"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
En voilà un retour qui était attendu. On y croyait presque plus, on avait limite oublié que le groupe était encore censé exister. Sept ans ! Surtout qu’on restait sur un vrai-faux album, Heal! (2010), assez dispensable. Tristesse pour un groupe qui a presque fait un parcours sans faute, encore plus depuis le génial Worst Enemy (2001). Disbelief le mal-aimé, souvent critiqué pour son côté mou sur scène, mais tout de même assez apprécié pour son subtil mélange de Death groovy, old-school et moderne à la fois, et de Sludge mélancolique et baveux. On avait même cru que le groupe allait passer l’arme à gauche après le départ successif de ses deux guitaristes, et trois batteurs ont fréquenté les rangs du groupe après Heal!. Une instabilité certaine, qui fait que Karsten Jager est désormais le seul membre fondateur subsistant, même si le bassiste Jochen Trunk est présent depuis 1995 (il a joué sur tous les full-length). Jägger aurait d’ailleurs pu se consacrer pleinement à Morgoth mais non, Disbelief est toujours vivant, et prépare son 10ème méfait depuis un petit moment. D’abord nommé Full Of Terrors, il s’appellera finalement The Symbol Of Death, ce tant attendu nouvel album de Disbelief qui a la charge de succéder à l’excellent Protected Hell (2009) -oui, pour moi Heal! n’est pas vraiment un album à proprement parler-, et de montrer qu’après 7 ans d’absence le groupe allemand est toujours autant maître de son sujet, ce qui n’est pas gagné d’avance. Pourtant on aurait tort de ne pas y croire…
Désormais flanqué des gratteux David Renner (ex-Painful) et Alexander Hagenauer (Soul Demise) ainsi que du batteur Fabian Regmann (Never Comes Silence), Disbelief doit se montrer digne de ses enregistrements passés et de son parcours en or, jalonné d’albums mortels (Worst Enemy, Spreading The Rage (2003), 66Sick (2005), Protected Hell…). Ce qui est une gageure et avec un line-up aussi remanié, on s’attend à avoir affaire à une belle déception surtout après l’inutile Heal!. Que nenni et ce serait faire injure aux petits nouveaux de ne pas leur accorder un minimum de confiance. Déjà, malgré son large remaniement de personnel, le style de Disbelief n’a pas bougé d’un pouce, restant finalement déposé par Jägger et Joe. Compos, son, tout est typique dans les moindres détails, à savoir un Death-Metal rocailleux et entraînant aux mélodies et ambiances dépressives, porté par les vocaux de Jägger qui sonnent toujours comme un parfait mélange entre John Tardy et Martin Van Drunen. La paire Dave - Alex s’est donc parfaitement mise dans le moule et cela va mine de rien donner un second souffle à Disbelief. Le « groupe » ne se refait pas, il y a de la routine, mais de la routine inspirée. L’entité Disbelief se permet même de retourner légèrement en arrière, The Symbol Of Death se rapprochant plus d’un Spreading The Rage avec quelques touches de Navigator (2007) que des variations de Protected Hell. Disbelief signe donc un retour en fanfare avec ce qu’il sait faire de mieux. Cerise sur le gâteau, le groupe bénéficie ici de la meilleure production sonore qu’il ait pu avoir. Cela va donner le peps nécessaire aux excellentes compos de The Symbol Of Death, on est bien loin du son de batterie-casserole de Heal!, et va finir de remettre Disbelief sur le devant de la scène pour un grand, un très grand retour de la formation allemande, qui a profité de son absence pour se faire une cure de jouvence.
Et Disbelief ne perd pas une minute pour nous prouver qu’il revient plus fort que jamais avec une grosse tuerie d’entrée, "Full of Terrors". Dur, implacable, le Death-Metal en mode rouleau-compresseur des Allemands est toujours aussi mortel, bardé de subtiles mélodies Sludge et accompagné des vocaux toujours aussi glaireux de Jägger. Et surtout les riffs couillus sont présents par paquets de douze, au sein de compos parfaitement fignolées. Sept ans d’absence et Disbelief balance directement un de ses meilleurs morceaux ! C’est presque déjà fait, Disbelief est de retour avec un putain d’album. Il faut bien sûr confirmer mais ça ne posera aucun problème à la formation allemande. "The Unsuspecting One" est déjà un des autres hits de ce The Symbol Of Death, on retrouve vraiment tout ce qui fait le charme du style Disbelief, de la lourdeur groovy, de la mélodie grisâtre, des vocaux bien grassouillets avec en point d’orgue un refrain particulièrement épique. L’inspiration et l'éxécution du line-up tout neuf est vraiment au top et le morceau-titre le prouve encore, avec son imparable côté sludgy bien rampant marié à l’efficacité de leur Death-Metal boueux. En grande forme dans toutes ses composantes, Disbelief est donc encore capable de proposer des pistes qui feront bien vite office de nouvelles références de son répertoire, si je ne devais en retenir qu’une au-delà de ce très complet trio d’entrée, ça serait l’ultra-percutant "Nothing to Heal", qui n’aurait pas dépareillé sur Protected Hell grâce à ses riffs modernes redoutables.
Mais Disbelief, ça n’a jamais été qu’une question de riffs, et encore une fois le groupe fait mouche grâce à ses ambiances désespérées et désenchantées. On s’en rend compte dès "Embrace the Blaze", qui demeure lourd et dynamique mais propose un refrain doux. Les mélodies se font donc bien entendre au sein de plages comme "To Defy Control", "Rest in Peace", "The Circle" et ses couplets bien mélancoliques ou encore "Into Glory Ride", et notamment "One by One" avec son superbe refrain. The Symbol Of Death n’en est pas pour autant un album mélo-gnangnan, loin s’en faut, et la rugosité reprend parfois le dessus, avec à la clé des riffs bien mordants ("To Defy Control", le bien groovy "Rest in Peace", le riffing direct et génial de "Evil Ghosts" sans oublier son beau refrain, la lourdeur de "One by One", "The Circle", l’efficacité de "Into Glory Ride"). Autant dire que Disbelief ne sacrifie jamais un aspect de son art à l’autre, The Symbol Of Death est encore un symbole de son équilibre, et ça fait presque 20 ans que ça dure malgré les pauses discographiques. Pour montrer qu’il en a encore sous la semelle, le groupe allemand termine son 10ème album -qui dépasse les 63 minutes au compteur- par un morceau-fleuve, "Shattered" et ses 7 minutes à la toise, ou encore une fois il fait montre de sa maîtrise et de sa complétude, avec des derniers riffs bien charnus et un final plus lumineux et mélancolique que jamais. Un plaisir prolongé par l’outro "Anthem for the Doomed" qui clôt habilement cet album en forme de retour totalement réussi, et particulièrement grandiose.
Certes, il n’y a rien de neuf sur le fond et la forme, quelques répétitions sont présentes, l’une ou l’autre mélodie ou refrain pourra paraître en-dessous d’une autre ou trop légère, mais avec de menues écoutes on se rend compte qu’il n’y a rien à jeter parmi ces 13 pistes très homogènes. The Symbol Of Death n’est pas fondamentalement meilleur que la plupart de ses prédécesseurs mais ce qui est sûr, c’est qu’il n’est pas moins bon non plus. Voilà déjà le principal, Disbelief revient avec un album digne de ses meilleures performances. C’est déjà ça mais en proposant une partition très inspirée malgré le (ou plutôt grâce au) line-up neuf aux 3/5èmes et une production aux petits oignons, en plus d’un Jägger toujours au top, The Symbol Of Death se pose également comme un des indispensables de la discographie des Allemands et ce presque immédiatement. Surtout vu son contexte… On y croyait plus, on avait pas envie d’y croire, mais après 7 ans d’absence et diverses incertitudes, oui, Disbelief est toujours là, n’a pas faibli, continue à tracer sa route et surtout, est toujours capable de frapper dans le mille avec son Sludge/Death-Metal efficace, groovy, mélancolique et entraînant. Un retour espéré et attendu qui remplit aisément tout ce qu’on pouvait attendre d’un nouvel et bon album de Disbelief, nouveau line-up ou pas finalement. Autour de Jägger et Joe, tout ce petit monde a fait le boulot avec classe pour que Disbelief perdure, et retrouve immédiatement sa gloire après une période de latence. Un excellent album, un de plus, pour Disbelief, qui va trôner fièrement auprès des Worst Enemy, Spreading The Rage, 66Sick ou autre Protected Hell, un retour en force avec un petit retour aux fondamentaux, pour un disque mortel qui, presque comme à chaque fois que Disbelief a sorti un album dans les années 2000, se devra de figurer en bonne place dans les tops de fin d’année. Willkommen zurück !
Tracklist de The Symbol Of Death :
1. Full of Terrors (5:45)
2. The Unsuspecting One (5:11)
3. The Symbol of Death (4:56)
4. Embrace the Blaze (5:18)
5. To Defy Control (5:38)
6. Rest in Peace (5:22)
7. Evil Ghosts (3:59)
8. One by One (4:44)
9. Nothing to Heal (5:13)
10. The Circle (4:36)
11. Into Glory Ride (3:49)
12. Shattered (7:00)
13. Anthem for the Doomed (1:43)