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Album

18 février 2022 - ZSK

LLNN

Unmaker

LabelPelagic Records
styleSludge/Post-Metal
formatAlbum
paysDanemark
sortieseptembre 2021
La note de
ZSK
8.5/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Le très populaire label Pelagic Records est en général porteur de deux choses : une musique aux accents « Post » et des groupes prometteurs aux allures de « Next Big Thing » - ou qui arrivent déjà à confirmer. Je ne suis pas forcément client de leur catalogue de manière générale mais me voici pourtant à rédiger une troisième chronique de leur catalogue sur un an. Après Crown que j’attendais de pied ferme et la révélation qu’était Hippotraktor, nous voici avec entre les mains le nouvel album de cette formation obscure qu’est LLNN. S’il semble être l’énième groupe estampillé Sludge/Post façon Neurosis-worship, c’est en passe de devenir un peu plus que ça. Le quatuor est danois et existe depuis 2014, et possède déjà une discographie qui compte désormais 3 albums, en plus d’un EP et de deux stuffs collaboratifs (avec Wovoka et Grim Van Doom). Rien de bien novateur en apparence cependant, mais LLNN a quelques petits trucs en plus. Au-delà de son nom très énigmatique, LLNN arbore des visuels assez particuliers, avec ces images spatiales très noires. Que l’on avait vu dès son premier EP Marks (2014), ensuite plus artistiquement sur la collaboration avec Wovoka qu’était Marks/Traces (2017) et encore plus sur Deads (2018) et son image de cratère lunaire très froide et évocatrice. Un groupe qui part dans l’Espace, ça me parle immédiatement, mais les influs Neurosis, beaucoup moins. LLNN était donc passé dans ma trappe, mais Pelagic étant généreux et proposant toujours toutes ses sorties en téléchargement libre, j’ai donné sa chance à Unmaker, le troisième full-length des Danois. Comme le dirait le perroquet dans L’Oreille Cassée de Tintin, « Caramba, encore raté ! » car quelques éléments m’empêchent toujours d’apprécier l’art de LLNN à sa juste valeur malgré des oripeaux attirants. Mais y revenir à tête reposée quelques mois plus tard, et en finissant par faire l’effort d’adaptation nécessaire, amène à une révélation : nous tenons avec LLNN un des groupes les plus lourds et singuliers de son genre.

Le style de LLNN n’a pas vraiment bougé depuis son premier album Loss (2015), je ne vais pas me risquer à parler des influences sous-jacentes au delà de Neurosis (dont je suis loin d’être un expert également), toujours est-il que le groupe a toujours eu les mêmes particularités, avec notamment la présence de synthés lugubres qui apportent cette fameuse touche spatiale. Deads était d’ailleurs un album plus aéré, plus ambiant en un sens, même si on est pas chez Darkspace non plus (et du coup le groupe baisserait sacrément dans l’estime de Raton). Unmaker remet un peu les compteurs à zéro, et sera l’album le plus équilibré de LLNN, et donc logiquement le plus abouti. Et il va falloir s’accrocher parce que le voyage dans l’espace promis par les Danois, il est très violent, il fait encaisser pas mal de G au décollage et tout le reste du parcours. Dès "Imperial" et son intro digne d’un blockbuster de science-fiction, LLNN nous accueille avec des riffs absolument terrassants, ultra abrasifs et cradingues. Un mur et une véritable terreur sonore, vite accompagnée par les hurlements absolument viscéraux de Christian Bonnesen. C’est aussi une des particularités de LLNN, ça peut même paraître être en décalage, et il faut s’y faire… ce que je n’avais pas réussi au départ. Mais le déclic a fini par arriver, et une fois qu’il est là, c’est un bonheur de participer au voyage interstellaire cauchemardesque de LLNN. Un Sludge/Post-Metal assez moderne mais graisseux au possible, épique à sa manière, laissant échapper quelques leads et des ambiances cosmico-dronesques incessantes, mais surtout ces assauts de lourdeur complètement écrasants. Difficile ne pas se laisser atomiser par ces riffs aussi puissants qu’un impact d’astéroïde, et un chant de fin de monde à l’unisson. Des passages rythmiques qui ne brillent pas forcément par leur subtilité, mais au final, ça sera comme un film catastrophe signé Roland Emmerich : plus c’est débile, plus c’est bon. Unmaker, ou Moonfall avant l’heure… enfin d’une certaine manière.

40 minutes terrifiantes et abyssales, c’est donc le menu très salé d’Unmaker. Qui multiplie alors les accès de lourdeur absolue, dès un "Desecrator" vrombissant qui mettrait presque déjà les coups de grâce, avec des rythmiques faisant voler la croûte terrestre en éclats, et un Matt McGachy (Cryptopsy) en annonciateur de l’apocalypse. "Obsidian", véritable tube avec toutes les particularités de LLNN (surtout les ambiances spatiales et bien sûr ces riffs qui cognent dur), le très baveux "Scion" ou encore le rouleau compresseur incroyable qu’est "Division" ne sont pas en reste. Quand il frappe fort sur la surface, LLNN est vraiment impressionnant. Et pour le reste, se permet de mettre un peu de variété. Que ça soit par respirations purement atmosphériques (l’interlude "Vakuum" aux accents Lustmordiens, l’outro lumino-apocalyptique "Resurrection") ou en travaillant plus ses compositions, à l’image d’un "Interloper" globalement plus mélodique mais qui prend par surprise en alignant en milieu de course les riffs les plus LOURDS du disque, suivi d’effets indus imparables. "Forger", avec son départ assez chaotique et son final plus épique, est également plus original ; mais l’autre sensation de Unmaker se nomme "Tethers", morceau passionnant qui met en exergue les ambiances spatiales et dronesques de LLNN tout en continuant à aligner les compos Metal déchirantes (les parpaings du final…) dans une certaine mélancolie, grâce au chant qui n’a jamais été aussi à fleur de peau. Hé bien quelle épopée cosmique. Noir, extrême, colossal et monolithique, Unmaker est un album qui frappe là où ça fait mal, brisant vos rêves d’étoiles. L’Espace est dangereux et sans pitié, voilà la réalité. Au bout de 3 albums, c’est assurément l’aboutissement de l’art futuriste des Danois, même s’ils peuvent aller plus loin encore, sachant que tous les morceaux ne sont pas forcément indispensables mais des "Imperial", "Obsidian", "Division" ou encore "Tethers" pour ne citer qu’eux sont déjà de sacrées expériences. D’une lourdeur oppressante et d’une noirceur affolante, Unmaker est un album très méchant qui n’est pas loin de pousser à bout certains codes du Sludge/Post-Metal, moderne mais cradingue au possible. Avec son côté spatial inimitable pour le genre, LLNN se présente comme le monstre sorti des abysses d’une quelconque lune du système solaire. Et il fait vraiment peur.

 

Tracklist de Unmaker :

1. Imperial (4:55)
2. Desecrator (4:12)
3. Obsidian (4:35)
4. Vakuum (2:11)
5. Scion (3:24)
6. Interloper (4:38)
7. Division (3:42)
8. Forger (3:57)
9. Tethers (6:02)
10. Resurrection (2:12)