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Décrire un album attendu au tournant par des milliers de fans en émois est forcément un exercice hasardeux.
Stratovarius joue en partie sa carrière sur ce nouvel album. En effet, "Polaris" sera l’album ou ne sera pas, s’il devait échouer lamentablement, la fin du groupe serait définitivement publique, et l’absence de Timo Tolkki cruciale.
Faisant suite à de nombreuses paroles échangées par presse interposées, chacun traitant ouvertement l’autre de lâche ou d’hypocrites, le véritable duel (semblant inévitable) se jouera bel et bien entre Polaris et "Age of Aquarius" (second opus de Revolution Renaissance, le nouveau groupe de Tolkki).
D’entrée, il est très clair que Stratovarius a voulu imposer un visuel ambitieux et grandiloquent, à l’image de cette superbe cover (tranchant radicalement avec le terne artwork de l’éponyme Stratovarius). Représentant un ange, quittant la Terre pour rejoindre l’étoile la plus brillante de notre système (l’étoile Polaris), la pochette semble symboliser l’envie de montrer au monde que le groupe en est devenu un vrai, uni et qu’il peut monter dans des sphères célestes sans l’ombre omniprésente de Tolkki (compositeur de plus de 95 % de la carrière du groupe tout de même).
Affichant un nouveau guitariste à peine plus vieux que l’existence du groupe ; Matias Kupiainen, Stratovarius déclare avoir pour la première fois effectué un vrai travail de groupe, fait tout à fait exact lorsque l’on observe que la plupart des morceaux viennent de plusieurs plumes (Timo Kotipelto et Matias semblant avoir beaucoup travaillés ensemble).
Mais le plus dur était de savoir, finalement, à quoi voulions nous nous attendre ? A un album révolutionnaire ? A un album de pur Stratovarius après la déconvenue éponyme ? A un album de speed mélodique visitant d’autres espaces sonores ?
Car justement, voilà le grand dilemme de ce disque. N’y allons pas par quatre chemins, "Polaris" est un excellent album. Il nous rassure quand au futur du groupe qui, il est aujourd’hui certain, n’en finira clairement pas là. Mais au fond de nous, que nous murmure cette petite voix que nous osons à peine entendre…qu’est "Polaris" ? Simplement…un album de plus… ?
Oui, c’est également l’impression globale qui ressort…Stratovarius est vivant, et son âme préservée, ça ne fait aucun doute. Le combo qui avait, grâce à une horlogerie diabolique de composition et de tournées, réussie à s’imposer dans le monde entier et sortir des chefs d’œuvres comme "Episode", "Visions" ou "Infinite" respire encore. Mais voilà, il en ressort une impression étrange, presque malsaine…comment un groupe séparé de son principal compositeur peut-il proposer un album aussi cohérent avec le reste de sa discographie ?
"Deep Unknown" introduit très bien les hostilités et l’on retrouve avec bonheur ce son si caractéristique, puissant et plein de rondeur, avec énormément de claviers (prenant des teintes plus modernes), des solis virtuoses et la diva Kotipelto, qui se targue même de composer des lignes de chant qui n’avaient pas été aussi originales depuis un bon nombre d’années. Et surtout un refrain qui fait tant de bien, accrocheur et divin.
On ressent complètement les finlandais, la voix inimitable de Timo, cette énergie positive.
Mais là où l’effet est immédiat sur ce titre ou une bombe comme "Highwer We Go", pouvant rappeler la musicalité de "Freedom" de par son positivisme et son refrain absolument magistral, certains titres se révèlent bancals, presque trop ambitieux.
Strato ne s’est clairement pas imposé de barrières, mais sans doute qu’ils ne disposent pas encore de la totale maitrise dont pouvait avoir Tolkki.
Un morceau comme "King of Nothing", très intéressant musicalement, plus proche d’un Dream Theater dans la fusion guitare / clavier (à noter que la production à souvent tendance à donner tant de distorsion aux clavecins qu’ils écrasent les grattes), technique mais très lourd (que ça fait plaisir de retrouver l’inestimable talent de Jens Johansson) souffre par le chant inadapté de Timo, manquant clairement d’émotions. Pourtant, les relents passionnants de claviers, torturés et soutenus par des chœurs somptueux, sont proches de l’effervescence musicale, mais la ligne principale de Kotipelto va a contre courant du reste.
A l’inverse, "Blind", malgré son intro évoquant trop "Visions", est marqué par un riff assassin et un tourbillon de solo faisant penser au Angra actuel (époque "Temple of Shadows", "Blind" ressemblant nettement à "Temple of Hate") mais surtout une maitrise tout au long du morceau. Il ne serait pas faux de citer ce titre comme le plus réussi de l’album, tant le refrain majestueux, la partie de double pédale et les séquences solos sont magnifiques.
Là où l’album se révèle imperfectible sur les titres courts, directs et simples (le très beau "Falling Star", "Deep Unknown", "Highwer We Go", "Forever is Today" rapellant fortement "Millennium"), il semble se chercher sur les compositions plus ambitieuses, à l’image justement de "King of Nothing" ou de "Emancipation Suite: I Dusk" à l’atmosphère faussement égyptienne (synthétique mais bien peu naturelle) bien loin de la grandeur d’un "Babylon".
Une certaine conformité, une grandeur superficielle font que cette pièce musicale de sept minutes ne décolle jamais, et voit encore un Kotipelto bancal (la performance sur la totalité de l’album reste très très bonne !).
Voilà donc ce que l’on pensera de "Polaris", un bon album à défaut d’être la totale réussite espérée, qui a le mérite au moins de laisser entrevoir un avenir prometteur.
Finalement, si l’on écarte purement la corruption de l’opus précédent, Polaris s’affiche dans la droite lignée de "Infinite" et "Elements", sans cette réelle nouveauté attendue. Il émane certes un sentiment de fraicheur mais le groupe pourra t-il continuer ainsi ? Mattias semble avoir composé avant tout comme un fan du groupe, et non comme un compositeur, ce qui occulte une capacité de renouvellement.
Mais sans rien révolutionner dans le monde redevenu parfaitement rodé de Stratovarius, "Polaris" est un excellent album (quoique tirant un peu trop sur la longueur vers la fin…) que l’on écoutera encore et encore…jusqu’au prochain effort…
1. Deep Unknown 04:28
2. Falling Star 04:33
3. King of Nothing 06:43
4. Blind 05:29
5. Winter Skies 05:50
6. Forever Is Today 04:41
7. Higher We Go 03:48
8. Somehow Precious 05:38
9. Emancipation Suite: I Dusk 06:58
10. Emancipation Suite: II Dawn 03:41
11. When Mountains Fall 03:12