Manzer + Goatvermin + Stonewitch @ Paris
Le Klub - Paris
"The sound of falling, when the pictures are moving"
1er mars 2020. Cette date restera gravée dans ma mémoire comme celle de mon dernier concert parisien avant un bon moment. Riot City et Traveler passaient au Glazart ce soir-là, et mirent un point d’honneur à nous faire vivre une soirée des plus inoubliables, dédiée à la gloire du Heavy Metal traditionnel. S’ensuivirent ensuite deux longues années d’abstinence forcées pour cause de pandémie, ponctuées par l’ennui, le manque, la solitude. Une absence totale de partage et de convivialité qui finit par peser, malgré les avantages provisoires que nous ont apporté ces quelques moments d’autarcie. L’envie brûlante de renouer avec le spectacle vivant est désormais la plus forte, elle nous gagne semaine après semaine, jour après jour. Pendant longtemps, très longtemps.
13 novembre 2021. Ca y est, il est là. Le moment tant attendu qui mettra fin à mon sevrage. Comme pour boucler la boucle, c’est sur une date bien old school que va se faire ma rentrée live parisienne. Une soirée placée sous le signe du label Armée de la Mort, qui réunit les trois groupes de ce soir. Trois groupes français, pour trois styles de Metal traditionnel : Le Heavy/Doom pour Stonewitch, le Black/Death primitif pour Goatvermin et le Black/Thrash pour Manzer. L’arrivée au Klub, revoir un attroupement de chevelus attendre dans le froid, prendre sa place à la billeterie, descendre dans le sous-sol. Tous ces petits riens me rappelèrent des souvenirs, des sensations, que je n’avais plus éprouvé depuis longtemps. La soirée commençait à peine, mais déjà, j’étais convaincu qu’il n’en résulterait que du positif et de la satisfaction.
STONEWITCH
C’est sous les coups de 19h00 que les Charentais de Stonewitch investissent la scène du Klub. Groupe le moins extrême de cette soirée, c’est personnellement celui que j’attends le plus, leur dernier album The Midnight Tales ayant beaucoup tourné chez moi ces derniers temps. Un superbe album, qui voyait le groupe adopter un style beaucoup plus travaillé et poli que leur premier essai, qui était davantage dans une veine Doom/Stoner poussiéreuse. Une évolution qui se fera grandement sentir sur scène. Jouant en majorité des morceaux du petit dernier, les cinq musiciens déroulent leur Heavy/Hard Rock mélodique avec maîtrise et précision. Les morceaux, épiques en diable, sont truffés de guitares harmonisées et de solos en tapping, qui viennent fluidifier et rafraîchir une base musicale d’origine assez minimaliste. D’ailleurs, les membres demeurent malgré tout sur un socle Doom trad, et n’hésitent pas à garnir leur set de quelques accords bien lourds, afin d’amener plus de tension et de solennité au sein des compos somme toute assez lumineuses. Autre point d’ancrage dans un ton plus roots, le chanteur, à l’allure très "Halfordienne", se démarquera par son timbre loin des standards falsetto du Heavy, optant pour une approche plus rocailleuse à la manière du Hard Rock, offrant au public une générosité que les quelques imprécisions dans les montées et le kitsch d’un léger accent français ne sauraient altérer, bien au contraire. Stonewitch a semble-t-il conquis l’assistance du Klub, autant par sa musique que par l’attitude débonnaire de son frontman. Si bien qu’un rappel est réclamé et obtenu, et c’est sur une reprise du « Sign of The Wolf » de Pentagram que s’achève ce début de soirée parti en trombe. Plus que convaincant, et totalement convaincu.
GOATVERMIN
Changement d’ambiance total avec le groupe suivant, à savoir les Bourguignons de Goatvermin. Point de mélodies galopantes et de combats à l'épée ici. Avec un nom aussi évocateur, tout le monde s’attend à ce que le cahier des charges du groupe de Black/Death (Chris) moyen soit rempli à ras bord : une ambiance totalitaire à base de Ray-Ban, de cartouchières et de bracelets cloutés. Une supposition qui va bien entendu se vérifier. Car si la dégaine des musiciens est à des années lumières de la panoplie du "trve warrior", leur musique, elle, est entièrement dans ce créneau. Une avalanche de Black/Death bestial, sale et sans concession qui te matraque la gueule en quasi permanence. Tout s’enchaîne dans une déflagration de haine continue, parfois entrecoupée de quelques down tempos qui viennent noircir encore plus le set, tout comme une référence du genre telle que Archgoat sait si bien le faire. Si les moments de pause entre les titres sont plutôt rares, certaines, bien que très courtes, ne laissent pas la pression retomber pour autant. Au contraire, elles ne font que renforcer le sentiment de malaise global qui émane du groupe, grâce à une utilisation judicieuse du larsen, une approche qui, dans le cas présent, relève autant de la maîtrise que du chaos le plus total. Et c’est donc sur un final cacophonique que Goatvermin tire sa révérence.
MANZER
Tête d’affiche de la soirée, Manzer est le groupe qui fait sans doute le mieux le pont entre Stonewitch et Goatvermin. Sous l’etiquette folklorique de « Pictavian Black Metal », la bande à Shaxul propose en fait un Black/Thrash dont efficacité et virulence sont les maîtres mots. Le trio va donc dérouler tout son savoir-faire en matière de riffs Speed Metal et thrashy, avec pour seul but de nous briser la nuque à grands coups de six cordes. Une énergie en partie dûe à la voix démoniaque et à la personnalité du batteur chanteur, ses interventions pleines de gouaille y étant pour beaucoup. Bien qu'étant assez pur et rustique dans son approche, Manzer incorpore toutefois des éléments issus d'autres styles de Metal old school, pour un résultat plus nuancé bien que restant en filigrane. Parfois, les titres prennent en effet des allures plus musclées à grand coups de trémolos rageurs typiquement BM, tandis que les salves véloces comportent quelques incursions mélodiques qui ne sont pas sans rappeler le Heavy et le Speed des 80's. Authentique, pugnace et jusqu'au boutiste, ce set des Poitevins aura permis de conclure en beauté cette reprise des sorties lives parisiennes. Vivement la prochaine date !
Un grand merci au Klub pour l'organisation de ce concert et aux trois groupes pour leurs prestations de haute volée !