
Oui, mais… Days Of The Lost n’est pas non plus un album à 100% axé sur un mélodeath Gothenburg circa 1999-2002 et va s’autoriser quelques sorties de route et des touches de « modernité » plus ou moins évidentes. Cela fonctionne bien sur le parfaitement équilibré "Gateways" à l’ambiance assez marquante d’ailleurs. Moins sur, à vrai dire, les deux seuls morceaux de l’album où Mikael Stanne use de son chant clair : "In Broken Trust" est assez niais et évoque les morceaux assez moyens du même acabit qui figuraient sur Moment de Dark Tranquillity comme "Eyes of the World" ; "A Truth Worth Lying For" évoque lui aussi les morceaux « à chant clair » des derniers Dark Tranquillity mais en moins bien. C’est alors étonnant mais The Halo Effect est plus en réussite quand il penche vers In Flames plutôt que Dark Tranquillity, en témoigne encore "Last of Our Kind" qui semble être une très dispensable chute de studio des derniers disques du groupe principal de Stanne. Days Of The Lost s’en retrouve alors un peu hétérogène, et est clairement plus en réussite lorsqu’il joue à fond la carte d’un mélodeath « mid-school ». On est donc clairement pas en présence d’un revival du mélodeath Gothenburg mi-90’s comme At The Gates avait pu le faire à sa reformation, ni de quelque chose qui plonge clairement dans une certaine modernité à la Soilwork, même si les touches de Engel et Cyhra (ou d’autres d’ailleurs) se ressentent à certains moments. Bref, Days Of The Lost est un peu le cul entre deux chaises mais n’en est pas moins un album convaincant, même s’il faut oublier 2-3 écarts. Il y a quand même de quoi faire avec des "Shadowminds", "Conditional" ou autre "Feel What I Believe", et il faudra voir où vous placez votre préférence sur la frise historique du mélodeath pour savoir quel est le pourcentage que vous apprécierez le plus de Days Of The Lost. Après, autant dire que si vous conchiez le In Flames actuel et que vous en étiez restés au pire jusqu’à Soundtrack To Your Escape, et que bien sûr vous êtes à côté un grand amateur de ce que produit Dark Tranquillity et encore actuellement, ce premier album de The Halo Effect sera du pain béni. Sera-t-il un « one-shot », on attendra de voir, en attendant, le mélodeath Gothenbug « historique » n’est pas mort et sait même vivre avec son temps. Alors que demande le peuple…
Tracklist de Days Of The Lost :
1. Shadowminds (3:53)
2. Days of the Lost (3:37)
3. The Needless End (4:04)
4. Conditional (3:41)
5. In Broken Trust (4:09)
6. Gateways (4:49)
7. A Truth Worth Lying For (4:24)
8. Feel What I Believe (3:59)
9. Last of Our Kind (4:04)
10. The Most Alone (4:03)