Non.
Après avoir exploré les questions autour de Satan, de la société, de l’amour et des comportements subversifs, tout projet de Rock qui se respecte finit par aborder, bien évidemment, les drogues ou le sexe. Pas de souci à se faire donc, King Dude ne fait pas spécialement dans le titre racoleur pour s’attirer des auditeurs, je suppose qu’il faut plutôt y voir l’une des haltes nécessaires, mais surtout intéressantes, au voyage musical qu’il a entrepris. Concernant les trois lettres employées, on peut le voir comme une provocation, tout comme un terme dénué d’impact, dans notre société actuelle. En ce sens, on peut voir « Sex » comme un album qui transpire les ébats charnels, ou comme ne sortant pas spécialement du lot, dans une discographie constante où tout cela n’est pas spécialement nouveau ou choquant.
Mais revenons au terme employé. Rock. King Dude a été étiqueté de bien des manières, et alors qu’aujourd’hui des tas de nouveaux termes précis existent, « Rock » semble sonner comme une insulte ou une annotation pas franchement excitante. Et pourtant, si on ne devait garder qu’un seul mot pour traduire la musique de King Dude, tant dans sa composition que son esprit, celui-ci serait sans doute le plus parlant.
« Sex » permet toutefois, comme les précédents opus du King, de décliner la source originelle en de nombreux courants. Lorsqu’il a commencé à se faire connaître, on l’a appelé le Johnny Cash sataniste, ou encore plus récemment, on l’a comparé à d’autres figures contemporaines plus ou moins « underground » et plus ou moins proches. Si tant de noms nous viennent à l’esprit, il ne s’agit pas tout à fait de plagiat, bien que des empreintes soient largement perceptibles. Ce nouvel album ne déroge pas à la règle. On retrouve à la fois les grands noms du Neofolk comme un socle inaltérable depuis ses débuts, où le Blues habituel vient s’insinuer, cette fois encore plus épris de Nick Cave, Leonard Cohen, David Bowie, de relents Punk, jusqu’à Type O Negative. Sans parler des clips vidéo, King Dude se fait aussi encore plus visuel qu’auparavant. On imagine sans mal l’excellent « I Wanna Die At 69 » en générique de western moderne et sanglant.
Malgré toutes ses influences plus ou moins évidentes, King Dude a toujours su créer des ensembles où chaque partie porte sa patte, qui ne fait pas douter une seule seconde de l’homme derrière. Pourtant, rares sont les titres des derniers albums qui se ressemblent ! « Sex » est, sur ce plan, dans la continuité directe de « Songs of Flesh & Blood - In the Key of Light ».
On a de tout sur le plan musical comme émotionnel, entre les relents plus gothiques et modernes de « Who Taught You How To Love » ou « Holy Christos ». Notons pour ce dernier titre (en réalité premier de l’album), qu’il permet d’entendre à nouveau la voix de la femme de TJ, qui a son propre projet Foie Gras, et avait déjà chanté avec le King comme sur « My Mother Was The Moon ». « I Wanna Die At 69 » et « Sex Dungeon USA » ou encore « The Girls » ont ce feeling plus dansant, entre Pop, Rock, Blues et Punk.
En ballade, du choix encore ! « Our Love Will Carry On » est dans la lignée des sérénades acoustiques qui ont fait connaître le projet, et « Shine Your Light » comme pièce maîtresse ferme solennellement l’album par sa facette la plus sensible. Finalement, pas de grande nouveauté dans ces influences.
Restent « Prisoners » et « Conflict & Climax » qui transpirent l’inédit ou presque chez King Dude. « Conflict & Climax » est indéniablement plus Post-Punk, portée par la basse et l’absence de chant, comme « Prisoners » qui laisse même entrer un peu plus de rythmique Neofolk/Martial.
En définitive, si vous doutiez de la capacité de King Dude à maîtriser toutes les facettes de son art et à en créer encore de nouvelles, vous serez ici servis. Néanmoins, je ne peux m’empêcher de trouver qu’il manque une certaine cohésion. Ayant été légèrement déçue par le manque de fil directeur, qui pourrait unir ces très bons morceaux mais sans lien les uns avec les autres si ce n’est la production, le chant et le feeling de King Dude, je me suis rappelée les trois lettres du titre de l’album. J’aurais aimé trouver réponse à ma question, me dire à force d’écoutes qu’il s’agit de toutes les facettes érotiques possibles, imaginables par King Dude, comme une compilation. Néanmoins, allez savoir si le problème vient de moi ou si TJ a une (ou plusieurs) vision(s) très particulière(s) du terme, très peu de titres de l’album m’évoquent la thématique. La compilation serait-elle très personnelle ? En réalité, je doute que l’effet puisse taper dans le mille si le message n’est pas assez, disons, universel.
Sans être un total échec, « Sex » est loin d’être l’album le plus marquant de la discographie de King Dude. L’avantage est qu’il a osé changer sa recette, en proposant cette fois un album thématique. Je suppose que le fil directeur est resté pendant tout le processus de composition et que les choix sont assumés mais, malheureusement, si l’effet n’est pas total sur moi je suppose qu’il ne fonctionne pas non plus chez d’autres personnes. Reste que les morceaux sont efficaces en live, que l’album est plaisant, mais qu’on reste sur sa faim, et surtout qu’on peut séparer chaque titre, l’écouter seul sans espérer celui qui suit officiellement, n’ayant que très rarement un lien avec. Dommage.
1. Holy Christos
2. Who Taught You How To Love
3. I Wanna Die At 69
4. Our Love Will Carry On
5. Sex Dungeon (USA)
6. Conflict & Climax
7. The Leather One
8. Swedish Boys
9. Prisoners
10. The Girls
11. Shine Your Light