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Album

23 février 2018 - ZSK

Necrophobic

Mark Of The Necrogram

LabelCentury Media Records
styleBlack/Death Metal mélodique
formatAlbum
paysSuède
sortiefévrier 2018
La note de
ZSK
7/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Necrophobic est phobique de la mort, par définition. Il ne veut donc pas passer l’arme à gauche, quand bien même ses changements de personnel le mettent bien en difficulté. La sortie de leur 7ème album Womb Of Lilithu en 2013 avait été écornée par de gros soubresauts de line-up. Alors que deux nouveaux gratteux avaient pris place dans la formation en 2011, on aura notamment appris que Robert Sennebäck (passé par Dismember et Unleashed) n’aura rien enregistré avec le groupe, laissant la seconde guitare au chanteur Tobias Sidegård pour Womb Of Lilithu. Ce même Tobias Sidegård qui, en pleine promotion de Womb Of Lilithu, se verra accusé de violences conjugales, aboutissant à son départ logique du groupe. Et par ricochet, Robert Sennebäck quittera le navire… et trois ans plus tard, c’est l’autre guitariste Fredrik Folkare (Firespawn, Unleashed entre autres) qui mettra les voiles. Bref, Necrophobic aura été au bord de l’implosion et a du se reconstruire entièrement, autour du batteur Joakim Sterner qui est le seul membre fondateur subsistant, et le bassiste Alex Friberg (Firespawn itou) qui lui n’est là que depuis… 2008, soit pour deux albums (Death To All en 2009, et donc Womb Of Lilithu). Il ne restait donc plus grand-chose du Necrophobic « historique », et du coup Joakim et Alex ont justement décidé de revenir un peu en arrière. Déjà en signant le retour de la paire de guitaristes inséparables Sebastian Ramstedt - Johan Bergebäck (passés par Black Trip et VOJD, Exhumed, Nifelheim ou encore Ordo Inferus actuellement), le premier ayant officié de Darkside (1997) à Death To All, le second dès Bloodhymns (2002) jusqu’à Death To All également, bref la quasi-période parfaite du groupe encore marquée par The Third Antichrist (1999) et Hrimthursum (2006). Et ce n’est pas tout car dans le genre « retour en arrière » il manquait un vocaliste, et la formation est allée rechercher… Anders Strokirk, qui n’est pas le tout premier chanteur de Necrophobic mais avait officié sur leur premier full-length, The Nocturnal Silence (1993) ! Un sacré remaniement sous le signe du Necrophobic pour le coup 100% « historique ». Un peu comme quand une équipe de foot en galère va chercher des joueurs formés au club et près de la retraite pour obtenir un coup de main bienvenu et ne pas sombrer…

Necrophobic va donc pouvoir renaître et ranger les déboires avec Tobias Sidegård dans le passé. Et il en avait bien besoin tant le groupe, avec une nouvelle paire de gratteux, avait signé un Womb Of Lilithu certes innovant (un peu de sympho, des chœurs clairs…) mais un peu raté, mou et décevant passé ses deux singles pourtant énormes, "Splendour Nigri Solis" et surtout "Furfur". Avec le retour de membres historiques, Necrophobic va donc pouvoir faire un pas en arrière et deux pas en avant pour se baser sur ses fondamentaux, qui avaient quand même enfanté des albums assez délicieux de Black/Death suédois comme The Third Antichrist, Bloodhymns et Hrimthursum, pour moi le trident de référence du groupe, complétés par le tout à fait satisfaisant Death To All également. Le retour de Anders Strokirk ne sera pas non plus porteur d’un pur retour aux sources vers The Nocturnal Silence qui penchait plus à l’époque vers du Death-Metal, on se retrouve avec Mark Of The Necrogram dans un registre très nettement Black, un brin mélodique bien évidemment, le tout avec une pochette signée Kristian Wåhlin pour avoir du Black suédois dans tous les coins possibles. Du pur Necrophobic de la fin des années 2000, dans la lignée de Hrimthursum (surtout) et Death To All, sans surprise et reléguant Womb Of Lilithu au rang d’expérimentation avec un line-up différent. Necrophobic retrouve donc son identité, quitte à ce que Anders Strokirk se mette carrément à faire du Tobias Sidegård, dans un registre un peu plus grave certes, mais bien éloigné de celui qui avait été employé sur The Nocturnal Silence. On y voit presque que du feu et Mark Of The Necrogram sera donc marqué à 100% par ce que Necrophobic faisait depuis The Third Antichrist avec la production sonore de Hrimthursum et Death To All. La question sera juste de savoir, est-ce que Mark Of The Necrogram est un bon cru de Necrophobic.

Et on a envie d’y croire, on peut même y croire sincèrement, avec le retour d’un line-up solide et du style classique, Necrophobic a les moyens de pondre un album facilement digne de ses meilleures sorties passées. On se laisse déjà convaincre par les deux singles habilement placés en début d’album, entrecoupés par un très bon "Odium Caecum" avec son ambiance bien sombre et ses compos bien senties et menées. Avec le morceau-titre qui ouvre l’album, on retrouve donc toutes les caractéristiques du Necrophobic 1999-2009, entre ces riffs rangés et incisifs et ces leads gracieux et entraînants, le tout accompagné du chant hargneux très maîtrisé de Strokirk (qui avait continué à officier dans Blackshine et Mykorrhiza notamment). Et avec le second single "Tsar Bomba", on retrouve tout simplement du très grand Necrophobic. Un morceau hyper efficace aux mélodies géniales, qui se pose d’ores et déjà comme une référence aux côtés de brûlots comme "Into Armageddon", "Act of Rebellion", "Blinded by Light, Enlightened by Darkness" ou encore "I Strike With Wrath" et malgré tout "Furfur". Un véritable hymne totalement imparable, qui se doit de figurer dans les playlists de Metal extrême de la fin de l’année et qui augurait du meilleur pour le reste de Mark Of The Necrogram, si la formation parvient à maintenir ce niveau, cette inspiration et cette classe. Mais hélas, trois fois hélas, Necrophobic ne va pas réussir à tenir sur la durée. "Lamashtu" démarre pourtant très bien avec même ce petit break à la basse bien vicieux, mais finit par se traîner en longueur malgré de toujours bons leads et solos. Et Mark Of The Necrogram de débander aussi sec. "Sacrosanct" est plat et répétitif, "Pesta" se tire également trop en longueur malgré de bons riffs et moments mélodiques, on refait également le vieux constat que Joakim Sterner n’est pas vraiment un batteur mirobolant non plus… Plus mélodique, "Requiem for A Dying Sun" offre à nouveau de bons moments (notamment sa partie centrale plus originale avec des claviers lugubres, suivie d’un super solo) mais s’avère être globalement un peu chiant. Le soufflé retombe donc très vite, et le retour de Ramstedt et Bergebäck n’assure malheureusement pas une inspiration de tous les instants.

Heureusement, le final de Mark Of The Necrogram va un peu rattraper le coup, avec un "Crown of Horns" bien couillu et plus digne du trio de départ de l’album que de son milieu assez vain, et un "From the Great Above to the Great Below" dynamique et très sympathique (pour du Necrophobic). L’outro "Undergången" clôt cet album au final tout juste satisfaisant car très hétérogène. Certes, Hrimthursum avait aussi des passages à vide en son temps (il faut dire qu’il comptait 3 morceaux complets de plus et atteignait l’heure de musique), mais Mark Of The Necrogram en pâtit encore plus vu son départ en fanfare et son final bien mordant. C’est dommage car avec ses excellents singles Mark Of The Necrogram promettait vraiment beaucoup. Le même problème qu’avec Womb Of Lilithu en son temps finalement… Cela fait tout de même plaisir de réentendre du Necrophobic « classique », mais Mark Of The Necrogram est tout de même inférieur à tout ce que le groupe avait produit entre 1999 et 2009, ses dix glorieuses en définitive. Le retour de la paire infernale de gratteux et du chanteur de The Nocturnal Silence est tout de même auréolé d’un minimum de réussite, sans tomber dans un trip trop passéiste, juste une nouvelle continuité qui fait oublier le décalé Womb Of Lilithu. En gardant les meilleurs morceaux on obtiendrait un EP assez énorme, en tant qu’album complet c’est plus discutable. On retiendra donc entre autres les "Mark of the Necrogram", "Crown of Horns" et bien sûr l’exceptionnel "Tsar Bomba" qui vous fera taper du pied pendant tout le reste de l’année 2018, pour un album du coup très inégal mais assez correct globalement, une fois que l’on fait la moyenne. Le Necrophobic classique est de retour, c’est le plus important même s’il y a du déchet et de la baisse d’inspiration à côté de performances de Black/Death mélo suédois, en espérant désormais que cela soit suffisant pour réussir à raviver vraiment la flamme à plus long terme…

 

Tracklist de Mark Of The Necrogram :

1. Mark of the Necrogram (4:53)
2. Odium Caecum (4:25)
3. Tsar Bomba (5:40)
4. Lamashtu (5:20)
5. Sacrosanct (4:38)
6. Pesta (5:59)
7. Requiem for a Dying Sun (4:39)
8. Crown of Horns (3:59)
9. From the Great Above to the Great Below (5:53)
10. Undergången (2:48)

 

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