Shining + Intronaut + Obsidian Kingdom
Boule Noire - Paris
Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Toujours en tournée pour défendre son International Blackjazz Society, Shining repasse par la capitale moins d'un an après avoir pris d'assaut le Divan du Monde. Et c'est à la Boule Noire, à vingt mètres du Divan, que le concert se déroule ce soir.
Lors de leur précédent passage, les Norvégiens avaient eu des premières parties bien sympathiques avec Jack Dalton et Caligula's Horse. Et ce sera aussi le cas ce soir. Obsidian Kingdom ouvre le bal avec un bon gros drone électronique qui rassemble près de la scène les quelques dizaines de personnes déjà présentes (concert débutant à 19h, la salle est loin d'être pleine). Vient ensuite le premier vrai morceau et là, les premières questions émergent : pourquoi y a-t-il une pédale wah-wah intégrée dans ce son post-core ? Est-ce vraiment du post-core ? Attends, là c'est un peu prog, non ? Du chant black ? Mais bordel, qu'est-ce qu'ils foutent ? Donc voilà, Obsidian Kingdom, c'est un patchwork assez surprenant de plusieurs styles, et parfois, ça fonctionne, parfois moins. Découvrant le groupe sur scène, je reste un peu dubitatif devant leur prestation, ne sachant jamais vraiment sur quel pied danser. Il y a quand même quelques très bons passages dans la lourdeur, des ambiances un peu aériennes bien fichues, mais l'ensemble est trop décousu pour qu'on y entre vraiment. Pas mauvais, loin de là (les zicos sont d'ailleurs très bons), mais trop étrange et fourre tout.
Setlist de Obsidian Kingdom :
01.The Kandinsky Group
02.Last Of The Light
03.Ball-Room
04.Cinnamon Balls
05.Haunts Of The Underworld
06.Black Swan
07.Away/Absent
Si le nom d'Obsidian Kingdom m'était tout à fait inconnu, celui d'Intronaut me disait vaguement quelque chose. De mémoire, un morceau qui traînait sur un sampler de mag il y a quelques années, mais rien de vraiment consistant pour savoir à quoi m'attendre. Dans ma tête, j'avais quand même rangé le groupe dans la case indus, ce qui s'avère être complètement faux dès le premier morceau : Intronaut, c'est du prog, et c'est du prog comme je l'aime. Pas de la branlette de manche à la Dream Theater, plutôt quelque chose dans la veine d'un Tool, en plus énervé et plus lourd. La petite taille de la scène ne permet pas de profiter pleinement des vidéos projetées, dommage parce que la musique du groupe se prête très bien au voyage visuel et sonore. Ce qui n'empêche en rien les Américains de délivrer un super set, classe, propre et efficace d'un bout à l'autre. Certains riffs où les deux guitares se répondent en stéréo avec rythmiques tordues sont de vrais bijoux, et quand la basse cinq cordes vibre, le groove est assez ultime. Et le batteur n'est pas en reste, lâchant des patterns bien prog, mesures asymétriques et tout le bazar. Une très très bonne surprise que je n'attendais pas, contrairement à d'autres qui semblaient connaître sur le bout des doigts chaque morceau.
C'est la troisième fois en moins d'un an que j'ai l'occasion de prendre ma rouste devant Shining, et l'impatience est toujours la même quand commence à s'affairer le groupe sur scène pour les derniers réglages. Parce que oui, cette fois, j'assume mon côté fanboy absolu. Et avant de commencer, il faut rappeler deux trois petites choses : Shining est clairement l'un des groupes les plus inventifs, passionnants et talentueux du moment, leurs live sont de pures tueries, avec de l'énergie qui déborde de partout, de la folie qui s'échappe en permanence et une maîtrise technique totale d'un bout à l'autre. Et ce n'est pas ce concert qui me fera dire le contraire : dès le désormais classique début sur I Won't Forget, la Boule Noire est emportée dans le groove bizarrement tordu du morceau. Si le son est au poil (une constante sur toute la soirée), l'éclairage est, il me semble, un peu en reste par rapport aux précédentes fois : moins de stroboscope apocalyptique qui te débranche le cerveau. Ce qui n'empêche pas le groupe de s'attaquer aux organes cérébraux en présence avec la triplette d'enfer The One Inside, Fisheye, My Dying Drive, qui retourne déjà complètement la salle. Puis, Jorgen se permet une petite pause pour remercier le public, avec une sincérité qui fait plaisir, et annoncer un nouveau morceau intitulé My Church. Ce nouveau titre commence avec un riff assez black metal habillé de clavier grandiose, avant une rupture surprenante vers une rythmique ternaire qui groove comme pas permis. Un peu décalé par rapport au Shining habituel, ce nouveau titre s'insère néanmoins très bien dans la setlist.
Place ensuite à la séquence International Blackjazz Society, avec en premier lieu Last Day, puis Thousand Eyes, titre à la fois percutant et complexe. Le plus calme House of Control permet de respirer un peu après toute cette ribambelle de mandales, mais la machine à saturer les neurones reprend bien vite du service avec The Last Stand, suivi d'une impro sax/batterie qui débouche sur un Need royal (cette cowbell, mais cette cowbell de la perfection !). Et ensuite, Mesdames et Messieurs, le moment que tout le monde attend, la pièce maitresse, le sommet de la folie, le pic de la fureur hallucinée, l'acmé du délire enfiévré : THE MADNESS AND THE DAMAGE DONE ! Ce morceau me rend dingue. Tout simplement. Et pas seulement moi, tout le monde. Tellement de notes, de saturation, de trucs qui partent et pètent dans tous les sens, tellement de claviers qui retournent ton petit cerveau dans ton petit crâne, de rythmiques hors du commun, de lignes de sax' sorties des enfers, tellement de slam partout dans la salle ! Comme d'hab, j'essaie de retranscrire ça à l'écrit, mais c'est juste impossible. Quand le groupe quitte la scène après ce morceau de bravoure, les lumières et la musique se rallument et tout le monde croit avoir pris sa raclée en entier, mais non ! Un dernier tour de piste sur Healter Skelter qui confirme ce que je disais plus haut : Shining est peut-être le groupe le plus invetif du moment. Comment compose-t-on et surtout comment fait-on pour apprendre et répéter un truc pareil ? Sans dec', le chaos est général d'un bout à l'autre du morceau et pourtant les mecs sont carrés comme pas permis. Juste incroyable.
Setlist de Shining :
01.I Won't Forget
02.The One Inside
03.Fisheye
04.My Dying Drive
05.My Church
06.Last Day
07.Thousand Eyes
08.Burn It All
09.House Of Control
10.The Last Stand
12.Need
13.The Madness And The Damage Done
Rappel
14.Healter Skelter
Comment conclure autrement qu'en souhaitant que le groupe repasse rapidement dans nos contrées ? Habituellement, je n'aime pas particulièrement voir plusieurs fois un groupe sur une même tournée, mais avec Shining, impossible de s'ennuyer, même avec une setlist quasi identique. Du coup, à quand la prochaine ?