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Tiens, une pochette étrange.
Et puis ce packaging est fort réussi, très joli digipack délivrant un livret aux couleurs introspectives et oniriques, presque à l’image d’illustrations psychiatriques.
Pour finir, il s’agit de musique extrême !
Et bien…il est à parier qu’il s’agit encore d’un groupe intellectuel de death progressif expérimental à influences cosmiques et au concept au moins aussi incompréhensible que le nom de l’album : "K2" (ceux qui osent dire qu’on a oublié les trois zéros sont priés de sortir de suite de cette page !).
Voilà, dans les grandes lignes, ce qui nous traverse l’esprit lors des premières secondes où l’on se retrouve avec ce troisième album du groupe italien Adimiron. Une foule de clichés donc, et une certaine peur de se retrouver avec un nouveau vrai faux groupe original.
Poursuivons…
Et en effet, les premières écoutes sont laborieuses et difficiles. Très technique mais sans être flamboyant ou démonstratif, on se retrouve au contraire face à un ensemble monolithique et de prime abord très peu maniable, répétitif et sincèrement long. Cette sensation, négative et péjorative, perdure tout de même plusieurs écoutes, jusqu’à ce que l’on pense que, simplement, "K2" n’est pas digne d’intérêt. Puis l’ensemble se décante…inexorablement. Les morceaux offrent leurs multiples détails, expriment leur personnalité, exposent leurs émotions.
"Oriens" impose particulièrement à travers des influences orientales et bouddhistes, particulièrement dans les chœurs évoquant incessamment un mantra, et renvoyant à un aspect incantatoire, presque mystique, conférant une ambiance très pesante à l’atmosphère d’un morceau introducteur lourd et saccadé, à la production impressionnante de puissance et se démarquant quelque peu de la masse de groupes aujourd’hui catalogués « djent ».
Néanmoins, la grande force du disque est probablement ce qui saute le moins aux oreilles lors des premières écoutes : sa variété.
Effectivement, "K2" est un alliage de multiples influences, les compositions se parent de dizaines de couches sonores afin d’apporter un spectre dense, créatif et intense. "Where Nothing Changes" débute ainsi de manière très « Meshuggahesque » mais poursuit néanmoins dans une ambiance plus éthérée, dévoilant tout le talent d’interprétation d’Andrea Spinelli derrière le micro en chant clair. La base rythmique est en constant mouvement, la batterie se veut très subtile, mi-humaine, mi-mécanique tandis que le chant verse parfois dans des accès furieux et immédiats de rage et d’agressivité.
A l’inverse, un morceau comme "Passenger" ne dépareillerait pas sur un album du Opeth actuel. Très posé, atmosphérique, le chant d’Andrea évoque inévitablement celui clair de Mikaël Akerfeldt, sans oublier ses leads mélodiques très sombres et ses arpèges en clean immensément beaux. Pourtant, le morceau s’incorpore parfaitement dans un ensemble cohérent et ne souffre pas d’une idée de plagiat qui aurait pu rapidement ressortir. Lorsque la double pédale surgit, aidée par des riffs très ambiancés, très distillés et étranges, Adimiron montre toute sa personnalité à un auditeur qui ne sait plus forcément où donner de la tête.
Alors il est certain qu’un titre comme "The Wishperer" rappellera immanquablement l’âme d’un "Chaosphere", malgré des accélérations plus véloces et une volonté moins hypnotisante des italiens ; mais à côté de cela, "Above the Rest" par exemple surprend par une personnalité extrêmement marquée et unique. Bien plus lent, solennel et partagé entre passages acoustiques et samples expérimentaux industriels, Adimiron surprend et démontre tout son talent sur ce genre de composition plus calme et dense, plus subtile également.
Certainement que, sur bien des aspects, "K2" est encore proche de quelques influences évidentes, mais l’on sent que les italiens cherchent à creuser un sillon personnel et un bon bien à eux, afin de se démarquer au maximum des créateurs de ces dernières années. Il y a certes beaucoup de travail puisque les groupes dans le genre affluent aujourd’hui de toutes parts, et sont tous plus travaillés, mieux produits et techniques les uns que les autres. Mais la victoire d’Adimiron ici est aussi de montrer que la technique ou la polyrythmie ne fait pas tout puisque c’est sur les passages les plus atmosphériques et globalement posés que le groupe tirent son épingle du jeu et donne envie d’en connaître la suite. Tout n’est encore pas parfait mais ils tiennent quelque chose…clairement…et ce quelque chose pourrait bien exploser au prochain album. Prenez garde…la révolution ne viendra peut-être plus du froid, mais de près de chez nous, vers nos cousins transalpins…
1. Oriens
2. Where Nothing Changes
3. Vertical Limit
4. Passenger
5. The Whisperer
6. To Whom It May Concern
7. Above the Rest
8. The Red Condition
9. Servant’s Poem
10. Thou Walk Eternal