Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Les méandres de l'underground sont infinis et l'exhaustivité, même dans la plus petite des niches, est une pure vue de l'esprit, un concept que l'on ne pourra jamais expérimenter. Phased est une preuve supplémentaire de cette infinité : malgré ses quatre albums au compteur, c'est pour cette chronique que j'ai posé pour la première fois une oreille sur leur musique, alors même que ce trio suisse oeuvre pile dans mes platebandes favorites : le doom/stoner à fort potentiel psyché.
Sans y aller par quatre chemins, Phased débute ce quatrième album avec un bon break de batterie à l'ancienne, simple mais efficace, avant de lâcher un premier riff qui dégouline de gras fondu. The Atavistic vous met directement dans le bain (boueux) de ce qui va se dérouler sur la suite de Aeon : du doom bien épais, avec un très gros travail sur les arrangements. On retrouve dès ce premier morceau une multiplicité de couches sonores allant de la basse bien pesante aux effets fuzzés qui se baladent en arrière plan du mix. Ce sont bien évidemment ces petites touches discrètes qui confèrent son aura perchée à l'album, avec comme moments les plus réussis à ce niveau Eternal Sleep (rempli d'effets étranges et avec une fin inatendue) et Into The Gravity Well (je reviens dessus plus bas).
Au niveau du son, on tape dans le vraiment très bon, lourd, très lourd la plupart du temps (imaginez le son d'Electric Wizard en moins éclaté, et vous y êtes) mais avec des nuances qui viennent se greffer quand il faut. La fin de The Atavistic se fait à la guitare sèche, une sortie très réussie, dont l'esprit se prolonge sur le début plus planant de Burning Paradise. La chant peut faire penser au grand Lee Dorian, Chris Sigdell ayant un débit et des intonations qui évoquent Cathedral, chant un peu trainant qui n'inspire pas vraiment l'optimisme. Mais le sieur sait adapter son timbre en fonction des ambiances et sort par moment un chant sussuré fort réussi (The Atavistic) ou quelque chose de plus growlé (Seed Of Misery).
Les morceaux sont variés, on trouve des pures entités doom, bien pesantes et où le désespoir fait corps avec la musique (Etched, Seed Of Misery) alors que d'autres séquences iront plus vers de la lourdeur où pointe une tension de colère (Eternal Spleep, dont le riffing est un peu trop pompé sur le Wiz', mais comme le Wiz' c'est trop bien, on ne peut pas leur en vouloir vraiment, en tout cas pas moi, cette paranthèse est bien plus longue que prévue, je ferme). Dans les choses un peu à part, il y a le surprenant et excellent Into The Gravity Weel qui s'approche presque du drone, ça vibre dans tous les sens pendant cinq minutes, pas de riffs vraiment construits, seuls des accords énormes bâtissent ce morceau à haute teneur en psychédélisme.
Avec Aeon, Phased propose un doom de très bonne facture, avec ce qu'il faut de diversité pour rendre l'écoute captivante d'un bout à l'autre. Clairement, des découvertes comme ça, j'en veux une par semaine. Pas plus parce qu'après il faut rattrapper toute la disco du groupe en question et ça, ça prend du temps. Quoiqu'il en soit, que vous connaissiez déjà ou pas Phased, ce Aeon vaut carrément le détour pour tout amateur de doom qui se respecte.
Tracklist de Aeon :
01.The Atavistic
02.Burning Paradigm
03.Etched
04.Eternal Sleep
05.Into The Gravity Well
06.(Return Of The) Son Of The Sun
07.Seed Of Misery