Regarde Les Hommes Tomber + Decline of the I + Les Chants de Nihil @Nantes
Stereolux - Nantes
Non.
A Nantes, faire jouer du metal d'une certaine ampleur n'est pas toujours facile. Il existe peu d'espaces intermédiaires ou vraiment grands, capables de combler les lacunes du Michelet (150 personnes) ou du Ferrailleur (300 personnes). Le Warehouse, plutôt connu pour sa facette « club », propose une petite offre metal qui reste toutefois assez rare. Autant dire que quand le Stereolux, avec ses deux salles de taille différente, annonce une belle date, cela fait plaisir de savoir que les conditions seront réunies pour apprécier au maximum le plateau.
Les Chants de Nihil
Globalement, c'est une belle manière de dire que même si je porte le Ferrailleur dans mon cœur pour tout un tas de raisons, j'étais forcément heureuse de revoir Les Chants de Nihil dans une salle plus adaptée. Vus il y a pourtant quelques semaines seulement, leur passage dans une salle plus petite ne leur a pas permis de profiter d'un bon son. Oui, j'arrivais à peine à distinguer les riffs de certains morceaux, alors que je connais pourtant plutôt bien leur discographie.
Ici, la salle Maxi peut accueillir un petit millier de personnes près d'une belle scène, avec des lumières adaptées et, surtout, un son qui envoie. Les deux guitares s'entremêlent sans se noyer, les notes de basse propulsent le groupe en live et on distingue bien les mots scandés en français, qu'ils soient hurlés ou chantés. La poésie du groupe faisant entrer le public dans sa fiction sonore, il n'est pas anodin de préciser lorsqu'il est possible de comprendre les paroles. Je crois seulement que je préférerais que les deux chants (de Jerry à la guitare et chanteur principal et de Youenn à la basse) soient plus distincts parfois, dans des jeux de question-réponse plus clairs.
Parmi les plus anciens titres du groupe, il manque « Dame Silence » qui avait été joué il y a quelques semaines et qui fait souvent partie des setlists. Timing plus serré, sans doute, bien que « Rouge comme tes lèvres » ait heureusement le temps de marquer la pause old school du set. Car bien sûr, le dernier album est à l'honneur, avec un « Ma doctrine, ta vanité » où quelques connaisseurs du public viennent rejoindre les chœurs, le titre éponyme « Le tyran et l'esthète » ou encore « Danse des morts-nés », en conclusion, qui termine de conquérir la fosse avant de continuer la soirée.
Decline of the I
A chaque fois, c'est la même chose. Je vais à un concert en pensant savoir d'avance ce qui me plaira et quel groupe me laissera de marbre. Decline of the I, j'avais déjà écouté, pas franchement accroché, si ce n'est un titre il y a bien longtemps. Je pensais regarder deux ou trois titres puis attendre tranquillement RLHT. A chaque fois, c'est souvent le groupe qui m'intéresse le moins qui réussit à me mettre en transe.
L'ambiance est rapidement posée : des samples entre sonorités étranges, notes de piano dissonantes et tout un tas d'atmosphères qui contribuent à dresser un tableau. Cela permet surtout de créer une certaine densité où aucun creux ne subsiste dans le spectre sonore. A cela s'ajoute la projection tout au long du concert d'images avec, je crois, La Passion de Jeanne d'Arc, La Maman et la Putain, Stalker, mais aussi un verre de vin qui se remplit à l'infini dans un élan hypnotique ou encore quelque chose qui ressemble à des images de Begotten remontées dans un rythme ultra saccadé et dérangeant. Puis, comme une cerise sur le gâteau, des citations énigmatiques du type « La seule raison d'être d'un être c'est d'être » (Henri Laborit).
Sur les planches, la sobriété et la simplicité sont de mise mais on sent aussi la complicité entre les membres. Le chanteur, central et assez imposant, laisse pourtant un peu d'espace aux cris des musiciens, dont le guitariste qui est la tête pensante du projet et les hurlements perçants de la bassiste dont la présence apporte beaucoup de force au live. Toujours pas complètement conquise sur album, je trouve pourtant que le groupe prend une dimension toute autre en live que j'aurai plaisir à revoir.
Regarde Les Hommes Tomber
En 2013, je me souviens avoir vu le groupe nantais au fort potentiel sur scène, au Motocultor, et m'être étonnée de voir autant de gens présents de si bon matin pour leur concert. Il y en a eu, du chemin, depuis ! Un changement de line-up, deux nouveaux albums et notamment Ascension, le petit dernier qui avait eu la bonne idée de sortir pile avant la pandémie actuelle. Cette release party, un an et demi après la sortie de l'album, est donc une belle bombe à retardement !
Il n'y a pas de grande surprise concernant la setlist : RLHT joue tout son album, en suivant l'ordre des titres, si ce n'est que l'interlude « La Tentation » est remplacé par « The Incandescent March », le morceau qui concluait l'album de 2015. Ascension est vraiment taillé pour le live, car la puissance qui se dégage de l'album est décuplée sur scène. Des riffs les plus accrocheurs aux arpèges hypnotiques, l'atmosphère fonctionne à merveille devant une salle blindée de fans. Un monstre de violence percussive, un chanteur possédé sans qu'on puisse lui nier une maîtrise absolue de sa posture, un jeu de scène sacrément pro : voilà ce qu'on retient du concert. Je dois aussi avouer qu'il y a toujours quelque chose de touchant à voir des personnes qu'on connaît évoluer et s'épanouir dans leur art, encore plus face à nous, bien que cela biaise forcément un peu le ressenti. L'heure de concert millimétré s'achève dans les flammes, marquant les derniers mots du concert, en français dans le texte : « Ecoute les diables sombrer, regarde les hommes tomber », entre désillusion et prophétie.
Seul bémol : les deux personnes devant moi qui ont passé un tiers du concert à filmer au portable, avec la luminosité au max... Forcément très désagréable et ça m'a sortie un peu trop souvent de la bulle créée par le groupe.
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Un grand merci au Stereolux pour l'invitation,
aux groupes et aux techniciens, ainsi qu'à
la photographe aussi talentueuse qu'adorable Ingrid Thierry.