"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Nous avions laissé Amiensus il y a quelques semaines avec deux belles promesses : celle d’un groupe enfin de retour en grande pompe, capable d’égaler son magnifique deuxième album qu’était Ascension (2015) ; puis celle que les réjouissances n’allaient pas s’interrompre aussi vite, Reclamation: Part 1 appelant logiquement à une Part 2, ce dont le groupe n’avait pas fait de secret promettant qu’elle allait arriver avant la fin de l’année. C’est donc chose faite avec désormais ce qui sera le cinquième album d’Amiensus, Reclamation: Part 2. Ou Part II, ou Pt. 2, ou Pt. II, je ne saurai dire j’ai vu tout passer que ce soit sur les réseaux, bandcamp, label ou sites de référencement… On va s’en tenir à ce qu’il y a d’écrit sur le CD, à savoir Reclamation Pt. II, précisément et sans le double point, et du coup Reclamation: Part 1 aurait du être nommé Reclamation Pt. I… mais soit, c’est très futile et j’aime être précis sur les détails, merde à la fin. Quoi qu’il en soit, ceux qui avaient apprécié Ascension et qui avait été enthousiasmés par le vrai retour en grâce d’Amiensus sur Reclamation Pt. I (donc) vont donc d’ores et déjà avoir du rab, avec sept nouveaux morceaux pour 39 minutes du black si moderne éthéré des Américains. Faire mieux que Reclamation Pt. I paraît déjà ardu, mais on reste logiquement dans la continuité vu que les deux parties ont de toute façon été créées et enregistrées d’une traite comme un tout. Alors que craindre ?
Qu’en fait Reclamation Pt. II ne constitue que les chutes de Reclamation Pt. I ? C’est vrai que c’est ce qu’on peut constater tout au début, l’impression que l’on a pas une seconde partie aussi épique et inspirée que la première. Mais il faut prendre le temps car Reclamation Pt. II, bien que plus direct que sa Pt. I, sera un album plus riche qu’il n‘y paraît. Reclamation Pt. II est surtout dans la lignée des morceaux un peu plus simples qui ornaient la seconde partie de la Pt. I (vous suivez ?), à savoir dès qu’on avait passé le fantastique « Sun and Moon ». Cette Pt. II s’annonce donc comme plus efficace mais non moins raffinée. « Sólfarið » qui ouvre Reclamation Pt. II ne perd d’ailleurs pas de temps en tricotages et démarre avec des compos bien rythmées et entraînantes, de même que le chant. Amiensus avait donc encore des ressources et des bonnes compos à offrir, et n’oublie pas tout son spectre vu que « Acquiescence » s’offrira tout de même un début et une fin très atmosphérique et enlevée dans la lignée d’un « Sun and Moon », encadrant des compos plus classiques mais toujours plus qu’appréciables. Ceci avant un somptueux break qu’est l’interlude à violon « Disconsolate », très enivrant et touchant, continuant à prouver qu’Amiensus a quand même un certain talent pour proposer un black très onirique et émotionnel, talent que l’on avait cru perdu à l’époque d’Abreaction (2020) mais qui a su revenir de la dimension féérique dont le portail avait été ouvert par Ascension.
Un « Decaying God Child », très mélodique, est toujours inspiré (avec encore des rythmiques et un chant à l’unisson), mais Amiensus sait encore nous offrir quelques bonbons et c’est ainsi qu’il atteint à nouveau un niveau d’epicness élevé avec l’excellent « The Distance », qui se paye le luxe d’inviter Lazare (Borknagar, Solefald) au chant. Si ça n’est pas la classe absolue dans le genre black sympho/atmo/épique, je ne sais pas ce qu’il faut de plus. Et Amiensus de terminer son « nouvel » album avec encore deux morceaux au top de l’inspiration et de l’efficacité, le bien tranchant et rythmé « Leprosarium » (avec des passages mélodiques prenants) et surtout le final en fanfare qu’est « Orb of Vanishing Light », aux compos en or et qui n’est pas sans rappeler le flamboyant « What Evil Lay Dormant » qui concluait Ascension. Près de 10 ans après, c’est sûr, Amiensus a transformé l’essai et ça fait diablement plaisir. Sans le dépasser, avec pour lui un curseur plus près que de l’efficacité que de l’epicness, Reclamation Pt. II complète parfaitement Reclamation Pt. I en toute cohérence et continuité, de manière plus homogène même. Si les morceaux les plus forts étaient sur la Pt. I (énième rappel pour ce « Sun and Moon » toujours aussi digne d’un « Towards Horizon »), la Pt. II montre un groupe au sommet de son inspiration dans son black mélodique, atmosphérique, symphonique et progressif à sa manière, qui peut toucher un large public parmi les amateurs de metal extrême. Ne loupez pas l’expérience cette fois, avec ce double album (qui aurait presque pu sortir tel quel finalement) à la fois beau et percutant, qui fait d’Amiensus une des petites sensations du black assez moderne et aventureux des années 2020. Qu’ils ne s’arrêtent pas en si bon chemin malgré cet effort généreux, car après, on arrivera sur la case du vrai chef-d’œuvre…
Tracklist de Reclamation Pt. II :
1. Sólfarið (5:05)
2. Acquiescence (8:49)
3. Disconsolate (2:45)
4. Decaying God Child (5:13)
5. The Distance (6:19)
6. Leprosarium (5:21)
7. Orb of Vanishing Light (4:55)