"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Dans le (très) petit monde de l’électro rétro teintée de Metal, il y a un match : celui qui oppose Master Boot Record à The Algorithm. L’Italie-France de la musique électronique MAO agrémentée de grattes. Master Boot Record, toujours très productif, a d’ailleurs fait assez fort cette année avec un excellent Personal Computer (écoutez juste "80386" pour vous en convaincre), son deuxième album à sortir chez Metal Blade d’ailleurs. Après, personnellement, j’ai toujours trouvé la discographie de Master Boot Record assez redondante pour multiplier les écoutes. Alors quitte à paraître chauvin, c’est The Algorithm qui remportera toujours le match pour moi. Mais n’exagérons rien, Master Boot Record et The Algorithm sont plutôt deux projets qui se complètent plutôt que de se faire concurrence. D’autant que le « délire » n’est pas foncièrement le même. Disons que quand Master Boot Record se base sur le combo MS-DOS / disquette 3.5 pouces, The Algorithm lui choisirait plutôt la dernière version de macOS et un SSD NMVe. Tout ça pour dire que tout rétro/chiptune qu’est sa musique, The Algorithm opte quand même pour une vision un peu plus moderne. Son deuxième album Octopus4 (2014) lui avait d’ailleurs permis d’explorer de nouvelles voies, déjà un peu éloignées du « Djent » des démos. Depuis, il enchaîne les pépites avec un regain de « Metal », restant sur un percutant Brute Force (2016) et surtout l’incroyable Compiler Optimization Techniques (2018), qui représentait l’aboutissement de ce qu’il était capable de faire. Il faut passer après ça et c’est ainsi que Data Renaissance ne nous arrive que quatre ans plus tard…
D’ailleurs, pour faire monter la température, Rémi a décidé de volontairement dévoiler une grande partie de Data Renaissance en amont, publiant régulièrement des singles. Ce ne sont donc pas moins de 7 pistes sur les 10 que comptent l’album qui ont été dévoilées au compte-gouttes, sur une période de presque un an (fin mai 2021 à début mai 2022). Quitte à casser l’effet de surprise et faire une Arson de Harakiri For The Sky ou plus récemment une Deam Morte de The Great Discord ? Eh bien, étrangement, cette fois-ci le résultat final va fonctionner et Data Renaissance sera un album cohérent. Mais il faut dire que le fait de dévoiler des singles un à un aura été pertinent, car au bout, Data Renaissance sera une véritable usine à tubes, encore plus que Brute Force. 10 morceaux, 39 minutes, ce 5ème album de The Algorithm va à l’essentiel. Quitte à ne pas évoluer d’un pouce musicalement, mais de toute façon tout était déjà dit avec Compiler Optimization Techniques, et certaines nouveautés sont de toute façon renouvelées (comme ces sonorités un peu plus Synthwave). Mais on troque les longs morceaux contre quelque chose de plus immédiat, même si on ne perd pas de vue cette ambiance si particulière amenée par l’opus précédent, cette impression d’être au cœur d’un ordinateur dont les échanges d’informations fuseraient à toute vitesse selon des chemins colorés. Une atmosphère à la « Tron », mais en version rebootée. Et ce rétro-futurisme est toujours ce qui fait le charme de The Algorithm.
Le superbe "Segmentation Fault" en ouverture montre que Rémi est toujours au top de son inspiration (surtout niveau production sonore avec un relief assez bluffant), entre cavalcades électroniques jouissives en mode Audiosurf et grattes tranchantes qui le placent toujours dans un improbable univers hybride metallisé. Et d’ailleurs, Data Renaissance sera un album ultra efficace, chaque apparition des grattes étant particulièrement percutante et remarquable : les 4 premiers morceaux en sont bien dotés (mention spéciale aux trémolos de "Readonly") et l’on notera encore la reprise imparable au début de "Object Resurrection" ou encore cet assaut mortel au sein de "Oracle Machine". C’est presque l’album de The Algorithm où l’on headbangue le plus ! Mais Rémi n’en oublie pas les passages plus feutrés où c’est le côté électronique le plus créatif qui s’exprime. La plupart des morceaux de l’album sont de toute façon très bien équilibrés (particulièrement "Multithreading" qui du coup porte bien son nom) mais on s’attardera quand même sur un "Cryptographic Memory", un "Oracle Machine" ou encore le final magnifique de "Object Resurrection" et les sublimes passages du morceau-titre pour notre dose d’électro un peu plus planante. Data Renaissance a beau être l’album le plus court de The Algorithm, il n’en est pas moins riche. Même s’il n’y aucune nouveauté notable par rapport aux précédents albums, surtout quand on sait que ça demeure un style ouvert à l’innovation. Mais Data Renaissance trouve un bon équilibre entre Brute Force et Compiler Optimization Techniques et surtout, se révèle très inspiré avec 10 pistes consistantes où il n’y a rien à jeter. Une belle collection de morceaux solides de The Algorithm, c’est finalement ce qui était annoncé et il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Pour quelque chose de neuf, il faudra attendre la prochaine update, en attendant pour les plus geeks d’entre nous, la version actuelle de l’Algorithme est plus que satisfaisante. Oui.
Tracklist de Data Renaissance :
1. Segmentation Fault (4:35)
2. Interrupt Handler (3:42)
3. Decompilation (3:28)
4. Readonly (3:41)
5. Cryptographic Memory (4:26)
6. Object Resurrection (3:54)
7. Multithreading (3:13)
8. Oracle Machine (3:07)
9. Data Renaissance (4:46)
10. Inline Assembly (4:03)