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Les faits reprochés aux Américains d’Emmure sont conséquents et alimentent la jalousie de toute une frange de coreux, n’ayant pas encore réussi à reproduire la recette idéale du métalcore abrasif et brutal. Une discographique efficace et tape à l’œil, un précédent opus chargé en testostérone, la montée en flèche digne de travailleurs intelligents et surtout le démarrage en trombe d’un vrai rouleau compresseur plus qu’habile sur scène, comme en témoigne leur récente tournée mijotée « aux petits oignons » en compagnie des Misery Speaks.
Ce soudain revirement de notoriété et la signature sur Victory Records auraient pu très bien corrompre jusqu’à la moelle, une inventivité manifeste, au détour de leur précédent et excellent album Goodbye To The Gallows. Il n’en est rien, tant les mercenaires de la nouvelle ère numérique récidive sous le couvert d’un tout nouveau combat de boxe mené avec eux-mêmes (c.f artwork) en redéfinissant les contours de la discipline et par la même occasion, la définition même de l’efficacité musicale ou encore de la pertinence sonore. Opportunistes et placés sous les meilleurs hospices d’une brutalité aguicheuse, ce The Respect Issue démontrent une fois de plus qu’Emmure est loin de s’être assagi et continue son petit bonhomme de chemin sur des routes peu fréquentables et rocailleuses.
S’il est bien un groupe qui réussit à se détacher allègrement des chemins traditionnels du métalcore, cette entité se trouve actuellement en face de nous et présente sous les traits d’Emmure. Avec une honnêteté de composition sans précédent et un souci du détail dans les arrangements, les cinq potes sont loin de se présenter comme des pantins serviles, lorsque résonnent dans leur for intérieur les grands « Sound Wave Superior » et « I Only Mean Half Of What I Don't Say », amenées tranquillement par un « Young Rich, And Out Of Control » étouffant, démarrant sous les chapeaux de roues d’une noirceur décontenancé.
Oui, l’ambiance développée par le groupe se trouve entachée et encrassée par des guitares assommantes et la plupart du temps livides, mais aussi par la voix si particulière de Frank Palmeri entre dégueulis notoire et folles vocalises. Sur " False Love In Real Life, il retrouve d’ailleurs de l’entrain pour pousser la chansonnette sur une des toutes meilleures pistes de l’album suivant les roulements intempestifs d’une batterie assurant la plupart du temps le strict minimum syndical. C’est sans compter sur sa participation au feu sacré de " Snuff 2: The Resurrection, enchaînant déstructurations rythmiques et explosion massive de toutes les idées préconçues formulées à l’égard de la musique du groupe.
Même si la totalité de la nouvelle œuvre, hautement introspective du groupe, demeure finalement plate et semble se rapprocher du Catch 33 de Meshuggah, pas dans le genre, mais en imposant durant 10 titres en une seule et même unité et bloc sonore, on remarque que les ambiances travaillées par le groupe et les accents mélodiques, restent finalement de l’ordre du bon goût, de la sincérité et d’un bon travail de fonds. (Chicago's Finest et " You're More Like Friend Without The 'R'). Anticonformisme au possible, notamment sur la dualité des titres " Rough Justice et " Dry Ice opposant deux univers totalement opposé, Emmure brouille les cartes, change la donne en apportant des éléments bruts allants droit au cœur d’un auditoire bercé trop près du mur. Des plans à la rencontre d’un hardcore natif des célèbres quartiers de New York et d’un brutal Death cheminant autour d’The Acacia Strain et des mouvances déstructurés façon Mathcore, comme en témoigne " Tales From The, marquant la combinaison parfaite de ces deux genres de complaisance.
Juste retour des choses pour ces travailleurs d’une mine musicale à l’apparence noire, mais truffé de pépites et de cailloux bien dorés, le nouvel album d’Emmure est une petite perle de schizophrénie musicale amenée langoureusement, par la singularité du groupe. The Respect Issue parvient même à rester dans l’esprit hardcore de la scène New-Yorkaise, que l’on pense chère aux yeux de cette turbine proactive. Avec plus de trempe, plus d’identité, plus de caractère et moins d’accoutumances aux schémas traditionnels du métalcore ou encore du hardcore, Emmure réussit le fou pari de mixer avec un brin d’authenticité, finesse et rage, brutalité et inventivité. La boucherie organisée s’est désormais faite un nom et le groupe de bâtisseurs peu raisonnables a encore de beaux jours devant-lui pour peaufiner son territoire sonore, voir même tenter d’autres folies dans un genre encore peu gagné par la profonde expérimentation.
1. Young Rich, And Out Of Control
2. Sound Wave Superior
3. I Only Mean Half Of What I Don't Say
4. False Love In Real Life
5. Chicago's Finest
6. Tales From The Burg
7. Rough Justice
8. Snuff 2: The Resurrection
9. Dry Ice
10. You're More Like Friend Without The 'R'