"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
De nos jours, les groupes autoproduits passent de plus en plus par la plateforme très vite devenue incontournable qu’est Bandcamp. A l’heure où le format physique est sur le déclin et où les jeunes groupes en restent au digital dans un premier temps, le célèbre site d’écoute en ligne a pignon sur rue. Il ne faut pas hésiter à creuser pour faire de menues découvertes et bien sûr y trouver des révélations, qui frappent fort pour leurs grands débuts dans la confidentialité d’une page Bandcamp. Je vais donc prendre un peu le temps de parler d’une des révélations « Bandcamp » françaises de l’année passée, que j’ai d’ailleurs citée dans mon bilan 2017, Innermoon. Le duo d’Adrien est formé à Grenoble en 2011, et a donc pris le temps nécessaire pour nous livrer directement un premier album de qualité. Intéressé par les fondamentaux du Metal que sont sa vivacité, ses émotions et sa puissance, Innermoon nous a donc balancé sur l’Internet début septembre 2017 son premier stuff, Cloud Walkers, d’une durée d’une petite quarantaine de minutes. Et là, directement, Cloud Walkers me parle vu qu’il pratique un Mélodeath assez traditionnel. Si le groupe se revendique plutôt moderne et cite même des influences Metalcore, ce qui transpire de Cloud Walkers ce sont surtout des mélopées sorties tout droit de la scandinavie dans les années 90. Pour ma part Innermoon vient directement se ranger dans la cour des Fallen Joy, EverRise, Fractal Gates ou encore Temnein, qui pratiquent un Mélodeath légèrement old-school avec quelques petites particularités additionnelles, et ce duo savoyard ne va pas déroger à la règle.
On pensera bien évidemment à In Flames et Dark Tranquillity de la belle époque, mais aussi à des formations comme Insomnium, Before The Dawn et même Amon Amarth à l’écoute des compositions de Cloud Walkers, au nombre de 5 au final car il y a 3 intros/interludes/outros là-dedans, mais les morceaux s’allongent facilement et Innermoon en profite également pour revendiquer un léger aspect progressif. Certes un peu plus moderne qu’un Fallen Joy ou que le dernier Temnein, surtout dans certaines rythmiques qui découlent plus de la scène Mélodeath moderne par moments, Cloud Walkers sent quand même bon le son scandinave des nineties, dans ces mélodies très raffinées et ce chant rugueux, et bien évidemment dans les quelques incursions acoustiques. Innermoon creuse même déjà sa personnalité en développant ici et là un aspect légèrement sympho grâce à l’apport de quelques claviers. "Sleeping’s End" nous plonge bien dans une ambiance épique et le combo se distingue déjà par la qualité de ses divers arrangements, et les choses sérieuses arrivent bien vite avec le fleuve "Harmony" d’entrée, allongeant déjà presque 8 minutes. Nanti d’une belle production traditionnelle (mais pas underground, loin de là) qui met bien en valeur les mélodies, Innermoon pose déjà son inspiration sur base d’illustres influences, et on se laisse vite emporter par ces compositions classiques mais excellentes, qui laissent aussi de la place à quelques riffs plus modernes bien sentis. Des leads gracieux se taillent déjà la part du lion, le chant est maîtrisé et accrocheur, sur la forme Innermoon est déjà très pro et sur le fond il convainc sans mal, notamment lorsqu’il se laisse aller à un magnifique break atmosphérique, ponctué de chants plus clairs très émotionnels et de leads épiques. Cloud Walkers commence sous de très beaux auspices et inutile de dire que nous tenons pour sûr une plus que sympathique révélation en termes de Mélodeath.
Le potentiel d’Innermoon va alors s’affirmer de morceau en morceau, en commençant par "Children of the Moon" où le duo savoyard se lâche déjà avec moult passages épiques et une forte présence des claviers, une véritable ambiance libératrice s’installe, les riffs et mélodies ne sont certes pas révolutionnaires mais l’ensemble est parfaitement achalandé. Si "Pride" est un morceau de Mélodeath rythmé assez classique, "Will to Power" lui emboîte bien le pas avec des riffs plus directs mais aussi de superbes mélodies et pas mal d’effets symphoniques. Innermmon semble déjà avoir trouvé un équilibre entre son Mélodeath traditionnel et ses aspirations plus progressives, en témoigne encore l’autre fleuve "Fallen" (8 minutes et demie !) qui se laisse encore aller à des envolées épiques avec des mélodies enivrantes et des breaks envoûtants, le tout étant toujours accompagné de parties extrêmes (riffs et vocaux) efficaces. Certes, Cloud Walkers n’apporte rien de neuf mais sur base d’un Mélodeath mi-old-school mi-moderne, il a déjà un peu de personnalité avec ces moments très épiques. Il reste quelques points de forme à améliorer (notamment certains claviers et peut-être que certains auditeurs préféreraient une vraie batterie même si le son n’est jamais trop synthétique), mais Innermoon est déjà très inspiré et a bien profité du temps de gestation de Cloud Walkers pour livrer un album parfaitement fignolé. On en veut déjà plus finalement, sachant que l’ensemble reste encore proche de ses influences évidentes, mais il y a déjà largement de quoi faire d’Innermoon un bel espoir du Mélodeath français, qui a su garder les traditions du genre au niveau du dosage des mélodies et du Metal extrême, avec juste ce qu’il faut de modernité. Le tout mériterait déjà d’être signé et de sortir sur CD, mais en attendant, n’hésitez pas à donner votre chance via Bandcamp à Innermoon, un nom à retenir dans le domaine du Mélodeath, encore un…
Tracklist de Cloud Walkers :
1. Sleeping's End (1:25)
2. Harmony (7:50)
3. Children of the Moon (5:33)
4. From Nothing (1:29)
5. Pride (5:44)
6. Will to Live (4:29)
7. Fallen (8:26)
8. The End (3:43)