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Album

17 septembre 2015 - Balin

Cruciamentum

Charnel Passages

LabelProfound Lore Records
styleDeath Metal
formatAlbum
paysAngleterre
sortieseptembre 2015
La note de
Balin
8/10


Balin

Matthieu, 24 ans, basé à Nantes. Ancien membre d'U-Zine et de Spirit of Metal. Vous me retrouverez pour les chroniques et live reports de divers styles musicaux.

Souvenez-vous, je vous avais laissés avec les Anglais de Cruciamentum il y a quelques années avec la sortie de leur premier EP, l’excellent Engulfed in Desolation qui faisait déjà suite à une démo des plus prometteuses, Convocation in Crawling Chaos. Car si le groupe fait désormais partie des cadors du style au niveau européen, ce n’est certainement pas grâce à une activité prolifique. En effet, il aura fallu pas moins de quatre ans (et le split du groupe évité de peu entre temps) pour que les fans aient droit à du neuf. L’album tant attendu a finalement vu le jour en ce début du mois de septembre, sous la houlette de Profound Lore Record, une écurie qui se démarque d’année en année via des productions très différentes en termes de styles, mais souvent de qualité. Superbement illustré par Daniel Desecrator, un artiste décidemment très en vue ces temps-ci, Charnel Passages semble se placer dans la lignée de ses prédécesseurs avec ces teintes sombres et son apparence de paysage post-apocalyptique quasi-mystique. Cependant que trouve-t-on réellement à l’intérieur ?

   Et bien tout d’abord, on conserve les trémolos evil qui ont fait le succès du groupe comme à la fin de l’excellent The Conquered Sun ou au début de Piety Carved From Flesh (oui parce que maintenant tout le monde en utilise, mais Cruciamentum fait partie des premiers à l’avoir fait (à outrance) après Incantation avec Necros Christos et Grave Miasma). On retrouve également les habituels breaks brise nuque de la formation qui feront définitivement toujours plaisir (Tongues of Nightshade, Rites to the Abduction of Essence). Cependant une des principales évolutions réside dans l’apport d’un grand nombre de solos au feeling très Morbid Angel (Necrophagous Communion, au début de Tongues of Nightshade). Côté production, le son est excellent, le résultat est bien léché, profond et massif tout en restant très clean, peut-être même un peu trop d’ailleurs… Mention spéciale en tout cas au son de la caisse claire qui est particulièrement claquant !

   La principale remarque qui me vient à l’esprit lorsque j’écoute Charnel Passages vient du fait que l’on a l’impression que le groupe s’éloigne de ses influences originales pour se rapprocher de ses confrères de Grave Miasma avec qui le groupe partage deux membres (le batteur D.B-H et le guitariste R.C., ce dernier jouant également dans Destroyer 666). Nous avons ainsi droit à davantage d’ambiances et de ponts très sombres (Dissolution of Mortal Perception), mais le quatuor n’oublie jamais d’avoiner (le début de Necrophagous Communion par exemple). Quand on a un batteur comme ça, ce serait dommage de ne pas en profiter… Les passages qui bourrent sont d’ailleurs toujours annoncés de la même façon, c’est-à-dire par un riff lancé par une seule guitare sur une mesure, puis tout le reste part en même temps. Cependant le groupe perd ce côté « rouleau compresseur » qui faisait en quelque sorte sa marque de fabrique. C’est principalement en cela que Charnel Passages va diviser les fans. Cruciamentum perd en force de frappe et en violence ce qu’il gagne en ambiance (le final de Collapse est clairement une nouveauté pour un groupe comme Cruciamentum !)

   Je me dois également de préciser que la voix est bien moins grave et puissante qu’avant. Mais qu’est-ce qu’il s’est passé à ce niveau ?! L’exemple flagrant se trouve sur Tongues of Nightshade ou à moindre mesure sur Piety Carved From Flesh. En effet, nous n’avons pas l’impression que D.L. hurle, mais plutôt qu’il prononce simplement son texte de façon assez monotone. Le fait que le chant soit intelligible ne me dérange pas du tout en soit, mais je dois avouer que cela m’a choqué au début tant cela diffère des précédentes sorties. Nous avons même le droit à des backing presque « aigus » sur Dissolution of Mortal Perception). Rassurez-vous, on s’y fait mais il s’agit d’un des seuls points noirs de l’opus pour ma part.

   Attendu de pied ferme depuis plusieurs années désormais, Charnel Passages va diviser les fans, c’est certain ! J’avoue être moi-même un peu troublé par ce premier album des Anglais. En effet, le talent de composition est indéniable, le jeu des deux guitares est intéressant (bien que cela aurait pu être encore plus exploité selon moi), l’ambiance dégagée par les très nombreuses parties lentes (devrais-je dire Incantationesque ?) et par les soli nous emmène au fond des abysses représentées sur l’illustration de l’album. Cependant Cruciamentum avait trouvé son style, puissant, très lourd et brut de décoffrage et j’ai le sentiment que le groupe, en souhaitant évoluer et se rapprocher de certaines autres formations de la scène, a perdu une part de son identité. Le futur nous dira de quelle façon cet album sera perçu dans le milieu même si je sais pertinemment que les quelques fans que Charnel Passages abandonnera en chemin seront vite remplacés par un plus grand nombre qui aura perçu en ce premier album de Cruciamentum à la fois la sortie de la consécration pour un groupe qui a du mérite et une importante pierre à l’édifice du Death Metal des années post 2000.

"As we waking world beckons me with it's light,  
 Chains of surreality chastise will,
 In the rays of hope, 
 The black sun eclipse, obscures the self I once knew."

Tracklist :

1. The Conquered Sun (The Dying Light Beyond Morpheus Realms) 
2. Necrophagous Communion  
3. Tongues of Nightshade  
4. Rites to the Abduction of Essence   
5. Piety Carved From Flesh 
6. Dissolution of Mortal Perception 
7. Collapse

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